La renaissance d’AlUla
Hegra, l’ancienne cité des Nabatéens dans la Vallée historique d’AlUla en Arabie Saoudite, émerge de la nuit des temps pour reprendre sa juste place parmi les merveilles du monde.
Rares sont ceux qui ont eu le privilège de visiter l’antique cité de Hegra, taillée il y a deux mille ans dans la roche du Hijaz, au nord-ouest de l’Arabie Saoudite, et oubliée des siècles durant, dans la nuit des temps.
Aujourd’hui, alors que la nouvelle Arabie Saoudite ouvre de plus en plus ses portes au monde extérieur, le Royaume s’apprête à partager avec tous l’un des magnifiques trésors oubliés de l’Antiquité.
De même que Petra, sa célèbre jumelle du nord, Hegra fut créée par les Nabatéens, un peuple mystérieux dont l’empire commercial arabe s’est développé avec éclat, mais pour très peu de temps, il y a plus de deux mille ans.
La présentation des magnifiques tombes de l’ancienne cité, creusées dans la roche, après plus d’une décennie consacrée à l’une des recherches archéologiques les plus intensives jamais entreprises, fait partie d’un projet de transformation du paysage saisissant et de l’héritage de la vaste région d’AlUla en l’une des plus importantes destinations touristiques culturelles du monde.
En 2020, les sites archéologiques de Hegra sont de nouveau ouverts au public, qui en a eu un aperçu l’an dernier, au cours du premier Festival d’hiver de Tantoura, une célébration spectaculaire de l’art, de la musique et de l’héritage qui attirera de nouveau le monde à AlUla, jusqu’au 7 mars prochain.
L’ouverture de Hegra et de la Vallée d’AlUla, une artère vitale du commerce et un creuset culturel dans l’Antiquité, rétablit un chapitre manquant dans l’histoire de la région et du monde entier, en complétant un récit qui, jusqu’à présent, n’avait été conté qu’en partie.
Hegra : Une ville antique perdue dans la nuit des temps
C’est au Sinaï, au milieu de « l’immense solitude montagneuse labyrinthique de vallées d’où la pluie était absente » que Charles Montagu Doughty, l’explorateur anglais né au XIXe siècle, les vit pour la première fois.
Écrites dans une langue morte depuis longtemps, les inscriptions mystérieuses et « souvent étrangement gribouillées » sur les « roches et pierres polies par les vents de sable » ne signifiaient rien pour lui.
Doughty, poète, imaginait qu’il devait contempler « les noms… et les salutations d’anciens voyageurs ». Comme devaient le prouver les archéologues, des décennies après sa mort, il avait tout à fait raison.
Il avait découvert les traces des Nabatéens – peuple perdu dans les nuits de l’Antiquité – sculptées dans la roche plus de deux mille ans plus tôt, alors qu’ils voyageaient sur les routes commerciales de l’ancien monde.
Petra, dans la Jordanie actuelle, immortalisée en 1845 par un poète britannique comme la « ville rose presque aussi vieille que le temps », était déjà bien connue en Occident, ayant été « découverte » en 1812 par Johann Burckhardt, un voyageur suisse.
Cependant, en 1877, dans l’ombre des Montagnes du Hijaz, Doughty devait tomber par hasard sur une ville perdue, riche de tombes et de monuments sculptés dans la roche, entièrement inconnue en Occident.
Dans son livre, Travels in Arabia Deserta, publié en 1888, Doughty se souvient qu’au village de Ma’an, à quelque 30 kilomètres au sud-est de Petra, il avait entendu parler « d’autres monuments sculptés à même la roche, semblables à ceux de Petra, et portant de nombreuses inscriptions », en un lieu éloigné, appelé « Mada’in Salih ».
C’était, avait-il appris, un point d’eau esseulé pour « la caravane annuelle de pèlerins de Damas, dans leur longue route désertique vers Médine et La Mecque, et qui se trouvait à quelques journées de marche au sud de Ma’an, mais difficile à atteindre durant d’autres périodes, en raison du danger que représentaient alors les Bédouins ».
Sans se laisser décourager, Doughty « résolut de prendre le risque » de visiter les monuments de Mada’in Salih. Pour assurer sa protection, il se joignit à « la grande caravane de Damas », voyageant en compagnie des fidèles qui allaient vers le sud, le long de l’ancienne piste des pèlerins, en direction de La Mecque, et arriva finalement à Mada’in Salih « après trois semaines d’un pénible voyage à cheval ».
Là, Doughty découvrit la preuve de l’existence d’une zone de peuplement qui s’était sans doute développée dans l’Antiquité, mais qui avait été complètement recouverte par les sables et le temps – l’antique ville de Hegra. Comme Petra, il avait été construit par les Nabatéens, un peuple qui, depuis approximativement le IVe siècle av. J-C jusqu’à l’invasion romaine de l’Arabie en 106 apr. J-C, avait contrôlé les lucratives routes du commerce qui traversaient la péninsule Arabique d’est en ouest et du nord au sud, créant un vaste royaume désertique.
