Nicaragua: Un évêque critique d'Ortega arrêté et assigné à résidence

Des policiers bloquent l'entrée principale de la curie de l'archevêque de Matagalpa, empêchant Mgr Rolando Alvarez de quitter, à Matagalpa, au Nicaragua, le 4 août 2022 (Photo, AFP).
Des policiers bloquent l'entrée principale de la curie de l'archevêque de Matagalpa, empêchant Mgr Rolando Alvarez de quitter, à Matagalpa, au Nicaragua, le 4 août 2022 (Photo, AFP).
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Publié le Samedi 20 août 2022

Nicaragua: Un évêque critique d'Ortega arrêté et assigné à résidence

  • L'évêque Alvarez avait exprimé jeudi sa reconnaissance pour les messages de solidarité reçus de ses fidèles mais aussi du monde entier
  • La police cerne depuis le 4 août l'évêché de Matagalpa, où Mgr Alvarez, critique du gouvernement du président Daniel Ortega, est reclus avec une dizaine de religieux et de laïcs

MANAGUA: L'évêque de Matagalpa, Rolando Alvarez, critique du président nicaraguayen Daniel Ortega arrêté aux premières heures vendredi, a été "assigné à résidence" à Managua, a indiqué la police dans un communiqué.

"Il a pu rencontrer sa famille" ainsi que le cardinal et archevêque de Managua, Leopoldo Brenes qui a relevé que "sa condition physique s'est détériorée" mais que son "esprit et son moral sont forts", selon un communiqué de l'archidiocèse de Managua.

L'archevêque, annonçant que M. Alvarez se trouvait dans une résidence familiale, a plaidé pour que la "raison" et la "compréhension" l'emportent pour trouver une solution à une situation "critique et complexe".

Selon la police, ce placement en résidence surveillée a été justifié en raison des activités "déstabilisantes et provocatrices" de l'évêque.

Le Secrétaire Général de l'Onu s'est dit "très préoccupé par la fermeture sévère de l'espace démocratique et civique au Nicaragua, et par les actions récentes contre les organisations de la société civile, y compris celles de l'Église catholique", selon un porte-parole d'Antonio Guterres.

Il "réitère son appel au gouvernement du Nicaragua pour qu'il assure la protection des droits de l'Homme de tous les citoyens, en particulier les droits universels de réunion pacifique, et aux libertés d'association, de pensée, de conscience et de religion, et qu'il libère toutes les personnes détenues arbitrairement", a-t-il ajouté.

Une assignation également condamnée par le secrétaire de l'Organisation des États américains (OEA), Luis Almagro.

Le Conseil épiscopal d'Amérique latine et des Caraïbes (Celam) avait annoncé sur Twitter qu'à 03H00 du matin (09h00 GMT) "la police nationale est entrée dans l'évêché de notre diocèse de Matagalpa" et "emmené Monseigneur Rolando Alvarez ainsi que huit autres personnes, dont des prêtres et des laïcs, vers une destination inconnue", alertant "la communauté internationale".

Le diocèse de Matagalpa avait lui-même annoncé sur sa page Facebook qu"'en ce moment la police nationale pénètre dans l'évêché. SOS. Urgent".

Des organisations de défense des droits humains ont dénoncé une arrestation "de force".

«Harcèlement»

La police cernait depuis le 4 août l'évêché de Matagalpa. Le prélat, 55 ans, assurait ne pas savoir pourquoi les autorités le poursuivent de leur vindicte et estimait être soumis à "une détention à domicile".

"Nous sommes entre les mains de Dieu", a déclaré Mgr Alvarez durant la messe de jeudi en assurant que Dieu "vainc l'obscurité, l'injustice".

Mercredi, 26 anciens chefs d'État et de gouvernement d'Espagne et d'Amérique latine ont lancé un appel au pape François, jusqu'ici resté silencieux, pour qu'il "prenne fermement la défense du peuple nicaraguayen et de sa liberté religieuse", accusant Daniel Ortega de "dictature primitive".

