France: Un projet de loi contre les séparatismes

Rue emblématique de Paris, où des journalistes du journal Charlie Hebdo ont été tués par des jihadistes armés en janvier 2015, (Thomas COEX/AFP)
Rue emblématique de Paris, où des journalistes du journal Charlie Hebdo ont été tués par des jihadistes armés en janvier 2015, (Thomas COEX/AFP)
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Publié le Lundi 31 août 2020

France: Un projet de loi contre les séparatismes

  • « Le séparatisme, c’est de ne plus respecter les lois et les règles de la République au nom d’une religion ou d’une influence extérieure. C’est précisément contre cela que nous nous battons »
  • Six mois plus tard, le projet de loi a pour objet la lutte « contre toutes les formes de séparatisme »

PARIS : Un projet de loi contre les séparatismes religieux sera présenté à la rentrée, en septembre ou en octobre, par le gouvernement français.

Lors de sa première intervention publique sur le sujet, à l’occasion d’un déplacement à Mulhouse le 18 février dernier, le président français, Emmanuel Macron, a indiqué qu’il souhaitait combattre « le séparatisme islamiste ».

« Le séparatisme, c’est de ne plus respecter les lois et les règles de la République au nom d’une religion ou d’une influence extérieure. C’est précisément contre cela que nous nous battons », a-t-on pu lire dans un tweet de l’Élysée. Dans le même temps, Emmanuel Macron précisait, toujours en février: « Faire un plan contre l’islam serait une faute profonde (…) Il ne s’agit pas de stigmatiser quelque religion. »

Ainsi orienté, ce projet de loi est controversé. Il suscite des inquiétudes. Les musulmans de France craignent que ce dispositif gouvernemental ne serve qu’à nourrir les amalgames. « Si ce projet est destiné uniquement à combattre l’islam politique, combat auquel je suis favorable, il serait aussi opportun de lutter contre la haine, le rejet et la stigmatisation souvent portés contre la communauté musulmane. Et par cela, j’inclus les débats publics sur le sujet qui ont lieu jusque dans les médias à large audience », nous confie Ryad, un Franco-Marocain, jeune cadre dans une entreprise privée.

De son côté, le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, lors d’une intervention au Sénat après sa nomination en juillet dernier, a déclaré vouloir piloter un projet de lutte contre « l’islam politique ».

« L’islam politique est un ennemi mortel pour la république, oui il faut combattre toute forme de communautarisme, a-t-il affirmé. Nous devons être intraitables avec ce que le président de la république a qualifié de séparatisme », a-t-il poursuivi. Il a assuré que le gouvernement devra « lutter de toutes [ses] forces contre l’islamisme politique qui attaque la république ».

Sauvegarde des lois de la République

Six mois plus tard, le projet de loi a pour objet la lutte « contre toutes les formes de séparatisme ». Fraîchement nommé à la tête du gouvernement, le Premier ministre, Jean Castex, lors de son discours de politique générale devant le Parlement le mercredi 15 juillet dernier, a confirmé l’élaboration d’une loi contre « les séparatismes ». Dans son allocution, le Premier ministre n’a pas fait référence à l’islam ni aux musulmans. Selon le gouvernement, l’intitulé du projet de loi évoque « les séparatismes », un mot au pluriel, un choix assumé pour lutter contre tous les radicalismes.

Cette loi visera « tout projet organisé en marge de la république, en vue de lui porter atteinte, a précisé Marlène Schiappa, ministre déléguée en charge de la Citoyenneté, sur les ondes de France Info. Je ne veux pas qu’on soit une addition de simili communautés qui ne se parlent pas au mieux et qui se détestent au pire », a-t-elle ajouté. Marlène Schiappa plaide pour la mise en œuvre « des politiques d’intégration pour les primo-arrivants et être également dans la répression ».

De son côté, le ministre de l’Intérieur, a souligné que les cellules départementales de lutte contre l’islamisme et le repli communautaire (Clir) devraient être renforcées pour contrer « les actes qui sapent les principes constitutionnels: la liberté, l’égalité, la fraternité mais aussi la laïcité, l’égalité homme femme, l’indivisibilité de la République et l’unicité du peuple français ».

Ainsi, les préfets verront leurs pouvoirs renforcés dans la gestion des services publics locaux ce qui leur permettra de prévenir «les défaillances républicaines ». La future loi devrait interdire les discriminations à l’encontre des femmes dans l’accès à certains établissements comme les clubs et les commerces. Elle contiendra aussi des mesures pour lutter efficacement contre la pratique de la polygamie.  

Conscient que ce projet de loi suscite une certaine agitation dans la société et l’accroissement de la confusion dont seraient victimes les musulmans de France, le ministre de l’Intérieur tente de rassurer. Avec des propos plus apaisants, il ne manque pas de rappeler qu’il s’adresse à tous les Français « quelle que soit leur couleur de peau et quelle que soit leur religion ».

