En Haïti, le retour du choléra est une «catastrophe»

Alors qu'Haïti ne comptait plus aucun cas de choléra depuis 2019, quelque 960 cas suspects et 33 décès avaient été détectés en trois semaines par le ministère de la Santé au 19 octobre (Photo, AFP).
Alors qu'Haïti ne comptait plus aucun cas de choléra depuis 2019, quelque 960 cas suspects et 33 décès avaient été détectés en trois semaines par le ministère de la Santé au 19 octobre (Photo, AFP).
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Publié le Lundi 24 octobre 2022

En Haïti, le retour du choléra est une «catastrophe»

  • Toute une partie de la population est actuellement isolée du fait de la mainmise de gangs armés sur de vastes zones, et du manque de carburant
  • Or les patients malades peuvent mourir de déshydratation en quelques heures s'ils ne sont pas soignés

PORT-AU-PRINCE: Une situation "alarmante", "chaotique", une "catastrophe": en Haïti, les responsables humanitaires en première ligne face à l'épidémie de choléra, qui s'est déclenchée il y a trois semaines dans le pays, n'ont pas de mots assez forts pour faire part de leur inquiétude.

Toute une partie de la population est actuellement isolée du fait de la mainmise de gangs armés sur de vastes zones, et du manque de carburant. Or les patients malades peuvent mourir de déshydratation en quelques heures s'ils ne sont pas soignés.

"C'est la catastrophe. On est dépassés", a dit à l'AFP le Dr Jean William Pape, dont l'ONG haïtienne Gheskio gère deux centres de traitement du choléra (CTC), sur la quinzaine mis en place au total dans le pays.

Dans l'un d'eux, à Port-au-Prince, la capitale, "nous avons 80 lits, ils sont tous occupés", explique-t-il. "A cause de la pénurie du carburant, les gens des bidonvilles m'ont dit qu'il y a eu plusieurs décès dans leurs zones, parce qu'on ne pouvait pas transporter les malades".

Depuis des semaines, le terminal pétrolier de Varreux est bloqué par une bande armée, contribuant à la paralysie du pays.

Alors qu'Haïti ne comptait plus aucun cas de choléra depuis 2019, quelque 960 cas suspects et 33 décès avaient été détectés en trois semaines par le ministère de la Santé au 19 octobre.

Un nombre qui pourrait être largement sous-estimé, selon Bruno Maes, représentant en Haïti de l'UNICEF.

La situation est d'autant plus frustrante que la prise en charge des malades, atteints de graves diarrhées, est simple (réhydratation durant quelques jours maximum), et qu'il existe un vaccin contre le choléra. Mais il ne reste efficace qu'environ cinq ans, et la dernière grande campagne de vaccination ciblée en Haïti remonte à 2017.

Moitié d'enfants 

Environ la moitié des cas détectés concernent des enfants de moins de 14 ans, dont beaucoup sont particulièrement fragiles à cause d'un système immunitaire affaibli par le manque de nourriture, dû à la pauvreté.

"Beaucoup d'entre eux sont très mal nourris", confirme le Dr Pape. "C'est difficile de trouver leurs veines pour leur administrer des soins" -- des solutés injectées par intraveineuse.

Selon l'ONU, environ 4,7 millions de personnes, soit près de la moitié de la population du pays, sont à un niveau d'insécurité alimentaire aiguë.

Médecins sans frontières (MSF) gère de son côté quatre centres (250 lits au total), et une vingtaine de points de réhydratation orale, a expliqué à l'AFP Moha Zemrag, chef de mission adjoint.

L'une des priorités est selon lui de pouvoir "permettre un accès à l'eau potable" dans certains quartiers contrôlés par des gangs, comme Brooklyn, dans la commune de Cité Soleil (agglomération de Port-au-Prince), sans eau potable depuis "trois mois".

Le choléra est causé par l'ingestion d'eau ou d'aliments contaminés par une bactérie (vibrio cholerae).

A cause de l'insécurité et de kidnappings très fréquents, les ONG ne peuvent par ailleurs pas se rendre dans ces quartiers pour désinfecter les logements à l'aide de chlore.

MSF a mis en place un système de navettes pour acheminer son personnel aux centres de soins, mais "dans quelques semaines" le manque de carburant pourrait rendre ces trajets impossibles, explique Moha Zemrag.

L'inquiétude grandit également pour la population rurale, qui sans carburant se retrouve souvent à plusieurs jours de marche de toute aide. De premiers cas ont été détectés dans la région des Nippes (sud) ou de l'Artibonite (nord).

Les routes menant au sud et au nord d'Haïti sont bloquées par des groupes armés, explique Bruno Maes: "Port-au-Prince est littéralement encerclée, étranglée". Des bureaux de l'UNICEF ont été pillés, et des livraisons de médicaments sont bloquées au port.

Corridors humanitaires 

Le retour du choléra ravive le souvenir cauchemardesque de l'épidémie introduite par des casques bleus en 2010, après un tremblement de terre. Elle avait fait plus de 10 000 morts jusqu'en 2019.