Aux alentours des « anciennes plaines sablonneuses en ruines », où un peuple avait jadis prospéré, Doughty découvrit des tombes spectaculaires, « pleines d’ossements humains », taillées dans les falaises de grès surplombant le site de la vieille ville.
Doughty s’attarda sur le site durant deux mois, attendant le retour de la caravane du pèlerinage, visitant les monuments, et notant soigneusement un grand nombre d’inscriptions anciennes du site.
Un aigle, aujourd’hui sans tête, garde l’entrée d’une tombe taillée dans Qasr al-Bint, une montagne au nord-est du mur de la ville de Hegra, utilisé depuis le début du premier siècle comme site d’une nécropole. Il est possible que l’oiseau représente la divinité nabatéenne Dushara.
Pour Hegra, qui a été au cours de la dernière décennie l’objet des recherches archéologiques les plus complètes jamais faites, la découverte de Doughty fut le début d’un long voyage qui la sortait de l’ombre de l’Antiquité.
En ce qui concerne les Nabatéens, toutefois, le mystère continue de planer sur les origines d’un peuple qui a, durant quatre cents ans, régi un vaste royaume, qui a préfiguré par son ampleur et son étendue celui de l’Arabie Saoudite – et dont la langue écrite a servi de tremplin final, au niveau de l’évolution de l’arabe.
« L’histoire des Nabatéens qui précède l’année 311 av. J-C demeure un mystère, en raison de l’absence de sources », affirmait Robert Wenning, de l’Institut des études du Proche-Orient, ancien de l’université de Munster. « Ils ne sont mentionnés dans aucune source avant cette date. »
Les recherches de Wenning l’ont conduit à conclure que, d’où que viennent les Nabatéens, ils ont activement pris part au précieux commerce de l’encens et des aromates, aux environs de 380 av. J-C. En prospérant, vers 311 av. J-C, ils étaient devenus une cible pour les forces puissantes.
« Peu de choses nous restent des vieilles générations [d’habitants] d’El-Hejr (Hegra), la cité caravanière ; ses rues de terre argileuse se retrouvent de nouveau au stade de poussière soufflée dans la nature sauvage. Leur histoire est écrite uniquement pour nous, dans les gribouillages indéchiffrables dessinés parmi tant d’autres sur les rochers sauvages de ce sinistre voisinage, ainsi que dans les titres gravés de leurs monuments funéraires, devenus rochers solitaires, qu’admire le voyageur craintif, dans ces montagnes désolées… »
Extrait de Travels in Arabia Deserta, de Charles Montagu Doughty,
publié en 1888.
La toute première référence historique connue concernant les Nabatéens fut écrite par Hieronymus de Cardie, un général grec ayant pris part à une série de tentatives vouées à les battre. Son récit original, écrit vers 311 av. J-C, n’existe plus, mais fut longuement cité par Diodore de Sicile, un historien dont la Bibliotheca Historica fut écrite entre 60 et 30 av. J-C.
Quand Hieronymus de Cardie les affronta, au cours du IIIe siècle av. J-C, les Nabatéens étaient toujours des nomades. « Ils vivent en plein air, écrit-il, revendiquant comme terre natale une étendue sauvage n’ayant ni rivières ni sources abondantes desquelles il serait possible à une armée ennemie de se procurer de l’eau. »
Mais il était évident qu’ils avaient déjà trouvé leur véritable vocation. « Tandis que de nombreuses tribus arabes utilisent le désert comme pâturage, écrit Diodore, les Nabatéens surpassent de loin les autres en richesses… Du fait que nombre d’entre eux sont habitués à rapporter vers la mer de l’oliban et de la myrrhe, ainsi que les genres d’épices de la plus grande valeur, qu’ils se procurent de ceux qui les transportent de ce que l’on appelle ”Arabia Eudaemon” », (la partie sud de la péninsule Arabique)
De Hieronymus qui, en 311 apr. J-C, prit les armes contre les Nabatéens, au service du général macédonien Antigone, et qui essaya de mettre la main sur une partie de leurs richesses, nous savons grâce à Diodore que ces négociants aux apparences faussement modestes ne se laissaient pas faire.
Antigone dépêcha une force expéditionnaire de 4 000 fantassins et 600 cavaliers sous le commandement du général Athenaeus, « et lui ordonna de foncer par surprise sur les barbares, et de leur enlever tout leur bétail en tant que butin ».
Athenaeus savait qu’un grand nombre de Nabatéens s’étaient rassemblés pour un marché annuel, laissant en arrière, pour leur sécurité, leurs biens et leurs familles sur « un certain rocher… extrêmement solide mais dépourvu de murailles ». Les historiens pensent qu’il s’agissait peut-être de Petra, qui pourrait avoir été la capitale des Nabatéens, depuis aussi longtemps que le IVe siècle av. J-C.
