Yusuf Al-Qaradawi

Nationalité:

Égyptien de naissance , a ensuite obtenu la nationalité Qatarie

Lieu de Résidence:

Qatar (Doha) depuis 1961

Statut juridique:

Interdit de séjour en Egypte depuis 1997; condamné à mort par contumace depuis 2015; fiché sur la liste des terroristes par l'Arabie Saoudite, l'Égypte, les Emirats Arabes Unis et le Bahreïn

Occupation:

Chef spirituel des « Frères musulmans »; chef du Conseil européen pour la fatwa et la recherche, co-fondateur de IslamOnline.net

Médias:

Anime sa propre émission sur la déclinaison arabe de la chaîne Al Jazeera, “Ach-Chari’a wa’l Hayat” (“La charia et la vie”); il est suivi par plus de 4 million de personnes sur Twitter et Facebook

Bio

Né dans le village de Saft Tourab dans le delta du Nil, Al-Qaradawi, théologien islamique, est élevé par son oncle après le décès de son père. Il est scolarisé dans les « kuttab » (écoles coraniques), et mémorise le Coran à l'âge de 9 ans.

Il commence plus tard à diriger les prières du Ramadan dans sa région et rejoint l'Institut d'études religieuses de la ville égyptienne de Tanta, obtenant son diplôme neuf ans plus tard.

Il rencontre le fondateur des Frères musulmans, Hassan Al-Banna, lorsque ce dernier prononce un discours dans son établissement scolaire.

Les écrits d’Al-Banna ont influencé et façonné la pensée politique et religieuse d’Al-Qaradawi.

Les Frères musulmans ont été jugés dangereux par l'Égypte dès les années 1940 et de nombreux pays les ont  plus tard désignés comme une organisation terroriste.

Dans sa jeunesse, Al-Qaradawi assiste aux réunions et conférences des Frères et rejoint leur section jeunesse à l'âge de quatorze ans après sa rencontre avec Al-Banna.

Al-Qaradawi poursuit ensuite ses études à l'Université d’Al-Azhar, où il étudie la théologie islamique, et obtient son diplôme en 1953.

Il est emprisonné sous le règne du roi Farouq en 1949, puis à trois reprises sous Gamal Abdel Nasser, pour avoir fomenté une tentative d'assassinat ratée contre le président en 1954, pour avoir prêché contre la présence britannique en Egypte et pour ses activités grandissantes dans le domaine de l’islam politique.

Après sa remise en liberté, Al-Qaradawi poursuit ses études et  obtient sa maîtrise en études coraniques en 1960 à l’université d’Al-Azhar.

Les Frères sont contraints à la clandestinité dans les années 1960, peu de temps après que Qaradawi a obtenu son diplôme, ce qui le pousse à s’exiler au Qatar en 1961.

Lorsqu’il travaille au Qatar, il se rapproche du dirigeant d'alors, le cheikh Khalifa Al-Thani, et obtient un passeport qatari.

Depuis son pays d’adoption, Al-Qaradawi diffuse ouvertement ses positions politiques incendiaires dans la région et élargi le nombre d’adeptes des Frères musulmans au Qatar, soutenu en ce sens par Doha.

Sa mission affichée est de redonner à l'Islam son autorité en libérant le monde musulman de l'hégémonie occidentale.

Après la destitution de Cheikh Khalifa par son fils, le Cheikh Hamad, lors d'un coup d'État, pacifique en 1995, Al-Qaradawi gagne en importance.

Le religieux justifie le coup d'État, affirmant qu’il est « nécessaire » pour la nation, et renforce par la suite ses liens avec le Cheikh Hamad.

En 1996, la chaîne d'information publique Al Jazeera diffuse  «Ach-Char’ia wa’l Hayat», l’une de ses émissions en direct les plus regardées.

Ce rôle de présentateur permet à Al-Qaradawi de répéter ses idées radicales à un auditoire qu’on estime à plus de 40 millions.

Il produit des écrits prolifiques sur l'islam et la jurisprudence islamique (fiqh), tout en établissant des relations étroites avec les organisations islamiques du monde entier.

Par la publication de son livre « Fiqh Al-Jihad » en 2009, il mène une campagne mondiale pour réaffirmer sa vision du djihad dans le monde musulman.

Il a publie des fatwas (édits religieux) extrêmes et violentes qui justifient les attentats suicides, la violence contre tous les Juifs et le meurtre de soldats américains, d'apostats et d'homosexuels.