Le gouvernement a mis la pression sur l'évêque de Matagalpa depuis sa dénonciation de la fermeture par les autorités de cinq radios catholiques de son diocèse. Il a exigé le "respect" de la liberté de culte et l'arrêt du "harcèlement" imposé à l'Église catholique.

Les autorités nicaraguayennes accusent le prélat de vouloir "organiser des groupes violents" et d'inciter "à des actes de haine (...) afin de déstabiliser l'État du Nicaragua".

Selon le Centre nicaraguayen des droits humains (Cenidh), "le gouvernement a durci la répression contre l'Église et ses prêtres jusque dans les coins les plus reculés du Nicaragua".

Le diocèse de Siuna a dénoncé dimanche l'arrestation d'un de ses prêtres. Le parquet a demandé son placement en détention provisoire pour 90 jours.

En juillet, les religieuses de la congrégation des Missionnaires de la Charité, fondée par Mère Teresa, ont dû quitter le Nicaragua, expulsées comme des "délinquantes", s'est indigné le Cenidh.

Les relations entre l'Église catholique et le gouvernement sont tendues depuis 2018 lorsque des manifestants qui réclamaient la démission du président nicaraguayen ont trouvé refuge dans des églises.

Le président Ortega accuse le clergé catholique de complicité de tentative de coup d'État ourdie par Washington. La crise a même mené à l'expulsion en mars du nonce apostolique, Mgr Waldemar Sommertag.

En s'attaquant à l'Église catholique, après avoir fait taire tous ses opposants, Daniel Ortega, réélu en 2021 pour un quatrième mandat consécutif lors d'un scrutin d'où étaient absents tous ses adversaires potentiels de poids, arrêtés ou contraints à l'exil, poursuit sa quête du pouvoir absolu au Nicaragua.


A l'ONU, l'enquêtrice en chef sur Gaza a encore espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés

Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés. (AFP)
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  • Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide"
  • Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger"

GENEVE: Navi Pillay, la présidente de la commission d'enquête indépendante de l'ONU qui a accusé cette semaine Israël de commettre un génocide à Gaza, ne perd pas espoir que les dirigeants israéliens soient un jour jugés.

"La justice est lente", a affirmé l'ancienne juge sud-africaine, dans un entretien à l'AFP.

Mais "comme l'a dit (Nelson) Mandela, cela semble toujours impossible, jusqu'à ce qu'on le fasse. Je considère qu'il n'est donc pas impossible qu'il y ait des arrestations et des procès" à l'avenir, a-t-elle ajouté.

La commission d'enquête, qui ne s'exprime pas au nom de l'ONU, a établi qu'Israël commet un génocide à Gaza depuis le début de la guerre déclenchée par l'attaque sans précédent du Hamas du 7-Octobre.

Selon les enquêteurs, le président israélien, Isaac Herzog, le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, et l'ancien ministre de la Défense, Yoav Gallant, ont "incité à commettre un génocide".

Israël a "rejeté catégoriquement" ce "rapport biaisé et mensonger".

La Cour pénale internationale (CPI) avait déjà émis des mandats d'arrêt contre MM. Netanyahu et Gallant.

Mme Pillay reconnaît que la CPI dépend des Etats pour la mise en œuvre des mandats d'arrêt car elle n'a "ni shérif, ni forces de police".

Mais elle veut y croire, faisant une comparaison : "Je n'aurais jamais pensé que l'apartheid prendrait fin de mon vivant".

"Tellement douloureux" 

Jeune avocate d'origine indienne dans l'Afrique du Sud de l'apartheid, devenue juge et Haute-Commissaire aux droits de l'homme à l'ONU (2008-2014), Mme Pillay, 83 ans, a l'art de traiter des dossiers difficiles.

Sa carrière l'a menée des cours sud-africaines, où elle a défendu les activistes anti-apartheid et obtenu des droits cruciaux pour les prisonniers politiques, au Tribunal pénal international pour le Rwanda, en passant par la CPI.

