Kenya: Duel serré pour la présidence, les appels à l'unité se multiplient

Des piétons marchent dans une rue à côté d'un panneau d'affichage du vice-président du Kenya, William Ruto, candidat à la présidence de l'Alliance démocratique unie (UDA) et de la coalition politique Kenya Kwanza, à Eldoret, le 13 août 2022. (AFP).
Des piétons marchent dans une rue à côté d'un panneau d'affichage du vice-président du Kenya, William Ruto, candidat à la présidence de l'Alliance démocratique unie (UDA) et de la coalition politique Kenya Kwanza, à Eldoret, le 13 août 2022. (AFP).
Short Url
Publié le Lundi 15 août 2022

Kenya: Duel serré pour la présidence, les appels à l'unité se multiplient

  • Le vice-président sortant William Ruto comptabilisait dimanche 51,25% des voix, contre 48,09% pour Raila Odinga, figure historique de l'opposition aujourd'hui soutenu par le président sortant
  • Devant ce duel présidentiel qui pourrait être le plus serré de l'histoire du Kenya, la population retient son souffle

NAIROBI: Les appels à la paix et à l'unité ont résonné dimanche à travers le Kenya, plongé dans l'interminable attente des résultats de la présidentielle du 9 août qui apparaît particulièrement serrée, selon des résultats officiels partiels.

Dimanche matin, selon le décompte de la Commission électorale (IEBC) sur près de la moitié des bureaux de vote, le vice-président William Ruto menait ce coude-à-coude avec 51,25% des voix, contre 48,09% pour Raila Odinga, figure historique de l'opposition aujourd'hui soutenue par le président sortant Uhuru Kenyatta.

La commission a ensuite coupé la diffusion en direct des résultats, sans donner d'explication.

Mais un décompte du quotidien Daily Nation, citant les données officielles sur 70% des bureaux de vote, indiquait en soirée que M. Ruto avait obtenu jusqu’à présent 52,54% des suffrages tandis que M. Odinga en avait obtenu 46,78%.

Depuis leur vote de mardi, les Kényans retiennent leur souffle devant ce duel présidentiel qui pourrait être l'un des plus serrés de l'histoire du pays. Leur patience est unanimement saluée dans un pays qui a connu ces dernières décennies plusieurs épisodes de tensions et violences post-électorales, parfois sanglantes.

Dimanche, MM. Ruto et Odinga se sont rendus dans des églises de la capitale Nairobi.

Chemise blanche et veste légère, William Ruto a appelé à une suite pacifique du processus électoral lors d'un service religieux : "Nous avons voté pacifiquement, nous avons traversé ce processus pacifiquement et ma prière, c'est que nous terminions ce processus pacifiquement".

Raila Odinga, vêtu d'une tunique bleue, sa couleur de campagne, a, lui, récité une prière de Saint-François : "Je veux devenir un instrument pour apporter la paix, guérir, unir et garder l'espoir vivant dans notre pays".

Ailleurs, les offices dominicaux, très fréquentés dans ce pays religieux, ont été l'occasion d'appels à la responsabilité.

À l'annonce des résultats, "ne créez pas de problèmes ou de chaos, mais priez pour le nouveau président que Dieu nous a donné", a lancé l'évêque Washington Ogonyo Ngede devant 300 fidèles réunis à Kisumu, fief d'Odinga dans l'ouest du pays.

"Les dirigeants vont et viennent, mais le Kenya vit pour toujours", a ajouté cet ami de longue date de la famille Odinga.

«Volonté du peuple»

À Eldoret, bastion de Ruto dans la vallée du Rift, l'évêque du diocèse catholique Dominic Kimengich a également appelé au calme, exhortant les hommes politiques à être "très prudents dans leurs propos".

"Nous avons connu cela en tant que Kényans, nous savons que toute remarque imprudente (...) peut facilement déclencher un conflit", a-t-il déclaré à l'AFP avant une messe dans la paroisse de Yamumbi. Il a demandé aux responsables politiques d'"accepter la volonté du peuple" exprimée dans les urnes.

En écho au secrétaire d'État américain Antony Blinken samedi sur Twitter, une quinzaine d'ONG et de syndicats, dont Amnesty International, ont appelé dimanche "à la patience".

"Nous applaudissons les Kényans pour leur conduite pacifique pendant les élections et appelons au calme durant que les résultats sont vérifiés", ont-ils déclaré dans un communiqué.

