L'Assemblée condamne le «massacre» d'Algériens le 17 octobre 1961 à Paris

Des gens regardent les chaussures des manifestants abandonnées après que la police française, sous les ordres du chef de la police parisienne, Maurice Papon, a attaqué une manifestation pacifique rassemblant entre 20 000 et 30 000 partisans du Front de Libération Nationale (Photo, AFP).
Des gens regardent les chaussures des manifestants abandonnées après que la police française, sous les ordres du chef de la police parisienne, Maurice Papon, a attaqué une manifestation pacifique rassemblant entre 20 000 et 30 000 partisans du Front de Libération Nationale (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 28 mars 2024

L'Assemblée condamne le «massacre» d'Algériens le 17 octobre 1961 à Paris

  • Le vote des députés intervient quelques semaines après l'annonce par l'Elysée d'une visite d'Etat du président algérien, Abdelmadjid Tebboune
  • La proposition de résolution portée par l'écologiste Sabrina Sebaihi et la députée Renaissance Julie Delpech a été approuvée dans un hémicycle clairsemé par 67 députés

PARIS: Un "vote pour l'histoire". L'Assemblée a approuvé jeudi une proposition de résolution condamnant le "massacre" du 17 octobre 1961 à Paris, au cours duquel entre une trentaine et plus de 200 manifestants algériens sont morts selon les historiens.

Le texte, qui a une portée avant tout symbolique, "condamne la répression sanglante et meurtrière des Algériens commise sous l’autorité du préfet de police Maurice Papon le 17 octobre 1961". Il "souhaite" en outre "l’inscription d’une journée de commémoration (de ce) massacre" à "l'agenda des journées nationales et cérémonies officielles".

La proposition de résolution portée par l'écologiste Sabrina Sebaihi et la députée Renaissance Julie Delpech a été approuvée dans un hémicycle clairsemé par 67 députés, essentiellement issus de la gauche et de Renaissance. Onze ont voté contre, tous membre du Rassemblement national.

A l'origine du texte, Mme Sebaihi a salué par avance un "vote pour l'histoire", représentant la "première étape" du "travail pour la reconnaissance de ce crime colonial, pour la reconnaissance de ce crime d'Etat".

Le terme - "crime d'Etat" - ne figure pas dans la proposition de résolution, issue d'un minutieux travail d'écriture avec le parti présidentiel et l'Elysée pour parvenir à un texte consensuel, sur un sujet toujours hautement inflammable en France comme en Algérie.

La proposition a été "ciselée mot par mot", afin d'être en "cohérence" avec les positions de la France, avait expliqué à l'AFP l'ancien député Renaissance Philippe Guillemard, qui avait travaillé sur ce texte avec Mme Sebaihi avant de passer le relai à Mme Delpech.

Le vote des députés intervient quelques semaines après l'annonce par l'Elysée d'une visite d'Etat du président algérien, Abdelmadjid Tebboune, "fin septembre-début octobre".

Des corps «jetés dans la Seine»

La ministre déléguée chargée des Collectivités territoriales Dominique Faure a évoqué dans son discours une manifestation "réprimée dans la violence par les services agissant sous l'autorité du préfet de police de l'époque, Maurice Papon", au cours de laquelle "outre de nombreux blessés, plusieurs dizaines (de personnes) furent tuées, leurs corps jetés dans la Seine".

"Ayons aujourd'hui à cette tribune une pensée pour ces victimes et leurs familles frappées de plein fouet par l'engrenage de la violence", a-t-elle dit, sous les yeux de représentants des collectifs qui plaident depuis plusieurs années pour cette reconnaissance.

Elle a rappelé le travail de mémoire déjà accompli pour reconnaître le massacre. En 2012, le président François Hollande avait rendu "hommage aux victimes" d'une "sanglante répression" s'étant abattue sur ces femmes et hommes manifestant pour "le droit à l'indépendance".

Son successeur Emmanuel Macron a déclaré en octobre 2021 que "les crimes commis le 17 octobre 1961 sous l'autorité de Maurice Papon sont inexcusables pour la République".

Mme Faure a cependant émis des réserves quant à l'instauration d'une journée de commémoration, soulignant que trois dates existent déjà pour "commémorer ce qui s'est passé pendant la guerre d'Algérie".

"Beaucoup reste à faire pour écrire cette histoire, mais c'est à mon sens la seule façon de bâtir une réconciliation sincère et durable. Je pense important de laisser l'histoire faire ce travail avant d'envisager une nouvelle journée commémorative spécifique pour les victimes du 17 octobre 61", a-t-elle dit.

Des réserves partagées par les groupes MoDem et Horizons, membres de la majorité, pour qui le "travail historique doit continuer", et qui avaient laissé la liberté de vote à leurs représentants.

