Des droits fondamentaux pour les primates ? Un canton suisse vote dimanche

Un zootechnicien tient un rat de laboratoire à l'Université de Genève, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)
Un zootechnicien tient un rat de laboratoire à l'Université de Genève, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 10 février 2022

Des droits fondamentaux pour les primates ? Un canton suisse vote dimanche

  • Lancée par l'association Sentience basée dans la métropole rhénane, l'initiative populaire demande que les primates non-humains bénéficient des droits à la vie et à l'intégrité physique et mentale
  • Le Tribunal fédéral suisse a jugé en 2020 que l'initiative est valable, au motif qu'elle ne demande pas que les droits fondamentaux applicables aux êtres humains le soient aux animaux

GENÈVE : Les électeurs du canton de Bâle ville, connu pour son zoo et ses groupes pharmaceutiques, ont dû peser une profonde question philosophique pour le scrutin du 13 février: les primates non-humains peuvent-il bénéficier de droits fondamentaux?

150 primates

Lancée par l'association Sentience basée dans la métropole rhénane, l'initiative populaire demande que les primates non-humains bénéficient des droits à la vie et à l'intégrité physique et mentale, afin de pouvoir "se défendre contre les interventions dans leur vie".

Selon cette association, les primates, qui sont environ 150 à Bâle-Ville, "se caractérisent par leur gros cerveau, leurs structures sociales complexes et leur grande capacité élevée à souffrir physiquement et psychologiquement".

Le Tribunal fédéral suisse a jugé en 2020 que l'initiative est valable, au motif qu'elle ne demande pas que les droits fondamentaux applicables aux êtres humains le soient aux animaux, "mais requiert l'introduction de droits spécifiques pour les primates non humains".

Il a en revanche estimé que le texte ne s'appliquerait qu'"aux organes cantonaux et communaux", et non pas directement aux personnes privées.

Un zootechnicien tient une boîte avec des rats de laboratoire à l'Université de Genève, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)
Un zootechnicien tient une boîte avec des rats de laboratoire à l'Université de Genève, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)

L'impact sur les institutions de recherche privées et le zoo de Bâle, qui est organisé sous forme de société anonyme et qui dépend des dons, est encore flou.

Et selon le tribunal, le canton et ses unités - telles que l'université ou les hôpitaux – ainsi que ses communes ne détiennent pas de primates.  

Un bien ou une personne

Ce vote est "plutôt une déclaration d'intention visant à garantir que les primates vivent dans de meilleures conditions", juge Pedro Pozas, directeur en Espagne du "Projet grands singes", un mouvement international qui réclame pour eux un ensemble de droits, dans un entretien à l'AFP.

Mais la portée du texte peut être très "large", estime toutefois Steven Wise, avocat américain spécialisé dans le droit animal.

"Cela donnerait des droits aux primates, qui devront ensuite être défendus devant des tribunaux pour savoir précisément quels sont ces droits", explique-t-il à l'AFP. 

Cecilia

M. Wise se bat depuis des décennies devant des tribunaux américains pour que des chimpanzés soient reconnus comme des personnes. En vain jusqu'à présent.

En Argentine, un tribunal a en revanche accordé en 2017 à une femelle chimpanzé, Cecilia, le droit de ne pas être emprisonnée sans jugement en vertu de l'habeas corpus, une disposition fondamentale du droit anglo-saxon. Il s'agissait du premier chimpanzé au monde à bénéficier de ce droit réservé aux humains.

"On essaie de briser la barrière du discours qui dit que tous les animaux non humains ne sont pas des personnes, mais des biens", souligne M. Wise, comparant ce combat à celui du mouvement afro-américain des droits civiques ou encore au mouvement de libération des femmes.

Ce combat devrait aussi passer par l'ONU, explique M. Pozas, dont l'organisation réclame une "déclaration" onusienne pour les grands singes.

Euthanasie

Bien que l'initiative ne concerne que les grands singes détenus par des organismes publics, le directeur du zoo de Bâle, Olivier Pagan, craint un effet indirect sur les primates en général: "Si l'initiative était adoptée, l'analyse de leur bien-être et de leur sécurité ne relèverait non plus de biologistes, vétérinaires et soignants expérimentés, mais d'un médiateur (...) voire de juristes non qualifiés".

Un chercheur pose avec un moniteur montrant une tumeur dans un laboratoire d'expérimentation animale de l'Université de Genève, le 18 janvier 2022. (Photo, AFP)

Pour le zoo, cela posera problème dès lors qu'un animal souffrira mais qu'il ne sera pas possible de mettre fin à ses souffrances sous couvert du droit à la vie.

