Enlevés, agressés, les avocats haïtiens crient leur ras-le-bol

La présidente du barreau de Port-au-Prince, Marie Suzy Legros (G), participe à une manifestation devant la résidence privée du Premier ministre Ariel Henry pour obliger le gouvernement à déplacer le tribunal civil vers une zone plus sûre, à Port-au-Prince, en Haïti, le 8 avril 2022. (AFP)
La présidente du barreau de Port-au-Prince, Marie Suzy Legros (G), participe à une manifestation devant la résidence privée du Premier ministre Ariel Henry pour obliger le gouvernement à déplacer le tribunal civil vers une zone plus sûre, à Port-au-Prince, en Haïti, le 8 avril 2022. (AFP)
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Publié le Samedi 09 avril 2022

Enlevés, agressés, les avocats haïtiens crient leur ras-le-bol

  • «Pour le mois de février, nous avons eu sept kidnappings au barreau et un agressé par balles»
  • Face à la demande de relocalisation du tribunal, les autorités gouvernementales avaient annoncé l'instauration d'un couloir de sécurité assurant l'accès à l'établissement

PORT-AU-PRINCE, Haïti: Il est devenu si dangereux pour les avocats de Port-au-Prince d'aller au tribunal de première instance... qu'ils n'y vont plus ! Aucune audience ne s'y est tenue depuis des mois, illustration d'une justice en Haïti mise en échec par les gangs.

"Pour le mois de février, nous avons eu sept kidnappings au barreau et un agressé par balles", relate à l'AFP Me Marie Suzy Legros, bâtonnière du barreau de la capitale haïtienne.


Avec plusieurs dizaines d'autres confrères et consoeurs en robe, l'avocate a manifesté vendredi devant la résidence officielle du Premier ministre, Ariel Henry, pour dénoncer l'insécurité à laquelle ils sont confrontés.


Relocaliser le Palais de justice de Port-au-Prince est l'une des premières revendications des protestataires.


Très rares sont encore les professionnels du droit à se risquer à descendre à cette cour: l'établissement fait directement face à des bidonvilles qui servent de quartiers généraux aux gangs les plus puissants du pays. 


Longtemps cantonnées dans ces zones très défavorisées du bord de mer de Port-au-Prince, les bandes armées ont grandement accru leur emprise à travers la ville et le pays, multipliant assassinats et enlèvements crapuleux. 


D'où l'exaspération des avocats haïtiens, aggravée par l'inertie d'un système judiciaire privé de moyens pour fonctionner.

Tribunal assailli par les gangs 
Face à la demande de relocalisation du tribunal, les autorités gouvernementales avaient annoncé l'instauration, par les forces de l'ordre, d'un couloir de sécurité assurant l'accès à l'établissement.


Or "c'est dans ce couloir que les avocats sont agressés", déplore Me Legros. 


"Des fois, les membres de gangs rentrent (au tribunal): ils viennent chercher leurs collaborateurs ou frères, selon comment ils les appellent, pour les faire s'évader", témoigne sobrement l'avocate.


Un tel blocage de l'appareil judiciaire ne fait qu'aggraver la surpopulation carcérale haïtienne, déjà parmi les plus élevées au monde.    


Les prisons du pays n'ont la capacité d'accueillir que 3.000 détenus mais, selon l'administration pénitentiaire, plus de 11.200 personnes y sont actuellement incarcérées dont plus de 82% encore en attente de jugement, certaines depuis plusieurs années.


Dans le centre carcéral de Port-au-Prince, communément appelé le pénitencier et où les conditions sanitaires sont déplorables, le taux d'occupation dépasse les 460%. 

Faibles salaires et corruption 
A l'échelle nationale, la justice va connaître un nouveau coup d'arrêt avec l'entame mardi d'une grève illimitée des greffiers.


"Nos conditions de travail sont précaires en Haïti. Il n’y a pas de matériel, pas d'ordinateurs: dans certains tribunaux, il n'y a même pas une feuille de papier", dénonce Ainé Martin, président de l'association nationale des greffiers haïtiens.


"Un greffier touche environ 220 dollars par mois, et au niveau des tribunaux de paix (premier échelon de la chaîne judiciaire), c’est 150 dollars: on ne vit pas avec un salaire maigre comme ça et c'est pourquoi il y a cette corruption qui gangrène le système judiciaire haïtien", déplore M. Martin.