L'ensemble des prises de parole ont traduit la volonté des députés de rendre hommage aux victimes du 17 octobre et de reconnaître la responsabilité des autorités dans le massacre, à l'exception notoire de celle du député RN Frank Giletti, qui a fustigé des "accusations unilatérales" et une "repentance à outrance", s'appuyant sur des "mensonges".

"En proposant cette résolution, vous placez vos pas dans ceux d'Emmanuel Macron, lui qui n'a eu de cesse de s'agenouiller devant le gouvernement algérien, lui qui s'attelle à mortifier son propre pays par des repentances continues devenues insoutenables", a-t-il dénoncé. "Scandaleux", a répliqué une voix dans l'hémicycle. Aucun député LR ne s'est exprimé.


Européennes: après LFI, Raphaël Glucksmann veut donner des gages sur le social à Amiens

La tête de liste PS/Place publique aux européennes Raphaël Glucksmann veut donner des gages à gauche sur la question sociale avec un déplacement à Amiens auprès des salariés de l'usine du biochimiste Metex, en redressement judiciaire, au lendemain d'une visite similaire de sa concurrente insoumise Manon Aubry. (AFP).
La tête de liste PS/Place publique aux européennes Raphaël Glucksmann veut donner des gages à gauche sur la question sociale avec un déplacement à Amiens auprès des salariés de l'usine du biochimiste Metex, en redressement judiciaire, au lendemain d'une visite similaire de sa concurrente insoumise Manon Aubry. (AFP).
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  • Après un début de campagne axé sur la défense européenne et l'Ukraine, puis une séquence sur l'écologie, l'essayiste de 44 ans, étiqueté par ses détracteurs comme trop Parisien et "hors-sol", est crédité de 14% des intentions de vote
  • Au début de sa campagne, Raphaël Glucksmann avait promis d'aller "partout", dans les usines, les fermes, et dans les territoires "où l'Europe est lointaine et où je suis perçu comme trop Parisien"

PARIS: La tête de liste PS/Place publique aux européennes Raphaël Glucksmann veut donner des gages à gauche sur la question sociale avec un déplacement à Amiens auprès des salariés de l'usine du biochimiste Metex, en redressement judiciaire, au lendemain d'une visite similaire de sa concurrente insoumise Manon Aubry.

Après un début de campagne axé sur la défense européenne et l'Ukraine, puis une séquence sur l'écologie, l'essayiste de 44 ans, étiqueté par ses détracteurs comme trop Parisien et "hors-sol", est crédité de 14% des intentions de vote et talonne la candidate de la majorité Valérie Hayer.

Dans la ville d'Emmanuel Macron, mais aussi dans une région qui a largement voté contre le référendum de 2005 sur le traité constitutionnel européen, celui qui avait regretté en 2019 que sa classe sociale se sente "plus chez soi à New York ou à Berlin, a priori, culturellement, qu'en Picardie", vient soutenir les salariés de Metex.

Cette usine, la seule en Europe à produire de la lysine, un acide aminé, est confrontée à l'envol des prix des matières premières, notamment le sucre, et à un "dumping" des producteurs chinois.

Il arrive juste après Manon Aubry, venue la veille avec le député de la circonscription François Ruffin, qui avait reproché à Raphaël Glucksmann d'être "hors sol et déconnecté", dans un échange épistolaire en janvier.

"Il y a dix ans, pour les experts, les ministres, les socialistes, les usines c'était dépassé, ça puait, ça polluait. Aujourd'hui, ils viennent. C'est notre victoire idéologique", a jugé lundi soir François Ruffin, lors du meeting de sa candidate.

Au début de sa campagne, Raphaël Glucksmann avait promis d'aller "partout", dans les usines, les fermes, et dans les territoires "où l'Europe est lointaine et où je suis perçu comme trop Parisien".

"Il l'a fait. Depuis des semaines, Raphaël est allé voir des ouvriers, des travailleurs", martèle un membre de son équipe de campagne. "Il ne fait pas une campagne parisienne".

Cette visite "vient boucler des semaines de campagne sur la nécessaire réindustrialisation de l'Europe", ajoute le même, rappelant que l'eurodéputé avait soutenu Systovi, entreprise de panneaux photovoltaïques près de Nantes, juste avant son placement en liquidation judiciaire, là encore du fait de la concurrence chinoise.

Pour Raphaël Glucksmann, Metex est un "symbole de l'incapacité de l'Europe à défendre ses intérêts".

Déçus du macronisme

Il défend un "protectionnisme écologique européen" et "un Buy European Act" pour réserver en priorité les commandes publiques européennes aux productions européennes.

Un membre du gouvernement ironise sur le fait que tous les concurrents aux européennes "doivent sentir le roussi et essayent de s'emparer du sujet" de la réindustrialisation.