Sa mission est des plus ardues depuis qu'elle préside, depuis sa création en 2021, la commission chargée par le Conseil des droits de l'homme de l'ONU d'enquêter sur les atteintes aux droits dans les territoires palestiniens et en Israël.

Elle déplore d'avoir été qualifiée d'"antisémite" depuis et dénonce les appels sur les réseaux sociaux de ceux qui réclament que les Etats-Unis la sanctionnent, comme Washington l'a fait pour une rapporteure de l'ONU, des juges de la CPI et des ONG palestiniennes.

Mais le plus dur, pour elle et son équipe, est de visionner les vidéos provenant de Gaza.

"Nous nous inquiétons pour notre personnel. Nous les surmenons et c'est traumatisant ces vidéos", dit-elle, citant "des violences sexuelles contre les femmes" et "les médecins qui sont dénudés par l'armée".

"C'est tellement douloureux" à regarder même si "on ne peut pas comparer notre souffrance à celle de ceux qui l'ont vécue", poursuit-elle.

Alors qu'elle présidait le Tribunal pénal international pour le Rwanda, des vidéos de civils abattus ou torturés l'ont aussi "marqué à vie".

Selon elle, la comparaison entre le Rwanda et Gaza ne s'arrête pas là : "Je vois des similitudes. Ce sont les mêmes méthodes".

Du Rwanda à Gaza 

"Dans le cas du Rwanda, c'était le groupe des Tutsi qui était visé. Ici, tous les éléments de preuve montrent que c'est le groupe palestinien qui est visé", dit-elle.

Elle mentionne aussi les propos de dirigeants israéliens qui "déshumanisent" les Palestiniens en les comparant à des "animaux". Comme lors du génocide rwandais, lorsque les Tutsi étaient "traités de cafards", ce qui revient à dire qu'"il est acceptable de les tuer", dénonce-t-elle.

Mme Pillay a indiqué qu'à l'avenir la commission entendait se pencher aussi sur des crimes supposés commis par d'autres "individus", expliquant qu'une grande partie des preuves a été publiée par les soldats israéliens eux-mêmes sur les réseaux sociaux.

Elle déplore toutefois que, faute de financements, la commission n'ait pas pu encore examiner si certains Etats qui fournissent de l'armement à Israël pouvaient être considérés complices.

Un travail qu'elle laisse à son successeur. Elle quitte la commission le 3 novembre en raison de son âge et de problèmes de santé.

Avant cela, elle doit présenter un dernier rapport devant l'Assemblée générale de l'ONU à New York. "J'ai déjà un visa", confie-t-elle.


Gaza: Bruxelles propose de taxer des biens importés d'Israël dans l'UE et de sanctionner deux ministres

La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.  "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu. "Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas. (AFP)
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  • L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres
  • Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE

BRUXELLES: La Commission européenne a proposé mercredi de renchérir le coût de certaines importations en provenance d'Israël et de sanctionner deux ministres d'extrême droite du gouvernement de Benjamin Netanyahu.

"Je veux être très claire, le but n'est pas de punir Israël. Le but est d'améliorer la situation humanitaire à Gaza", a affirmé lors d'un point presse la cheffe de la diplomatie de l'UE, Kaja Kallas.

Les mesures commerciales devraient, si elles étaient adoptées par les pays de l'UE, renchérir de quelque 227 millions d'euros le coût de certaines importations israéliennes, principalement d'origine agricole.

La Commission européenne a également proposé de sanctionner deux ministres israéliens d'extrême droite, Itamar Ben-Gvir, chargé de la Sécurité nationale, et Bezalel Smotrich chargé des Finances, selon un responsable de l'UE.

L'exécutif européen avait déjà proposé en août 2024 de sanctionner ces deux ministres. Une tentative vaine, faute d'accord au sein des 27 Etats membres. Ces sanctions pour être adoptées requièrent l'unanimité des pays de l'UE.

"Tous les États membres conviennent que la situation à Gaza est intenable. La guerre doit cesser", a toutefois plaidé mercredi Mme Kallas. Ces propositions seront sur la table des représentants des 27 Etats membres dès mercredi.