Mais le pays ne connaît pas la même "explosion" du nombre de cas cette fois-ci, estime Sylvain Aldighieri, directeur adjoint des urgences en santé publique de l'Organisation panaméricaine de la santé.

Les autorités ont une "expérience de 10 ans sur le choléra", et l'important est de "réactiver les mécanismes" connus.

Encore faut-il pouvoir le faire.

L'ONU a imposé vendredi des sanctions contre les gangs (embargo sur les armes...), mais reste jusqu'ici divisée sur l'envoi d'une force internationale.

Une mesure qui permettrait selon M. Aldighieri "la création de corridors humanitaires pour les zones compliquées", et que les équipements "puissent sortir du port". Pour le moment, dit-il, de premiers avions avec du matériel sont attendus "dans les prochains jours".


L'Ukraine va annoncer des mesures pour faire rentrer ses hommes de l'étranger

Des habitants locaux se tiennent devant une affiche de recrutement de la troisième brigade d'assaut ukrainienne alors qu'ils se réfugient dans une station de métro souterraine lors d'une alerte de raid aérien à Kiev le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
Des habitants locaux se tiennent devant une affiche de recrutement de la troisième brigade d'assaut ukrainienne alors qu'ils se réfugient dans une station de métro souterraine lors d'une alerte de raid aérien à Kiev le 23 avril 2024 (Photo, AFP).
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  • Selon des estimations de médias, des dizaines de milliers d'hommes ont fui le pays illégalement pour éviter d'aller au front
  • Des centaines de milliers d'Ukrainiens vivaient en outre à l'étranger avant l'invasion

KIEV: Le chef de la diplomatie ukrainienne a indiqué mardi des "mesures" imminentes visant à faire rentrer en Ukraine les hommes en l'âge de combattre se trouvant à l'étranger.

L'Ukraine, qui combat depuis deux ans l'invasion russe, a cruellement besoin de soldats, d'autant que Kiev s'attend à ce que la Russie lance une nouvelle offensive dans les semaines ou mois à venir.

"Le fait de séjourner à l'étranger ne dispense pas un citoyen de ses devoirs envers sa patrie", a déclaré Dmytro Kouleba sur X, annonçant avoir ordonné des "mesures pour rétablir l'équité entre les hommes en âge d'être mobilisés en Ukraine et ceux à l'étranger".

Il n'a pas précisé la nature de ces mesures se bornant à dire que le ministère allait "prochainement fournir des éclaircissements" sur de nouvelles procédures à suivre pour "accéder aux services consulaires".

L'Ukraine interdit aux hommes en âge de combattre de voyager à l'étranger à quelques exceptions près.

Déserteurs 

Mais, selon des estimations de médias, des dizaines de milliers d'hommes ont fui le pays illégalement pour éviter d'aller au front.

Des centaines de milliers d'Ukrainiens vivaient en outre à l'étranger avant l'invasion.

La déclaration du ministre intervient alors qu'un influent site d'information ukrainien ZN.UA a publié lundi soir ce qu'il affirme être une lettre officielle signée par un adjoint de M. Kouleba et préconisant aux consulats ukrainiens de suspendre à partir de mardi tout service consulaire pour les hommes âgés de 18 à 60 ans.

Selon des médias ukrainiens, plusieurs consulats ukrainiens ont cessé d'accepter ces dossiers.

La compagnie d'Etat Dokument qui facilite la délivrance de documents ukrainiens a annoncé mardi sur son site qu'elle "suspendait" les procédures à l'étranger pour des "raisons techniques".

L'Ukraine, dont l'armée est en difficulté face aux troupes russes, a adopté une loi sur la mobilisation visant à durcir les punitions pour les récalcitrants.

Elle a aussi baissé l'âge de mobilisation de 27 à 25 ans.


Début des discussions entre Washington et Niamey sur le retrait des troupes américaines du Niger

Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
Les manifestants réagissent alors qu'un homme brandit une pancarte exigeant que les soldats de l'armée américaine quittent le Niger sans négociation lors d'une manifestation à Niamey, le 13 avril 2024. (AFP)
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  • Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis
  • Washington a accepté de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait

WASHINGTON: Washington a entamé les discussions avec Niamey sur le retrait du Niger des troupes américaines qui y étaient déployées dans le cadre de la lutte antidjihadiste au Sahel, a déclaré lundi le Pentagone.

Le gouvernement du Niger, issu d'un coup d'Etat en juillet dernier, avait dénoncé en mars l'accord de coopération militaire en vigueur avec les Etats-Unis, estimant que la présence américaine était désormais "illégale".

Washington a finalement accepté la semaine dernière de retirer du pays ses plus de 1 000 soldats et annoncé envoyer une délégation à Niamey pour s'accorder sur les détails de ce retrait.

"Nous pouvons confirmer le début des discussions entre les Etats-Unis et le Niger sur le retrait ordonné des forces américaines du pays", a déclaré le porte-parole du Pentagone Pat Ryder.

Une "petite délégation du Pentagone et du commandement militaire américain pour l'Afrique" participe aux discussions, a-t-il précisé.

