Linda, ses grands-pères et la guerre d'Algérie, histoire d'un possible apaisement

Linda, 30 ans, pose au Vieux Port de Marseille, dans le sud de la France le 8 février 2022. (AFP)
Linda, 30 ans, pose au Vieux Port de Marseille, dans le sud de la France le 8 février 2022. (AFP)
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Publié le Mercredi 16 mars 2022

Linda, ses grands-pères et la guerre d'Algérie, histoire d'un possible apaisement

  • Le récit familial n'est pas suffisant, «l'école devrait faire office de ponts entre ces récits hérités des ancêtres et l'histoire dans son déroulement le plus exact»
  • «Quand mon grand-père harki est mort, mon grand-père indépendantiste a pleuré. Après le mariage de mes parents, après la guerre, ils étaient devenus comme des frères»

MARSEILLE: Linda, 27 ans, aime raconter l'amitié entre ses deux grands-pères, pourtant dans des camps opposés durant la guerre d'Algérie, une histoire qui porte la possibilité d'un apaisement malgré les traumatismes de la colonisation et des combats.

"Dans ma famille, il n'y a pas eu de discours haineux après la guerre", confie cette Française, fondatrice d'une entreprise de production audiovisuelle près de Cannes, dont un grand-père fut un fervent soutien du mouvement luttant pour l'indépendance de l'Algérie et l'autre, harki, enrôlé comme supplétif algérien des troupes françaises.


"Quand mon grand-père harki est mort, mon grand-père indépendantiste a pleuré. Après le mariage de mes parents, après la guerre, ils étaient devenus comme des frères", poursuit Linda, rencontrée à Marseille où elle présentait les propositions du groupe "Regards de la jeune génération sur les mémoires franco-algériennes".


Soixante ans après les accords d'Evian du 18 mars 1962, Linda est engagée avec beaucoup d'énergie dans ce collectif créé dans la foulée du rapport de l'historien Benjamin Stora sur la colonisation française en Algérie et la guerre d'indépendance (1954-1962).

Les messages de jeunes pour mieux comprendre l'histoire franco-algérienne

Un groupe de 15 jeunes âgés de 18 à 35 ans, ayant tous un lien familial avec l'histoire de l'Algérie et de la France, s'est formé en juin 2021. Ils ont adressé un questionnaire aux candidats à la présidentielle en France et lancé des "messages".

En voici quelques uns:

Enseignement «incontournable» de la guerre d'Algérie: 

Actuellement, en France, "il est possible d'écarter le cours portant sur la guerre d’Algérie, à la discrétion du professeur. Cette guerre devrait être inscrite dans le temps long de la colonisation, cette dernière devant elle aussi faire l'objet de plusieurs heures d'études". Le récit familial n'est pas suffisant, "l'école devrait faire office de ponts entre ces récits hérités des ancêtres et l'histoire dans son déroulement le plus exact." Un site internet public regroupant toutes les ressources, archives, films, livres, pourrait être créé.


- Création d'un institut culturel qui facilite les résidences d'artistes, les expositions hors les murs et comprenne un Office des jeunesses franco-algérienne, sur le modèle de ce qui existe avec l'Office franco-allemand de la jeunesse, pour stimuler les échanges des deux côtés de la Méditerranée.


- Un réseau social et un podcast de Radio-France dédié aux témoignages, alors que les personnes ayant vécu la guerre vieillissent ou disparaissent.


- Aménager ou rénover des lieux de mémoire en y associant des jeunes français et algériens. Ne pas se contenter de plaques mais mettre un QR code qui permette d'accéder à des témoignages ou à un bref historique de lieux emblématiques dans l'espace public associés à la guerre ou la colonisation.

Leurs grands-parents ont combattu pour ou contre l'indépendance, étaient musulmans, juifs, pieds-noirs (Européens installés en Algérie sous la colonisation et rapatriés en 1962). Chacun est arrivé avec sa mémoire d'un conflit qui fit 500 000 morts dont 400 000 Algériens, selon les historiens. 

"Malgré les contradictions que nous portions au départ, il y a toujours beaucoup de bienveillance", apprécie Linda, longs cheveux de jais, pull gris et leggings noirs. Comme tous les membres du groupe, qui veulent préserver leurs proches d'un débat sur l'Algérie parfois très blessant, elle préfère que son nom de famille ne soit pas publié.

"Linda porte un message en tant que personne, celui de la réconciliation et de la fraternité qui dépasse le conflit passé", souligne Valentin, titulaire d'un master d'histoire, qui participe aux échanges.

