Afghanistan : sur la ligne de front, une paix bien éloignée

Un policier monte la garde près de son poste non loin d'une position des talibans dans le village d'Aziz Abad. (Photo d'archives AFP).
Un policier monte la garde près de son poste non loin d'une position des talibans dans le village d'Aziz Abad. (Photo d'archives AFP).
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Publié le Vendredi 06 novembre 2020

Afghanistan : sur la ligne de front, une paix bien éloignée

  • Dans le village d'Aziz Abad, la mosquée est inaccessible à la nuit tombée tant les combats font rage
  • Le processus de paix vu d'ici paraît bien improbable: «Les talibans ne veulent pas la paix», tranche Zainullah, qui n'utilise qu'un nom, comme de nombreux Afghans

AFGHANISTAN : Dans le village d'Aziz Abad, la mosquée est inaccessible à la nuit tombée tant les combats font rage. Sur la ligne de front de Maiwand, dans le sud de l'Afghanistan, personne ne croît aux pourparlers de paix entre talibans et gouvernement afghan.

Depuis des mois, les incursions talibanes se multiplient dans le district le plus instable de la province de Kandahar, bastion historique des insurgés. 

«Tu vois cette mosquée?», demande Sardar, fermier quadragénaire d'Aziz Abad. «Nous ne pouvons pas y faire la prière du soir, car la situation sécuritaire est trop mauvaise.»

Son village aride, perdu au milieu du désert, se situe à quelques mètres seulement de la dernière base marquant la fin du territoire sous contrôle de Kaboul. Les rues sont vides, des murs détruits. Le silence règne. La population se terre. 

«Mes proches vivent là-bas, et je ne peux pas aller les voir», regrette Sardar, pointant du doigt le camp taliban.  

Le contrôle des insurgés semble permanent. Dans le crachotement d'un talkie-walkie, la police affirme les entendre s'interroger après avoir remarqué de l'autre côté de la ligne de front les véhicules utilisés par l'AFP, pourtant ordinaires mais qu'ils ne connaissent pas. 

Parqués dans leur mini-base en terre entourée de barbelés, sans eau courante ni électricité, les policiers montrent les maisons en ruine, tas de gravats et autres tranchées d'où les talibans les observent, et d'où ils attaquent chaque soir.

«Il n’y a pas une seule nuit ou nous n’allons pas nous réfugier dans nos tranchées», raconte Zainullah, 20 ans mais des traits d'enfant, sa moustache se dessinant à peine, tout en désignant de minuscules tunnels jonchés de déchets.

Lui était jeune adolescent quand il a rejoint la police pour défendre son district. Les hommes à ses côtés sont des proches. Ils défendent leur territoire, armés de leur seul courage et de quelques vieilles Kalachnikovs. Leur base actuelle, peuplée de chiens faméliques, s’écroule. Les sacs de sable la protégeant sont troués par les projectiles ennemis.

Improbable paix

Le processus de paix vu d'ici paraît bien improbable. «Les talibans ne veulent pas la paix», tranche Zainullah, qui n'utilise qu'un nom, comme de nombreux Afghans. Et de se remémorer avec nostalgie un passé récent, quand les forces afghanes jouissaient du «soutien aérien des forces américaines qui bombardaient les talibans».

Mais les États-Unis ont signé en février un accord avec les rebelles dans lequel ils s'engagent à retirer les troupes étrangères du sol afghan d'ici mi-2021 contre de vagues promesses des rebelles.

Eux qui à la tête d'une coalition internationale ont chassé les talibans du pouvoir fin 2001 et comptaient jusqu'à 100 000 soldats au plus fort de leur présence en 2010, devraient ramener ce nombre à 2 500 début 2021, selon un conseiller à la Maison-Blanche.

Donald Trump a même annoncé début octobre que tout le contingent américain aurait quitté l'Afghanistan «d'ici Noël». Une nouvelle qui a plombé davantage encore le moral des forces afghanes, que le départ des États-Unis met en péril.

L'impact de telles décisions est évident sur le terrain. Libéré de la pression militaire américaine, les talibans ont en à peine une semaine pris deux avant-postes, gagné du terrain, et lancé plusieurs attaques sur Maiwand, énumère Abdul Ghafar, un autre policier.