Record de femmes élues 

Quelque 22,1 millions d'électeurs ont été appelés aux urnes mardi pour désigner le successeur du président Uhuru Kenyatta, ainsi que leurs gouverneurs, parlementaires et élus locaux.

Les résultats des scrutins locaux tombent au compte-gouttes. Ils ne laissent pas présager quel camp ravira la majorité parlementaire, mais ils dessinent d'ores et déjà une percée historique des femmes.

Pour la présidentielle, le suspense est maximal. Si aucun de ces deux candidats ne recueille plus de 50% des voix, ainsi que 25% des voix dans la moitié des 47 comtés, le Kenya connaîtra pour la première fois un second tour.

L'IEBC est donc sous pression. Non seulement parce que le pays, locomotive économique de l'Afrique de l'Est ; tourne au ralenti dans l'attente des résultats, mais aussi parce qu'elle a été vivement critiquée il y a cinq ans après une présidentielle invalidée par la Cour suprême.

Vendredi, la commission a reconnu que les opérations de collecte, comptage et vérification des résultats étaient plus longues que prévu, ralenties, selon elle, par l'interférence de partisans des partis politiques.

Cette élection est scrutée de près par la communauté internationale. Le Kenya est en effet un point d'ancrage démocratique dans la région et les résultats de toutes les présidentielles y ont été contestés depuis 2002.

Le scrutin de mardi dernier a été marqué par un taux de participation d'environ 65% (contre 78% en août 2017), sur fond d'une inflation galopante et de frustration à l'égard de l'élite politique.


Le nombre de migrants ayant traversé la Manche à un niveau record depuis janvier

Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
Le navire des forces frontalières britanniques « Defender », transportant des migrants récupérés en mer alors qu'ils tentaient de traverser la Manche depuis la France, revient à la marina de Douvres, dans le sud-est de l'Angleterre, le 17 janvier 2024 (Photo, AFP).
Short Url
  • Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4 644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre
  • En 2023, près de 30 000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche

LONDRES: Plus de 4.600 migrants ont rejoint l'Angleterre par la Manche illégalement à bord de canots depuis le 1er janvier, un record pour les trois premiers mois de l'année malgré les promesses du gouvernement conservateur de mettre fin à ces dangereuses traversées.

Selon des chiffres publiés mercredi par le ministère britannique de l'Intérieur, 4.644 personnes, toutes nationalités confondues, ont effectué cette périlleuse traversée au premier trimestre, soit une augmentation de 23% par rapport à la même période l'année dernière (3.700).

Le dernier record avait été établi en 2022 avec 4.548 traversées entre début janvier et fin mars.

Rien que mardi, 338 personnes ont gagné les côtes anglaises dans ces embarcations, le plus souvent des canots pneumatiques chargés de dizaines de passagers.

Depuis le début de l'année, au moins sept migrants, dont une fillette de sept ans et un adolescent de 14 ans, sont morts en mer et sur un canal en tentant de rejoindre l'Angleterre.

"Il y a une prise de risque de plus en plus grande" et "l'année qui vient n'augure rien de bon", avait averti début mars l'association française d'aide aux migrants Utopia 56, selon laquelle le rythme de décès depuis le début de l'année atteint un niveau inédit depuis trois ans.

Depuis son arrivée à Downing Street il y a un an et demi, le Premier ministre Rishi Sunak a fait de la lutte contre l'immigration irrégulière l'une de ses priorités, martelant vouloir "stopper les bateaux".

Projet de loi contreversé

En 2023, près de 30.000 migrants ont au total traversé illégalement la Manche, un chiffre en forte baisse par rapport au record atteint en 2022 (45.000), que le gouvernement met en avant dans son bilan.

Toute progression des arrivées sur le sol britannique risque de fragiliser les conservateurs à quelques mois des élections législatives, pour lesquelles l'opposition travailliste est donnée largement en tête dans les sondages.

Le projet de loi controversé du gouvernement pour expulser les migrants au Rwanda se heurte par ailleurs à la résistance de la chambre haute du Parlement, celle des Lords, qui souhaite adoucir ce texte.

Lundi, le ministère de l'Intérieur a lancé une campagne sur les réseaux sociaux pour dissuader les ressortissants vietnamiens, de plus en plus nombreux, à tenter de traverser la Manche.


