Au dernier meeting de Le Pen, le «Tout sauf Macron» comme cri de ralliement

Marine Le Pen et Emmanuel Macron à Montpellier, dans le sud de la France, le 21 avril 2022 (Photo, AFP).
Marine Le Pen et Emmanuel Macron à Montpellier, dans le sud de la France, le 21 avril 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Vendredi 22 avril 2022

Au dernier meeting de Le Pen, le «Tout sauf Macron» comme cri de ralliement

  • Dans un discours très offensif, Marine Le Pen a appellé à un front anti-Macron
  • Emmanuel Macron semble creuser l'écart dans les derniers sondages, qui le créditent de 55,5% à 57,5% des voix

ARRAS: "Macron, c'est l'horreur", "faisons barrage" et "Marine est mûre" pour le pouvoir: le dernier meeting de Marine Le Pen à Arras jeudi a pris des allures de "tout sauf Macron", alors que les sondages donnent un  avantage au président sortant.

Dans un discours très offensif, la candidate d'extrême droite a appellé à "un front anti-Macron", un président qui "n'aime pas les Francais", a-t-elle tonné, en reprochant à son rival sa "condescendance et son arrogance sans limite" lors du débat télévisé de la veille.

"Un président ne devrait pas se tenir comme cela", a-t-elle ironisé.

Chauffés à blanc, certains partisans, drapeaux français en main, ont hurlé des "Macron dehors", "banquier", "voleur" et même un "Macron pendaison", lâché par un militant au fond du hangar d'Artois Expo, où plus de 3.000 personnes étaient réunies et où... Emmanuel Macron avait lui aussi tenu un meeting entre les deux tours il y a cinq ans.

Dans les travées, au milieu des chaises pliantes en velours rouge, beaucoup pestent contre le président sortant, "candidat des riches", et fustigent sa gestion du Covid.

"Macron a menti, alors que c'est une grippe comme une autre. Il nous a enfermés comme des lapins", lance Jean-Marie Depoilly, 66 ans, électeur de Le Pen de père en fille.

Et "il a pris de l'argent aux pauvres pour donner aux riches", attaque encore ce retraité, ancien employé d'un abattoir puis ouvrier dans une usine de verrerie.

Barrage

Laetitia Melin, 33 ans, aide médico-psychologue, suspendue de son poste car pas vaccinée, soutient Marine Le Pen parce qu'elle est contre le pass sanitaire.

Mais si sa championne s'incline, elle a "déjà prévu de quitter la France, peut-être pour l'Espagne". Cette jeune femme de la Somme ne veut "plus avoir affaire à M. Macron". Mais elle "va peut-être attendre les législatives", nuance-t-elle.

Emmanuel Macron semble creuser l'écart dans les derniers sondages, qui le créditent de 55,5% à 57,5% des voix.

Au premier tour de la présidentielle, Arras a été un îlot macroniste dans un département du Pas-de-Calais très favorable à Marine Le Pen, sa terre d'élection en tant que députée.

Dans cette ville préfecture de 40.000 habitants, le président sortant est arrivé en tête avec 29,48% des voix, devant la candidate du Rassemblement national (24,03%) et l'Insoumis Jean-Luc Mélenchon (22,86%). Dans le département, c'est 38,68% pour Le Pen, 24,61% pour Macron.

Dimanche pour "gagner", il faut "la mobilisation des abstentionnistes" et "faire barrage à Macron", martèle le député RN du département Bruno Bilde, qui cite l'électorat "clé" de Jean-Luc Mélenchon.

Doudoune sans manche et piercing discret, Patricia Mallet, femme de ménage de 54 ans, peste contre les jeunes qui ne votent pas. "C'est toujours les mêmes, ils jouent à la console toute la journée".

Fruit mûr

Sebastiao Neto, 23 ans, fait des selfies avec son grand drapeau breton, qui détonne dans l'ambiance nordiste. "J'ai fait 700 kilomètres pour venir. Cette fois Marine est prête comme un fruit mûr" pour gouverner. "Ce n'était pas le cas en 2017", estime cet employé en boulangerie.