"Pour moi, elle est une forme de matérialisation à la fois concrète et symbolique de ce à quoi on devrait tendre", ajoute celui qui regrette que beaucoup de gens en France "comprennent mal" l'histoire franco-algérienne et "la retournent politiquement", malgré le travail rigoureux des historiens.

Leur groupe a donc formulé des propositions pour que la société, notamment la jeunesse, ne tombe pas dans le piège des "mauvaises informations": enseignement incontournable à l'école de la colonisation et de la guerre, office franco-algérien de la jeunesse, comme celui créé entre la France et l'Allemagne, etc.

«Cheminement»
Malgré ses racines, Linda ne s'est pas "intéressée d’un coup à cette histoire, ça a été un cheminement". Comme ce jour où, au collège, des camarades lancent "harki, ça veut dire traître". "Ca me heurte, personne n'avait jamais dit ça dans ma famille, même pas du côté indépendantiste".

"J'ai commencé à me poser des questions, à apprendre davantage sur la colonisation, je voulais revenir à la source de cette guerre", se souvient-elle.

Elle découvre l'histoire de son grand-père maternel harki, qui s'était engagé dans l'armée française comme cuisinier, espérant être protégé du tourbillon de violences lié au conflit. "Un homme qui vivait dans sa campagne, qui ne voulait faire de mal à personne, mais s'est retrouvé pris en tenaille entre deux camps", puis maltraité par l'un et l'autre, dit-elle.

"En 1962, il s'est réjoui de l'indépendance", mais comme des milliers de Harkis, lui, sa femme et leur fille de deux ans, la mère de Linda, devront partir pour la France. Ballotés dans de sommaires centres de transit, ils atterriront à Timgad, un camp établi en périphérie de Mouans-Sartoux, près de Cannes. 

Du côté paternel, Linda n'a pas eu le temps de poser toutes les questions qu'elles voulait. Encore jeune, elle a perdu père et grand-père. Elle sait à quel point son père était fier de l'indépendance de l'Algérie, ce pays "magnifique" qu'elle a visité trois fois. "Mais il m'apprenait à respecter mon pays, la France".

Linda conserve précieusement le carnet de rapatriés de ses grands-parents maternels retrouvé récemment, qui liste ce qu'ils laissèrent en Algérie: des meubles, deux vaches, quelques chèvres. Elle est reconnaissante à cette grand-mère, qu'elle adore et "qui refuse la victimisation", d'avoir organisé des fêtes au camp de harkis.

Ce lieu symbole de la dureté des conditions d'arrivée en France, "elle l'a transformé en quelque chose de positif". "Humblement", Linda espère que le travail de leur groupe servira aussi à construire une meilleure compréhension au-delà des souffrances multiples du passé.


«Simplification!» Bruno Le Maire dévoile son «plan d'action» anti-paperasse pour les entreprises

Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, assiste à une conférence de presse pour présenter un plan visant à simplifier les démarches administratives des entreprises au ministère de l'Économie à Paris, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
Le ministre français de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, assiste à une conférence de presse pour présenter un plan visant à simplifier les démarches administratives des entreprises au ministère de l'Économie à Paris, le 24 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • La commande publique, «qui obéit à des règles dignes de Balzac», sera également simplifiée
  • Il comprend quelques mesures s'appliquant également aux particuliers

 

PARIS: "Balzac", "Kafka" et "Ubu" contre le 21e siècle: le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a présenté mercredi en conseil des ministres un plan visant à débarrasser les entreprises de "la paperasse", via notamment un nouveau bulletin de salaire.

Après le Premier ministre Gabriel Attal, qui a présenté mardi des mesures de "débureaucratisation" de l'administration à destination des particuliers, M. Le Maire a dévoilé mercredi comment l'Etat allait aider des patrons de TPE et PME "fatigués, exaspérés" par les tâches administratives auxquelles ils consacrent "en moyenne huit heures par semaine", l'équivalent de trois points de PIB par an.

Il y a en France 400.000 normes applicables, les huit principaux codes comptent 23.000 pages... contre 828 en 1833, et entreprises et administrations s'envoient chaque année 253 millions de courriers, met en avant Bercy.

Pour les petits patrons, "on est parfois chez Kafka", a remarqué la ministre des Entreprises, Olivia Grégoire.

D'où ce "plan d'action : simplification!", en 50 mesures dont la moitié feront l'objet d'un projet de loi discuté à partir du 3 juin au Sénat.

Il comprend quelques mesures s'appliquant également aux particuliers; une possible future feuille de paye simplifiée, qui devrait passer de 55 à 15 lignes, ou des astreintes pour les assureurs qui ne respectent pas les délais d'indemnisation.