Attentat de Moscou: les quatre assaillants présumés placés en détention provisoire

Une vue montre la salle de concert incendiée de l'hôtel de ville Crocus à Krasnogorsk, près de Moscou, le 26 mars 2024 (Photo, AFP).
Une vue montre la salle de concert incendiée de l'hôtel de ville Crocus à Krasnogorsk, près de Moscou, le 26 mars 2024 (Photo, AFP).
Short Url
  • Les autorités n'avaient toujours pas évoqué dimanche la responsabilité de ce groupe, citant à l'inverse une piste ukrainienne
  • Vladimir Poutine, qui s'est exprimé une fois samedi, près de 24 heures après les faits, n'a pas fait de nouvelle déclaration mais a allumé un cierge à la chapelle de sa résidence près de Moscou

MOSCOU: Les quatre auteurs présumés de l'attaque d'une salle de concert près de Moscou, qui a fait au moins 137 morts, ont été placés dimanche en détention provisoire après leur comparution devant un tribunal de la capitale.

Cette comparution intervient au soir d'une journée de deuil en Russie, après le massacre de vendredi qui a fait au moins 137 morts, l'attaque la plus meurtrière sur le sol européen revendiquée par le groupe jihadiste Etat islamique (EI).

Les autorités n'avaient toujours pas évoqué dimanche la responsabilité de ce groupe, citant à l'inverse une piste ukrainienne.

Les services de santé ont indiqué dimanche soir que le nombre de blessés avait été réévalué à 182, dont 101 étaient toujours hospitalisés.

Les enquêteurs ont continué dimanche de fouiller les décombres du bâtiment qui a été ravagée par un gigantesque incendie déclenché par les assaillants.

Vladimir Poutine, qui s'est exprimé une fois samedi, près de 24 heures après les faits, n'a pas fait de nouvelle déclaration mais a allumé un cierge à la chapelle de sa résidence près de Moscou, selon son porte-parole, cité par les agences russes.

Les policiers ont en outre retrouvé quelque 500 balles, deux fusils d'assaut Kalachnikov et 28 chargeurs sur les lieux de la tragédie, précisant qu'ils appartenaient "aux assaillants".

Les quatre hommes arrêtés et accusés de "terrorisme" (ils encourent la prison à perpétuité) ont été placés en détention provisoire, a indiqué le tribunal Basmanny de Moscou. Leur détention, fixée jusqu'au 22 mai, peut être prolongée dans l'attente de leur procès, dont la date n'a pas encore été fixée.

Au total, les autorités russes ont rapporté l'arrestation de onze personnes dont quatre assaillants en lien avec cette attaque.

Le tribunal a diffusé des images montrant trois suspects amenés dans la salle d'audience menottés et pliés en deux par des policiers, puis assis dans la cage en verre réservée aux accusés. Le quatrième est arrivé dans une chaise roulante, les yeux fermés.

L'un des suspects avait un bandage blanc à l'oreille, comme sur de précédentes vidéos de l'arrestation des assaillants présumés diffusées samedi par les enquêteurs, où trois d'entre eux apparaissaient avec du sang sur le visage.

Selon le tribunal, deux des accusés ont plaidé coupable. L'un d'entre eux, un natif du Tadjikistan, a "reconnu entièrement sa culpabilité".

Les autorités avaient précédemment indiqué que les suspects étaient des "citoyens étrangers", sans mentionner leur nationalité. Le Tadjikistan est une ex-république soviétique d'Asie centrale à majorité musulmane.

Le Comité d'enquête, un puissant organe d'investigation, n'a pas mentionné la revendication formulée dès vendredi par le groupe jihadiste Etat islamique.

Il n'a rien dit non plus dimanche de l'Ukraine, alors que Vladimir Poutine et ses services spéciaux (FSB) avaient évoqué cette piste, car, selon eux, les tueurs présumés tentaient de rejoindre le territoire ukrainien.

Attaque la plus meurtrière 

Cette attaque est la plus meurtrière en Russie depuis une vingtaine d'années, et la plus sanglante revendiquée par l'EI en Europe.

Le groupe jihadiste, que la Russie combat en Syrie et qui est actif dans le Caucase russe, a déjà commis des attentats de moindre ampleur dans le pays depuis la fin des années 2010.