Les Etats-Unis vont "continuer à explorer les options possibles afin d'assurer que nous soyons toujours en mesure de faire face aux potentielles menaces terroristes", a-t-il encore dit.

A Niamey, le ministre nigérien des Affaires étrangères, Bakari Yaou Sangaré, a indiqué dans un communiqué avoir eu lundi "des discussions" avec l’ambassadrice des États-Unis à Niamey, Kathleen Fitzgibbon, portant "sur la question du départ des troupes militaires américaines du Niger".

L’entretien s’est déroulé en présence de Maria Barron, directrice de l'Agence américaine pour le développement international (USAID) à Niamey, qui a assuré que l'agence allait "poursuivre sa coopération bilatérale" avec le Niger, annonçant "un nouvel accord devant remplacer celui en cours qui expire en septembre 2024", selon le communiqué.

Au Niger, les Etats-Unis disposent notamment d'une base de drone importante près d'Agadez, construite pour environ 100 millions de dollars.

Après le coup d'Etat qui a renversé le président élu Mohamed Bazoum fin juillet, le nouveau régime militaire a rapidement exigé le départ des soldats de l'ancienne puissance coloniale française et s'est rapproché de la Russie, comme le Mali et le Burkina Faso voisins, également dirigés par des régimes militaires et confrontés à la violence de groupes jihadistes.


L'Ukraine s'attend à une détérioration sur le front vers la mi-mai

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky (Photo, AFP).
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  • L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine
  • La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar

KIEV: La situation sur le front ukrainien va empirer autour de la mi-mai et début juin, qui sera une "période difficile", a prévenu lundi le chef du renseignement militaire ukrainien Kyrylo Boudanov, sur fond de craintes d'une nouvelle offensive russe.

La Russie, qui est à l'initiative depuis l'automne 2023, a revendiqué lundi la conquête d'un village de l'Est ukrainien situé non loin de Vougledar, localité à la jonction des fronts Est et Sud, dont elle cherche à s'emparer depuis deux ans.

"N'allons pas trop dans les détails, mais il y aura une période difficile, à la mi-mai et début juin", a prévenu M. Boudanov, interrogé sur l'état du front, dans une interview au service ukrainien de la BBC.

L'armée russe "mène une opération complexe", a-t-il dit.

"Nous pensons qu'une situation plutôt difficile nous attend dans un futur proche. Mais il faut comprendre que ce ne sera pas catastrophique", a estimé Kyrylo Boudanov.

"Armageddon ne se produira pas, contrairement à ce que beaucoup disent en ce moment. Mais il y aura des problèmes à partir de la mi-mai", a-t-il ajouté.

L'armée ukrainienne traverse une période délicate, confronté à une pénurie de nouvelles recrues et de munitions en raison de retards importants de livraisons d'aide occidentale, notamment américaine.

En face, les troupes russes, bien plus nombreuses et mieux armées, ne cessent de pousser à l'Est et revendiquent régulièrement la prise de petits villages dans le Donbass.

En février, Moscou s'est emparé d'Avdiïvka, une ville forteresse, et vise désormais la cité  stratégique de Tchassiv Iar.

Cette cité, perchée sur une hauteur, s'étend à moins de 30 kilomètres au sud-est de Kramatorsk, la principale ville de la région sous contrôle ukrainien, qui est un important nœud ferroviaire et logistique pour l'armée ukrainienne.

Offensive estivale? 

Lundi, le ministère russe de la Défense a affirmé avoir "libéré" Novomykhaïlivka, à une trentaine de kilomètres de Donetsk.

Ce village est proche de Vougledar, une cité minière à la jonction des fronts Sud et Est. Début 2023, l'Ukraine était parvenue à y repousser un assaut de l'armée russe, infligeant des pertes humaines importantes.

Kiev craint désormais une offensive estivale russe encore plus puissante.

Fin mars, le commandant des forces terrestres ukrainiennes Oleksandre Pavliouk avait jugé "possible" un tel scénario, impliquant un groupe de 100.000 soldats russes.

Le commandant en chef des forces ukrainiennes, Oleksandre Syrsky, a déjà admis mi-avril que la situation sur le front Est s'était "considérablement détériorée" récemment.

Il a affirmé voir une "intensification significative" de l'offensive russe depuis mars, aboutissant à des "succès tactiques".

La grande contre-offensive ukrainienne de l'été 2023 s'était heurtée à de puissantes lignes de défense russes qui ont épuisé les ressources de l'armée ukrainienne, sans permettre de libérer les régions occupées par la Russie.

L'Ukraine fait désormais face aux hésitations de ses alliés occidentaux, même si une aide militaire américaine de 61 milliards, longtemps bloquée, a finalement été votée par la Chambre des représentants des Etats-Unis samedi. Le texte doit encore être adopté par le Sénat puis promulgué par le président Joe Biden.

Kiev espère désormais que l'aide des Etats-Unis pourra atteindre le front très rapidement. Le Kremlin a, lui, jugé que qu'elle ne changerait "rien"