Sans parler du délabrement des locaux.


"Avec les égouts qui ne sont pas curés, quand il pleut, l’eau chargée d'ordures rentre dans le tribunal. En plusieurs fois, les bureaux du barreau ont pris l’eau et il y a des dossiers qu’on ne peut pas récupérer", constate avec dépit la bâtonnière de Port-au-Prince.


Le palais de justice de la capitale s'était écroulé lors du séisme de janvier 2010 qui a tué plus de 200.000 personnes. Dans l'urgence, les différentes cours avaient été provisoirement relogées mais seul le tribunal de première instance n'a pas encore été relocalisé.


"On a déjà posé la première pierre du nouveau Palais de justice, en 2016 mais depuis lors, plus rien", regrette Me Legros. 


"Sans tribunal, le sentiment d’impunité grandit et sans justice, il n’y a pas de pays", conclut l'avocate.


Elle ne connaît que trop bien la réalité de la lenteur des affaires publiques et de la justice en Haïti: elle a pris la tête du barreau de Port-au-Prince après l'assassinat de son prédécesseur Me Monferrier Dorval, tué par balles devant chez lui en août 2020.


L'enquête sur le meurtre du célèbre avocat n'a encore mené à aucune arrestation. 


Même l'emblématique dossier de l'assassinat du président Jovenel Moïse, abattu chez lui le 7 juillet 2021, est à l'arrêt: en mars, un quatrième juge a été chargé de l'instruction mais, après un mois, celui-ci s'est plaint de ne pas encore disposer ni du dossier ni de moyens pour travailler. 


Une action en justice est engagée contre le gouvernement britannique à propos de la suspension du financement de l'UNRWA

Des Palestiniens reçoivent des sacs de farine au centre de distribution de l’UNRWA dans le camp de réfugiés de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. (AFP)
Des Palestiniens reçoivent des sacs de farine au centre de distribution de l’UNRWA dans le camp de réfugiés de Rafah, dans le sud de la bande de Gaza. (AFP)
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  • La société londonienne Bindmans LLP a envoyé une lettre de pré-action au Foreign, Commonwealth and Development Office au nom d’un britannique d'origine palestinienne souhaitant protéger les membres de sa famille, qui sont des réfugiés enregistrés auprès d
  • De récentes analyses d’experts ont indiqué qu’une famine est imminente dans la région, avec plus d’un million de Palestiniens confrontés à la faim extrême.

LONDRES : Un cabinet d’avocats britannique conteste la décision du gouvernement britannique de suspendre le financement de l’Agence de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine au Proche-Orient, a déclaré mercredi le cabinet.

La société londonienne Bindmans LLP a envoyé une lettre de pré-action au Foreign, Commonwealth and Development Office au nom d’un britannique d'origine palestinienne souhaitant protéger les membres de sa famille, qui sont des réfugiés enregistrés auprès de l’UNRWA.

Les parents de cet homme, qui vivent dans le camp de réfugiés de Jabalia, dans le nord de Gaza, dépendent entièrement de l’aide fournie par l’UNRWA. Comme beaucoup d’autres, ils souffrent de graves pénuries de nourriture, d’eau et de produits de première nécessité.

La plainte de Bindman allègue que la décision du gouvernement pourrait violer ses obligations internationales, l’impliquant potentiellement dans les violations apparentes par Israël de la Convention sur le génocide et de l’article 1 commun de la Quatrième Convention de Genève.

Il est également soutenu que la décision contredit la Stratégie pour le développement international du FCDO et son Cadre humanitaire international.

De récentes analyses d’experts ont indiqué qu’une famine est imminente dans la région, avec plus d’un million de Palestiniens confrontés à la faim extrême.

Cela intervient après que huit rapporteurs spéciaux des Nations Unies ont souligné la grave crise alimentaire et hydrique à Gaza, déclarant que « chaque personne à Gaza a faim, un quart de la population meurt de faim et lutte pour trouver de la nourriture et de l’eau potable, et la famine est imminente ».

Le Royaume-Uni a décidé de mettre fin au financement le 27 janvier après que des responsables israéliens ont accusé 12 membres du personnel de l’UNRWA, sur un total de 30000, d’avoir participé aux attaques du 7 octobre contre Israël, sans fournir de preuves.

