Contesté sur les retraites, Macron veut un meilleur partage des superprofits

Le président français Emmanuel Macron est vu à l'écran lors d'une interview télévisée depuis l'Elysée (Photo, AFP).
Le président français Emmanuel Macron est vu à l'écran lors d'une interview télévisée depuis l'Elysée (Photo, AFP).
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Publié le Jeudi 23 mars 2023

Contesté sur les retraites, Macron veut un meilleur partage des superprofits

  • M. Macron compte «demander au gouvernement de travailler sur une contribution exceptionnelle» pour que les travailleurs puissent profiter de cette manne
  • La question de la taxation des superprofits avait divisé le gouvernement à l'été dernier, le ministre de l'Economie y étant opposé

PARIS: Emmanuel Macron a pressé mercredi les entreprises qui dégagent des bénéfices exceptionnels d'en reverser une part plus importante à leurs salariés, sur fond de colère sociale contre la réforme des retraites.

Invité au 13 heures de TF1 et France 2, le président de la République a jugé qu'"il y a quand même un peu un cynisme à l'œuvre, quand on a des grandes entreprises qui font des revenus tellement exceptionnels qu'ils en arrivent à utiliser cet argent pour racheter leurs propres actions".

M. Macron compte "demander au gouvernement de travailler sur une contribution exceptionnelle" pour que "les travailleurs puissent profiter" de cette manne.

Outre le versement de dividendes à leurs actionnaires, de plus en plus d'entreprises choisissent d'utiliser leurs bénéfices pour racheter leurs propres actions et soutenir ainsi leurs cours en Bourse.

Le gouvernement veut "obliger" les entreprises "à distribuer plus d'intéressement, plus de participation, plus de primes défiscalisées", lorsqu'elles rachètent leurs actions, a précisé le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire.

Le ministre a évoqué un possible "doublement" des sommes versées au titre de ces dispositifs dans les entreprises de plus de 5.000 salariés, ajoutant qu'il s'agissait d'une "proposition qui est faite aux partenaires sociaux pour qu'ils négocient sur cette meilleure participation, ce meilleur intéressement ou cette distribution plus large d'actions pour les grandes entreprises qui ont recours à ces actions gratuites".

Des actionnaires gâtés
Les entreprises françaises du CAC 40 ont dégagé en 2022 plus de 142 milliards d'euros de bénéfices grâce aux records du luxe et de l'énergie, bénéficiant de l'inflation et de la crise énergétique -- augurant une année faste pour les actionnaires.

M. Macron a écarté la solution de taxer tous les superprofits, comme "nous l'avons fait sur les énergéticiens" qui reversent à l'État les revenus tirés de leurs ventes au-delà d'un prix plafond de 180 euros le mégawatt-heure (Mwh).

"Il faut trouver la bonne technique", a-t-il jugé, pour que les entreprises qui "sont en train d'acheter leurs actions (...) distribuent davantage à leurs salariés".

La question de la taxation des superprofits avait divisé le gouvernement à l'été dernier, le ministre de l'Économie y étant opposé tandis que la Première ministre Elisabeth Borne s'était montrée plus ouverte.

Pour le président du Medef Geoffroy Roux de Bézieux, "les prochains chantiers (du gouvernement) pour aboutir, devront s'appuyer sur une autre méthode" et " surtout, ne pas dénaturer ce qui a fait l’objet d’un accord entre partenaires sociaux", a-t-il indiqué sur Twitter dans une allusion au récent accord sur le partage de la valeur.

Le président de la Confédération des PME, François Asselin, a lui souligné sur France 2 que "ce n'était pas un sujet vraiment PME".

Les deux principales organisations patronales françaises, tout comme le gouvernement, s'étaient récemment félicités de l'accord sur le partage de la valeur conclu avec les syndicats, qui vise à étendre à toutes les entreprises de 11 salariés et plus les dispositifs d'intéressement, de participation et de primes de partage de la valeur (prime Macron).

En févier, Mme Borne avait annoncé vouloir traduire cet accord dans une loi.

Durant son interview mercredi, M. Macron a dit souhaiter "réengager" un dialogue avec les partenaires sociaux, froissés par le recours au 49-3 pour faire adopter sa très impopulaire réforme des retraites.