Des millions de personnes dans le monde arabe suivent Al-Qaradawi à la télévision depuis des années. Il sait exploiter l’avènement des réseaux sociaux pour toucher un public mondial, il accroît sa renommée en occupant des fonctions dans diverses organisations islamiques et en animant ses propres émissions, à partir des années 1970 à la radio qatarie puis à la télévision.

Il apparaît fréquemment sur Al-Hayat TV, BBC Arabic, Palestine Authority TV, Al-Faraeen TV et Al-Hiwar TV.

En 2004, Al-Qaradawi crée à Doha l'Union internationale des savants musulmans, désignée comme organisation terroriste par divers pays arabes. Il fonde plusieurs autres organisations pour diffuser son idéologie extrémiste.

Alors que le printemps arabe prend de l'ampleur et crée une vacance de pouvoir, Al-Qaradawi exprime son soutien au renversement des gouvernements syrien, libyen, tunisien et égyptien.

D'une voix tonitruante sur «Ach-Char’ia wa’l Hayat» en 2013, il taxe les pays musulmans de faiblesse, appelant les peuples à renverser leurs gouvernements et à lancer une guerre contre tous ceux qui s'opposent aux Frères musulmans.

Il qualifie ces personnes de «khawarij» (ennemis de l'islam), au rang desquels il fait figurer ceux qui participent à la révolte de juin 2013 contre le président égyptien d'alors, Mohammed Morsi, issu des rangs des Frères musulmans.

Al-Qaradawi publie des fatwas appelant les Égyptiens à boycotter les élections de 2014 qui portent Abdel Fattah El-Sissi au pouvoir. Le religieux appelle la nation à « résister aux oppresseurs » et à soutenir un État musulman.

Il est condamné à mort par contumace en 2015 par le gouvernement égyptien pour son implication dans une évasion de prison en 2011, lors du soulèvement qui a évincé le président de l'époque, Hosni Moubarak.

En janvier 2018, un tribunal militaire égyptien condamne Al-Qaradawi, toujours par contumace, à la prison à vie pour incitation au meurtre, diffusion d’informations mensongères et destruction de biens publics en relation avec la mort d'un policier en 2015.

Depuis que Cheikh Hamad a remis le pouvoir à son fils, le Cheikh Tamim, en 2013, Al-Qaradawi est resté proche de ce dernier tout en continuant de gagner en notoriété mondiale.

Djihad et terrorisme

Al-Qaradawi a publié des fatwas appelant les Égyptiens à boycotter les élections de 2014 qui ont porté Abdel Fattah El-Sissi au pouvoir. Le religieux a appelé la nation à « résister aux oppresseurs » et à soutenir un État musulman.

Il a été condamné à mort par contumace en 2015 par le gouvernement égyptien pour son implication dans une évasion de prison en 2011 lors du soulèvement qui a évincé le président de l'époque, Hosni Moubarak.

En janvier 2018, un tribunal militaire égyptien a condamné Al-Qaradawi, toujours par contumace, à la prison à vie pour incitation au meurtre, diffusion d’informations mensongères et destruction de biens publics en relation avec la mort d'un policier en 2015.

Depuis que Cheikh Hamad a remis le pouvoir à son fils, le Cheikh Tamim, en 2013, Al-Qaradawi est resté proche de ce dernier tout en continuant de gagner en notoriété de par le monde.

« Je pense que l'Islam conquerra l'Europe sans recourir à l'épée ni à la violence. L’Europe est accablée par le matérialisme, la philosophie de la promiscuité sexuelle et les valeurs immorales qui gouvernent le monde, les valeurs de l'intérêt personnel et du plaisir, dit-il. Il est grand temps que [l'Europe] se réveille et de trouve un moyen de se sortir de cet état, et elle ne trouvera pas pour le faire d’autre planche de salut que l’islam. »

