Confinement : Pour la chorégraphe Nacera Belaza, rien ne remplace le lien avec les spectateurs

La chorégraphe et danseuse franco-agérienne Nacera Belaza parle de "l'Onde" au théâtre Joliette de Marseille le 28 octobre 2020 (Christophe Simon / AFP)
La chorégraphe et danseuse franco-agérienne Nacera Belaza parle de "l'Onde" au théâtre Joliette de Marseille le 28 octobre 2020 (Christophe Simon / AFP)
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Publié le Samedi 31 octobre 2020

Confinement : Pour la chorégraphe Nacera Belaza, rien ne remplace le lien avec les spectateurs

  • Sa création "L'Onde" déprogrammée en France pour cause de confinement, la chorégraphe franco-algérienne Nacera Belaza estime qu'internet ne peut remplacer l'expérience sensorielle
  • Au moment des répétitions générales, mercredi, Emmanuel Macron a annoncé un reconfinement, et comme de nombreux artistes, Nacera Belaza et ses danseurs se sont retrouvés face à l'incertitude

MARSEILLE : "Je ne vais pas me rabattre sur le fait de présenter des choses en ligne" : sa création "L'Onde" déprogrammée en France pour cause de confinement, la chorégraphe franco-algérienne Nacera Belaza estime qu'internet ne peut remplacer l'expérience sensorielle liant spectateurs et danseurs dans une salle.

Ce devait être une semaine joyeuse, celle où enfin sa compagnie présenterait ce spectacle en première mondiale dans les rendez-vous d'automne du Festival de Marseille, dans le sud-est de la France.

Au printemps, cette création coproduite avec des institutions belges et françaises devait connaître sa première au Kunstfestival des Arts de Bruxelles. Mais le Covid-19 avait entraîné l'annulation de cette performance.

Au moment des répétitions générales, mercredi, le président français Emmanuel Macron a annoncé un reconfinement, et comme de nombreux artistes, Nacera Belaza et ses danseurs se sont retrouvés face à l'incertitude, aux théâtres et cinémas fermés, aux festivals annulés.

Si elle a pu présenter L'Onde face à une salle pleine à craquer jeudi, juste avant le confinement, la représentation de vendredi n'a pas eu lieu.

"On est dans de drôles d'états qu'on n'avait jamais expérimentés, des états où c'est incertain. En même temps on travaille, on avance sur la pièce sans savoir si elle pourra être présentée dans les prochains mois. Cela crée beaucoup d'incertitude, d'instabilité qui fragilisent énormément, qui ajoutent au processus de création énormément de tensions", confie l'artiste lors d'un entretien avec l'AFP à Marseille.

Pourtant, il en faudrait plus pour décourager Nacera Belaza. Née à Ouamri, dans la région de Medea au sud d'Alger en 1969, elle est arrivée à Reims (est) à l'âge de cinq ans avec ses parents, des immigrés venus "des montagnes" pour travailler en France.

Comme de la calligraphie

La période troublée et les changements entraînés par la pandémie peuvent "faire bouger des habitudes, questionner", lâche cette femme au regard intense.

La danse, elle l'a apprise en autodidacte. Dans sa famille, danser n'était pas vu comme un métier sérieux. Alors Nacera a dansé, répété, créé en secret dans un réfectoire de son collège à Reims, puis dans des locaux improvisés au lycée et à la faculté de lettres.

Jusqu'à créer sa compagnie. Décorée chevalier des arts et des lettres, elle devient une danseuse et chorégraphe reconnue sur les scènes de France et à l'étranger. Avec un désir de mener son chemin, en toute liberté.

"La liberté pour moi, c'est cette capacité de se relier à plus vaste, la nature, l'invisible. Cette composante de l'être nous manque terriblement aujourd'hui. On a réduit l'être à n'être qu'une sorte de contenant, un individu centré sur lui-même, coupé de tout ce qui l'entoure, la nature", explique-t-elle.

Pour "manipuler l'invisible en soi" à travers le corps et la danse, Nacera Belaza a puisé dans les rituels, la spiritualité de mouvements répétitifs comme les derviches.

Elle se souvient de ce groupe traditionnel du sud de l'Algérie qui a réussi à "hypnotiser" un public parisien par un balancement du corps.

"Ils arrivaient à créer cette disponibilité inouïe chez le spectateur qui fait qu'il est prêt à tout voir et à rester jusqu'à l'infini. C'est cet endroit-là qui m'intéresse", dit-elle.

Et pour que le lien se fasse, la scène, la salle est essentielle.

"C'est primordial que les corps des spectateurs et des danseurs soient en présence les uns des autres", insiste-t-elle.

Or au temps de la visio-conférence et du Covid, "on regarde ce qu'il y a en ligne avec les yeux, or qui dit les yeux veut dire qu'on stimule en premier lieu le mental (...) pas du tout la même expérience que dans une salle où tous nos sens sont convoqués".