Athenaeus tomba sur les Nabatéens sans défense, dont « il tua une partie sur le champ, et prit une autre partie comme prisonniers. D’autres encore qui étaient blessés furent abandonnés. Il rassembla la plus grande part de l’oliban et de la myrrhe, et prit près de 500 talents d’argent ».
Athenaeus avait fui les lieux, mais certains de ses prisonniers s’échappèrent et ramenèrent une force nabatéenne de 8 000 combattants, qui attaqua le camp aux premières heures de la journée. Moins de cinquante hommes échappèrent au massacre qui s’ensuivit.
Furieux, Antigone envoya une autre force de 8 000 hommes pour venger la première. Cette fois, les Nabatéens qui se tenaient prêts, sur la partie supérieure du rocher, infligèrent aux Grecs une autre défaite. Dans une dernière tentative de tirer profit de son incursion sur la terre des Nabatéens, Antigone envoya une troisième force ayant à sa tête Hieronymus, qui a relaté l’histoire de la campagne, pour ramasser le précieux bitume qu’il avait vu flotter à la surface de la mer Morte.
Le résultat « ne fut pas à la mesure des attentes d’Antigone ; les Arabes, rassemblant jusqu’à 6 000 hommes, se dirigèrent, sur leurs radeaux de roseaux, contre les occupants des bateaux, et les tuèrent presque tous de leurs flèches ».
À ce stade, Antigone mit un point final à ses pertes.
Il y eut beaucoup de changements pour les Nabatéens au cours des trois siècles entre les observations de Hieronymus de Cardie et leur apparition suivante dans l’histoire écrite, dans un récit de Strabon, géographe et historien grec d’Amasya (dans la Turquie actuelle) qui voyagea beaucoup au cours des dernières années du Ier siècle av. J-C.
Dans son livre, Geographica, dont on pense qu’il a été écrit entre 7 av. J-C et 18 apr. J-C, Strabon donne un aperçu captivant d’un peuple qui, à présent au sommet de sa domination des routes commerciales trans-arabes, avait abandonné la vie itinérante et vivait bien – et, curieusement pour l’époque, démocratiquement.
On ne sait pas précisément où Strabon rencontra les Nabatéens – à ce stade de leur histoire, leur influence couvrait une vaste région, s’étendant de Damas au nord à Gaza sur la côte méditerranéenne, et à la péninsule du Sinaï à l’ouest, ainsi que des rivages de la mer Rouge, à travers la moitié de l’actuelle Arabie Saoudite vers l’est. Leur extrême limite sud est supposée s’être trouvée quelque part au sud de Hegra.
Cependant, partout où il allait à leur rencontre, il les connaissait assez bien pour noter avec surprise que, malgré leur richesse évidente, ils avaient peu d’esclaves, et « étaient servis en grande partie par leurs proches, ou par un autre des leurs ou par eux-mêmes » – une coutume alors inhabituelle, qui, rapporte Strabon, « s’appliquait même à leurs rois ».
Une partie du récit de Strabon signale que, alors qu’il se serait rendu chez les Nabatéens à Petra, il ne trouva pas son chemin vers la cité sœur, Hegra, à quelque 500 kilomètres au sud. Faisant l’éloge des maisons des Nabatéens – qui, « du fait de l’utilisation de pierres, sont coûteuses » – il notait : « En raison de la paix, les villes n’ont pas de murs. » Comme l’a prouvé une décennie d’excavations à Hegra, la cité des Nabatéens de l’extrême sud était entourée de solides remparts, dont certains ont été datés de la seconde moitié du premier siècle, tandis que l’une des portes antiques fut probablement construite durant la fin du Ier siècle av. J-C.
Bien que la plupart des tombes de Hegra aient été sculptées et utilisées entre le Ier et le début du IVe siècle, l’occupation du site date des environs du IVe siècle av. J-C. On a de plus en plus de preuves que la présence des Nabatéens à Hegra s’est bien poursuivie au cours du IVe siècle, alors que leur emprise sur la région et sur les routes commerciales lucratives a pris fin en 106 apr. J-C, quand l’ensemble de leurs territoires fut envahi par les légions de l’empereur Trajan, et incorporé dans la province romaine de l’Arabia Petraea.
Pendant des décennies, aucun élément n’a indiqué que l’influence de Rome en Arabie s’était étendue beaucoup plus au sud que l’embouchure du Golfe d’Aqaba sur la mer Rouge. Mais la découverte d’un camp fortifié romain sur la limite méridionale de l’antique cité ne représente qu’une partie de l’histoire étonnante qui est apparue au cours des dernières décennies, grâce au travail conjoint d’une équipe archéologique saoudo-française, dont les truelles ont balayé les sables du temps qui avaient obscurci durant deux millénaires le trésor de l’héritage mondial qu’est Hegra.
AlUla : Un rêve d’archéologue
Entre les cités antiques de Hégra et de Qurh, la vallée d’AlUla serpente sur plus de trente kilomètres et regorge de trésors archéologiques qui témoignent de la riche histoire de l’Arabie, de l’époque préhistorique jusqu’aux prémices de l’ère postislamique.