Les agences internationales, y compris les services de renseignement américains, ont remis en question les affirmations non fondées d’Israël.

Plus tôt en février, l’UNRWA a déclaré que certains employés libérés à Gaza après avoir été détenus par Israël avaient fait l’objet de pressions exercées par les autorités israéliennes pour qu’elles déclarent faussement que l’agence avait des liens avec le Hamas et que le personnel avait participé à des attaques.

Ces affirmations sont contenues dans un rapport examiné par Reuters, qui détaille les allégations de mauvais traitements dans la détention israélienne faites par des Palestiniens non identifiés, y compris plusieurs travaillant pour l’UNRWA.

Au cours des dix dernières années, au moins la moitié de l’aide du gouvernement britannique aux Palestiniens est passée par l’UNRWA, le plus grand fournisseur d’aide en Palestine.

Le Royaume-Uni n’a pas expliqué pourquoi il a retiré des fonds et n’a pas répondu au rapport intérimaire de l’ONU détaillant la réponse robuste de l’UNRWA aux allégations, a déclaré Bindman. Il a également souligné que d’autres pays alliés, comme le Canada et les États membres de l’UE, ont exprimé leur satisfaction à l’égard du rapport et se sont engagés à reprendre le financement.

Leur contestation judiciaire prétend que la décision de retirer le financement a été prise de façon illogique et sans tenir dûment compte des preuves, des obligations internationales ou des cadres décisionnels du FCDO.

Le demandeur souhaite que cette décision soit annulée et que le financement de l’UNRWA soit rétabli. Si le gouvernement ne rétablit pas le financement de l’UNRWA d’ici le 2 avril, un examen judiciaire sera lancé.

Le 26 janvier, un jour seulement avant la décision du gouvernement, la Cour internationale de justice a rendu une décision dans l’affaire Afrique du Sud c. Israël. Les juges se sont mis d’accord sur le risque plausible de génocide à Gaza et ont pris des mesures provisoires pour prévenir un préjudice irréparable aux droits des Palestiniens.

La suspension du financement a eu un impact significatif sur la capacité de l’UNRWA à opérer à Gaza, le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, mettant en garde contre l’effondrement financier potentiel de l’agence en 2024.

« La stratégie de développement international du gouvernement du Royaume-Uni établit quatre priorités, notamment « fournir une aide humanitaire vitale et travailler pour prévenir les pires formes de souffrance humaine », a déclaré Alice Hardy, associée chez Bindmans LLP.

« Compte tenu de la situation catastrophique à Gaza, y compris une famine imminente causée par l’homme, la décision en cours de cesser de financer l’UNRWA est non seulement moralement mauvaise, mais va à l’encontre de cette stratégie », a déclaré M. Hardy.

Jonathan Purcell, haut responsable des affaires publiques du Centre international de justice pour les Palestiniens, a déclaré : « Le gouvernement sait que l’UNRWA est le seul moyen efficace de fournir de l’aide humanitaire, et il devrait savoir qu’il n’a pas donné suffisamment de raisons pour expliquer comment ou pourquoi il a décidé de réduire le financement. Lorsque la décision de retirer des fonds a été prise, c’était illogique. Maintenant que Gaza est confrontée à la famine, c’est inadmissible. Le gouvernement doit rétablir le financement immédiatement s’il ne veut pas être complice des milliers de morts de faim et de soif qui risquent fort de se produire dans les mois à venir."

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


Le nombre de migrants ayant traversé la Manche à un niveau record depuis janvier

Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
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  • Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4 644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre
  • En 2023, près de 30 000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche

LONDRES: Plus de 4.600 migrants ont rejoint l'Angleterre par la Manche illégalement à bord de canots depuis le 1er janvier, un record pour les trois premiers mois de l'année malgré les promesses du gouvernement conservateur de mettre fin à ces dangereuses traversées.

Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4.644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre, soit une augmentation de 23% par rapport à la même période l'année dernière (3.700).

Le dernier record avait été établi en 2022 avec 4.548 traversées entre début janvier et fin mars.

Rien que mardi, 338 personnes ont gagné les côtes anglaises dans ces embarcations, le plus souvent des canots pneumatiques chargés de dizaines de passagers.