M. Le Maire a aussi annoncé la suppression des 1.800 formulaires administratifs Cerfa d'ici à 2030, dont 80% d'ici à 2026. Cela dans le cadre d'une philosophie "dites le nous une fois", pour éviter de multiplier la communication des mêmes documents à plusieurs administrations.

Il a annoncé aussi "une revue complète" sur trois ans des 2.500 autorisations administratives. L'obligation pour l'employeur d'envoyer les arrêts-maladie à la Sécu est supprimée.

La commande publique, "qui obéit à des règles dignes de Balzac", sera également simplifiée, avec le dépôt de tous les appels d'offres publics sur une plateforme unique, Place, en 2027.

«Trouille»

M. Le Maire a confirmé l'institution d'un "test PME", pour évaluer l'impact de nouvelles normes pour les petites et moyennes entreprises, avant leur application.

"Certains patrons disent qu'ils ont la trouille d'avoir fait une erreur, mais il n'y a aucune raison d'avoir peur de l'administration", a-t-il observé.

Il a ainsi annoncé que le rescrit, la possibilité de demander au fisc de se prononcer sur tel ou tel point, afin d'éviter des problèmes ultérieurs, serait élargi à d'autres administrations comme la Direction générale de la concurrence, de la consommation, et de la répression des fraudes (DGCCRF) ou aux Douanes.

"Toujours dans cette logique de confiance", des peines de prison prévues pour certains manquements déclaratifs seront supprimées, au profit de sanctions moins lourdes. "Les chefs d’entreprise ne sont pas des bandits en puissance", a dit M. Le Maire.

Tandis que le ministre de l'Industrie Roland Lescure observait "qu'Ubu est encore un peu roi dans notre pays", M. Le Maire a dévoilé des mesures de simplification spéciales pour les industriels.

Notamment, "les grands projets industriels n'auront plus à organiser un débat au titre de la Commission nationale du débat public (CNDP)" et la compensation environnementale des projets pourra s'effectuer "dans un délai raisonnable", et non plus immédiatement.

Il s'est toutefois opposé "avec colère" à l'idée que Bercy reculerait ainsi sur l'écologie.

Chaque année enfin, sera organisée une nouvelle revue des mesures "inutiles ou trop lourdes". Le ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini a assuré de "l'engagement de l'administration à installer le plan dans la durée".

Les patrons ont plutôt bien réagi au plan : "Je veux y croire", a indiqué à l'AFP François Asselin, président de la CPME, "car il semble que Bercy ait embarqué toute l'administration" sur ce projet.

Le Medef pour sa part "soutient l'esprit" du texte, qui néanmoins "n'épuise pas l'ensemble du chantier de simplification".

Le premier syndicat patronal a cependant mis en garde contre "des signaux contradictoires", évoquant la transposition en France de directives européennes complexes comme la CSRD et le devoir de vigilance, ou encore l'accord trouvé mardi sur le Compte épargne temps universel (Cetu) entre une autre organisation, l'U2P, et des syndicats.


Tournée du chef de la diplomatie française au Proche-Orient

Le ministre français des Affaires étrangères et européennes Stéphane Séjourne lit un dossier devant le 8e comité interministériel pour la transformation publique à l'hôtel Matignon à Paris, le 23 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français des Affaires étrangères et européennes Stéphane Séjourne lit un dossier devant le 8e comité interministériel pour la transformation publique à l'hôtel Matignon à Paris, le 23 avril 2024. (Photo de Ludovic MARIN / AFP)
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  • Il s'agira de la seconde visite de Stéphane Séjourné dans la région après celle qu'il avait faite début février, peu après sa prise de fonction
  • Samedi, il entamera sa tournée régionale par Beyrouth où il discutera des propositions de la France destinées à rétablir la stabilité à la frontière entre le Liban et Israël

PARIS: Le ministre français des Affaires étrangères va se rendre à partir de samedi au Proche-Orient où il évoquera notamment l'instabilité au sud Liban et la situation à Gaza, a-t-on appris mercredi auprès de son entourage.

Il s'agira de la seconde visite de Stéphane Séjourné dans la région après celle qu'il avait faite début février, peu après sa prise de fonction.

Samedi, il entamera sa tournée régionale par Beyrouth où il discutera des propositions de la France destinées à rétablir la stabilité à la frontière entre le Liban et Israël, a-t-on précisé.