Sans surprise, Laïla Nehmé, habilitée à diriger des recherches au très prestigieux et très français Centre national pour la recherche scientifique (CNRS), ainsi que codirectrice du projet archéologique de Hégra (depuis 2008), ne se compte pas parmi les fans de la série télévisée fantastique Game of Thrones.
Mme Nehmé estime que « la réalité dépasse toujours la fiction », et tout particulièrement lorsqu’il s’agit des découvertes qu’elle et son équipe internationale, constituée de spécialistes de toutes disciplines, ont exhumées de la vallée d’AlUla ces dix dernières années.
Récemment pourtant, en lisant un article du journal français Le Monde, dont le sujet était Game of Thrones et plus précisément le pays imaginaire de Westeros, protégé par une muraille glaciaire des hordes surnaturelles des redoutés Marcheurs Blancs, Mme Nehmé songea à l’une de ses découvertes à Hégra.
« Cet article établissait un lien avec le mur d’Hadrien, que les Romains construisirent dans le nord de l’Angleterre pour contenir les invasions barbares – ces “Marcheurs Blancs” qui menaçaient leur empire », raconte la chercheuse.
Les tombes des Nabatéens à Hégra ont été taillées dans les affleurements de grès qui entourent la cité antique.
Construit de 112 à 118 après J.-C. sur ordre de l’empereur Hadrien, le mur était la frontière nord-ouest de l’empire Romain. Quatre mille kilomètres plus au sud, à Hégra, les archéologues firent une découverte qui redéfinit les contours de l’empire : les vestiges d’un camp fortifié romain, ce qui prouve que la limite méridionale de la province romaine de l’Arabie pétrée se situait bien plus au sud qu’on ne l’imaginait auparavant.
« Ainsi donc, si le mur d’Hadrien, tout au nord de l’Angleterre et de son climat inhospitalier, est le rempart de glace de l’empire Romain, ce que nous avons mis au jour à Hégra, dans la chaleur du désert, représente le mur de feu de ce même empire. »
Presque personne ne peut se targuer d’en savoir autant au sujet de la cité antique de Hégra et des Nabatéens que Laïla Nehmé. Cinquante-trois ans à ce jour, elle débarque en Syrie sur les traces des Nabatéens, à l’âge tendre de dix-neuf ans, en tant qu’épigraphiste, pour déchiffrer les écritures antiques. Elle soutiendra son doctorat sur Pétra en 1994.
En 2001, Laïla Nehmé et Dhaifallah al-Talhi, archéologue de l’université de Haïl, furent conjointement nommés directeurs des recherches archéologiques de Mada’in Salih. Entre 2002 et 2005, une équipe d’archéologues français travaille main dans la main avec le ministère saoudien du Tourisme et du Patrimoine pour établir un inventaire détaillé du site de Hégra. Inventaire qui sera la première pierre d’une exploration méthodique et scrupuleuse qui démarre en 2008 et se poursuit encore.
Ce travail servira aussi à instruire avec succès la candidature de Hégra au patrimoine mondial de l’Unesco, une première pour l’Arabie Saoudite.
En 2018, la collaboration entre la France et l’Arabie Saoudite à Hégra mène à la naissance de l’Agence française pour le développement d’AlUla, créée pour soutenir l’Arabie Saoudite dans le développement économique, touristique et culturel de la région.
Située à plus de deux cents kilomètres des rives de la mer Rouge, Hégra, au sud-est des montagnes du Hijaz, se trouve dans une grande plaine parsemée de collines de grès, parfois regroupées en massifs spectaculairement sculptés par les vents du nord-ouest, qui soufflent ici chaque printemps et chaque été depuis la nuit des temps. Au nord-est, le plus grand de ces massifs, Jabal Ithlib, toise la plaine du haut de ses cent mètres.
Ces vents ont aussi modelé des formes étrangement évocatrices, ainsi ce rocher, dix kilomètres au nord-est de la ville moderne d’AlUla, haut de trois étages, sculpté pendant des millions d’années, et qui ressemble à un… éléphant !
Au centre du site archéologique, autrefois desservi par cent trente rigoles creusées dans le roc et qui alimentaient une oasis aux contours irréguliers, se trouve la zone d’habitation. Il ne reste toutefois que bien peu de vestiges de ces bâtiments, car faits de briques de terre séchée. Toutefois, des études géophysiques conduites entre 2002 et 2005 ont mis en évidence la présence alléchante de structures souterraines préservées, tandis que l’on peut encore deviner à l’œil nu l’emplacement des fortifications de la ville.
Les points forts de Hégra mis en avant dans sa candidature pour l’inscription au patrimoine mondial de l’Unesco furent sans aucun doute ses nécropoles, qui entourent la zone d’habitation. Ces véritables cités des morts comptent plus de quatre-vingt-dix sépultures, datées d’entre l’an 1 avant J.-C. et 75 de notre ère, taillées dans les rochers qui entourent et surplombent la résidence des vivants.