Les sanctions dans le domaine commercial ne nécessitent que la majorité qualifiée des Etats membres. Mais là encore, un accord sera difficile à obtenir, jugent des diplomates à Bruxelles.

Des mesures beaucoup moins ambitieuses, également présentées par la Commission européenne il y a quelques semaines, n'avaient pas trouvé de majorité suffisante pour être adoptées. Avait notamment fait défaut le soutien de pays comme l’Allemagne ou l'Italie.

Les exportations israéliennes vers l'UE, son premier partenaire commercial, ont atteint l'an dernier 15,9 milliards d'euros.

Seuls 37% de ces importations seraient concernés par ces sanctions, si les 27 devaient donner leur feu vert, essentiellement dans le secteur agro-alimentaire.


Trump s'en prend à des magistrats après l'assassinat de Charlie Kirk

Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
Cette capture d'écran provenant de la diffusion en direct du tribunal de l'Utah montre Tyler Robinson, suspect dans le meurtre du militant politique Charlie Kirk, assistant à une audience à distance depuis sa cellule de prison à Provo, dans l'Utah, le 16 septembre 2025. (AFP)
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  • Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X
  • Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre

WASHINGTON: Le président américain Donald Trump a de nouveau stigmatisé mercredi des magistrats qui l'avaient poursuivi et jugé durant le mandat de Joe Biden, prenant prétexte du récent assassinat de l'influenceur ultraconservateur Charlie Kirk.

Dans le viseur du locataire de la Maison Blanche, sur son réseau Truth, se trouvent deux de ses cibles privilégiées : l'ex-procureur spécial Jack Smith, et le juge Juan Merchan qui avait présidé son procès pour des paiements cachés à une star du X.

Donald Trump reproche à Jack Smith d'avoir ouvert il y a quelques années une enquête sur Turning Point, le mouvement créé par l'influenceur ultraconservateur américain Charlie Kirk, assassiné le 10 septembre.

"Pourquoi le merveilleux Turning Point a-t-il été mis sous ENQUÊTE par le +Dérangé+ Jack Smith et l'administration Biden Corrompue et Incompétente ?", s'interroge Donald Trump dans un message sur Truth.

"Ils ont essayé de forcer Charlie, ainsi que de nombreuses autres personnes et mouvements, à cesser leurs activités. Ils ont instrumentalisé le ministère de la Justice contre les opposants politiques de Joe Biden, y compris MOI!", s'offusque-t-il encore.

Jack Smith, lui-même visé par une enquête administrative depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, avait été nommé procureur spécial en 2022.

Il avait lancé des poursuites fédérales contre Donald Trump, pour tentatives illégales d'inverser les résultats de l'élection de 2020 et rétention de documents classifiés après son départ de la Maison Blanche.

Les poursuites avaient été abandonnées après la réélection de Trump, en vertu de la tradition consistant à ne pas poursuivre un président en exercice. Jack Smith avait ensuite démissionné du ministère de la Justice.

Sans jamais le citer nommément, le président Trump s'en prend également sur le réseau Truth à Juan Merchan, qui a présidé le procès Stormy Daniels. Le président avait été reconnu coupable de 34 chefs d'accusation, pour des paiements cachés de 130.000 dollars à l'ex-star du X.

Donald Trump exprime le souhait que le juge "corrompu" paie "un jour un prix très élevé pour ses actions illégales".

Depuis l'assassinat de Charlie Kirk, le camp républicain redouble de véhémence contre les démocrates et organisations progressistes, accusés de promouvoir la violence politique.

"La gauche radicale a causé des dégâts énormes au pays", a affirmé le président républicain mardi, avant son départ au Royaume-Uni. "Mais nous y remédions".

Selon le Washington Post, un élu républicain du Wisconsin a déposé une proposition de loi visant à bloquer les fonds fédéraux aux organisations employant des personnes "qui tolèrent et célèbrent la violence politique".

Le New York Times précise pour sa part que sont notamment dans le viseur l'Open Society Foundation du milliardaire George Soros ainsi que la Ford Foundation, qui toutes deux financent des organisations de gauche.