Les combats n'ont de fait jamais cessé dans le district depuis l'intervention américaine de 2001, qui a mis un terme à cinq années de règne sanglant des talibans.

Ils se sont même «intensifiés» avec les pourparlers démarrés en septembre, estime Ahmad Ikhlas, un jeune commandant de police à l'ouïe endommagée dans un attentat. Ce que confirment plusieurs responsables locaux.

D'après le Sigar, un comité parlementaire américain, qui cite des chiffres de l'armée américaine, les attaques «ennemies» ont cru de 50 % entre le 1er juillet et le 30 septembre en Afghanistan par rapport au deuxième trimestre. Un total «supérieur aux normes saisonnières».

Fin septembre, des centaines d'insurgés ont réussi à pénétrer un ou deux kilomètres en territoire gouvernemental. Ils ont atteint le village de Deh Qubat, situé à une demi-heure de route d'Aziz Abad, une première, avant d'être repoussés par les forces afghanes.

«Les talibans se cachaient derrière les murs, dans les maisons et dans la mosquée. Ils étaient partout», se souvient Atta Jan, un agriculteur de 28 ans, qui prenait son petit-déjeuner quand les insurgés ont fait irruption dans sa rue. 

«Je n’ai jamais vu de combats aussi intenses», confirme Khalil, 26 ans, un haut gradé n'utilisant qu'un nom, qui a participé à la libération de Deh Qubat face à quelque 800 insurgés.

 «Poudre aux yeux»

«Ils jettent de la poudre aux yeux des Américains, font un accord avec eux, mais pas la paix en Afghanistan. Une autre guerre va commencer», assure cet homme ayant lui-même des proches parmi les insurgés.

Alors que le président Ashraf Ghani multiplie les appels à un cessez-le-feu permanent, les rebelles refusent scrupuleusement de s'engager sur ce terrain, estimant qu'ils se priveraient ainsi d'un fort ascendant sur Kaboul dans leur quête d'une reprise du pouvoir, alors qu'ils contrôlaient ou contestaient déjà près de la moitié du territoire afghan début 2019, selon le Sigar. Une tendance qui n'est depuis lors allée qu'en se renforçant.

Les civils en paient le prix. L'ONU a recensé près de 2 200 morts et 3 800 blessés du conflit les neuf premiers mois de l'année, constatant une reprise des violences depuis mi-septembre.

Quelque 58 % des pertes sont causées par les «éléments anti-gouvernementaux», talibans et groupe Etat islamique, selon l'ONU, ce que les talibans rejettent. Au 1er novembre, l'Afghanistan comptait 260 000 déplacés, de même source.

A Maiwand, personne ne croît plus en une amélioration de la situation, dans un pays entré dans sa cinquième décennie de guerre, où les habitants ne connaissent que la violence depuis l'invasion soviétique de Noël 1979. 

«J’ai 41 ans et de ma vie entière, je n’ai pas vu la paix», se désespère Bibi Khanum, une villageoise de Aziz Abad.

Les progrès qui ont suivi la chute du régime taliban ont en outre été bien trop lents à se matérialiser, poussant certains à s'engager, pour l'argent ou par conviction, avec les rebelles.

Dix-neuf ans plus tard, la première école pour filles d'Aziz Abad est toujours en construction. «J'aurais été heureuse d'aller à l'école», déplore Malalai, 14 ans et déjà fiancée. «Mais si je commence maintenant, je serai trop vieille quand je serai diplômée.»

Tous les établissements scolaires sont également fermés à Deh Qubat du fait de la situation sécuritaire.

Depuis l'attaque, Rafiullah, 13 ans, craint de sortir de chez lui. À la radio, il entend bien parler des pourparlers. Mais n'y voit qu'une mascarade. «Les Américains ont fait la paix, lance-t-il. Pas les talibans.»