Des quatre principales nécropoles, Quasr al-Bint, avec trente et une tombes édifiées entre l’an 0 et l’an 58, est la plus impressionnante, de près comme de loin. Les façades de beaucoup de ces sépultures présentent, taillés dans la pierre, divers monstres, des aigles, des visages et tout un petit bestiaire…
Une étude exhaustive des quelque 22 000 kilomètres carrés que comptent la région d’AlUla a recensé plus de 23 000 sites dignes d’intérêt.
À l’instar de Petra, de nombreuses tombes mettent en avant leurs façades taillées, si spectaculaires. Néanmoins, et cette fois-ci au contraire de Petra, ces façades portent souvent des inscriptions nabatéennes datées, parfois accompagnées des noms des défunts, nous offrant un aperçu privilégié sur la vie des habitants des lieux.
Pour Laïla Nehmé, l’une des choses les plus remarquables dans les influences architecturales des Nabatéens est leur variété, évidente au regard des tombes taillées dans des motifs empruntés aux Grecs, aux Égyptiens, aux Phéniciens aussi bien qu’aux Romains ou encore aux Mésopotamiens.
« Les Nabatéens étaient de véritables “éponges“, s’inspirant de leurs voisins pour créer quelque chose d’original et qui n’appartenait qu’à eux, comme leur architecture, dit-elle. Vous ne verrez ça nulle part ailleurs, et la même chose vaut pour leur poterie, leur écriture et leur religion. »
Ce mélange des genres témoigne des nombreux voyages des Nabatéens, qui géraient avec grand profit les routes commerciales de l’Arabie antique.
« C’étaient des voyageurs, renchérit Mme Nehmé, indépendants pendant quatre siècles jusqu’au début du deuxième siècle de notre ère. Ils ont entretenu des relations avec les Romains, et les Grecs avant cela, s’inspirant de ce qu’ils voyaient. »
Menées depuis 2008, les fouilles des sépultures majestueuses de Hégra ont livré une quantité considérable d’ossements, de cuir, de textiles, et permis aux archéologues de reconstituer les rites funéraires nabatéens, de la mort jusqu’aux funérailles.
La tombe IGN 117 en particulier a livré de nombreux secrets. Sur la tablette datée de l’an 60 ou 61, au-dessus de la porte, figurait l’inscription : « Ceci est la tombe que Hinat, fille de Whabu, fit pour elle-même, ses enfants, et les enfants de ses enfants, à jamais. Personne ne peut vendre, donner cette tombe en gage ou la louer. Quiconque contreviendra à ce qui précède devra céder sa part à son héritier. Dans la vingt et unième année de Maliku, roi des Nabatéens. »
Du sable qui constitue le sol de la tombe, les archéologues exhumèrent les restes mortels de plus de quatre-vingts personnes, adultes comme enfants, enterrées-là entre le Ier et le IIIe siècle.
Dans le camp fortifié romain découvert au sud-est de la cité antique, une figurine en bronze d’un bélier a été découverte cinq centimètres seulement sous la surface du sol.
Découverte particulièrement émouvante et inespérée, cachée dans les plis de l’étoffe enroulée autour du crâne d’une femme enterrée dans cette tombe, les restes d’un collier de dattes enfilées sur une corde de feuilles de palmier tressées. Une offrande pour le voyage dans l’au-delà, un rituel jamais vu ailleurs qu’à Hégra dans la péninsule Arabique.
Dans un article publié en 2015, les archéologues indiquent que dans les plis et replis du tissu et du cuir qui enserrait le crâne « l’on pouvait, de façon bouleversante, discerner le négatif d’un visage, et trouver quelques mèches de cheveux ».
Ces découvertes, parmi d’autres, pourraient contribuer à résoudre le mystère des origines des Nabatéens. Les analyses ADN des échantillons d’os prélevés sur quarante corps sont en cours à la Harvard Medical School, dans le cadre de recherches sur le capital génétique de l’Arabie antique.
Hégra n’était pas isolée, bien sûr. Le large éventail de langues dans les inscriptions retrouvées lors d’une étude complète de la Darb al-Bakrah, l’ancienne route commerciale qui reliait Hégra et Pétra, témoigne du caractère multiculturel du commerce des épices et du va-et-vient continuel des différentes nationalités qui laissaient des marques, non seulement dans la pierre mais aussi dans l’histoire de l’Arabie antique.
Les écritures en différentes langues que les chameliers abandonnèrent à l’histoire comprenaient l’araméen impérial, adopté comme langue officielle par les Perses en 500 avant J.-C. à la suite de leur conquête de la Mésopotamie, mais aussi le grec, le palmyrénien, le taymanitique, le dadanitique, l’hismaïque, le safaitique, le nabatéen et l’arabo-nabatéen, une langue intermédiaire qui donna finalement la langue arabe que nous connaissons.