Sur les femmes

Les fatwas d'Al-Qaradawi contre les femmes comprennent la justification de la correction corporelle de la femme par son époux.  «Il n’est permis de battre [sa femme]  que dans des cas très restreints  et seulement dans le cas où la femme se rebelle contre son mari, déclare-t-il dans l’émission  «Ach-Chari’a wa’l Hayat» sur Al Jazeera en octobre 1997. Bien entendu, la correction ne doit pas être administrée avec un fouet, un bâton ou une planche. Elle doit être mesurée à l’aune de ce que le Prophète [Mohammed] a dit à une servante qui l’importunait à propos d’une question particulière: « Si je ne craignais d’être puni dans l'au-delà, je t'aurais battue avec ce miswak [une brindille utilisée pour se nettoyer les dents]. » ajoute Al-Qaradawi. « De même, on ne peut avoir recours à la correction corporelle qu’après avoir donné des avertissements à la femme puis lui avoir interdit le lit conjugal. [Comme le dit le Coran 4:34], « commencez par les exhorter, puis ignorez-les dans votre lit conjugal et, si nécessaire, corrigez-les. » »

Dans une fatwa publiée sur www.islamonline.net, Al-Qaradawi a déclaré : « Il est interdit de battre la femme, à moins que cela ne soit nécessaire, et qu’elle « soit en état de rébellion » contre le mari et se moque de lui. Il s'agit d'une discipline temporaire (ta'adib) qui est permise selon le Coran dans des circonstances exceptionnelles, lorsque d'autres efforts pour mettre [la femme] en garde ont échoué et après lui avoir refusé le lit conjugal. Comme le dit Dieu : « Pour celles qui se montrent insubordonnées, commencez par les exhorter, puis ignorez-les dans votre lit conjugal et, si nécessaire, corrigez-les. Mais dès qu'elles redeviennent raisonnables, ne leur cherchez plus querelle. Allah est le Maître Souverain ! » Malgré cette permission en cas de réelle nécessité, le Prophète a dit : « Les hommes bons parmi vous ne battent pas [leurs femmes]. »

En ce qui concerne la masturbation, Al-Qaradawi a déclaré à Qatar TV en 2006 : « La masturbation féminine comporte plus de risques que la masturbation masculine. La masturbation masculine n'est pas aussi risquée. Parfois, les femmes insèrent un doigt, et certaines femmes insèrent des objets qui peuvent présenter des risques, d'autant plus que l'hymen est très sensible et que toute altération peut le déchirer. Cela pourrait exposer la femme à des accusations. Elle peut expliquer : « J'ai fait ceci ou cela», mais il n’est pas certain qu’on la croie. On pensera qu'elle a dû avoir des relations interdites avec des types. »

Vidéo

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Analyse

Yusuf Al-Qaradawi: L'antithèse de la modération

Arab News

  • Ne laissez pas ce religieux musulman vous berner. Malgré ce qu'il dit, il attise la haine religieuse et la violence depuis des décennies grâce au soutien du gouvernement de Qatar

C’est sur Youssouf Al-Qaradawi que se penche ce numéro des «Prédicateurs de la haine». Al-Qaradawi est l'une figures phare des Frères musulmans, l'organisation politico-religieuse qui a été sanctionnée et proscrite par les États du Golfe et de nombreux pays occidentaux.

Les partisans des Frères sont accusés d’attiser la haine religieuse et de promouvoir le culte de la violence afin d’accéder au pouvoir politique.

Dans un tweet récent, Al-Qaradawi affirme qu'il n'est pas un prédicateur fondamentaliste et qu'il promeut une pensée modérée depuis vingt-cinq ans.

« Je me suis opposé à l'extrémisme et aux extrémistes pendant environ un quart de siècle. J'ai vu la menace qu’il faisait peser sur la religion (dîn) et le monde d’ici-bas (dunya), sur l'individu et la société ; j’ai appelé à la modération et rejeté l’exagération et la négligence par ma plume, par mes propos et par ma pensée, que ce soit dans le domaine du fiqh et de la fatwa (jurisprudence islamique) ou dans celui de la prédication (tabligh) et de l’invitation au message de l’islam (da’wah) », déclare-t-il dans un tweet.

Cependant, son passé donne à voir précisément l’inverse. Il a justifié les attentats-suicides, en particulier en Palestine, s'est prononcé à plusieurs reprises contre les Juifs en tant que communauté et a publié des fatwas (édits religieux) qui rabaissent les femmes en islam.

Dans une fatwa sur son site internet, il déclare que le martyre est une forme supérieure de djihad. Dans une interview accordée en 2005 à l’émission « Newsnight » de la BBC, il se félicite des attentats-suicides dans les territoires palestiniens occupés par Israël, estimant qu’il s’agit d’un sacrifice au nom de Dieu. « J'ai soutenu les opérations de martyre, et je ne suis pas le seul », déclare-t-il.