Fabia Wyss, vétérinaire du zoo, précise: "Si l'initiative est adoptée et si je décide d'endormir malgré tout l'animal, je me mets hors-la-loi. Mais en laissant souffrir un animal inutilement, je me rends également coupable au sens de la loi sur la protection des animaux."


La BBC doit «se battre» pour défendre son journalisme, dit le DG sortant

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC". (AFP)
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  • Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public
  • Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump

LONDRES: La BBC doit "se battre" pour défendre son journalisme, a déclaré mardi le directeur général sortant de la BBC, Tim Davie, alors que le groupe public britannique est menacé de plainte en diffamation par Donald Trump.

Tim Davie, qui a démissionné dimanche, a reconnu qu'une "erreur" avait été commise dans un documentaire sur le président américain diffusé en octobre 2024, selon ses propos tenus lors d'une visioconférence avec les employés du groupe audiovisuel public, rapportés par la chaîne BBC News.

Le groupe audiovisuel public britannique est dans la tourmente après avoir réalisé, pour ce documentaire diffusé dans son magazine d'information phare "Panorama", un montage trompeur d'un discours de Donald Trump, le 6 janvier 2021, qui donnait l'impression que le président sortant incitait explicitement ses partisans à une action violente contre le Congrès.

"Nous avons fait une erreur, et il y a eu un manquement à nos règles éditoriales", a reconnu Tim Davie, expliquant qu'il avait assumé sa "part de responsabilité" en démissionnant.

Il n'a toutefois pas mentionné directement la menace d'action en justice lancée par Donald Trump, ni la date de son départ effectif, lors de cette visioconférence avec le président de la BBC, Samir Shah.

Au moment où le groupe est très critiqué et accusé de partialité, en particulier par la droite conservatrice, le DG sortant a reconnu que "les temps sont durs pour la BBC".

"Mais nous nous en sortirons", et "nous devons nous battre pour défendre notre journalisme", a-t-il insisté.

"Nous sommes une organisation unique et précieuse, et je vois la liberté de la presse mise à rude épreuve, je vois son instrumentalisation", a-t-il encore ajouté.


Le président allemand demande à son homologue algérien de gracier l'écrivain Boualem Sansal

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs. (AFP)
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  • "Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays"
  • Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...)"

BERLIN: Le président allemand a exhorté lundi son homologue algérien à gracier l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, emprisonné depuis un an en Algérie et au coeur d'une grave crise diplomatique entre Alger et Paris.

Appelant son homologue Abdelmadjid Tebboune à un "geste humanitaire", Frank-Walter Steinmeier propose aussi que Boualem Sansal soit transféré en Allemagne pour "y bénéficier de soins médicaux (...) compte tenu de son âge avancé (...) et de son état de santé fragile".

"Un tel geste serait l'expression d'une attitude humanitaire et d'une vision politique à long terme. Il refléterait ma relation personnelle de longue date avec le président Tebboune et les bonnes relations entre nos deux pays", a estimé le président allemand, dans un communiqué.

La présidence algérienne a confirmé dans son propre communiqué que M. Steinmeier avait demandé à Abdelmadjid Tebboune "d'accomplir un geste humanitaire en graciant l'écrivain Boualem Sansal", une information reprise par la télévision algérienne par ailleurs.

Selon des spécialistes à Alger, le fait que la présidence et la télévision publique reprennent les éléments de langage du président allemand peut être perçu comme un signe positif.

Mais aucune indication n'a été donnée quant au calendrier de la prise de décision par le président algérien.

Dans une longue interview accordée en septembre dernier, le président Abdelmadjid Tebboune avait par ailleurs évoqué la possibilité de se rendre en Allemagne fin 2025 ou début 2026.

Arrêté à Alger le 16 novembre 2024, le romancier et essayiste franco-algérien Boualem Sansal a été condamné en appel en juillet à cinq ans de réclusion pour avoir notamment déclaré que l'Algérie avait hérité sous la colonisation française de territoires appartenant jusque-là au Maroc.

Jeudi, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, avait souligné que la France menait un "dialogue exigeant" avec Alger pour obtenir la libération de Boualem Sansal.

L'affaire s'inscrit dans un contexte d'hostilité entre Paris et Alger, qui sont empêtrés depuis plus d'un an dans une crise diplomatique sans précédent qui s'est traduite par des expulsions de fonctionnaires de part et d'autre, le rappel des ambassadeurs des deux pays et des restrictions sur les porteurs de visas diplomatiques.