Adrienne Watson, porte-parole du Conseil de sécurité nationale à la Maison Blanche, a estimé dimanche que l'EI portait "seul la responsabilité de cette attaque. Il n'y avait aucune implication ukrainienne".

Le ministre britannique des Finances Jeremy Hunt aussi mis en doute la version de M. Poutine, disant avoir "très peu confiance" en la parole des autorités russes.

Dimanche, le ministre ukrainien des Affaires étrangères, Dmytro Kouleba, a affirmé que le président russe "est un menteur pathologique".

"Il tente maintenant de lier l'Ukraine ou des pays occidentaux au massacre de Moscou, sans aucune preuve (...) Son but est de motiver les Russes pour mourir dans leur guerre insensée et criminelle contre l'Ukraine", a-t-il ajouté.

Quelques jours avant l'attentat, M. Poutine avait qualifié de "provocation" des mises en gardes américaines quant à une attaque terroriste en préparation en Russie.

Selon le groupe Site, spécialisé dans la recherche antiterroriste, une vidéo apparemment tournée par les assaillants a été diffusée sur des comptes de réseaux sociaux habituellement utilisés par l'EI.

On y voit plusieurs individus aux visages floutés, armés de fusils d'assaut et de couteaux, dans ce qui semble être le Crocus City Hall. Ils tirent plusieurs rafales, de nombreux corps inertes jonchent le sol et on aperçoit un début d'incendie en arrière-plan.

«Plus de joie»

Dans les rues de Moscou, les avis étaient partagés quant à l'implication de l'Ukraine, pays que l'armée russe a attaqué en février 2022.

"L'Ukraine commet aussi des actes terroristes mais là, ça rassemble plus à ce que font les islamistes. Je ne crois pas à la version de la participation de l'Ukraine", a insisté Vamig Aliev, étudiant en médecine de 22 ans.

Pour Valéry Tchernov, 52 ans, c'est tout autre chose. "Qui est derrière (les assaillants)? Les ennemis de la Russie et de Poutine pour déstabiliser le pouvoir, concrètement c'est possible (que) l'Ukraine et les Occidentaux" aient utilisé EI, a-t-il estimé.

Autre question en suspens, la nationalité des tireurs. Selon des médias russes et le député Alexandre Khinstein, certains sont originaires du Tadjikistan, pays confronté à l'EI et voisin de l'Afghanistan.

Le président tadjik Emomali Rakhmon et M. Poutine se sont entretenus dimanche et ont décidé d'"intensifier" leur coopération antiterroriste.

La capitale russe marquait, elle, le deuil national décrété par la présidence. Les drapeaux étaient en berne, de nombreux lieux de divertissements fermés et les restaurants ont promis de reverser leur recette du jour aux victimes.

Des affiches sont apparues montrant une bougie sur fond noir et l'inscription "Crocus City Hall. 22/03/2024. Nous sommes en deuil...".

"Les gens ne sourient plus ici, il n'y a plus de joie", dit à l'AFP Valentina Karenina, 73 ans, originaire de Sibérie et de passage à Moscou.

 


Dans une ville endeuillée, des Moscovites partagés sur les accusations visant l'Ukraine

Cette capture d'une séquence prise et publiée par le ministère russe des Urgences le 26 mars 2024 montre le personnel des services d'urgence en train de nettoyer les décombres de la salle de concert incendiée de l'hôtel de ville Crocus à Krasnogorsk, à l'extérieur de Moscou. (AFP)
Cette capture d'une séquence prise et publiée par le ministère russe des Urgences le 26 mars 2024 montre le personnel des services d'urgence en train de nettoyer les décombres de la salle de concert incendiée de l'hôtel de ville Crocus à Krasnogorsk, à l'extérieur de Moscou. (AFP)
Short Url
  • Les autorités russes ne cessent de présenter l'Ukraine comme étant dirigée par des «nazis» ou comme menant des «attaques terroristes»
  • Le Kremlin a reconnu cette semaine que le pays était en «guerre» en Ukraine alors qu'il avait banni l'emploi du mot, lui préférant le terme «d'opération militaire spéciale»

MOSCOU: Meurtris par la sanglante attaque du Crocus City Hall, des Russes insistent sur leur union dans la douleur. Mais les opinions sont partagées quant à la version des faits du Kremlin semblant accuser l'Ukraine.