Il encourage les musulmans qui ne sont pas en mesure de se battre à soutenir financièrement les moudjahidines (ceux qui mènent le djihad) partout à l’étranger.

Ces propos peuvent difficilement être décrits comme des prises de position contre le terrorisme, malgré ce qu’il affirme dans son tweet.

Al-Qaradawi a publié des fatwas autorisant des attaques contre tous les Juifs. En janvier 2009, sur la chaîne arabe d’Al Jazeera, il fait cette prière : « Ô Dieu, pourfends Tes ennemis, les ennemis de l’Islam… Ô Dieu, pourfends ces traîtres d’agresseurs juifs … Ô Dieu, compte-les, tue-les un à un et n’en épargne aucun ». Il nourrit un mépris similaire envers les Européens et leur voue une haine profonde.

Dans son émission télévisée de 2013, diffusée depuis Doha et suivie par des millions de téléspectateurs à travers le monde, Al-Qaradawi critique les pays musulmans, les taxant de faiblesse, et enjoint leurs populations à renverser leurs gouvernements et à déclarer la guerre à tous ceux qui s'opposent aux Frères musulmans, disant que ces opposants sont des « khawarij » (ennemis de l'Islam). Une révolte contre le président égyptien de l'époque, Mohammed Morsi, qui est affilié aux Frères musulmans, commence le 30 juin 2013.

On peut juger de la pensée suprémaciste islamique de Qaradawi et de son mépris total pour l'Europe et sa culture dans l'une de ses interventions à la télévision du Qatar en 2007.

« Je pense que l'Islam conquerra l'Europe sans recourir à l'épée ni à la violence.

L’Europe est accablée par le matérialisme, la philosophie de la promiscuité sexuelle et les valeurs immorales qui gouvernent le monde, les valeurs de l'intérêt personnel et du plaisir, expose-t-il. Il est grand temps que [l'Europe] se réveille et trouve un moyen de se sortir de cet état et seul l’islam peut lui offrir une planche de salut. »

Des observateurs au Moyen-Orient peinent à comprendre le soutien du Qatar et l’octroi de la citoyenneté à un idéologue incendiaire comme Al-Qaradawi, d’autant plus que Doha dit lutter contre le terrorisme.

L’une des raisons principales pour lesquelles le Quatuor anti-terroriste – qui comprend l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis, l’Égypte et le Bahreïn - boycotte le Qatar est que le Qatar promeut le terrorisme et accorde un soutien actif aux terroristes.

Lorsqu’Oussama Ben Laden, numéro un d'Al-Qaïda jusqu’à sa mort, est devenu une menace pour la paix mondiale et lorsqu'il a déclenché des vagues de terrorisme dans différentes régions du monde, Riyad a pris la décision logique de lui retirer la citoyenneté saoudienne.

Les observateurs politiques estiment que le Qatar aurait dû agir de la même manière dans le cas d’Al-Qaradawi. C'est un religieux déloyal qui a été accusé d'avoir commandité l'assassinat de personnalités politiques dans son pays d'origine, l'Égypte, qui l’a condamné à mort par contumace.

Le Qatar aurait dû le remettre à l'Égypte, mais ne l'a pas fait. Au lieu de cela, il lui a accordé la citoyenneté.

Dans une interview exclusive de 2017 avec Arab News en marge du Forum de Doha, le ministre des Affaires étrangères du Qatar, Cheikh Mohammed bin Abdulrahman Al-Thani, est interrogé sur les raisons pour lesquelles son pays continue de soutenir Al-Qaradawi. Sa réponse est édifiante. « C'est un citoyen qatari qui a la nationalité qatarie et c’est une personne âgée ; nous ne pouvons donc pas lui dire de quitter le Qatar ». « La constitution qatarie n'autorise pas à soumettre un citoyen qatari à un pouvoir judiciaire étranger, que ce soit dans un pays arabe ou pas.»

Salman Al-Ansari, fondateur de la Commission des relations publiques saoudiennes, se réfère à la loi sur l'asile politique promulguée par le Qatar.

Il a déclare qu’elle accorde aux terroristes et aux extrémistes certains privilèges sous le couvert de l'asile, « dont le plus important est d'échapper aux poursuites judiciaires. »

« In fine, ajoute-t-il, la loi donne aux terroristes le droit de résider au Qatar et d’en obtenir la nationalité, ainsi que la possibilité de se déplacer librement d’un pays à l’autre en utilisant de fausses identités et nationalités. »