La BBC, dans l'oeil du cyclone, sommée de s'expliquer

Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump. (AFP)
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  • La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire
  • La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès

LONDRES: Le président de la BBC, Samir Shah, doit s'expliquer lundi au lendemain de la démission retentissante du directeur général du groupe audiovisuel public britannique et de la patronne de sa chaîne d'information BBC News, après le montage trompeur d'un discours de Donald Trump.

La BBC, institution longtemps chérie des Britanniques mais cible régulière des médias et responsables politiques conservateurs, est dans la tourmente, accusée ces derniers jours d'avoir déformé des propos du président américain dans un documentaire de son magazine d'information phare, "Panorama", diffusé en octobre 2024, une semaine avant la présidentielle américaine.

La BBC est mise en cause pour avoir monté des passages différents d'un discours de Donald Trump datant du 6 janvier 2021, jour de l'assaut du Capitole à Washington, de telle façon qu'il semble inciter ses partisans à marcher vers le siège du Congrès pour se "battre comme des diables".

Or, dans la phrase originale, M. Trump disait: "Nous allons marcher vers le Capitole et nous allons encourager nos courageux sénateurs et représentants et représentantes au Congrès". L'expression "se battre comme des diables" correspondait à un autre passage du discours.

Face à la polémique grandissante, son directeur général, Tim Davie, et la patronne de la chaîne d'information du groupe BBC News, Deborah Turness, ont annoncé dimanche leur démission, qui fait la Une des journaux lundi.

Le président américain a dénoncé les "journalistes corrompus" et "malhonnêtes" de la BBC, sur son réseau Truth Social.

Le président du conseil d'administration du groupe, Samir Shah, doit s'excuser et s'expliquer dans une réponse écrite aux questions de la commission parlementaire sur la culture sur cette affaire, et sur d'autres accusations de partialité sur la couverture de la guerre à Gaza.

"La BBC doit répondre à de graves questions concernant ses normes éditoriales et la manière dont la direction gère les problèmes", a jugé la présidente de la commission, Caroline Dinenage, estimant que le groupe public "se devait d'être exemplaire" face à la montée de la désinformation.

Lundi, la patronne démissionnaire de BBC News a de nouveau assuré qu'il n'y avait "pas de partialité institutionnelle" sur la chaîne, qui a produit le programme mis en accusation.

 

- "Violation des règles" -

 

La classe politique a quasi unanimement critiqué la BBC pour sa gestion de l'affaire, qui tombe d'autant plus mal que le groupe audiovisuel doit renégocier d'ici fin 2027 son nouveau contrat de mission avec le gouvernement.

La cheffe de l'opposition, Kemi Badenoch, a déploré "un catalogue de graves défaillances". Le chef du parti d'extrême droite Reform UK, Nigel Farage, a appelé à "un changement de fond en comble" du groupe public.

La BBC tire une grande part de ses ressources de la redevance annuelle (174,50 livres, soit 198 euros), payée par 22,8 millions de foyers, soit 3,8 milliards de livres.

Samir Shah a dit espérer que le futur directeur général du groupe, dont la nomination pourrait prendre plusieurs mois, "façonnerait positivement" le prochain contrat de mission. la ministre de la Culture, Lisa Nandy, qui a qualifié la situation d'"extrêmement grave", a affirmé que le futur contrat aiderait la BBC à "garantir son rôle" auprès du public.

Le chef du parti libéral démocrate (centriste), Ed Davey, a appelé le Premier ministre Keir Starmer, et la classe politique en général, à défendre la BBC face à Donald Trump et la sphère Maga. "Il est facile de voir pourquoi Trump veut détruire la première source d'information dans le monde. Nous ne pouvons pas le laisser faire", a-t-il prévenu sur la plateforme X.

Le Telegraph a eu connaissance d'une note interne rédigée par l'ancien conseiller indépendant du comité des normes éditoriales de la BBC, Michael Prescott, dans laquelle il suggérait que des erreurs avaient été commises dans le montage. Il affirme que les responsables chargés des normes éditoriales du groupe auprès de qui il a soulevé le problème ont nié toute violation des règles.

En octobre, le régulateur des médias avait épinglé la BBC pour avoir "enfreint les règles de diffusion" à propos d'un reportage à Gaza dans lequel le narrateur principal, un enfant, était le fils d'un haut responsable du mouvement islamiste palestinien Hamas.