Pour lever les équivoques, il rappelle ses origines, son deuxième prénom, Moussa, et parle de l’histoire de son grand-père, qui, selon ses propos, « priait Allah et portait l’uniforme de la république ». Gérald Darmanin martèle: « La laïcité n’est pas la négation de la liberté des cultes ».

De son côté, le Conseil français du culte musulman (CFCM) rappelle qu’il faudra lutter avec la même détermination contre toutes les formes de séparatisme. Il ne manque pas de pointer du doigt les personnes qui nourrissent les débats publics de discours assimilés à des « provocations à la haine religieuse et qui continuent malheureusement de s’exprimer librement et de déverser leur haine sur les Français de confession musulmane ».

Interrogé par Arab News en français sur l’utilité de la future loi, Mohamed, un fonctionnaire dans l’administration française souligne que cela peut être défendable à condition d’assurer un traitement d’équité et de justice quant aux nombreux dossiers de discrimination, y compris dans la vie sociale et professionnelle, comme l’accès à l’emploi ou au logement. « La république ne saurait tolérer la politique de l’autruche, celle qui applique une justice sur la base de deux poids, deux mesures », conclut-il.


Rassemblement à Paris en mémoire d'Aboubakar Cissé et contre l'islamophobie

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré. (AFP)
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  • "Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deu
  • Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion

PARIS: Au moins un millier de personnes se sont rassemblées à Paris pour rendre hommage à Aboubakar Cissé, un musulman tué la semaine dernière dans une mosquée du Gard, et dénoncer l'"islamophobie", a constaté une journaliste de l'AFP.

"Le racisme tue, non à la haine contre les musulmans", a-t-on pu lire sur des pancartes tenues par des manifestants réunis à l'appel de SOS Racisme et de la militante associative Assa Traoré.

"Je n'ai pas l'impression que l'on (les musulmans) soit entendu et représenté dans les médias ou au gouvernement. Si cela avait été une victime d'une autre religion, d'un autre nom et d'une autre culture nous, nous aurions été au soutien. Il existe un deux poids deux mesures", commente Yasmina, 52 ans, fonctionnaire, qui n'a pas souhaité donner son nom de famille.

"On arrive encore à dire que ce n'était pas un musulman qui était visé mais on ne va pas se mentir il n'y a que les musulmans en France qui fréquentent les mosquées. À un moment il faut poser les mots comme on le fait à juste titre contre l'antisémitisme, et appeler ça de l'islamophobie", a souligné Myriam, 30 ans, assistante dentaire, qui n'a pas souhaité non plus donner son nom.

Aboubakar Cissé, un jeune Malien, a été lardé de plusieurs dizaines de coups de couteau dans la mosquée de la petite commune gardoise de La Grand-Combe, où il était venu tôt comme chaque semaine pour faire le ménage, avant la prière du vendredi.

Son assassin, un Français d'origine bosnienne de 21 ans, s'est rendu à la police italienne.

Dans la vidéo qu'il avait lui-même réalisée juste après son meurtre, le suspect a insulté la religion de sa victime.

Un juge d'instruction du pôle criminel de Nîmes a été saisi et une information judiciaire ouverte pour meurtre avec préméditation et à raison de la race ou de la religion.

Outre une marche blanche à La Grand-Combe, un rassemblement en mémoire de la victime et contre l'islamophobie a déjà été organisé dimanche à Paris et une manifestation s'est déroulée mardi à Lyon.


Un 1er-Mai syndical qui se veut «festif et combatif», mais sans unité large

Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large. (AFP)
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  • A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation
  • Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien

PARIS: Pour les salaires, pour l'abrogation de la réforme des retraites, ou encore "contre la trumpisation du monde" : les organisations syndicales appellent à battre le pavé jeudi pour le 1er-Mai, mais la mobilisation se tient sans unité large.

Pour la journée internationale des travailleurs, la CGT a recensé quelque 260 rassemblements en France. La centrale de Montreuil a appelé avec la FSU, Solidaires et des organisations de jeunesse (Union étudiante, Unef, Fage, USL) à défiler "contre l'extrême droite, pour la paix, les libertés et la justice sociale".

Si - comme l'an dernier - l'intersyndicale ne sera pas unie pour l'occasion, le numéro un de FO Frédéric Souillot défilera aux côtés de ses homologues, dont la cheffe de file de la CGT Sophie Binet, dans le cortège parisien.

A Paris, la manifestation doit partir à 14H00 de la place d'Italie vers la place de la Nation.

D'autres cortèges s'élanceront dès le matin, comme Marseille et Lille à 10h30. Ce sera aussi le cas dès 10 heures à Bordeaux, Strasbourg ou Dunkerque, où des responsables de gauche, comme Marine Tondelier (Ecologistes), François Ruffin (ex-LFI) ou Boris Vallaud (PS) sont attendus pour protester contre le plan du sidérurgiste ArcelorMittal prévoyant la suppression d'environ 600 postes.

La numéro un de la CFDT Marylise Léon et son homologue de l'Unsa Laurent Escure se retrouvent, eux, dans la matinée dans le centre de Paris pour un rassemblement et une table ronde sur le travail.