En 2004, Laïla Nehmé, accompagnée de sept Saoudiens, suivit pendant trois jours le chemin identifié en 1999 par le Dr Ali al-Ghabban, archéologue saoudien. De la ville contemporaine d’AlUla jà la frontière avec la Jordanie, trois cents kilomètres pendant lesquels les membres de l’expédition prirent des centaines de photos et transcrivirent plus de neuf cents inscriptions, dormant dans le désert le long de la route… Leurs prédécesseurs antiques devaient, quant à eux, affronter encore cent cinquante kilomètres avant d’atteindre Pétra, la jumelle septentrionale de Hégra.
En 2018, un catalogue exhaustif des inscriptions a été publié The Darb Al-Bakrah. A Caravan Route in North-West Arabia, un livre substantiel de plus de trois cents pages, écrit par Mme Nehmé qui, dit-elle, en vint ainsi à mieux connaître les Nabatéens antiques.
« Je suivais les pas de cette population antique et, parfois, je retrouvais le même nom à différents endroits, se souvient-elle. La même personne inscrivait son nom dans deux lieux distants de trente kilomètres l’un de l’autre. Ou parfois dans un même lieu, mais à sept années d’intervalle, dans la première période de l’époque romaine. »
Certaines inscriptions au long de la route, de Hégra à la frontière jordanienne, ne sont rien de plus que de simples noms, un « graffiti antique », mais d’autres nous offrent un aperçu fascinant sur une époque révolue. Ces patronymes s’accompagnaient à l’occasion de prières comme « Voyage en paix », d’incitations à commémorer la mémoire d’un caravanier ou encore un souhait, qui nous parle de ces temps dangereux : « Que chaque homme ou chameau qui parte de Hégra fasse un voyage sûr et sans encombre. » Un autre auteur note la présence discrète de « cavaliers chargés de la garde ».
Certains « écrivains » sont passés à la postérité en nous donnant leur profession : soldat, scribe, serviteur, agriculteur, éleveur de chameaux, prêtre ou embaumeur, ce dernier se rendant peut-être à Hégra pour des funérailles dans les sépultures creusées dans la roche.
Mais, aussi spectaculaires que soient les tombes de Hégra, les dix-sept années consacrées à des recherches archéologiques poussées dans cette zone d’environ trente kilomètres carrés n’ont été qu’un prélude à une étude plus ambitieuse encore, celle de la région entière d’AlUla, plus seulement l’oasis, mais aussi l’immense région de vingt-deux mille kilomètres carrés qui l’entoure.
C’est la tâche à laquelle s’est attelée la Dr Rebecca Foote, archéologue américaine qui a été nommée, à la fin de 2017, directrice des recherches archéologiques et de la conservation de l’héritage culturel pour la nouvellement créée Commission royale pour AlUla.
Vue sur un site antique dans l’arrière-pays d’AlUla, photo prise d’hélicoptère par l’équipe chargée de cette étude.
« Il n’y avait pas eu d’étude archéologique complète et exhaustive de la région d’AlUla, pas même de la vallée et de son oasis, bien que les recherches déjà effectuées se soient concentrées à cet endroit », déclare Laïla Nehmé lors d’un entretien accordé à Arab News. « Ma première tâche a été de faire un inventaire pour sauvegarder ces biens, développer le tourisme et préparer le terrain pour de futures études universitaires approfondies. »
Dès le début, Rebecca Foote réalise l’ampleur de la tâche qu’elle et son équipe (vingt personnes à l’origine et maintenant plus de quarante) doivent affronter : « Ce qu’il y a de plus remarquable dans cette étude est son échelle. Couvrir une région entière, de la taille de la Sardaigne, en deux ou trois ans est assez inhabituel, et en tout cas, un défi. »
Pour relever ce défi, l’équipe a divisé cette vaste zone de recherches en trois parties, chacune pouvant être abordée un peu différemment par l’équipe qui lui était dédiée. La zone la plus étendue était de loin celle dite de « l’arrière-pays », qui recouvre plus de dix-neuf mille kilomètres carrés d’un terrain accidenté, qui s’étend des sommets des montagnes Hijaz à l’ouest jusqu’aux déserts de l’est.
La deuxième zone la plus importante en superficie (3 300 kilomètres carrés) était le noyau central où se trouve la bande de quarante-huit kilomètres carrés de l’antique oasis, qui serpente sur les trente kilomètres séparant l’ancienne ville dadanite de Qurh (appelée de nos jours Al-Mabiyat) du sud de Hégra. L’étude en profondeur de cette région démarra en octobre. L’implantation abandonnée, connue sous le nom d’« ancienne ville d’AlUla », à dix-sept kilomètres au sud de Hégra, fait l’objet d’une étude à part.
Occupée jusque dans les années 1980, date à laquelle les habitants abandonnèrent cette ville pour le confort matériel de la récente et moderne AlUla, à peine quelques kilomètres plus au sud, l’ancienne ville est un peu à part et promet de devenir un pôle d’attraction touristique.
