Remaniement: Jean Castex démissionne, Elisabeth Borne aux portes de Matignon

Le Premier ministre français Jean Castex arrive à l'Elysée à Paris le 16 mai 2022 pour remettre sa démission au président français. (AFP)
Le Premier ministre français Jean Castex arrive à l'Elysée à Paris le 16 mai 2022 pour remettre sa démission au président français. (AFP)
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Publié le Lundi 16 mai 2022

Remaniement: Jean Castex démissionne, Elisabeth Borne aux portes de Matignon

  • Si une femme devait bien être désignée, Edith Cresson, la seule à avoir occupé le poste, sous la présidence de Mitterrand, lui souhaite «beaucoup de courage» au sein d'une classe politique «machiste»
  • Après un week-end dominé par les noms de plusieurs anciennes ministres, c'est celui de la ministre du Travail qui bruissait parmi plusieurs conseillers de l'exécutif lundi après-midi

PARIS: Le Premier ministre français Jean Castex a remis lundi sa démission, après 22 mois à la tête du gouvernement, et devrait être remplacé par la ministre du Travail Elisabeth Borne, qui sera en première ligne pour les élections législatives de juin.


Après un week-end dominé par les noms de plusieurs anciennes ministres, c'est celui de la ministre du Travail qui bruissait parmi plusieurs conseillers de l'exécutif lundi après-midi.


"Je viens de remettre ma lettre de démission", a déclaré M. Castex après une heure d'entrevue avec le chef de l'Etat au palais présidentiel de l'Elysée. La présidence a indiqué que M. Macron avait accepté cette démission.


Selon des sources concordantes au sein de l'exécutif, une passation de pouvoirs avec le ou la successeur(e) de M. Castex au poste de Premier ministre aura lieu autour de 19H00 (17H00 GMT) lundi.

Castex veut continuer à servir le pays mais quitte la vie politique nationale

Le désormais ancien Premier ministre Jean Castex a annoncé lundi vouloir "continuer à servir notre pays" mais fera "un pas de côté en sortant de la vie politique nationale", a-t-il déclaré lors de la passation de pouvoirs à Matignon avec la nouvelle cheffe du gouvernement Elisabeth Borne.


"Je ferai en ce qui me concerne un pas de côté, en sortant de la vie politique nationale dans laquelle je ne suis finalement entré qu'un peu par effraction en juillet 2020, je continuerai, bien sûr, à servir notre pays, il y a tellement de façons de servir son pays quand on l'aime, en dehors de la politique", a affirmé M. Castex visiblement ému et chaleureusement applaudi par le personnel de Matignon à la fin de son discours. 


M. Castex a rendu un hommage appuyé aux "agents et fonctionnaires de l'État et du service public" et plus particulièrement aux personnels "de santé publique" auxquels il a associé les salariés de santé du privé qui ont fait face à la pandémie de Covid-19. 


Ils "ont fait face avec un courage et une abnégation absolument exceptionnelle à toutes les vagues de la pandémie", a-t-il relevé.


Il a également salué "les membres du Parlement et notamment la majorité parlementaire" "fidèle et d'une grande loyauté". Il a également eu une "pensée particulière" pour les victimes d'attentats terroristes comme celui qui a couté la vie au professeur Samuel Paty, le 16 octobre 2020.


A sa successeure, M. Castex a rappelé qu'elle devait veiller "à ne jamais oublier" les "millions" de concitoyens de la France silencieuse qui est "la colonne vertébrale de la France" et qui ne s'expriment "pas forcément sur les réseaux sociaux" ou "les chaînes d'information continue". 

Réélu le 24 avril, M. Macron avait assuré il y a une semaine à Berlin qu'il connaissait déjà le nom de son prochain Premier ministre... sans dévoiler son identité, à près d'un mois des législatives des 12 et 19 juin.


Seuls indices donnés par le chef de l'Etat, son nouveau Premier ministre sera doté d'un profil "social", "écologique" et "productif".


Mme Borne, technicienne tenace, jugée loyale, est perçue par le pouvoir comme ayant fait ses preuves au gouvernement pendant tout le dernier quinquennat, des Transports au Travail en passant par l'Ecologie.


