En Afghanistan, les ONG s'activent en coulisses à l'orée d'une possible «catastrophe humanitaire»

Des enfants afghans brûlent des déchets plastiques pour tenter de se réchauffer à Kaboul, le 16 janvier 2019. (Photo d'archives, AFP / PHOTOESSAY)
Des enfants afghans brûlent des déchets plastiques pour tenter de se réchauffer à Kaboul, le 16 janvier 2019. (Photo d'archives, AFP / PHOTOESSAY)
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Publié le Samedi 04 septembre 2021

En Afghanistan, les ONG s'activent en coulisses à l'orée d'une possible «catastrophe humanitaire»

  • Sécheresse, Covid-19, afflux de blessés dans les hôpitaux, centaines de milliers de déplacés : tous les voyants sont au rouge dans le pays, l'un des plus pauvres du monde
  • Au total, 18 millions de personnes se trouvent déjà dans une situation humanitaire désastreuse en Afghanistan et ce nombre pourrait prochainement doubler, selon l'ONU

KABOUL : A l'orée d'une potentielle "catastrophe humanitaire", les organisations humanitaires négocient en coulisses avec le nouveau régime taliban pour maintenir leurs opérations en Afghanistan, sur fond d'incertitudes financières et économiques.


Sécheresse, Covid-19, afflux de blessés dans les hôpitaux, centaines de milliers de déplacés : tous les voyants sont au rouge dans le pays, l'un des plus pauvres du monde, dont l'économie, ravagée par quatre décennies de guerre, dépend largement d'une aide internationale quasiment suspendue. 


Au total, 18 millions de personnes se trouvent déjà dans une situation humanitaire désastreuse en Afghanistan et ce nombre pourrait prochainement doubler, selon l'ONU. La population afghane est estimée à 35 à 40 millions d'habitants.  


Mardi, le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a tiré la sonnette d'alarme en mettant en garde contre "une catastrophe humanitaire" et "la menace d'un effondrement total des services de base".


Sur le terrain, l'heure est à l'incertitude pour les ONG, qui tentent d'obtenir des garanties sur la continuité de leurs programmes.


"Nos équipes sur le terrain ont déjà engagé des discussions avec les talibans dans de nombreuses provinces", indique Michelle Delaney, porte-parole du Conseil norvégien pour les  réfugiés (NRC). "On nous a demandé à chaque fois de continuer à faire notre travail".

Négociations

D'autres ONG ont confirmé être en discussion avec les talibans afin de poursuivre leurs opérations ou avoir reçu des garanties de sécurité pour poursuivre leurs programmes existants.


En 2019, les talibans avaient suspendu l'autorisation de travailler donnée à l'Organisation mondiale de la santé (OMS) et au Comité international de la Croix rouge (CICR) dans les districts qu'ils contrôlaient, avant de la rétablir. Une sanction déjà infligée au CICR pendant de longs mois en 2018.


Les insurgés d'alors exigeaient notamment des modifications de la campagne de vaccination contre la polio, perçue par certains d'entre eux comme une conspiration occidentale visant à stériliser les enfants musulmans ou à porter atteinte en leur foi en l'islam. L'Afghanistan est le seul pays au monde avec le Pakistan où la poliomyélite reste endémique.


Plusieurs travailleurs humanitaires rappellent aussi que les talibans avaient demandé, plus tôt cette année, de stopper les projets aidant les femmes à gagner en autonomie et empêché l'accès aux territoires qu'ils contrôlaient à leurs collègues femmes. 


"Tout le monde se demande ce qui va se passer", confie Marianne O'Grady, directrice adjointe de CARE Afghanistan. Jusqu'à présent les travaux de l'ONG, qui promeut l'autonomie des femmes, n'ont pas été entravés, précise-t-elle. 


La sécurité des missions se pose également, sur l'un des terrains les plus dangereux pour les travailleurs humanitaires.


Le 3 octobre 2015, en plein combat entre islamistes et armée afghane, un avion américain avait bombardé l'hôpital de Médecins sans frontières (MSF) à Kunduz (nord). Bilan: 42 morts, dont 24 patients et 14 membres de l'ONG.


En juin dernier, 10 démineurs afghans, employés par l'organisation britannique HALO Trust, avaient été tués dans la province de Baghlan (nord) par le groupe jihadiste Etat islamique.

Risque de pénurie

Pas de quoi décourager les ONG dont plusieurs, notamment celles travaillant déjà dans des zones talibanes, assurent n'avoir aucune intention de revoir leur présence à la baisse. 


"Les changements en Afghanistan n'ont pas modifié notre relation avec les talibans et la situation actuelle ne change pas notre façon d'agir", assure Florian Seriex, porte-parole du CICR.


D'autres humanitaires étrangers, qui ont quitté le pays fin août, expriment pour leur part le souhait d'y retourner. 


Le temps presse et le pays pourrait être confronté à une pénurie de fournitures médicales dans les mois à venir, prévient le représentant de MSF en Afghanistan, Filipe Ribeiro. 


D'autant que les mesures prises contre le nouveau coronavirus laissent à désirer : à peine 1% de la population afghane avait été totalement vaccinée contre le Covid-19 le mois dernier, selon les données recueillies par l'AFP.


Le gel des réserves nationales afghanes, détenues à l'étranger, et celui de l'aide internationale font enfin planer une menace sur la poursuite des opérations humanitaires à moyen, si ce n'est à court terme.


