L'oxyde d'éthylène pose à l'Europe la question de sa vulnérabilité aux frontières

Un militant de l'ONG Foodwatch, portant un masque du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker (photo d'archives)(AFP)
Un militant de l'ONG Foodwatch, portant un masque du président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker (photo d'archives)(AFP)
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Publié le Mardi 06 juillet 2021

L'oxyde d'éthylène pose à l'Europe la question de sa vulnérabilité aux frontières

  • Aucune intoxication n'a été relevée, mais sa dangerosité, en cas d'exposition prolongée, n'est pas discutée
  • La liste de produits rappelés est longue: graines de sésame en provenance d'Inde, du Vietnam, de Chine ou de Jordanie

PARIS : Commission Européenne et Etats membres doivent tenter mercredi d'accorder leurs violons au sujet de l'oxyde d'éthylène, un pesticide cancérogène interdit mais détecté depuis septembre 2020 dans certains produits alimentaires importés en Europe comme le sésame, et qui témoigne de la vulnérabilité du continent vis-à-vis de ses partenaires commerciaux.

Où en est l'affaire?

L'étrange équation a été synthétisée par le syndicat français Solidaires CCRF& SCL, première organisation syndicale à la Répression des fraudes française (DGCCRF): "Comment peut-on classer une substance comme dangereuse (...) et donc l'interdire dans l'Union européenne et 'en même temps' tolérer sa présence dans certains produits?"

Depuis plusieurs mois, l'instance dépendante de Bercy s'échine à retirer de la circulation des produits dans lesquels ont été détectés des résidus de ce fongicide gazeux, utilisé comme désinfectant pour éviter la présence de moisissures et réduire les risques de salmonelles dans les produits faisant l'objet d'un transport.

Aucune intoxication n'a été relevée, mais sa dangerosité, en cas d'exposition prolongée, n'est pas discutée. Classé comme "agent cancérogène, mutagène et reprotoxique", il est interdit à ce titre dans l'Union européenne.

Le sésame, plus le seul suspect

La liste de produits rappelés est longue: graines de sésame en provenance d'Inde, du Vietnam, de Chine ou de Jordanie; mais aussi épices (curcuma, poivre, curry), infusions ou compléments alimentaires... Et plus récemment sucre en poudre, glaces et crèmes glacées, en raison de la présence de caroube, un stabilisant provenant notamment de Turquie.

La caroube a ainsi été jugée coupable de la contamination de certains lots de l'agro-industriel américain Cargill, qui confirme à l'AFP avoir "trouvé après analyse des traces de résidus" d'oxyde d'éthylène (ETO) dans "certains lots". Le géant américain assure avoir "bloqué tous (ses) mélanges d'ingrédients potentiellement suspects" dans ses entrepôts "pour des tests complémentaires" et "mis en place un renforcement" des contrôles.

Pourquoi une levée de boucliers?

Dans ce genre de situation, la règle est très claire, expliquait dès novembre 2020 la DGCCRF: "limiter au maximum l'exposition des consommateurs à cette substance".

Or, ont accusé le syndicat Solidaires CCRF& SCL ainsi que l'ONG Foodwatch, les autorités pourraient laisser "s'écouler sur le marché européen des produits" dont la contamination serait "en dessous du seuil détectable", soit 0,02mg/kg pour les produits fabriqués avant le 14 juin 2021.

"Si on incorpore un produit contaminé à une glace par exemple, il va peut-être se retrouver sous le seuil de détection", décrypte Roland Girerd, de Solidaires CCRF & SCL. "Ca ne veut pas dire qu'il a disparu. Et dans la mesure où ces ingrédients sont utilisés dans tout un tas de produits, cela peut vouloir dire qu'on ne va pas les ingérer que dans un seul d'entre eux".

Le but serait que tout produit contenant des matières premières dont on sait qu'elles ont été traitées à l'oxyde d'éthylène ne soit pas mis sur le marché, même si la substance n'est pas détectée dans le produit final.

Quelle réponse européenne?

Dans un courriel envoyé à l'AFP, un responsable de la Commission européenne explique "mener actuellement des discussions avec les Etats membres afin de trouver une approche commune sur ce sujet". Après des premières réunions les 29 et 30 juin, n'ayant selon l'ONG Foodwatch "abouti à aucun consensus", une nouvelle réunion doit se tenir mercredi.