« Nous mettons à présent l’accent sur la documentation des structures existantes et leur stabilisation, pour les préserver de futurs dommages, ajoute le Dr Foote. Les décisionnaires détermineront bientôt le schéma à suivre pour insuffler une nouvelle énergie à cette zone et du rôle de cette ancienne ville pour cela. »
Quant à savoir quel âge a cette cité antique, « c’est ce que nous essayons de déterminer pour le moment. Ibn Battuta écrit, au XIVe siècle, que la ville n’était alors encore qu’un bourg. Mais la date de première habitation est sans doute bien plus ancienne, et c’est ce que nous espérons découvrir grâce à de nouvelles fouilles ciblées. »
Des siècles de travaux successifs rendent la chose difficile à savoir avec certitude, mais il est possible que certains murs toujours debout à notre époque datent de huit cents ans.
Les maisons, bâties en briques de terre séchée sur des fondations en pierre, étaient petites (la plupart n’avait qu’une pièce par étage) et mitoyennes. Pendant des générations, raconte Foote, « chaque famille possédait une ferme dans l’oasis, où demeurer pendant l’été. L’hiver venu, ces familles retournaient dans la cité antique ».
Le projet impressionne, non seulement par la superficie étudiée, mais aussi par le vaste intervalle de temps couvert : Foote et son équipe se consacrent à une période qui commence à la Préhistoire et se termine à la Première Guerre mondiale. Et cela pour la bonne raison que la ligne ferroviaire Hijaz, inaugurée par les Ottomans en 1908 dans l’intention avouée de réduire le temps de trajet entre Damas et Médine, passe par la vallée d’AlUla.
Avec une telle surface à couvrir, et si diverse, l’équipe du Dr Foote a fait appel aux technologies les plus récentes, imagerie satellite, drones chargés de relevés photogrammétriques avec de multiples angles de prise de vue, traitement informatique des données recueillies avec rendu en 3D. Sans compter l’utilisation d’un Lidar, une technique aérienne utilisant le laser pour scanner le terrain, y compris à travers la végétation. Combinées avec l’orthophotographie haute-résolution, ces technologies identifient avec certitude chaque site témoin d’une activité humaine de plus d’un siècle.
L’étude a commencé au printemps 2018. Après moins de deux ans, vingt-trois mille sites dignes d’attention ont été découverts (la plupart intéressants à plus d’un titre)… C’est dire toute la richesse de la région en matière archéologique.
Hégra recèle de grandes quantités de poteries, petits fragments ou pièces intactes, produites entre l’ère prénabatéenne et celle de l’occupation romaine, au début du IIe siècle et même au-delà. Certaines de ces pièces étaient produites localement et d’autres importées des pourtours de la Méditerranée et de Mésopotamie, illustrant parfaitement le rôle-clé de Hégra dans les routes que suivaient les caravanes dans leurs traversées de l’Arabie.
Au centre de cette zone, les découvertes les plus nombreuses appartiennent au domaine de l’art ou à celui de la communication, art rupestre ou inscriptions lapidaires. Jusqu’ici, l’équipe a trouvé des inscriptions en neuf langues différentes, qui enjambent les millénaires : thamudique, araméen, dadanitique, minéen, nabatéen, grec, latin, hébreu et arabe.
Les découvertes sont recensées dans une base de données spécialement développée à cet usage par l’université d’Oxford. « Notre objectif est de tout enregistrer avec précision », assure le Dr Foote. À l’origine conçue comme un outil à l’usage exclusif de la Commission royale pour AlUla, la base de données sera dorénavant partagée avec les universitaires qui souhaiteraient mener des recherches dans la région.
Un des mystères que les équipes espèrent résoudre est de comprendre pourquoi, contrairement au reste du Moyen-Orient, les implantations dans la vallée d’AlUla ne sont pas pérennes.
« Jusqu’ici, nous connaissons quatre implantations, explique le Dr Foote. La première se situe à Dadan, au centre de la vallée. La deuxième se déplace à Hégra. La troisième descend jusqu’à Qurh, et la dernière remonte jusqu’à ce que nous appelons de nos jours “la cité antique”, habitée jusque dans les années 1980. Quelle est la raison de ces déménagements au sein de la vallée, plutôt qu’une seule et unique zone d’habitation ? »
La réponse pourrait bien être encore enfouie profondément dans le sol, qu’elle soit liée à la guerre, la politique, la religion ou peut-être à un tremblement de terre catastrophique qui aurait provoqué la destruction de l’antique Dadan.
La ville de Qurh prospère dès le VIe siècle, à l’aube de l’ère islamique, et jusqu’au XIIe siècle. Cette occupation se superpose en partie avec celle d’Al-Dirah, la cité antique d’AlUla, habitée dès le Xe siècle et jusqu’à son abandon au début du XXe siècle. À un certain moment, les deux villes prospéraient de concert, accueillant les pèlerins de La Mecque et de Médine.