"La question qui se pose à nous tous, c'est de savoir quel va être l'avenir de l'aide humanitaire dans ce pays", s'inquiète Marianne O'Grady de CARE.

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Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.


Ouragan Melissa: près de 50 morts dans les Caraïbes, l'aide afflue

Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
Un homme passe devant les débris d'une maison endommagée après le passage de l'ouragan Melissa dans le village de Boca de Dos Rios, province de Santiago de Cuba, Cuba, le 30 octobre 2025. (AFP)
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  • L’ouragan Melissa, le plus puissant à frapper la Jamaïque en près de 90 ans, a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque, laissant derrière lui des destructions massives et des centaines de milliers de sinistrés
  • L’aide internationale afflue vers les Caraïbes, avec des secours venus des États-Unis, du Venezuela, de la France et du Royaume-Uni, alors que les experts rappellent le rôle du réchauffement climatique dans l’intensification de ces catastrophes

CUBA: L'aide internationale afflue vendredi vers les Caraïbes dévastées par le passage de l'ouragan Melissa qui a fait près de 50 morts en Haïti et en Jamaïque.

Habitations en ruines, quartiers inondés et communications coupées... L'heure est à l'évaluation des dégâts causés par Melissa qui devrait désormais faiblir au dessus dans l'Atlantique nord après avoir passé les Bermudes.

Selon le Centre national américain des ouragans (NHC), les inondations devraient s'atténuer aux Bahamas, mais les crues pourraient demeurer à un niveau élevé à Cuba, en Jamaïque, en Haïti et en République dominicaine voisine.

Rendu plus destructeur par le réchauffement climatique, l'ouragan a été le plus puissant à toucher terre en 90 ans lorsqu'il a frappé la Jamaïque mardi en catégorie 5, la plus élevée sur l'échelle Saffir-Simpson, avec des vents d'environ 300 km/h.

"Le bilan confirmé est désormais de 19 morts" dont neuf à l'extrémité ouest de l'île, a déclaré jeudi soir la ministre jamaïcaine de l'Information Dana Morris Dixon, citée par les médias locaux.

De nombreux habitants n'ont toujours pas pu contacter leurs proches, ont expliqué les autorités. L'armée jamaïcaine s'emploie à dégager les routes bloquées, selon le gouvernement.

"Il y a eu une destruction immense, sans précédent, des infrastructures, des propriétés, des routes, des réseaux de communication et d'énergie", a déclaré depuis Kingston Dennis Zulu, coordinateur pour l'ONU dans plusieurs pays des Caraïbes. "Nos évaluations préliminaires montrent que le pays a été dévasté à des niveaux jamais vus auparavant".

- Melissa "nous a tués" -

A Haïti, pas directement touché par l'ouragan mais victime de fortes pluies, au moins 30 personnes, dont dix enfants, sont mortes, et 20 portées disparues, selon le dernier bilan des autorités communiqué jeudi. Vingt-trois de ces décès sont dus à la crue d'une rivière dans le sud-ouest du pays.

A Cuba, les communications téléphoniques et routières restent largement erratiques.

A El Cobre, dans le sud-ouest de l'île communiste, le son des marteaux résonne sous le soleil revenu: ceux dont le toit s'est envolé s'efforcent de réparer avec l'aide d'amis et de voisins, a constaté l'AFP.

Melissa "nous a tués, en nous laissant ainsi dévastés", a déclaré à l'AFP Felicia Correa, qui vit dans le sud de Cuba, près d'El Cobre. "Nous traversions déjà d'énormes difficultés. Maintenant, évidement, notre situation est bien pire."

Quelques 735.000 personnes avaient été évacuées, selon les autorités cubaines.

- Secouristes -

L'aide promise à l'internationale s'achemine dans la zone dévastée.

Les États-Unis ont mobilisé des équipes de secours en République dominicaine, en Jamaïque et aux Bahamas, selon un responsable du département d'État. Des équipes étaient également en route vers Haïti.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a également indiqué que Cuba, ennemi idéologique, est inclus dans le dispositif américain.

Le Venezuela a envoyé 26.000 tonnes d'aide humanitaire à son allié cubain.

Le président du Salvador Nayib Bukele a annoncé sur X envoyer vendredi "trois avions d'aide humanitaire en Jamaïque" avec "plus de 300 secouristes" et "50 tonnes" de produits vitaux.

Kits de première nécessité, unités de traitement de l'eau: la France prévoit de livrer "dans les prochains jours" par voie maritime une cargaison d'aide humanitaire d'urgence en Jamaïque, selon le ministère des Affaires étrangères.

Le Royaume-Uni a débloqué une aide financière d'urgence de 2,5 millions de livres (2,8 millions d'euros) pour les pays touchés.

Le changement climatique causé par les activités humaines a rendu l'ouragan plus puissant et destructeur, selon une étude publiée mardi par des climatologues de l'Imperial College de Londres.

"Chaque désastre climatique est un rappel tragique de l'urgence de limiter chaque fraction de degré de réchauffement, principalement causé par la combustion de quantités excessives de charbon, de pétrole et de gaz", a déclaré Simon Stiell, secrétaire exécutif de l'ONU chargé du changement climatique, alors que la grande conférence climatique des Nations unies COP30 s'ouvre dans quelques jours au Brésil.

Avec le réchauffement de la surface des océans, la fréquence des cyclones (ou ouragans ou typhons), les plus intenses augmente, mais pas leur nombre total, selon le groupe d'experts du climat mandatés par l'ONU, le Giec.