L'attentat commis par un commando armé vendredi soir et qui a fait au moins 137 morts a été revendiqué par les jihadistes de l'Etat islamique (EI). Mais le Kremlin n'a jamais évoqué leur responsabilité, insistant sur le fait que les quatre assaillants présumés, qui ont été arrêtés, auraient tenté de fuir en Ukraine, pointant du doigt le pays qu'il a attaqué en 2022 et combat depuis deux ans.

Beaucoup refusent de s'exprimer sur un sujet aussi sensible. Mais Vamig Aliev, étudiant en médecine de 22 ans et qui dit que ses parents sont musulmans, accepte.

Il estime que Kiev a déjà commis des attentats, référence à des assassinats ciblés à la bombe pour lesquels l'Ukraine fait figure de principal suspect. Mais il note aussi que le modus operandi de l'attaque de vendredi lui paraît être le fait de combattants islamistes.

"Je pense que derrière cet acte terroriste il y a les islamistes extrémistes de l'EI. L'Ukraine commet aussi des actes terroristes, mais là ça rassemble plus à ce que font les islamistes", a relevé le jeune homme, qui dit être un habitué du Crocus City Hall.

"Je ne crois pas à la version de la participation de l'Ukraine même après ce que le président (Poutine) a dit", a-t-il insisté.

Malgré ce désaccord, il juge que la tragédie a été un facteur d'unité.

"De tels événements unifient afin qu'on puisse ensemble surmonter les obstacles", ajoute Vamig. "Je ne suis pas surpris (du soutien des Occidentaux qui ont dénoncé l'attaque), personne n'aime les terroristes".

Rouslana Baranovskaïa, juriste de 35 ans, est elle très émue. Des yeux pleins de larmes, elle raconte avoir été "souvent" au Crocus City Hall et se dit en "état de choc".

«Pourquoi ?»

Mais elle s'interroge sur le fait que les autorités russes, qui ont toujours vanté la puissance de leur appareil sécuritaire, n'aient pas pu empêcher cette tragédie.

D'autant que des pays occidentaux avaient mis en garde Moscou et leurs ressortissants en Russie d'une attaque en préparation.

"Les Etats-Unis et le Royaume-Uni avaient prévenu leurs ressortissants, alors voilà la question: pourquoi nos services spéciaux ne savaient-ils rien?", s'agace-t-elle.

Mardi, trois jours avant l'attentat, Vladimir Poutine avait dénoncé les mises en garde "provocatrices" des Etats-Unis et "une volonté d'intimider et de déstabiliser notre société", lui qui considère Washington comme un ennemi existentiel.

Et dimanche, Washington a répété que "l'Etat islamique porte l'entière responsabilité de cet attentat" et dit ne voir "aucune implication ukrainienne". "Début mars, le gouvernement américain a partagé avec la Russie des informations sur un projet d'attentat terroriste à Moscou", a indiqué une porte-parole de la Maison Blanche.

"Je ne me sens pas en sécurité, que quelqu'un puisse surgir et me tuer, ça fait peur", confie pour sa part Mme Baranovskaïa.

Pour d'autres cependant, l'implication de Kiev est probable. Les autorités russes ne cessent de présenter l'Ukraine comme étant dirigée par des "nazis" ou comme menant des "attaques terroristes", afin de justifier l'assaut lancé le 24 février 2022 par le Kremlin.

Valéry Tchernov, 52 ans, relève qu'avec l'attaque du Crocus City Hall tout le monde va "comprendre que le front n'est pas seulement dans une partie de la Russie mais dans tout le pays".

"Certains n'avaient pas compris qu'il y a une guerre et que dans ce cas tous les moyens sont bons", affirme ce commerçant.

"Qui est derrière (les assaillants)? Les ennemis de la Russie et de Poutine pour déstabiliser le pouvoir".

"Concrètement c'est possible (que ce soit) l'Ukraine et les Occidentaux. Je n'exclus rien. C'est possible qu'ils aient utilisé l'EI pour détourner l'attention de l'opinion publique", a-t-il martelé.

M. Tchernov espère donc désormais que "la société a compris que la guerre est dans tous les recoins du pays".

Le Kremlin a reconnu cette semaine que le pays était en "guerre" en Ukraine alors qu'il avait banni l'emploi du mot, lui préférant le terme "d'opération militaire spéciale".