"On a décidé de faire de la question sociale et industrielle la question centrale de la campagne", répond Pierre Jouvet, candidat socialiste en troisième position sur la liste.

Objectif: "parler à l’ensemble de la gauche et des écologistes, et aux déçus du macronisme", "ceux qui en sont revenus après la réforme des retraites et la loi immigration", ajoute l'eurodéputé PS Christophe Clergeau. "Il faut montrer qu'il y a une différence claire entre la macronie et nous".

Un macroniste historique le reconnaît: le risque Glucksmann a été "négligé" par la majorité.

Alors qu'Attal venait d'être nommé, "j’avais dit: 'vous allez voir Glucksmann, ça va se faire tout seul'", a-t-il observé, déplorant la désaffection des électeurs de la majorité issus de la gauche. Il a cité comme exemples "la loi immigration qui a été mal comprise et mal appréciée", ou les déclarations du ministre de la Fonction publique Stanislas Guerini sur le licenciement des fonctionnaires.

Raphaël Glucksmann doit présenter ses mesures sociales lors d'un meeting mardi soir à Amiens. Il propose notamment un prix réglementé de l'énergie, l'encadrement des prix de l'alimentaire, une tarification sociale de l'eau pour les premiers mètres-cube consommés, ou encore un "plan Marshall" pour le logement social.

Il prône aussi des écarts de salaires réduits de 1 à 20 dans une même entreprise, un "bouclier emploi face aux transformations écologiques et numériques", et l'extension du dispositif "Territoires zéro chômeurs de longues durée".


Trois agents pénitentiaires français tués lors de l'évasion d'un détenu

Un homme a blessé grièvement deux policiers dans un commissariat de Paris le 9 mai après s'être emparé d'une arme, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. (AFP)
Un homme a blessé grièvement deux policiers dans un commissariat de Paris le 9 mai après s'être emparé d'une arme, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier. (AFP)
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  • Le délit de fuite a eu lieu en fin de matinée à un péage routier à Incarville, dans le nord de la France
  • Le détenu était transporté entre les villes de Rouen et d'Evreux en Normandie

Trois agents pénitentiaires français ont été tués et deux autres blessés mardi dans l'attaque d'un fourgon pénitentiaire transportant un détenu qui s'est évadé, a indiqué à l'AFP une source policière.

Le délit de fuite a eu lieu en fin de matinée à un péage routier à Incarville, dans l'Eure, dans le nord de la France, a ajouté une autre source proche du dossier.

Le détenu était transporté entre les villes de Rouen et d'Evreux en Normandie.

 

 


Après une nuit de violences en Nouvelle-Calédonie: couvre-feu, appels au calme et nombreuses interpellations

Une photo montre des caddies endommagés dans la rue après le pillage d'un supermarché et la vandalisation de magasins dans le quartier N'Gea de Nouméa, le 14 mai 2024. (AFP)
Une photo montre des caddies endommagés dans la rue après le pillage d'un supermarché et la vandalisation de magasins dans le quartier N'Gea de Nouméa, le 14 mai 2024. (AFP)
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  • Les premières altercations ont commencé dans la journée de lundi, en marge d'une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle examinée à Paris à l'Assemblée nationale
  • Les indépendantistes estiment que ce dégel risque de "minoriser encore plus le peuple autochtone kanak"

NOUMEA: Magasins pillés, maisons incendiées, tirs sur les gendarmes: des affrontements d'une extrême violence ont éclaté dans la nuit de lundi à mardi en Nouvelle-Calédonie, alors que l'Assemblée nationale examine à Paris une révision constitutionnelle décriée par les indépendantistes.

"La violence n'est jamais justifiée ni justifiable", a estimé Gabriel Attal. "La priorité, évidemment, pour nous, c'est de rétablir l'ordre, le calme et la sérénité", a ajouté le Premier ministre en marge d'un déplacement en Savoie.

Le représentant de l'Etat dans l'archipel français du Pacifique sud, Louis Le Franc, a décrété le couvre-feu pour la nuit de mardi à mercredi dans l'agglomération de Nouméa.

"On n'a pas de morts, il n'y a pas de blessés graves pour l'instant, il y aurait pu y en avoir", a déclaré le haut-commissaire de la République devant la presse.

Les forces de l'ordre ont procédé à 82 interpellations ces deux derniers jours, a détaillé Gérald Darmanin devant la presse.

Le ministre de l'Intérieur et des Outre-mer a "condamné de façon extrêmement forte ces violences", qu'il a qualifiées d'"émeutes commises par des délinquants, parfois des criminels".

Un total de 54 gendarmes et policiers ont été blessés, certains "gravement", a ajouté M. Darmanin, précisant que des familles de gendarmes avaient été "évacuées".