Cent jours après l'arrivée de Donald Trump au pouvoir, la CGT, la FSU et Solidaires veulent aussi faire de cette journée un temps fort "contre la trumpisation du monde et l'internationale réactionnaire qui se développe partout", a expliqué à l'AFP Thomas Vacheron, cadre de la CGT.

Des syndicats internationaux (américain, belge, argentin, notamment) ont été conviés au défilé parisien. "Cette démarche unitaire et internationale est un petit pas" pour lutter contre des politiques qui menacent les travailleurs (hausse des droits de douane ou expulsions massives des travailleurs clandestins), selon Murielle Guilbert (Solidaires).

"Le sang et les larmes"

Cette année encore, de source policière, la présence de militants de l'ultra-gauche est jugée très probable à Paris, Nantes ou Lyon, entre autres.

De même source, dans la capitale où un peu plus de 2.000 membres des forces de l'ordre sont attendus, la décision du gouvernement de dissoudre le groupe antifasciste "La Jeune garde" et le collectif "Urgence Palestine" pourrait tendre le climat.

"On ne tolèrera rien", a averti mercredi le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau.

"Il faut relativiser" cette présence de "black blocs" face aux "centaines de milliers de manifestantes et de manifestants" attendues, a nuancé Sophie Binet mercredi, dénonçant des "stratégies malheureusement classiques (...) pour décrédibiliser la mobilisation sociale".

En 2023, les huit principaux syndicats (CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, CFTC, Unsa, Solidaires, FSU) avaient défilé ensemble contre la réforme des retraites, du jamais vu depuis près de 15 ans, avec une très forte mobilisation à la clé (entre 800.000, selon les autorités et 2,3 millions, selon la CGT).

L'an dernier, les chiffres étaient revenus dans des fourchettes plus ordinaires: entre 121.000 personnes, selon les autorités, et 210.000, selon la CGT; et jeudi, la mobilisation devrait attirer sensiblement le même nombre de manifestants (100.000 à 150.000 de source policière).

Ce rendez-vous traditionnel se tient au moment où les syndicats craignent que le gouvernement apporte son soutien à des propositions de loi visant à autoriser certaines professions à faire travailler les salariés le 1er-Mai - seul jour férié et chômé en France -, une journée acquise "dans le sang et dans les larmes des ouvriers", rappelle Sophie Binet.

Le syndicat des "Gilets jaunes" a par ailleurs appelé ses sympathisants à mener une opération secrète sur différents points de rassemblement. "On va montrer aux partenaires du pouvoir ce qu’est un VRAI syndicat", ont-ils écrit dans un appel posté sur le réseau social X.


Macron et von der Leyen inciteront lundi les chercheurs étrangers à choisir l'Europe

Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le président français Emmanuel Macron accueille la présidente de la Commission européenne Ursula Von der Leyen à son arrivée au sommet de la « coalition des volontaires » au palais de l'Élysée, à Paris, le 27 mars 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques »
  • « Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

PARIS : À Paris, le président Emmanuel Macron et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen participeront lundi à une conférence pour vanter les mérites de l'Europe auprès des chercheurs étrangers, notamment américains, confrontés à « un certain nombre de menaces », a annoncé l'Élysée mercredi.

Le président français clôturera cette conférence dans la prestigieuse université de la Sorbonne, « dédiée à la science, à l'attractivité de l'Union européenne, mais aussi plus largement à l'innovation, à la recherche et aux libertés académiques », ont affirmé ses services à la presse.

Le message de cette rencontre sera « très clair » : « Choose Science, Choose Europe ».

Selon son entourage, il s'agit de dire, « dans un moment où les libertés académiques connaissent un certain nombre de reculs ou de menaces, que l'Europe est un continent attractif et que l'innovation, l'attractivité, la science et la recherche sont des éléments essentiels pour la croissance européenne ».

Le chef de l'État aura à cette occasion un entretien avec la présidente de la Commission européenne, qui participera à la conférence. 

Le 18 avril, Emmanuel Macron avait donné rendez-vous le 5 mai aux chercheurs « du monde entier ». Sur le réseau X, il les avait invités à « choisir la France et l'Europe », dans une tentative d'attirer les chercheurs américains menacés par la politique de Donald Trump.

« Ici, en France, la recherche est une priorité, l’innovation est une culture et la science est un horizon sans limite », avait-il assuré.

Parallèlement, le gouvernement a lancé une plateforme baptisée « Choose France for Science », présentée comme « une première étape pour préparer l'accueil des chercheurs internationaux ».

Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier, chercheurs et universités sont dans le collimateur de son gouvernement et redoutent pour leur avenir, entre libertés académiques et de recherche menacées et financements réduits.

De plus en plus de chercheurs ou d'aspirants chercheurs réfléchissent donc à quitter le pays, considéré jusqu'ici comme le paradis de la recherche dans nombre de domaines.

En France, dès début mars, le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Philippe Baptiste, a demandé aux universités de réfléchir à des moyens de les accueillir.