 


Turquie: une "flotille de la liberté" pour Gaza prête à appareiller

Vue de la proue du navire RoRo Akdeniz avant son départ du port maritime de Tuzla, près d'Istanbul, le 19 avril 2024. Une nouvelle "flottille de la liberté" est prête à partir pour Gaza
Vue de la proue du navire RoRo Akdeniz avant son départ du port maritime de Tuzla, près d'Istanbul, le 19 avril 2024. Une nouvelle "flottille de la liberté" est prête à partir pour Gaza
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  • Après cette opération, les relations entre Israël et la Turquie ont connu une succession de crises jusqu'au rétablissement complet de leurs liens diplomatiques en août 2022, avec le retour des ambassadeurs et consuls dans les deux pays.
  • "Israël a attaqué notre flotte en 2010, tué dix de nos volontaires sans jamais avoir eu de comptes à rendre", a renchéri l'avocate américaine Huwaida Arraf, keffieh palestinien autour du cou.

TURQUIE : Une "flottille de la liberté" est prête à appareiller pour Gaza depuis le port turc de Tuzla (ouest) afin de forcer le blocus et d'apporter de l'aide à la population de l'enclave palestinienne.

Au moins trois bâtiments transportant 5.000 tonnes de vivres, d'eau potable et d'aide médicale attendent le feu vert des autorités turques pour lever l'ancre depuis ce port sur la mer de Marmara, au sud d'Istanbul, si possible la semaine prochaine, ont indiqué les organisateurs vendredi.

Quelque 280 militants, défendeurs des droits, avocats et médecins sont prêts à prendre place à bord, venus de plus d'une trentaine de pays dont les Etats-Unis, le Canada, le Royaume-Uni, la Norvège, l'Allemagne, l'Espagne ou la Malaisie.

Devant la presse, ils ont réclamé la garantie de leur libre passage et un cessez-le-feu immédiat dans le territoire de Gaza soumis au blocus et aux bombardements israéliens depuis le 7 octobre.

Ann Wright, militante pacifiste et ancienne colonelle de l'armée américaine, qui a précisé avoir "démissionné en 2003 pour protester contre la guerre en Irak", a mis les autorités israéliennes en garde: "Toute tentative d'arraisonner ou d'attaquer nos bateaux sera illégale", a-t-elle prévenu.

Des ouvriers préparent un navire de la coalition de la flottille de la liberté alors qu'il jette l'ancre dans le port maritime de Tuzla, près d'Istanbul, le 19 avril 2024.
Des ouvriers préparent un navire de la coalition de la flottille de la liberté alors qu'il jette l'ancre dans le port maritime de Tuzla, près d'Istanbul, le 19 avril 2024.

"Nous représentons la société civile qui réclame la paix et la justice. Nous demandons au monde de garantir notre sécurité afin de livrer (les biens) de première nécessité à nos frères et sœurs de Gaza", a ajouté Mme Wright.

"Comme vous le savez, cette flottille n'est pas la première", a-t-elle glissé en référence à une précédente expédition restée célèbre, car source de grandes tensions entre Israël et la Turquie.

- Le précédent de 2010 -

En 2010, une "flottille de la liberté" forte de huit cargos et transportant près de 700 passagers, de l'aide humanitaire et des matériaux de construction, avait pris la mer au départ d'Antalya (sud) pour tenter de forcer le blocus de la bande de Gaza et ravitailler la population.

Neuf jours après son départ, le 31 mai, une opération militaire israélienne et l'abordage d'un de ses bâtiments, le Mavi Marmara, avaient fait dix morts et 28 blessés parmi les militants et dix blessés côté israélien.

Après cette opération, les relations entre Israël et la Turquie ont connu une succession de crises jusqu'au rétablissement complet de leurs liens diplomatiques en août 2022, avec le retour des ambassadeurs et consuls dans les deux pays.

"Ce que le peuple palestinien endure actuellement est inimaginable", a insisté Mme Wright. "Le siège de Gaza est illégal, c'est une forme de châtiment collectif qui constitue un crime de guerre".

"Israël a attaqué notre flotte en 2010, tué dix de nos volontaires sans jamais avoir eu de comptes à rendre", a renchéri l'avocate américaine Huwaida Arraf, keffieh palestinien autour du cou.