Une partie de l’équipe se concentre sur le recensement de tous les sites d’intérêt dans l’oasis, qui occupe la vallée sur la plupart de sa longueur.
L’autre énigme à résoudre concerne la relation qu’entretenaient les Lihyanites, la tribu qui précède les Nabatéens et gouvernait Dadan, et les Nabatéens eux-mêmes. Les inscriptions nous apprennent que leurs deux langues, bien que proches, étaient différentes.
Entre 600 et 200 avant J.-C. (au moins), « Dadan était une grande ville, la capitale des royaumes dadanite et lihyanite, prospérant par le commerce d’encens, le contrôlant bien avant les Nabatéens, ajoute le Dr Foote. Nous ne comprenons pas vraiment la nature exacte de leur lien, et la raison de ce déménagement de quinze kilomètres, de Dadan à Hégra. »
Deux ans après le début de cette grande étude, la profondeur historique des racines historiques d’AlUla devient évidente. Si quelques outils remontent à l’âge de la pierre taillée (entre 150 000 et 200 000 avant J.-C.), les sites déjà fouillés datent pour la plupart d’entre 2000 et 5200 avant J.-C.
Les objets utilisés pour la datation du plus ancien des sites (5200 avant J.-C.) nous offrent un rappel poignant de la vie quotidienne de ces peuples qui vivaient autrefois sur le territoire de ce qui allait devenir, sept mille ans plus tard, l’Arabie Saoudite : le charbon de bois provenant d’un foyer, et deux dents d’animal, sans doute un mouton ou un bélier.
« La grande majorité des visiteurs veulent voir seulement le site de Hégra, inscrit au patrimoine mondial de l’humanité, dit le Dr Foote, mais nous voudrions que tous ceux qui viennent à AlUla apprennent à connaître la richesse débordante de ce lieu, qui ne se limite pas à Hégra. Il y a tant à voir, d’un point de vue culturel autant qu’au point de vue de la nature, que cet endroit sera bientôt un site touristique majeur. »
Une partie de cette richesse encore inexploitée est la cité antique de Dadan (appelé de nos jours « Al-Khuraybah »), plus ancienne encore que Hégra et à vingt kilomètres à peine dans la vallée d’AlUla. Des fouilles ont été conduites à Dadan par l’université du roi Al-Saoud à Riyad pendant plus de quinze ans. Mais un nouveau programme, plus ambitieux, mené conjointement cette fois par le Centre national pour la recherche scientifique français et la Commission royale pour AlUla débute dès février.
Abdulrahman al-Suhaibani, 34 ans, maître-assistant en archéologie à l’université du roi Al-Saoud et consultant en préservation du patrimoine à la Commission royale, a été nommé codirecteur de cet ambitieux programme de cinq ans.
Dadan, cette ville antérieure à Hégra la nabatéenne et qui prospéra dans la vallée d’AlUla de 600 à 200 avant J.-C. avant de disparaître mystérieusement de l’histoire, a toujours représenté un casse-tête que M. Al-Suhaibani et ses collègues sont bien décidés à résoudre.
« Une des questions les plus essentielles est de découvrir l’origine des Nabatéens et la relation qu’ils entretenaient avec les Dadanites », affirme M. Al-Suhaibani qui a soutenu sa thèse de doctorat sur l’architecture dadanite à la Sorbonne à Paris.
La civilisation nabatéenne a été précédé par les royaumes de Dadan et de Lihyan, mais la durée pendant laquelle ces différents peuples ont cohabité n’est pas connue précisément. « Nous savons que les Nabatéens vinrent de Pétra jusqu’à Hégra aux alentours de la seconde moitié du IIIe siècle avant J.-C. La question est donc maintenant de connaître quelle est la relation entre le déclin des Lihyanites et l’arrivée des Nabatéens dans la région. »
Jusqu’ici, les archéologues ne pouvaient qu’émettre des hypothèses à ce sujet, sans certitude aucune. « Peut-être que les Nabatéens sont en fait le même peuple que les Lihyanites ? », avance M. Al-Suhaibani.
La réponse à ces questions, si elle existe, émergera sans doute des profondeurs du sol de la vallée d’AlUla, si riche d’histoire, dans les cinq prochaines années, qui seront celles des fouilles archéologiques les plus intenses que Dadan ait jamais connue.
M. Al-Suhaibani pense qu’à terme Dadan deviendra « un des sites les plus importants d’AlUla, tant en termes de tourisme que de patrimoine ».
« Ce que peut faire l’archéologie pour notre pays, c’est préciser son identité culturelle. Nous devons aller à la rencontre du peuple pour lui faire découvrir son héritage et son histoire ; nous devons travailler avec nos enfants pour qu’ils connaissent notre histoire, qui n’est pas moins grande que celle de nos voisins, Égyptiens, Jordaniens, Irakiens ou Yéménites, et dont nous pouvons être légitimement fiers. »