Les rachats d'actions ont le vent en poupe en France. En 2022, les entreprises du CAC 40 ont racheté pour 23,7 milliards d'euros d'actions, selon la lettre financière Vernimmen.

TotalEnergies prévoit de débourser 2 milliards de dollars au premier trimestre 2023 pour ces rachats, soit autant que ce que le groupe a versé au titre d'une taxe sur les superprofits dans l'UE et au Royaume-Uni.

Le groupe automobile Stellantis veut y consacrer 1,5 milliard d'euros et verser 4,2 milliards d'euros de dividendes, tout en versant 2 milliards en primes pour ses salariés.

BNP Paribas entend consacrer 5 milliards d'euros à des rachats d'actions, soit l'équivalent de la moitié de son bénéfice record de plus de 10 milliards d'euros en 2022.

Et le géant du luxe LVMH va distribuer 400 millions d'euros à ses quelque 39.000 salariés français, dépenser jusqu'à 1,5 milliard d'euros en rachat d'actions et verser quelque 6 milliards d'euros en dividendes aux actionnaires, dont près de 3 milliards reviennent à la famille du PDG Bernard Arnault.


La France condamne les cyberattaques attribuées au service de renseignement russe

Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde. (Photo, AFP)
Les vols de données et attaques au rançongiciel se sont multipliés ces derniers mois dans le monde. (Photo, AFP)
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  • Depuis 2021, ce mode opératoire d'attaque (MOA) a été utilisé pour cibler ou compromettre une dizaine d'entités françaises, ce qui représente un nombre significatif d'occurrences.
  • De nombreux partenaires européens ont également été visés par APT28 au cours des dernières années.

PARIS :  La France condamne avec la plus grande fermeté le recours par le service de renseignement militaire russe (GRU) au mode opératoire d'attaque APT28, à l'origine de plusieurs cyberattaques contre des intérêts français.

Depuis 2021, ce mode opératoire d'attaque (MOA) a été utilisé pour cibler ou compromettre une dizaine d'entités françaises, ce qui représente un nombre significatif d'occurrences.

Ces entités sont des acteurs de la vie publique française : des services publics, des entreprises privées, ainsi qu’une organisation sportive liée à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024.

Ce mode opératoire a également été utilisé par le GRU dans le sabotage de la chaîne de télévision TV5Monde en 2015, ainsi que dans la tentative de déstabilisation du processus électoral français en 2017.

APT28 est aussi employé pour exercer une pression constante sur les infrastructures ukrainiennes dans le contexte de la guerre d'agression menée par la Russie contre l'Ukraine, notamment lorsqu'il est opéré par l'unité 20728 du GRU.

De nombreux partenaires européens ont également été visés par APT28 au cours des dernières années, ce qui démontre une continuité dans les opérations de cette organisation. À ce titre, l'UE a imposé des sanctions aux personnes et entités responsables des attaques menées à l’aide de ce mode opératoire.

Ces activités déstabilisatrices sont inacceptables de la part d'un membre permanent du Conseil de sécurité des Nations unies. Elles sont par ailleurs contraires aux normes des Nations unies en matière de comportement responsable des États dans le cyberespace, auxquelles la Russie a souscrit.

Aux côtés de ses partenaires, la France est résolue à employer l'ensemble des moyens à sa disposition pour anticiper les comportements malveillants de la Russie dans le cyberespace, les décourager et y réagir le cas échéant, afin de protéger ses intérêts et garantir la sécurité de ses citoyens.

L’Agence nationale de sécurité des systèmes d’information publie aujourd'hui un rapport qui alerte sur la menace liée à APT28, dans le but de prévenir de futures attaques.

 


La cour d'assises de Paris se dit bien compétente pour juger un ex-rebelle salafiste syrien

La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre. (AFP)
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  • Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie
  • La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre

PARIS: La cour d'assises de Paris a rejeté mercredi la demande des avocats d'un ancien rebelle syrien qui voulaient qu'elle se déclare incompétente pour le juger pour complicité de crimes de guerre.

La défense de Majdi Nema, un ancien membre du groupe salafiste syrien Jaysh al-Islam (JAI, Armée de l'islam) arrêté en France en 2020, a contesté mardi, au premier jour du procès, le principe de compétence universelle permettant à la justice française de juger un étranger pour des crimes commis à l'étranger sur des étrangers.