"Mais de la même façon que le siège de Gaza est illégal, toute tentative d'Israël de nous attaquer ou tenter d'intercepter nos navires sera contraire au droit", a-t-elle insisté.

La gynécologue obstétricienne malaisienne Fauziah Mohd Hasan a remarqué que, pendant que l'escalade des tensions se poursuit entre l'Iran et Israël, "les tueries continuent à Gaza".

"Nous ne pouvons pas laisser Israël distraire le monde sur ce qui cause de plus en plus de morts, de maladies et de destructions à Gaza", a plaidé le Dr Hasan, en évoquant les "plus de 50.000 femmes enceintes" dans l'enclave bouclée.

"Nous savons que des femmes subissent des césariennes sans anesthésie, qu'elles donnent naissance à des bébés prématurés et trop petits, qu'elles ne peuvent allaiter en raison du stress", avance aussi la Malaisienne.

La Turquie est l'un des principaux pays fournisseurs d'aide humanitaire à la population palestinienne.

Un neuvième "navire de la Bonté" envoyé par le gouvernement turc est arrivé vendredi au port égyptien d'El-Arish, chargé de 3.774 tonnes d'aide humanitaire.

 


Le vote d'hindous pour Modi et la «gloire de la civilisation de l'Inde»

Une femme vêtue d'une burqa arrive pour voter dans un bureau de vote lors de la première phase des élections générales indiennes à Kairana, dans l'État de l'Uttar Pradesh, le 19 avril 2024. (Photo de Sajjad HUSSAIN / AFP)
Une femme vêtue d'une burqa arrive pour voter dans un bureau de vote lors de la première phase des élections générales indiennes à Kairana, dans l'État de l'Uttar Pradesh, le 19 avril 2024. (Photo de Sajjad HUSSAIN / AFP)
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  • Agé de 73 ans, M. Modi reste très populaire après deux mandats, au cours desquels l'Inde a accru son influence diplomatique et son poids économique
  • Cette ferveur nationaliste hindoue exponentielle inquiète d'importantes minorités, dont quelque 210 millions d'Indiens musulmans

HARIDWAR: Le vieux Ram Bhakt a bravé vendredi la chaleur accablante dans la ville sainte de Haridwar pour donner son vote au Premier ministre Narendra Modi qui, selon lui, est le garant de la "gloire de la civilisation" de l'Inde.

Nichée entre les contreforts de l'Himalaya et les rives du Gange dans l'Etat de l'Uttarakhand (nord), Haridwar est une vieille cité parsemée de temples hindous. Un des sites de prédilection des pèlerins de la foi majoritaire du pays le plus peuplé du monde.

C'est aussi un bastion de M. Modi dont le parti nationaliste hindou Bharatiya Janata (BJP) a placé l'hindouisme au coeur de sa politique, dans ce pays qui a inscrit la laïcité dans sa Constitution.

Il a déjà donné au BJP deux victoires écrasantes en 2014 et 2019 en jouant sur la fibre religieuse de l'électorat hindou.

"Je vote pour la gloire de la civilisation de l'Inde", affirme le saddhu Ram Bhakt, homme saint de 96 ans, au front ridé couvert de pigment vermillon et de cendre, appuyé sur sa canne en bois, drapé dans une modeste robe couleur safran.

«Le pays dont nous rêvions»

"Sous Modi, notre pays est devenu ce dont nous, les sages, rêvions depuis toujours", se réjouit-il auprès de l'AFP.

Agé de 73 ans, M. Modi reste très populaire après deux mandats, au cours desquels l'Inde a accru son influence diplomatique et son poids économique.

Les analystes politiques l'ont d'ores et déjà donné vainqueur de ces élections générales qui ont débuté vendredi et se poursuivront en sept étapes jusqu'au 1er juin.

Cette année, il a inauguré dans la ville d'Ayodhya un grand temple dédié à la divinité hindoue Ram, bâti sur le site d'une mosquée vieille de plusieurs siècles détruite par des fanatiques hindous.

Cet événement, très attendu par ses militants, a bénéficié d'une ample couverture médiatique et de festivités publiques dans toute l'Inde.