Son père est angolais, mais le discours de la candidate RN contre l'immigration convient au jeune homme: "Elle ne veut pas stopper l'immigration mais la structurer. Quand on arrive chez des gens, on doit être plus propre que chez soi, c'est normal".

Dans la matinée, Marine Le Pen a rencontré à Roye (Somme) des transporteurs routiers, se faisant conduire sur quelques mètres dans un camion jaune.

"Faut pas qu’elle abandonne", insiste Kevin Linard, un chauffeur de 31 ans. "Si on a encore cinq ans comme on a vécus là... Ça été une horreur. A la fin du mois, quand on a tout payé, on n’a plus rien".

Dominique Le Moan, jeune femme de 25 ans, a trouvé Marine Le Pen meilleure qu'il y a cinq ans lors du débat télévisé face à Emmanuel Macron mercredi soir. "Elle était calme, sereine, elle n'a pas fait la même erreur".

Il faudrait "qu'elle gagne", insiste-t-elle. Avant d'ajouter, fataliste: "mais on sait qu'elle ne passera pas".


Le plus grand squat de France évacué, des migrants déboussolés

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant. (AFP)
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  • La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des «sas» --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre)
  • Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu

VITRY-SUR-SEINE: "Vous savez, en France, il n'y a pas que Paris. Bordeaux, c'est bien, il fait plus chaud qu'ici!": une employée de l'Office de l'immigration tente de convaincre un migrant évacué du plus grand squat de France, près de Paris, de partir dans le sud-ouest du pays. Sans grand succès.

Dans ce squat de Vitry-sur-Seine (sud de la capitale), une entreprise désaffectée occupée depuis presque trois ans, vivaient jusqu'à peu plusieurs centaines de migrants --jusqu'à 450--. Préparés depuis plusieurs jours par les associations à une évacuation imminente, les 300 personnes toujours présentes ont assisté mercredi, dans le calme, à l'arrivée des forces de l'ordre.

Des hommes seuls en majorité, des femmes et quelques enfants en bas-âge, en situation régulière en France pour beaucoup, sont sortis de cette ancienne entreprise de transport. En portant sacs et valise qui contiennent toutes leurs affaires d'une vie d'errance.

Dans le froid, visage fermé et inquiet, ils sont regroupés dans la cour. Derrière des tables, des personnels des préfectures et de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (Ofii) les orientent et proposent des relogements provisoires.

Agrippés à leurs documents administratifs soigneusement mis sous pochette plastique, les migrants ont à peine quelques minutes pour expliquer leur situation, dans un français parfois approximatif ou un anglais balbutiant.

Sous la surveillance des forces de l'ordre, les files d'attente s'étirent devant ces bureaux à ciel ouvert. A l'exception de celui dédié aux départs en province.

La plupart, demandeurs d'asile, sont fortement incités à rejoindre des "sas" --des structures d'accueil provisoires-- à Bordeaux (sud-ouest) et en Val de Loire (centre). Les cars en partance pour ces destinations attendent devant les grilles mais peinent à se remplir.

«Je veux rester ici»

"Vous voulez aller en région? Il y a plus de place là-bas, c'est dynamique!", explique une employée de l'Ofii à un jeune migrant à l'air dubitatif qui comprend difficilement la proposition.

"Il n'y pas que Paris comme ville en France", insiste-t-elle. Peine perdue, son interlocuteur explique suivre une formation en Ile-de-France. Il est orienté vers la table voisine pour trouver une place dans un "sas" plus proche de Paris.

Abakar, lui aussi réfugié soudanais, 29 ans, était à Nantes (ouest). Il a rejoint la région parisienne pour suivre une formation en logistique. Le jeune homme dit avoir décroché une promesse d'embauche dans un supermarché: "Je veux rester ici, je ne peux pas toujours partir ailleurs".