Outre l'avantage d'être une femme, une option soutenue par 74% des Français selon un sondage Ifop publié dans le Journal du Dimanche, cette ancienne directrice de cabinet de la socialiste Ségolène Royal a également le mérite d'appartenir à l'aile gauche de la Macronie.


Un atout à l'heure où s'annoncent de nouvelles réformes sociales, à commencer par "la mère des batailles" sur les retraites.

«Impatience des Français»
Lors de son premier mandat, Emmanuel Macron avait surpris les observateurs, en nommant Edouard Philippe puis Jean Castex, deux élus sans aucune expérience gouvernementale.


Jean Castex, qui s'était autoproclamé "Premier ministre de l'intendance", a multiplié les déplacements à travers la France - 350 en 22 mois - imprimant l'image d'un chef de gouvernement "des territoires", soucieux de la promotion de l'exécution des réformes, quitte à passer complètement sous les radars au plan national.


Si une femme devait bien être désignée, Edith Cresson, la seule à avoir occupé le poste (1991-1992), sous la présidence du socialiste François Mitterrand, lui souhaite "beaucoup de courage" au sein d'une classe politique "machiste". 


Le choix est d'autant plus attendu qu'il viendra confirmer ou non l'orientation qu'entend se donner le chef de l'Etat. 


Emmanuel Macron a promis de tenir compte de la colère exprimée par de nombreux Français pendant la crise des "gilets jaunes", révoltés contre sa politique fiscale et sociale, et lors de l'élection présidentielle, et de changer de méthode.


"La composition du nouveau gouvernement, l'identité des grands ministres, l'identité du ou de la Première ministre peut avoir une importance très forte sur les élections législatives", a souligné dimanche soir sur la chaîne LCI le sondeur Frédéric Dabi, de l'institut de sondages Ifop.


Mais, relève-t-il, "l'impatience des Français" se focalise surtout "sur des questions d'inflation, de pouvoir d'achat, d'environnement et de sécurité" auxquelles il va falloir répondre dans un contexte anxiogène de crise du Covid-19 et de guerre en Ukraine qui favorisent l'envolée les prix de l'énergie et de l'alimentation.


Pour l'heure, le bloc présidentiel est crédité de quelque 26% d'intentions de vote aux législatives et conserverait une majorité à l'Assemblée.


Il est toutefois défié par l'union de la gauche socialiste, écologiste, communiste et radicale, autour de Jean-Luc Mélenchon (arrivé troisième au premier tour de la présidentielle), qui obtiendrait 28% et l'extrême droite de Marine Le Pen, finaliste malheureuse du second tour face à Emmanuel Macron (24%).


Le plus grand squat de France évacué, des migrants déboussolés

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
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  • La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des «sas» --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre)
  • Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu

VITRY-SUR-SEINE: "Vous savez, en France, il n'y a pas que Paris. Bordeaux, c'est bien, il fait plus chaud qu'ici!": une employée de l'Office de l'immigration tente de convaincre un migrant évacué du plus grand squat de France, près de Paris, de partir dans le sud-ouest du pays. Sans grand succès.

Dans ce squat de Vitry-sur-Seine (sud de la capitale), une entreprise désaffectée occupée depuis presque trois ans, vivaient jusqu'à peu plusieurs centaines de migrants --jusqu'à 450--. Préparés depuis plusieurs jours par les associations à une évacuation imminente, les 300 personnes toujours présentes ont assisté mercredi, dans le calme, à l'arrivée des forces de l'ordre.

Des hommes seuls en majorité, des femmes et quelques enfants en bas-âge, en situation régulière en France pour beaucoup, sont sortis de cette ancienne entreprise de transport. En portant sacs et valise qui contiennent toutes leurs affaires d'une vie d'errance.

Dans le froid, visage fermé et inquiet, ils sont regroupés dans la cour. Derrière des tables, des personnels des préfectures et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) les orientent et proposent des relogements provisoires.

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant.

Sous la surveillance des forces de l'ordre, les files d'attente s'étirent devant ces bureaux à ciel ouvert. A l'exception de celui dédié aux départs en province.

La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des "sas" --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre). Les cars en partance pour ces destinations attendent devant les grilles mais peinent à se remplir.