"La nation est en train de créer la genèse d'une histoire nouvelle", a-t-il clamé aux milliers de personnes rassemblées pour la cérémonie, parmi lesquelles des célébrités de Bollywood et des stars du cricket.

Shiv Shankar Giri, 28 ans, membre d'un ordre monastique hindou à Haridwar, a dit à l'AFP avoir voté pour "celui qui nous a rendu Ram".

"Nous votons tous pour celui qui a rendu l'hindouisme fort", souligne-t-il. "Nous votons pour Modi".

«La protection de notre foi»

Mais cette ferveur nationaliste hindoue exponentielle inquiète d'importantes minorités, dont quelque 210 millions d'Indiens musulmans.

L’Etat de l’Uttarakhand, considéré comme la pierre angulaire géographique de l’hindouisme, est en proie à de vives tensions sectaires.

Des groupes radicaux, vaguement affiliés au BJP, appellent à l’expulsion des musulmans de cet Etat.

Plusieurs musulmans y ont été tués en février lors d'affrontements avec des riverains hindous, à la suite de la démolition par les autorités municipales d'une mosquée qui, selon elles, avait été construite illégalement.

Pour Mukesh Dubey, prêtre d'un petit temple hindou à Haridwar, le fait que le gouvernement Modi défende sa foi est une "duperie" destinée à détourner de difficultés plus graves et urgentes auxquelles l'Inde est confrontée, avec des millions de jeunes diplômés d'universités au chômage.

Les cadeaux religieux ne servent à rien si "les gens n'ont pas de travail et de nourriture", dit-il à l'AFP.

Le BJP devrait néanmoins remporter la victoire à Haridwar, où son candidat avait remporté aux dernières élections 250.000 voix de plus que son principal adversaire.

Uday Bharti, saddhu de 59 ans, est catégorique, le BJP agit en faveur de ce qui "compte le plus".

"Modi a assuré la protection de notre pays et de notre foi", affirme-t-il à l'AFP devant un bureau de vote. "Nous sommes ici pour garantir que Modi continue de faire du bon travail".


Ukraine : huit morts dans des frappes, Kiev revendique la destruction d'un bombardier russe

Cette photographie distribuée publiée le 19 avril 2024 par le gouverneur du kraï de Stavropol en Russie, Vladimir Vladimirov, montre les restes d'un bombardier stratégique russe à longue portée Tu-22M3 écrasé dans un champ agricole à l'extérieur de Stavropol. (Photo, AFP)
Cette photographie distribuée publiée le 19 avril 2024 par le gouverneur du kraï de Stavropol en Russie, Vladimir Vladimirov, montre les restes d'un bombardier stratégique russe à longue portée Tu-22M3 écrasé dans un champ agricole à l'extérieur de Stavropol. (Photo, AFP)
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  • Moscou a fait état de la mort d'un membre d'équipage dans le crash d'un avion Tupolev-22M3 à la suite d'une défaillance technique, sans mentionner d'implication ukrainienne
  • La Russie bombarde quotidiennement des localités ukrainiennes et Kiev dit éprouver un manque aigu de munitions pour repousser ces attaques

KIEV: Au moins huit personnes, dont des enfants, ont été tuées dans des frappes nocturnes en Ukraine, sur la région de Dnipropetrovsk (centre-est), ont annoncé vendredi les autorités ukrainiennes qui ont revendiqué avoir pour la première fois abattu un bombardier stratégique russe.

Les ministres des Affaires étrangères des Etats du G7 ont dans le même temps pris "l'engagement" de "renforcer" les moyens de défense antiaérienne de l'Ukraine, à l'issue de leur réunion dans le sud de l'Italie. Ils ont par ailleurs exprimé leur "forte préoccupation" à propos de transferts de matériels chinois profitant selon eux à la production militaire russe.

De son côté, Moscou a fait état de la mort d'un membre d'équipage dans le crash d'un avion Tupolev-22M3 à la suite d'une "défaillance technique", sans mentionner d'implication ukrainienne. Les deux pays semblent évoquer le même appareil.

Dans le district ukrainien de Synelnykové, au sud-est de Dnipro, la capitale de la région de Dnipropetrovsk, "plus de dix maisons ont été endommagées" et "six personnes sont mortes", a déclaré le ministre ukrainien de l'Intérieur Igor Klymenko sur Telegram.