Avec le mouvement répétitif, qui crée une idée de l'infini, Nacera Belaza, compare son travail à celui d'un artisan, dont chaque pièce serait travaillée à partir des mêmes motifs mais ressortirait différente de ses mains.

Depuis sa pièce "Le Cri", elle se voit comme un calligraphe, "toute une vie pour apprendre le geste parfait".

Et espère pouvoir de nouveau travailler en Algérie - inaccessible en raison de la pandémie - où elle n'a de cesse d'encourager d'autres artistes. (AFP)

 


Hoor al-Qasimi nommée directrice artistique de la Biennale de Sydney

Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
Al-Qasimi a créé la Fondation d’art de Sharjah en 2009 et en est actuellement la présidente et la directrice. (Instagram)
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  • Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre
  • Depuis 2017, Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique

DUBAÏ : La Biennale de Sydney a annoncé cette semaine la nomination de la commissaire d’expositions émiratie Hoor al-Qasimi au poste de directrice artistique de sa 25e édition, qui se tiendra du 7 mars au 8 juin 2026.

Créée en 1973, la Biennale de Sydney est l'une des expositions les plus anciennes du genre et s’affirme en tant que première biennale établie dans la région Asie-Pacifique.

En 2009, Al-Qasimi a créé la Fondation d'art de Sharjah, dont elle est actuellement la présidente et la directrice. Tout au long de sa carrière, elle a acquis une vaste expérience dans la conception de biennales internationales, notamment en tant que commissaire de la deuxième Biennale de Lahore en 2020 et du Pavillon des Émirats arabes unis à la 56e Biennale de Venise en 2015.

Elle a également cocuraté la sixième édition de la Biennale de Sharjah en 2003 et en assure la direction depuis.

Al-Qasimi préside l'Association internationale des biennales ainsi que l'Institut d’Afrique depuis 2017.  Elle a précédemment siégé au conseil d'administration du MoMA PS1 à New York et à celui du Ullens Center for Contemporary Arts (UCCA), à Beijing, entre autres fonctions.

Elle est également directrice artistique de la sixième Triennale d'Aichi, qui se tiendra au Japon en 2025.

 


Cannes: le conflit israélo-palestinien en filigrane

L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
L'actrice française Leila Bekhti porte un badge en forme de pastèque palestinienne alors qu'elle arrive à la projection du film "Furiosa : A Mad Max Saga" lors de la 77e édition du Festival de Cannes à Cannes, dans le sud de la France, le 15 mai 2024. (Photo Valery Hache AFP)
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  • Sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza
  • Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité »

CANNES, France : Un symbole palestinien ou un portrait d'otage: à l'heure où le conflit entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza embrase les campus et les réseaux sociaux, les stars présentes au 77e Festival de Cannes préfèrent afficher un soutien discret.

Ruban jaune accroché à la veste, l'acteur Philippe Torreton a gravi mardi les marches du Festival. Un symbole en soutien aux quelque 250 personnes prises en otage par le Hamas le 7 octobre.

L'actrice Leïla Bekhti, qui a récemment enregistré un message en faveur des enfants de Gaza pour l'Unicef, a arboré mercredi un pin's pastèque, l'un des symboles de la résistance palestinienne.

Des positionnements très discrets quant au conflit israélo-palestinien, au moment où sur TikTok, le hashtag «blockout2024» fait florès et invite les internautes à bloquer les comptes de stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza. Beyoncé et Kim Kardashian figurent parmi les cibles de cette mobilisation propalestinienne et ont déjà perdu des centaines de milliers d'abonnés.

En réponse, des célébrités comme Omar Sy, membre du jury à Cannes, ont mis en ligne en début de semaine un appel au cessez-le-feu sur Instagram.

Sur le tapis rouge cannois, le message le plus fort à propos de ce conflit est venu jusqu'ici d'une survivante de l'attaque du Hamas le 7 octobre, Laura Blajman-Kadar, vêtue d'une robe jaune affichant des portraits d'otages israéliens et une écharpe noire «Bring them home» («Ramenez-les à la maison»).

Vendredi, une projection privée du film-témoignage monté par le gouvernement et l'armée israélienne sur les massacres du 7 octobre, «Bearing Witness», a été envisagée avant d'être annulée «pour raisons de sécurité, ont indiqué à l'AFP ses organisateurs.

Ce film, composé d'extraits des caméras et téléphones des assaillants du Hamas et d'images captées par des victimes et des secouristes, avait été diffusé le 14 novembre à l'Assemblée nationale en France. Des projections privées ont déjà eu lieu en marge de sommets comme Davos, selon les organisateurs.

- Haute surveillance -

Mais point de manifestation politique, ni côté public, ni côté montée des marches. Une discrétion à l'extrême, qui pourrait basculer avec la présentation vendredi à 18H00 de «La belle de Gaza», documentaire dans le milieu très fermé des femmes transgenres palestiniennes réfugiées à Tel-Aviv.