«Je veux rester ici»

"Vous voulez aller en région? Il y a plus de place là-bas, c'est dynamique!", explique une employée de l'Ofii à un jeune migrant à l'air dubitatif qui comprend difficilement la proposition.

"Il n'y pas que Paris comme ville en France", insiste-t-elle. Peine perdue, son interlocuteur explique suivre une formation en Ile-de-France. Il est orienté vers la table voisine pour trouver une place dans un "sas" plus proche de Paris.

Abakar, lui aussi réfugié soudanais, 29 ans, était à Nantes (ouest). Il a rejoint la région parisienne pour suivre une formation en logistique. Le jeune homme dit avoir décroché une promesse d'embauche dans un supermarché: "Je veux rester ici, je ne peux pas toujours partir ailleurs".

Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu, selon eux, pour faire place nette avant les Jeux olympiques et ses milliers de touristes.

"Il y a des places dans des structures d'accueil près de Paris, mais, clairement, la volonté est de les éloigner de la capitale. Surtout avant les JO", assure Paul Alauzy, représentant de l'ONG Médecins du monde.

Merci Daniel, demandeuse d'asile soudanaise, a confié ses enfants à une association du Val-de-Marne, au sud-est de la capitale. A l'intérieur du squat, explique-t-elle, "il y avait trop de violence". Mais elle ne veut pas quitter l'Ile-de-France. "J'ai peur de ne pas les revoir". Elle est finalement orientée dans un hôtel à Boissy-Saint-Léger, en région parisienne, pour quelques jours.

Assise sur sa valise, Ishia, enceinte de cinq mois, semble perdue. Comme son mari, Gamaral, rencontré il y a quelques années lors d'un long parcours d'exil, elle a fui le Soudan. Ils sont arrivés en France il y a trois semaines.

Ishia est envoyée dans un hôpital. Gamaral, lui, ne "sait pas quoi espérer".


Pour la justice, la Seine-Saint-Denis ne peut être «l'Eldorado des blanchisseurs»

Palais de justice de Bobigny, au nord-est de Paris, le 15 janvier 2024. (AFP)
Palais de justice de Bobigny, au nord-est de Paris, le 15 janvier 2024. (AFP)
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  • Si les montants individuels ne sont pas forcément très élevés, les victimes peuvent se compter en centaines
  • En 2023, le tribunal de Bobigny a saisi pour environ 42 millions d'euros d'avoirs criminels, contre 39 millions d'euros l'année précédente

BOBIGNY: Dans une Seine-Saint-Denis confrontée à une importante criminalité organisée, la justice renforce ses capacités de lutte contre la délinquance financière, un travail d'enquête "très lent, très frustrant mais avec quelques succès", estime la juge d'instruction Claire Thépaut dans un entretien à l'AFP.

Vice-présidente du tribunal de Bobigny en charge des 16 juges d'instruction saisis des affaires les plus complexes, la magistrate de 52 ans supervise le renforcement de cette investigation spécialisée, dans une juridiction davantage rompue à la lutte contre les violences faites aux personnes ou les trafics en tous genres.

D'un premier passage à Bobigny au début des années 2000, Claire Thépaut avait gardé un sentiment d'inachevé. "J'étais partie avec une grande frustration de ne pas avoir instruit comme je l'aurais voulu les gros dossiers de blanchiment car j'étais complètement débordée par mes dossiers de meurtres, trafic de stupéfiants, extorsion et autres", raconte-t-elle, en recevant l'AFP dans son bureau.

Dans ce tribunal notoirement saturé, chaque juge d'instruction doit gérer plus d'une centaine de dossiers en simultané, avec une priorité donnée aux affaires tenues par des délais légaux en raison de personnes en détention provisoire.

Ce qui est plus rarement le cas dans les dossiers "éco-fi", qui s'empoussièrent souvent au bas de la pile.

Pour pallier cette carence, deux cabinets de juges d'instruction ont été créés à l'automne. Désormais, quatre juges travaillent sur les questions économiques et financières, dont deux à plein temps (contre trois juges partagés entre éco-fi et droit commun auparavant).

«Call-center de cocaïne»

"La Seine-Saint-Denis est considérée comme un endroit où l'on peut facilement créer des sociétés bidons et ouvrir des comptes sur lesquels on fait un peu ce qu'on veut pendant un peu trop longtemps à mon goût", décrit Claire Thépaut. "L'idée est d'éviter qu'elle ne soit vue comme l'Eldorado des blanchisseurs".