Depuis plusieurs mois, les associations dénoncent l'évacuation des squats de la région parisienne et campements de rue à un rythme plus soutenu, selon eux, pour faire place nette avant les Jeux olympiques et ses milliers de touristes.

"Il y a des places dans des structures d'accueil près de Paris, mais, clairement, la volonté est de les éloigner de la capitale. Surtout avant les JO", assure Paul Alauzy, représentant de l'ONG Médecins du monde.

Merci Daniel, demandeuse d'asile soudanaise, a confié ses enfants à une association du Val-de-Marne, au sud-est de la capitale. A l'intérieur du squat, explique-t-elle, "il y avait trop de violence". Mais elle ne veut pas quitter l'Ile-de-France. "J'ai peur de ne pas les revoir". Elle est finalement orientée dans un hôtel à Boissy-Saint-Léger, en région parisienne, pour quelques jours.

Assise sur sa valise, Ishia, enceinte de cinq mois, semble perdue. Comme son mari, Gamaral, rencontré il y a quelques années lors d'un long parcours d'exil, elle a fui le Soudan. Ils sont arrivés en France il y a trois semaines.

Ishia est envoyée dans un hôpital. Gamaral, lui, ne "sait pas quoi espérer".


Pour la justice, la Seine-Saint-Denis ne peut être «l'Eldorado des blanchisseurs»

Palais de justice de Bobigny, au nord-est de Paris, le 15 janvier 2024. (AFP)
Palais de justice de Bobigny, au nord-est de Paris, le 15 janvier 2024. (AFP)
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  • Si les montants individuels ne sont pas forcément très élevés, les victimes peuvent se compter en centaines
  • En 2023, le tribunal de Bobigny a saisi pour environ 42 millions d'euros d'avoirs criminels, contre 39 millions d'euros l'année précédente

BOBIGNY: Dans une Seine-Saint-Denis confrontée à une importante criminalité organisée, la justice renforce ses capacités de lutte contre la délinquance financière, un travail d'enquête "très lent, très frustrant mais avec quelques succès", estime la juge d'instruction Claire Thépaut dans un entretien à l'AFP.

Vice-présidente du tribunal de Bobigny en charge des 16 juges d'instruction saisis des affaires les plus complexes, la magistrate de 52 ans supervise le renforcement de cette investigation spécialisée, dans une juridiction davantage rompue à la lutte contre les violences faites aux personnes ou les trafics en tous genres.

D'un premier passage à Bobigny au début des années 2000, Claire Thépaut avait gardé un sentiment d'inachevé. "J'étais partie avec une grande frustration de ne pas avoir instruit comme je l'aurais voulu les gros dossiers de blanchiment car j'étais complètement débordée par mes dossiers de meurtres, trafic de stupéfiants, extorsion et autres", raconte-t-elle, en recevant l'AFP dans son bureau.

Dans ce tribunal notoirement saturé, chaque juge d'instruction doit gérer plus d'une centaine de dossiers en simultané, avec une priorité donnée aux affaires tenues par des délais légaux en raison de personnes en détention provisoire.

Ce qui est plus rarement le cas dans les dossiers "éco-fi", qui s'empoussièrent souvent au bas de la pile.

Pour pallier cette carence, deux cabinets de juges d'instruction ont été créés à l'automne. Désormais, quatre juges travaillent sur les questions économiques et financières, dont deux à plein temps (contre trois juges partagés entre éco-fi et droit commun auparavant).

«Call-center de cocaïne»

"La Seine-Saint-Denis est considérée comme un endroit où l'on peut facilement créer des sociétés bidons et ouvrir des comptes sur lesquels on fait un peu ce qu'on veut pendant un peu trop longtemps à mon goût", décrit Claire Thépaut. "L'idée est d'éviter qu'elle ne soit vue comme l'Eldorado des blanchisseurs".

Dans son bureau défilent des dossiers d'"officines" de blanchiment d'espèces, dont le travail consiste à faire rentrer de manière masquée l'argent sale du travail dissimulé ou des divers trafics dans le système bancaire.