Même si le conflit israélo-palestinien, évoqué à travers la dureté des autorités pour les «clandestines» venues de Cisjordanie sans permis de travail, s'efface totalement dans ce film de Yolande Zauberman, supplanté par un autre type de conflit intime et universel.

Si aucun film palestinien n'est présent en sélection, «Vers un pays inconnu» du réalisateur danois d'origine palestinienne Mahdi Fleifel, suit deux jeunes cousins palestiniens se retrouvant en Grèce, après avoir fui un camp au Liban. Le film est présenté à la Quinzaine des cinéastes.

Au Marché du film, le plus grand au monde, le pavillon du «film arabe» a déroulé une grande banderole appelant à soutenir l'industrie des territoires occupés ou ses cinéastes en exil.

Le seul film israélien présenté cette année est le court-métrage d'Amit Vaknin, étudiante en cinéma à l'Université de Tel-Aviv. «It's no time for pop» s'attache à une jeune femme qui refuse de prendre part à des festivités patriotiques.

Le pavillon israélien a été maintenu, sous très haute surveillance, avec un filtrage sécuritaire drastique à l'entrée.

L'équipe de l'ambassade israélienne a déclaré à l'AFP avoir douté jusqu'au dernier moment du maintien de sa présence, moins d'une semaine après les manifestations monstre lors de l'Eurovision en Suède.

 


Pour sa nouvelle création, Angelin Preljocaj livre son «Requiem(s)»

Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
Le chorégraphe et danseur français Angelin Preljocaj participe à une répétition de sa chorégraphie, le ballet «Le lac des cygnes» du compositeur russe Tchaïkovski, avec les danseurs du «Ballet Preljocaj», au Théâtre de l'Archeveche à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, le 23 juillet 2020. (Clement Mahoudeau AFP)
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  • Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes
  • Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal

AIX-EN-PROVENCE, France : De la tristesse, de la rage parfois mais aussi des moments de joie, le chorégraphe français Angelin Preljocaj présente ce week-end à Aix-en-Provence, en première mondiale, «Requiem(s)», un spectacle autour de toutes les facettes de la mort et du deuil.

«C'est un thème magnifique et puis l'année 2023 était une année assez dure pour moi personnellement. J'ai perdu beaucoup d'amis, mes parents aussi. Je me suis dit que c'était peut-être le moment de faire un requiem», confie M. Preljocaj à l'AFP.

Basé avec son ballet à Aix-en-Provence, dans le sud de la France, au Pavillon noir, le chorégraphe d'origine albanaise est connu notamment pour ses ballets «Le Parc» et «Blanche-Neige», et ses collaborations fréquentes avec des artistes issus de la musique électro comme Air, le DJ Laurent Garnier et les Daft Punk.

Dans la salle du Grand Théâtre de Provence d'Aix, 300 personnes ont assisté à la répétition générale, la veille de la première, et les deux premières dates de «Requiem(s)» étaient annoncées complètes.

Pour ce spectacle, Angelin Preljocaj dit s'être longuement documenté, allant piocher des références entre autres chez le sociologue Émile Durkheim, qui expliquait que les hommes ont fait société quand ils ont commencé à donner une cérémonie pour leurs morts.

Les facettes de ce cérémonial ressortent tout au long du ballet, tantôt langoureux, tantôt très rythmé, parfois complètement frénétique, les danseurs jouant avec les différentes émotions liées au deuil.

«Ce n'est pas toujours triste, il y a beaucoup de joie dans le spectacle aussi, de la rage parfois, de la mélancolie», énumère le chorégraphe.

- De Mozart au métal -

Cette mosaïque d'émotions jaillit aussi de la musique qui accompagne les 19 danseurs, avec des ruptures aussi rapides qu'un claquement de doigts, passant brutalement du +Lacrimosa+ du requiem de Mozart à une chanson de métal.

«Les musiques m'apportaient des nuances d'émotions différentes et j'avais envie de travailler avec ces choses-là, par exemple les cantates de Bach (1685-1750), Ligeti (1923-2006), Mozart (1756-1791)... et du métal. Je me suis beaucoup amusé avec ça», sourit Angelin Preljocaj.

Des décors aux costumes en passant par la lumière, les danseurs se retrouvent plongés dans une bichromie noire et blanche pudique, seulement troublée par quelques très rares touches de rouge.

Après une heure trente de danse, le public a applaudi de longues minutes.

«Un spectacle, c'est comme une photographie qu'on met dans le révélateur; le révélateur c'est le public, et ce soir c'était très très chaleureux», souffle le chorégraphe à l'issue de la générale.

Après les deux dates inaugurales au Grand Théâtre de Provence vendredi et samedi, une tournée à Paris et dans plusieurs autres villes de France, le spectacle reviendra au mois d'octobre à Aix puis sera joué le 4 décembre à Modène (Italie) puis en 2025 à Athènes, Madrid et Fribourg (Suisse).