Dans l'intervalle, précise encore ce responsable de la Commission européenne, "les autorités des Etats membres ont la responsabilité de faire respecter la législation européenne" et de procéder "au retrait et au rappel des produits non conformes".

Foodwatch explique à l'AFP souhaiter que "la France maintienne la ligne du strict respect de la réglementation et n'autorise aucune dérogation, même pas en-dessous du seuil quantifiable."

Interrogé fin juin sur le dossier, le ministère de l'Economie avait indiqué que c'était la Commission européenne qui était "décisionnaire sur le sujet".

Quelle capacité de contrôle?

Dans un rapport sénatorial, l'élu Les Républicains de la Haute-Loire Laurent Duplomb jugeait que c'était "la philosophie du système européen, qui repose sur une confiance candide dans ses partenaires commerciaux", qui était remise en cause par l'oxyde d'éthylène.

Il mettait en regard la valeur des denrées alimentaires importées chaque année en France (56 milliards d'euros, dont 19 en provenance de pays hors UE) et le budget alloué aux contrôles, "compris entre 25 millions et 30 millions d'euros". Et estimait que "sans contrôles, les garanties obtenues lors de la signature d'accords de libre-échange sont dès lors ineffectives".

L'association de défense des consommateurs, Consommation Logement Cadre de vie (CLCV) a aussi pointé "des lacunes concernant le contrôle des ingrédients importés de pays tiers". Mais pointe, outre les autorités, les "fabricants européens", "responsables de la conformité des produits qu'ils commercialisent à la réglementation européenne".

 

 


Droit du travail: le gouvernement se donne jusqu'en septembre pour cadrer la négociation

Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
Cette photographie montre l'entrée du ministère du Travail, à Paris, le 17 janvier 2025. (AFP)
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  • Le gouvernement lance des négociations larges sur le droit du travail et l’assurance chômage, avec une lettre de cadrage attendue la semaine prochaine
  • Parmi les mesures envisagées : monétisation de la cinquième semaine de congés, suppression de deux jours fériés, lutte contre les temps partiels subis et assouplissement des CDD et intérim

PARIS: Le ministère du Travail a indiqué vendredi que la feuille de route de la négociation sur le droit du travail, avec notamment la possible monétisation de la cinquième semaine de congés payés, serait envoyée en septembre pour poursuivre "la concertation préalable".

Plaidant qu'"il faut travailler plus", le Premier ministre François Bayrou avait souhaité le 15 juillet que les partenaires sociaux ouvrent des négociations sur une nouvelle réforme de l'assurance chômage et sur le droit du travail pour participer à l'effort budgétaire.

Le ministère doit adresser "dans le courant de la semaine prochaine" la "lettre de cadrage" fixant le cadre de la négociation d'une nouvelle réforme de l'assurance chômage avec des discussions prévues "jusqu’à la mi-novembre", ainsi que le document d'orientation concernant la suppression de deux jours fériés pour une négociation qui doit durer "jusqu’à la fin du mois de septembre".

Mais les autres mesures ayant trait à "la modernisation du marché du travail et la qualité du travail" feront l'objet d'un document d'orientation à la rentrée. Outre la monétisation de la cinquième semaine de congés payés, il s'agit notamment de lutter contre les temps partiels subis, de "fluidifier" le marché du travail avec des assouplissements sur les CDD et les contrats d'intérim ou encore de dispositions sur l’indemnisation des arrêts maladie.

"Un envoi en septembre plutôt que début août répond à une demande de certains des partenaires sociaux de pouvoir poursuivre la concertation préalable à l’envoi de ce document d’orientation", a expliqué le ministère, ajoutant que cela "permettra de continuer à recueillir leurs avis, leurs idées et leurs priorités pour enrichir ce document".

Le calendrier de cette négociation doit s'étendre "sur plusieurs mois, au minimum jusqu’à la fin de l’année 2025", selon la même source.