Depuis le début de l'année, au moins sept migrants, dont une fillette de sept ans et un adolescent de 14 ans, sont morts en mer et sur un canal en tentant de rejoindre l'Angleterre.

"Il y a une prise de risque de plus en plus grande" et "l'année qui vient n'augure rien de bon", avait averti début mars l'association française d'aide aux migrants Utopia 56, selon laquelle le rythme de décès depuis le début de l'année atteint un niveau inédit depuis trois ans.

Depuis son arrivée à Downing Street il y a un an et demi, le Premier ministre Rishi Sunak a fait de la lutte contre l'immigration irrégulière l'une de ses priorités, martelant vouloir "stopper les bateaux".

Projet de loi contreversé

En 2023, près de 30.000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche, un chiffre en forte baisse par rapport au record atteint en 2022 (45.000), que le gouvernement met en avant dans son bilan.

Toute progression des arrivées sur le sol britannique risque de fragiliser les conservateurs à quelques mois des élections législatives, pour lesquelles l'opposition travailliste est donnée largement en tête dans les sondages.

Le projet de loi controversé du gouvernement pour expulser les migrants au Rwanda se heurte par ailleurs à la résistance de la chambre haute du Parlement, celle des Lords, qui souhaite adoucir ce texte.

Lundi, le ministère de l'Intérieur a lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour dissuader les ressortissants vietnamiens, de plus en plus nombreux, à tenter de traverser la Manche.


Attentat de Moscou: les quatre assaillants présumés placés en détention provisoire

Une vue montre la salle de concert incendiée de l'hôtel de ville Crocus à Krasnogorsk, près de Moscou, le 26 mars 2024 (Photo, AFP).
Une vue montre la salle de concert incendiée de l'hôtel de ville Crocus à Krasnogorsk, près de Moscou, le 26 mars 2024 (Photo, AFP).
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  • Les autorités n'avaient toujours pas évoqué dimanche la responsabilité de ce groupe, citant à l'inverse une piste ukrainienne
  • Vladimir Poutine, qui s'est exprimé une fois samedi, près de 24 heures après les faits, n'a pas fait de nouvelle déclaration mais a allumé un cierge à la chapelle de sa résidence près de Moscou

MOSCOU: Les quatre auteurs présumés de l'attaque d'une salle de concert près de Moscou, qui a fait au moins 137 morts, ont été placés dimanche en détention provisoire après leur comparution devant un tribunal de la capitale.

Cette comparution intervient au soir d'une journée de deuil en Russie, après le massacre de vendredi qui a fait au moins 137 morts, l'attaque la plus meurtrière sur le sol européen revendiquée par le groupe jihadiste Etat islamique (EI).

Les autorités n'avaient toujours pas évoqué dimanche la responsabilité de ce groupe, citant à l'inverse une piste ukrainienne.

Les services de santé ont indiqué dimanche soir que le nombre de blessés avait été réévalué à 182, dont 101 étaient toujours hospitalisés.

Les enquêteurs ont continué dimanche de fouiller les décombres du bâtiment qui a été ravagée par un gigantesque incendie déclenché par les assaillants.

Vladimir Poutine, qui s'est exprimé une fois samedi, près de 24 heures après les faits, n'a pas fait de nouvelle déclaration mais a allumé un cierge à la chapelle de sa résidence près de Moscou, selon son porte-parole, cité par les agences russes.

Les policiers ont en outre retrouvé quelque 500 balles, deux fusils d'assaut Kalachnikov et 28 chargeurs sur les lieux de la tragédie, précisant qu'ils appartenaient "aux assaillants".

Les quatre hommes arrêtés et accusés de "terrorisme" (ils encourent la prison à perpétuité) ont été placés en détention provisoire, a indiqué le tribunal Basmanny de Moscou. Leur détention, fixée jusqu'au 22 mai, peut être prolongée dans l'attente de leur procès, dont la date n'a pas encore été fixée.

Au total, les autorités russes ont rapporté l'arrestation de onze personnes dont quatre assaillants en lien avec cette attaque.

Le tribunal a diffusé des images montrant trois suspects amenés dans la salle d'audience menottés et pliés en deux par des policiers, puis assis dans la cage en verre réservée aux accusés. Le quatrième est arrivé dans une chaise roulante, les yeux fermés.