Dans son bureau défilent des dossiers d'"officines" de blanchiment d'espèces, dont le travail consiste à faire rentrer de manière masquée l'argent sale du travail dissimulé ou des divers trafics dans le système bancaire.

"Quand vous savez qu'un +call-center+ de cocaïne peut générer un chiffre d'affaires de 300 000 euros en espèces par mois, on se doute bien que ces espèces doivent être blanchies d'une manière ou d'une autre et qu'on ne peut pas tout dépenser en location de voitures ou en chambres d'hôtel", détaille la juge.

Les escroqueries en bande organisée (escroquerie à l'encart publicitaire fictif, escroquerie "à l'amour", etc.) sont également fréquentes. Si les montants individuels ne sont pas forcément très élevés, les victimes peuvent se compter en centaines.

Mais dans ce département parmi les plus pauvres et criminogènes de France métropolitaine, la circulation de l'argent sale constitue souvent un angle mort des services de police et de justice.

Travail de bénédictin 

"Une grande partie de nos effectifs de police travaille sur des affaires simples, des affaires de voie publique. Quand on veut faire des enquêtes au long cours, nous avons du mal à trouver des services susceptibles de le faire", déplore Claire Thépaut, signataire d'une récente tribune de 130 magistrats demandant plus de moyens humains et matériels face à la délinquance financière.

Être juge d'instruction sur les dossiers économiques et financiers relève parfois du travail de bénédictin: "on court après les banques pour avoir les documents, notamment à l'étranger, on est obligés d'auditionner de nombreuses personnes pour remonter toutes les sociétés écrans jusqu'aux bénéficiaires, c'est beaucoup plus compliqué".

"On est très lents, par manque de moyens, c'est souvent très frustrant mais on a quelques succès sur des dossiers avec d'énormes préjudices, d'énormes montants blanchis et de belles saisies", estime la magistrate, tenue au secret de l'instruction.

Une des priorités de sa nouvelle section est de "taper au porte-monnaie les délinquants". En 2023, le tribunal de Bobigny a saisi pour environ 42 millions d'euros d'avoirs criminels, contre 39 millions d'euros l'année précédente, selon des chiffres communiqués en début d'année par son procureur Eric Mathais.

Les chefs de juridiction espèrent instaurer à partir de 2025 une chambre correctionnelle spécialisée dans le jugement de dossiers de criminalité organisée et financière.


Cisjordanie: Paris «  condamne avec la plus grande fermeté les actes de violences  »

Deux Palestiniens ont été tués par balles lundi dans le nord de la Cisjordanie occupée après des heurts avec des colons israéliens, a indiqué lundi le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne. (AFP).
Deux Palestiniens ont été tués par balles lundi dans le nord de la Cisjordanie occupée après des heurts avec des colons israéliens, a indiqué lundi le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne. (AFP).
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  • La mort ce week-end d'un adolescent israélien assassiné dans des circonstances inconnues en Cisjordanie occupée a provoqué d'importantes représailles de colons qui ont attaqué des villages
  • La France "condamne le meurtre" de l'adolescent israélien ce week-end "qui ne saurait en aucune manière justifier ces violences", selon le communiqué du ministère

PARIS: La France "condamne avec la plus grande fermeté les actes de violence commis par des colons contre des civils palestiniens en Cisjordanie", et appelle les autorités israéliennes "à traduire sans délai les auteurs de ces violences en justice", indique mardi soir un communiqué du ministère français des Affaires étrangères.

La mort ce week-end d'un adolescent israélien assassiné dans des circonstances inconnues en Cisjordanie occupée a provoqué d'importantes représailles de colons qui ont attaqué des villages, incendié des maisons et des voitures palestiniennes au cours du week-end, tuant au moins deux personnes. En outre, deux Palestiniens ont été tués par balles lundi dans le nord de la Cisjordanie occupée après des heurts avec des colons israéliens, a indiqué lundi le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne.

La France "condamne le meurtre" de l'adolescent israélien ce week-end "qui ne saurait en aucune manière justifier ces violences", selon le communiqué du ministère.