Paris salue la conférence de New York et poursuit l’initiative avec Riyad

Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
Le président français Emmanuel Macron s'adresse aux médias lors d'une visite des entrepôts du Croissant-Rouge égyptien où est stockée l'aide destinée à Gaza, dans la ville frontalière égyptienne d'El-Arish, en Égypte, le 8 avril 2025. (AFP)
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  • Paris et Riyad poussent pour une reconnaissance collective de l’État palestinien
  • La France appelle à un cessez-le-feu, la levée du blocus et le désarmement du Hamas

PARIS: Sur fond de crise humanitaire d’une cruauté inqualifiable dans la bande de Gaza, le président Emmanuel Macron a annoncé une opération de largage de vivres conduite par la France, avec le soutien de la Jordanie, des Émirats arabes unis et de l’Allemagne.

« Face à l’urgence absolue, nous venons de conduire une opération de largage de vivres à Gaza », a déclaré le chef de l’État sur X, en remerciant les partenaires impliqués et saluant l’engagement des forces armées françaises.

Mais, de son point de vue, ces largages restent insuffisants : « Il faut qu’Israël ouvre un plein accès humanitaire », a-t-il insisté, réitérant l’exigence française d’une levée immédiate du blocus des aides.

Au-delà de la réponse d’urgence, Paris entend porter une initiative diplomatique structurante : la conférence internationale co-présidée à New York par la France et l’Arabie saoudite a marqué un tournant en posant un cadre politique ambitieux.

Cette conférence, tenue en l’absence des États-Unis et d’Israël, a réuni plus de 40 ministres et 120 participants, aboutissant à l’adoption d’un plan d’action en 42 points.

Malgré les réticences et le scepticisme ambiants, elle a permis l’émergence d’une dynamique inédite vers la reconnaissance de l’État palestinien et un processus de paix régional.

Le plan d’action validé à New York constitue désormais un socle politique partagé entre acteurs européens, puissances arabes, Union européenne et Ligue arabe.

Ce texte appelle à un cessez-le-feu immédiat à Gaza, à la libération de tous les otages, à l’acheminement massif de l’aide humanitaire, mais surtout à la mise en œuvre concrète de la solution à deux États.

Il prévoit notamment un processus progressif de désarmement du Hamas, condition indispensable à la stabilisation durable de la région.

Pour la France, ce texte marque une rupture avec l’impasse diplomatique des dernières décennies et propose pour la première fois un mécanisme concerté de démilitarisation et de réintégration de Gaza dans le giron de l’Autorité palestinienne.

Le document évoque même la possibilité de confier les armes du Hamas à une tierce partie sous supervision internationale, afin de garantir qu’elles ne soient plus utilisées.

Ce volet, essentiel pour Israël, est aussi le fruit d’un consensus entre les États arabes partenaires, y compris ceux perçus comme proches du Hamas.

Sur le front politique, Paris se réjouit de l’effet de levier de la conférence : peu après, plusieurs pays — Portugal, Royaume‑Uni, Canada — ont annoncé leur volonté de reconnaître l’État palestinien, à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations unies en septembre.

Une coalition de volontaires est en train de se constituer : quinze États, aux côtés de la Ligue arabe et de l’Union européenne, ont d’ores et déjà signé une déclaration commune en ce sens.

La France espère ensuite entraîner d’autres partenaires européens, notamment l’Allemagne. « Nous continuons à travailler en E3 avec nos partenaires allemands et britanniques », indique une source haut placée.

Si Berlin reste prudent, des signes d’évolution apparaissent dans les récentes déclarations de sa ministre des Affaires étrangères. Paris entend maintenir ces échanges diplomatiques jusqu’à septembre.

Contrairement aux critiques israéliennes et américaines, la France affirme que cette dynamique de reconnaissance ne constitue pas un obstacle à la paix, mais un levier pour la relancer.

Le président Macron estime que cette reconnaissance, inscrite dans un cadre politique exigeant — avec une gouvernance palestinienne réformée et un désarmement du Hamas — peut rebâtir les conditions d’une solution durable.

Les ruptures des négociations avec le Hamas sont antérieures aux annonces de Paris, souligne-t-on à l’Élysée, et ne peuvent donc pas lui être imputées.

La reconnaissance collective envisagée en septembre serait également un signal fort en direction des modérés palestiniens, en particulier l’Autorité palestinienne, qui s’est engagée début juin à respecter une série d’exigences posées par la communauté internationale en matière de gouvernance et de lutte contre la corruption.

Un des apports majeurs de la conférence de New York est l’introduction formelle de la question du désarmement du Hamas dans un cadre diplomatique multilatéral.