L'un des suspects avait un bandage blanc à l'oreille, comme sur de précédentes vidéos de l'arrestation des assaillants présumés diffusées samedi par les enquêteurs, où trois d'entre eux apparaissaient avec du sang sur le visage.

Selon le tribunal, deux des accusés ont plaidé coupable. L'un d'entre eux, un natif du Tadjikistan, a "reconnu entièrement sa culpabilité".

Les autorités avaient précédemment indiqué que les suspects étaient des "citoyens étrangers", sans mentionner leur nationalité. Le Tadjikistan est une ex-république soviétique d'Asie centrale à majorité musulmane.

Le Comité d'enquête, un puissant organe d'investigation, n'a pas mentionné la revendication formulée dès vendredi par le groupe jihadiste Etat islamique.

Il n'a rien dit non plus dimanche de l'Ukraine, alors que Vladimir Poutine et ses services spéciaux (FSB) avaient évoqué cette piste, car, selon eux, les tueurs présumés tentaient de rejoindre le territoire ukrainien.

Attaque la plus meurtrière 

Cette attaque est la plus meurtrière en Russie depuis une vingtaine d'années, et la plus sanglante revendiquée par l'EI en Europe.

Le groupe jihadiste, que la Russie combat en Syrie et qui est actif dans le Caucase russe, a déjà commis des attentats de moindre ampleur dans le pays depuis la fin des années 2010.

Adrienne Watson, porte-parole du Conseil de sécurité nationale à la Maison Blanche, a estimé dimanche que l'EI portait "seul la responsabilité de cette attaque. Il n'y avait aucune implication ukrainienne".

Le ministre britannique des Finances Jeremy Hunt aussi mis en doute la version de M. Poutine, disant avoir "très peu confiance" en la parole des autorités russes.

Dimanche, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, a affirmé que le président russe "est un menteur pathologique".

"Il tente maintenant de lier l'Ukraine ou des pays occidentaux au massacre de Moscou, sans aucune preuve (...) Son but est de motiver les Russes pour mourir dans leur guerre insensée et criminelle contre l'Ukraine", a-t-il ajouté.

Quelques jours avant l'attentat, M. Poutine avait qualifié de "provocation" des mises en gardes américaines quant à une attaque terroriste en préparation en Russie.

Selon le groupe Site, spécialisé dans la recherche antiterroriste, une vidéo apparemment tournée par les assaillants a été diffusée sur des comptes de réseaux sociaux habituellement utilisés par l'EI.

On y voit plusieurs individus aux visages floutés, armés de fusils d'assaut et de couteaux, dans ce qui semble être le Crocus City Hall. Ils tirent plusieurs rafales, de nombreux corps inertes jonchent le sol et on aperçoit un début d'incendie en arrière-plan.

«Plus de joie»

Dans les rues de Moscou, les avis étaient partagés quant à l'implication de l'Ukraine, pays que l'armée russe a attaqué en février 2022.

"L'Ukraine commet aussi des actes terroristes mais là, ça rassemble plus à ce que font les islamistes. Je ne crois pas à la version de la participation de l'Ukraine", a insisté Vamig Aliev, étudiant en médecine de 22 ans.

Pour Valéry Tchernov, 52 ans, c'est tout autre chose. "Qui est derrière (les assaillants)? Les ennemis de la Russie et de Poutine pour déstabiliser le pouvoir, concrètement c'est possible (que) l'Ukraine et les Occidentaux" aient utilisé EI, a-t-il estimé.

Autre question en suspens, la nationalité des tireurs. Selon des médias russes et le député Alexandre Khinstein, certains sont originaires du Tadjikistan, pays confronté à l'EI et voisin de l'Afghanistan.

Le président tadjik Emomali Rakhmon et M. Poutine se sont entretenus dimanche et ont décidé d'"intensifier" leur coopération antiterroriste.

La capitale russe marquait, elle, le deuil national décrété par la présidence. Les drapeaux étaient en berne, de nombreux lieux de divertissements fermés et les restaurants ont promis de reverser leur recette du jour aux victimes.

Des affiches sont apparues montrant une bougie sur fond noir et l'inscription "Crocus City Hall. 22/03/2024. Nous sommes en deuil...".

"Les gens ne sourient plus ici, il n'y a plus de joie", dit à l'AFP Valentina Karenina, 73 ans, originaire de Sibérie et de passage à Moscou.