"Quand vous savez qu'un +call-center+ de cocaïne peut générer un chiffre d'affaires de 300 000 euros en espèces par mois, on se doute bien que ces espèces doivent être blanchies d'une manière ou d'une autre et qu'on ne peut pas tout dépenser en location de voitures ou en chambres d'hôtel", détaille la juge.

Les escroqueries en bande organisée (escroquerie à l'encart publicitaire fictif, escroquerie "à l'amour", etc.) sont également fréquentes. Si les montants individuels ne sont pas forcément très élevés, les victimes peuvent se compter en centaines.

Mais dans ce département parmi les plus pauvres et criminogènes de France métropolitaine, la circulation de l'argent sale constitue souvent un angle mort des services de police et de justice.

Travail de bénédictin 

"Une grande partie de nos effectifs de police travaille sur des affaires simples, des affaires de voie publique. Quand on veut faire des enquêtes au long cours, nous avons du mal à trouver des services susceptibles de le faire", déplore Claire Thépaut, signataire d'une récente tribune de 130 magistrats demandant plus de moyens humains et matériels face à la délinquance financière.

Être juge d'instruction sur les dossiers économiques et financiers relève parfois du travail de bénédictin: "on court après les banques pour avoir les documents, notamment à l'étranger, on est obligés d'auditionner de nombreuses personnes pour remonter toutes les sociétés écrans jusqu'aux bénéficiaires, c'est beaucoup plus compliqué".

"On est très lents, par manque de moyens, c'est souvent très frustrant mais on a quelques succès sur des dossiers avec d'énormes préjudices, d'énormes montants blanchis et de belles saisies", estime la magistrate, tenue au secret de l'instruction.

Une des priorités de sa nouvelle section est de "taper au porte-monnaie les délinquants". En 2023, le tribunal de Bobigny a saisi pour environ 42 millions d'euros d'avoirs criminels, contre 39 millions d'euros l'année précédente, selon des chiffres communiqués en début d'année par son procureur Eric Mathais.

Les chefs de juridiction espèrent instaurer à partir de 2025 une chambre correctionnelle spécialisée dans le jugement de dossiers de criminalité organisée et financière.


Cisjordanie: Paris «  condamne avec la plus grande fermeté les actes de violences  »

Deux Palestiniens ont été tués par balles lundi dans le nord de la Cisjordanie occupée après des heurts avec des colons israéliens, a indiqué lundi le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne. (AFP).
Deux Palestiniens ont été tués par balles lundi dans le nord de la Cisjordanie occupée après des heurts avec des colons israéliens, a indiqué lundi le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne. (AFP).
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  • La mort ce week-end d'un adolescent israélien assassiné dans des circonstances inconnues en Cisjordanie occupée a provoqué d'importantes représailles de colons qui ont attaqué des villages
  • La France "condamne le meurtre" de l'adolescent israélien ce week-end "qui ne saurait en aucune manière justifier ces violences", selon le communiqué du ministère

PARIS: La France "condamne avec la plus grande fermeté les actes de violence commis par des colons contre des civils palestiniens en Cisjordanie", et appelle les autorités israéliennes "à traduire sans délai les auteurs de ces violences en justice", indique mardi soir un communiqué du ministère français des Affaires étrangères.

La mort ce week-end d'un adolescent israélien assassiné dans des circonstances inconnues en Cisjordanie occupée a provoqué d'importantes représailles de colons qui ont attaqué des villages, incendié des maisons et des voitures palestiniennes au cours du week-end, tuant au moins deux personnes. En outre, deux Palestiniens ont été tués par balles lundi dans le nord de la Cisjordanie occupée après des heurts avec des colons israéliens, a indiqué lundi le ministère de la Santé de l'Autorité palestinienne.

La France "condamne le meurtre" de l'adolescent israélien ce week-end "qui ne saurait en aucune manière justifier ces violences", selon le communiqué du ministère.