Jusqu’ici marginalisée ou qualifiée d’irréaliste, cette exigence est clairement codifiée dans le plan d’action. Des discussions sont en cours, y compris sur l’exil éventuel de certains cadres du mouvement auprès d’États tiers.

Le Hamas n’a pas accepté ces conditions, mais le message politique est clair : son isolement au sein du monde arabe s’accentue et sa marge de manœuvre se rétrécit.

Face à cette dynamique, Israël et l’administration américaine ont haussé le ton, estimant qu’une reconnaissance unilatérale de la Palestine constituerait une « insulte » aux victimes israéliennes du 7 octobre.

Le président américain Donald Trump a même imposé des sanctions ciblées contre certains membres de l’Autorité palestinienne et de l’OLP, en contradiction avec les efforts en cours pour renforcer cette autorité.

La position américaine révèle un décalage croissant avec une partie de la communauté internationale, y compris des alliés traditionnels, en raison de son soutien inconditionnel à Israël, malgré l’ampleur des pertes civiles à Gaza et la persistance de la colonisation en Cisjordanie.

Cet état de fait suscite déjà des interrogations en Europe, où des pays comme la Suède exigent, par exemple, le gel de la partie commerciale de l’accord d’association entre l’Union européenne et Israël.

La France, de son côté, entend poursuivre cette dynamique au-delà de la conférence de New York. Un sommet est prévu les 21 et 22 septembre, juste avant l’Assemblée générale de l’ONU, pour réunir les États prêts à reconnaître collectivement la Palestine et à faire vivre ce nouveau cadre politique.

« Il s’agit d’une coalition inédite, qui repose sur un équilibre entre exigences sécuritaires et reconnaissance des droits politiques du peuple palestinien », souligne-t-on à Paris.

En réaffirmant l’exigence d’un cessez-le-feu immédiat, la levée du blocus humanitaire, la libération des otages, mais aussi le désarmement du Hamas et la mise en place d’un État palestinien souverain, la France, de concert avec l’Arabie saoudite, tente de reconstruire une architecture de paix.


La défiance à l'égard de Macron et de Bayrou au plus haut, selon un sondage Paris, France

Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou et le président français Emmanuel Macron assistent à une réunion avec les élus de Nouvelle-Calédonie et les représentants de l'État au palais de l'Élysée, à Paris, le 12 juillet 2025. (AFP)
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  • La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat
  • Le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi

PARIS: La défiance à l'égard du président Emmanuel Macron s'est accrue en juillet pour atteindre le niveau le plus élevé de son second quinquennat, tandis que le Premier ministre François Bayrou a établi un nouveau record d'impopularité, selon un sondage Elabe pour Les Echos publié jeudi.

Près des trois quarts des Français interrogés (73%) affirment ne pas faire confiance au chef de l'Etat et la moitié (49%) va jusqu'à "ne pas lui faire du tout confiance", le niveau le plus élevé atteint de son second mandat, qu'il n'a dépassé qu'une seule fois depuis son arrivée à l'Elysée en 2017 au plus fort de la crise des gilets jaunes en décembre 2018.

Selon le sondage, seuls 21% des Français font confiance à Emmanuel Macron, soit un point de moins qu'en juin et 6 de perdus par rapport à mars.

Pour François Bayrou, qui a présenté à la mi-juillet les mesures d'économie prévues par le gouvernement dans son projet de budget pour l'année prochaine, la chute se poursuit avec seulement 12% des Français qui disent lui faire confiance, soit un nouveau record d'impopularité (-2 points).

La défiance à l'égard du chef du gouvernement a progressé, avec 80% des Français (+5 points en un mois) qui disent ne pas lui faire confiance et 56% qui affirment ne pas lui faire "du tout" confiance, soit un bond de 9 points depuis juin.

Au classement des personnalités, le RN Jordan Bardella conserve la première place avec 39% des Français (+3 points) qui ont une image positive de lui, devant l'ancien Premier ministre Edouard Philippe (37%) et Marine Le Pen (35%).

A gauche, le mieux classé est l'ancien président François Hollande qui s'installe en huitième position grâce à un bond de 6 points en un mois.

Sondage réalisé par internet les 29 et 30 juillet auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, selon la méthode des quotas. Marge d'erreur entre 1,4 et 3,1 points.