Le président français Emmanuel Macron a reçu vendredi à l'Elysée le Premier ministre libanais Najib Mikati ainsi que le commandant en chef de l'armée libanaise, Joseph Aoun dans un nouvel effort pour contenir la montée des violences entre le Liban et Israël.

Stéphane Séjourné devrait, lui, évoquer les propositions françaises qu'il avait portées en février pour désamorcer le conflit à la frontière libano-israélienne.

Beyrouth a pris acte de ces propositions sans pour autant les endosser alors que les Etats-Unis sont aussi à la manoeuvre.

Stéphane Séjourné poursuivra sa tournée en Arabie saoudite. Il s'agira là de sa première visite bilatérale, qui sera centrée sur les enjeux économiques, énergétiques, environnementaux et de défense, a-t-on indiqué de même source.

Le 30 avril, le chef de la diplomatie sera en Israël avant de se rendre dans les territoires occupés le lendemain. La France entend jouer un rôle actif "dans les efforts pour trouver une solution politique" à la guerre à Gaza avec un double enjeu "obtenir la libération des otages" toujours retenus par le groupe islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza et obtenir "un cessez le feu durable", a rappelé l'entourage du ministre.


Grève des contrôleurs: des «  dizaines de millions d'euros » en jeu, prévient ADP

Selon le Groupe ADP mercredi, Roissy en a accueilli lundi 203.000 et Orly 111.000, alors que ces deux aéroports concentrent environ la moitié de la fréquentation totale des aéroports français. (AFP).
Selon le Groupe ADP mercredi, Roissy en a accueilli lundi 203.000 et Orly 111.000, alors que ces deux aéroports concentrent environ la moitié de la fréquentation totale des aéroports français. (AFP).
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  • Les aiguilleurs du ciel sont appelés à cesser le travail jeudi pour protester contre les mesures d'accompagnement, notamment salariales, d'une refonte du contrôle aérien français
  • Pour mettre en adéquation les effectifs disponibles et le trafic, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a demandé mardi aux compagnies aériennes de renoncer à une majorité de leurs vols jeudi

PARIS: La facture de la grève des contrôleurs aériens français prévue jeudi pourrait se chiffrer en "dizaines de millions d'euros" pour les compagnies aériennes et les aéroports, et affecter des dizaines de milliers de passagers, selon le gestionnaire des aéroports parisiens.

"Pour les compagnies aériennes, pour les aéroports, ce sont plusieurs dizaines de millions d'euros qui sont en jeu, chaque jour", a déclaré mercredi le PDG du Groupe ADP, Augustin de Romanet, au micro de la radio Franceinfo.

Les aiguilleurs du ciel sont appelés à cesser le travail jeudi pour protester contre les mesures d'accompagnement, notamment salariales, d'une refonte du contrôle aérien français.

Pour mettre en adéquation les effectifs disponibles et le trafic, la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) a demandé mardi aux compagnies aériennes de renoncer à une majorité de leurs vols jeudi.

Cette proportion montera à 75% à Paris-Orly, deuxième aéroport français, et 65% à Roissy, le premier, et Marseille. Elle sera de 60% à Toulouse et Nice, et 50% pour les autres aéroports.

"Les abattements de vols qui vont être demandés aux compagnies sont extrêmement élevés, c'est rarement vu dans notre histoire", a commenté M. de Romanet.

"C'est vraiment très pénalisant pour les passagers", a déploré le PDG, alors que deux des trois grandes zones académiques sont en vacances de printemps.

Des dizaines voire des centaines de milliers de voyageurs risquent de voir leur vol annulé. Selon le Groupe ADP mercredi, Roissy en a accueilli lundi 203.000 et Orly 111.000, alors que ces deux aéroports concentrent environ la moitié de la fréquentation totale des aéroports français.

Face à l'échec des négociations avec la DGAC jusqu'ici, le SNCTA, syndicat majoritaire des contrôleurs aériens, a même déposé un deuxième préavis de grève en plein week-end de l'Ascension, les jeudi 9 (férié), vendredi 10 et samedi 11 mai.

"Je fais confiance aux négociateurs et à leur esprit de responsabilité pour que cette grève (...) n'ait pas lieu. On arrive à très fortement abîmer la sérénité des Français et des étrangers avec ces mouvements qui objectivement devraient pouvoir être réglés par la négociation", a jugé Augustin de Romanet.

Pour lui, "les réformes de productivité qui sont demandées (aux contrôleurs) par le gouvernement sont nécessaires, et sont demandées par les compagnies aériennes, notamment les compagnies européennes quand elles survolent la France. Elles ont besoin d'un contrôle aérien aussi efficace que possible".