A Nouméa, le haut-commissaire de la République a appelé la population au calme, tout comme le président indépendantiste du gouvernement du territoire, Louis Mapou.

Le président de l'Union calédonienne (indépendantiste) Daniel Goa a demandé à la jeunesse de "rentrer chez elle" et condamné pillages et exactions. "Les troubles de ces 24 dernières heures révèlent la détermination de nos jeunes de ne plus se laisser faire par la France", a-t-il commenté.

«Exfiltrations d'habitants»

Les premières altercations entre manifestants et forces de l'ordre ont commencé dans la journée de lundi, en marge d'une mobilisation indépendantiste contre la réforme constitutionnelle examinée à Paris à l'Assemblée nationale, visant à élargir le corps électoral aux élections provinciales, cruciales en Nouvelle-Calédonie.

Les indépendantistes estiment que ce dégel risque de "minoriser encore plus le peuple autochtone kanak".

M. Le Franc a rapporté "des tirs tendus avec des armes de gros calibre, des carabines de grande chasse, sur les gendarmes" dans la nuit de lundi à mardi dans la commune du Mont-Dore, au sud-est de Nouméa.

Dans les quartiers nord de Nouméa, le représentant de l'Etat a déploré "des destructions de commerces, de pharmacies et de domiciles".

"On a malheureusement pu constater des exfiltrations d'habitants de leur domicile pour qu'ensuite leur domicile soit brûlé", a ajouté Louis Le Franc.

Des éléments du GIGN, l'unité d'intervention d'élite de la gendarmerie, sont intervenus pour secourir une personne âgée de 81 ans dont la maison était en flammes, a indiqué Gérald Darmanin à l'Assemblée nationale.

Le ministre a précisé que l'octogénaire était le père de Sonia Backès, la présidente de la province Sud de l'archipel et principale figure du camp non-indépendantiste.

"S'il n'a pas été attaqué parce qu'il était mon père, il a au moins été attaqué parce qu'il était Blanc", a affirmé sur BFMTV l'ancienne secrétaire d'Etat, déplorant des "insultes racistes".

"Nous avons été confrontés depuis plus de vingt-quatre heures à un vrai déchaînement de haine, un déferlement de jeunes, manifestement manipulés et d'une violence assez inouïe", a déploré le général Nicolas Matthéos, commandant de la gendarmerie de Nouvelle-Calédonie.

Des brigades de gendarmerie ont été attaquées, selon la même source, évoquant des émeutiers essayant de pénétrer dans les lieux "avec des sabres", des "caillassages" et des "tirs".

«Tristesse»

Dans la crainte d'un enlisement, des éléments du GIGN, du RAID, son équivalent pour la police, quatre escadrons de gendarmes mobiles et deux sections de la CRS 8, une unité spécialisée dans la lutte contre les violences urbaines, ont été mobilisés.

Sept escadrons de gendarmerie sont sur place, contre trois à quatre en temps normal, selon la gendarmerie.

Les pompiers de Nouméa ont dit avoir reçu près de 1 500 appels dans la nuit de lundi à mardi et être intervenus sur environ 200 feux.

Selon une organisation patronale, une trentaine de commerces, usines et entreprises ont été incendiés.

"J'ai un sentiment de tristesse", confie à l'AFP Jean-Franck Jallet, propriétaire d'une entreprise de boucherie sauvée des flammes par les pompiers.

"Nous avons 40 salariés, on est passé à côté de la catastrophe. On a cru que le vivre-ensemble était possible mais ça n'a pas marché, il y a trop de mensonges", a déploré ce patron.

Rassemblements interdits 

Tout rassemblement a été interdit dans le grand Nouméa, a indiqué le haut-commissariat, qui a invité les 270.000 habitants de Nouvelle-Calédonie à rester chez eux.

Le gouvernement calédonien a de son côté annoncé la fermeture des lycées et collèges jusqu'à nouvel ordre. L'aéroport international a été fermé jusqu'à jeudi.

Au cours d'une séance tendue lundi à l'Assemblée nationale, Gérald Darmanin avait appelé les députés à adopter sans modification la réforme, qui ouvre le scrutin provincial aux résidents installés depuis au moins dix ans sur l'île.

Les débats n'ont pas pu être menés à leur terme dans la nuit, en raison d'un grand nombre d'amendements déposés notamment par le groupe La France insoumise (LFI).

La conférence des présidents de l'Assemblée a cependant décidé mardi matin que le vote sur le projet de loi constitutionnelle resterait à l'ordre du jour de la journée.

Après celle du Sénat, l'approbation de l'Assemblée est nécessaire avant de réunir le Parlement en Congrès pour réviser la Constitution, à une date qui reste à fixer.