Dans la ville de Dnipro, où un immeuble d'habitation de quatre étages et d'autres "infrastructures civiles" ont été touchés, deux personnes ont péri, a-t-il ajouté, prévenant que le bilan risquait de s'alourdir.

Au moins 25 personnes ont été blessées, selon le gouverneur local.

Le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba a précisé que "deux enfants", âgés de quatorze et huit ans, figuraient parmi les morts et qu'un troisième, un garçon de six ans, avait été blessé. Différents responsables avaient auparavant fait des déclarations contradictoires sur le nombre des mineurs tués et leur âge.

"Les enfants ne devraient pas être tués par des frappes aériennes dans l'Europe moderne", a lancé M. Kouleba.

Chemins de fer visés

La compagnie publique ukrainienne des chemins de fer Ukrzaliznytsia a dénoncé vendredi "un bombardement massif" de ses infrastructures à Dnipro et dans sa région, faisant état d'une employée tuée et de sept blessés.

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a de nouveau appelé ses partenaires à envoyer "des systèmes de défense antiaérienne à l'Ukraine", au lieu de les laisser "stockés dans des entrepôts".

La Russie bombarde quotidiennement des localités ukrainiennes et Kiev dit éprouver un manque aigu de munitions pour repousser ces attaques, tandis que l'aide occidentale se réduit ou arrive en retard.

La Chambre américaine des représentants a annoncé qu'elle voterait samedi sur une enveloppe de 61 milliards de dollars d'aide à l'Ukraine, bloquée depuis des mois.

Au total, la Russie a tiré 22 missiles et 14 drones explosifs sur le territoire ukrainien dans la nuit de jeudi à vendredi, a souligné dans la matinée l'armée de l'air ukrainienne, affirmant avoir abattu 29 de ces engins.

Volodymyr Zelensky a dit avoir rendu visite à des soldats dans la région de Donetsk, dans l'est, où l'armée russe accentue sa pression.

Le président a expliqué avoir inspecté "la construction de fortifications", une des priorités actuelles de l'Ukraine afin de freiner les troupes de Moscou.

"Abattu" en mission de combat

Le commandant de l'armée de l'air ukrainienne Mykola Olechtchouk a affirmé vendredi que ses forces avaient, "pour la première fois", "détruit un bombardier stratégique de longue portée Tu-22M3, porteur de missiles de croisière X-22".

L'Ukraine avait déjà revendiqué la destruction d'un appareil de ce type en août mais il se trouvait au sol et non dans les airs.

Selon le renseignement militaire ukrainien (GUR), il s'agit cette fois d'un avion qui a participé aux bombardements nocturnes et "a été abattu à la suite d'une opération spéciale".

Le GUR assure que cet aéronef, qui effectuait une "mission de combat", est tombé dans la région de Stavropol, dans le sud-ouest de la Russie.

A Moscou, le ministère russe de la Défense n'a pas confirmé que des tirs ukrainiens avaient visé un avion militaire russe mais une source au sein de l'armée a déclaré à l'agence de presse d'Etat TASS qu'un bombardier supersonique Tupolev-22M3 s'était "écrasé dans la région de Stavropol après une mission de combat, en rentrant sur sa base".

L'appareil n'avait pas d'armements à son bord, a assuré cette source.

Le gouverneur de la région de Stavropol a pour sa part fait savoir qu'un Tupolev-22M3 avait fait une chute dans cette zone après un incident "technique" et qu'au moins un membre de son équipage avait perdu la vie.

"Un avion est tombé dans les champs dans le district de Krasnogvardeïski", a écrit Vladimir Vladimirov sur Telegram.

"Selon les données préliminaires, une défaillance technique est à l'origine de l'accident", a-t-il ajouté, sans donner plus de détails.

Deux autres membres de l'équipage de l'appareil ont été retrouvés vivants et les secours cherchent toujours le quatrième, a-t-il précisé.

Le district de Krasnogvardeïski se situe à quelque 300 km de la frontière ukrainienne.