Mes Romain Ruiz et Raphaël Kempf arguaient notamment que la chute du régime de Bachar al-Assad, survenue en décembre 2024, changeait la donne, et appelaient à ce que leur client soit jugé par la justice de transition en Syrie.

La cour d'assises a rejeté cette demande, se disant "régulièrement saisie" et "compétente pour connaître des faits reprochés à Majdi Nema", permettant ainsi au procès de se poursuivre.

Cet homme de 36 ans comparaît pour complicité de crimes de guerre, soupçonné notamment d'avoir aidé à enrôler et à former à l'action armée des mineurs, et pour entente en vue de la préparation de crimes de guerre, des faits pour lesquels il encourt 20 ans de réclusion criminelle.

Il conteste les accusations, affirmant n'avoir eu qu'un "rôle limité" dans JAI, un groupe prônant la charia et qui combattait le régime syrien, qu'il dit avoir quitté en 2016.

Alors qu'une plainte avait été déposée en France contre JAI en 2019, il avait été arrêté en janvier 2020 à Marseille, où il se trouvait pour un séjour d'études de quelques mois. Il avait été mis en examen et écroué par un juge du pôle crimes contre l'humanité du tribunal de Paris.


Proportionnelle: Bayrou consulte mais les avis divergent

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  • Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique
  • François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours

PARIS: François Bayrou entame mercredi avec le Rassemblement national une série de consultations des forces politiques sur la proportionnelle, que lui-même réclame depuis longtemps mais sur laquelle les désaccords restent nombreux.

Le Premier ministre recevra chacun des chefs de partis et des présidents de groupes parlementaires représentés à l'Assemblée nationale, suivant un ordre lié à leur importance numérique.

La cheffe de file des députés RN Marine Le Pen, qui forment le groupe le plus important à l'Assemblée, et le président du parti à la flamme Jordan Bardella seront ainsi reçus en premier à 10H00.

Suivra un entretien jeudi 1er mai à 17H00 avec le président du groupe macroniste et du parti Renaissance Gabriel Attal. Il sera accompagné par le député Pierre Cazeneuve, qui a mené une analyse comparative des différents modes de scrutin.

François Bayrou défend un scrutin à la proportionnelle intégrale, dans tous les départements, pour les élections législatives, alors que depuis l'instauration de la Ve République - à l'exception des législatives de 1986 -, les députés sont élus au scrutin uninominal majoritaire à deux tours.

Le RN réclame lui aussi la proportionnelle, mais avec une prime majoritaire pour la liste arrivée en tête. "La tripolarisation de la vie politique entraîne une absence de majorité", a soutenu mardi Mme Le Pen, qui "n'imagine pas que le Premier ministre (...) puisse reculer sur ce sujet".

"Moins pire" 

En discutant de cette revendication commune avec le RN, François Bayrou espère sans doute faire baisser la tension avec l'extrême droite, qui fait planer la menace d'une motion de censure contre son gouvernement.

Le RN dénonce l'absence de perspectives législatives sur la proportionnelle, sur l'immigration ainsi que sur la feuille de route énergétique (programmation pluriannuelle de l'énergie, PPE). François Bayrou l'a à cet égard ménagé lundi en reportant la date de publication d'un décret sur la PPE.

Mais le Premier ministre n'est pas assuré d'avoir cette fois le soutien des macronistes, traversés par moult "interrogations", selon Pierre Cazeneuve.

En 2018, le président Emmanuel Macron avait souhaité l'instauration d'un système mixte avec 15% des députés élus à la proportionnelle, puis la réforme avait été abandonnée.

Or les députés Renaissance considèrent désormais que le mode de scrutin actuel est "le moins pire", car la "distorsion" entre le nombre de voix et le nombre de députés "n'existe plus" dans l'Assemblée actuelle, et ce changement n'est "pas forcément une priorité" pour les Français au vu du nouveau contexte international, a expliqué M. Cazeneuve lors d'un point presse.

Cumul des mandats 

Gabriel Attal et Pierre Cazeneuve entendent jeudi élargir le débat à la question de "l'efficacité de l'action publique", en reparlant de la réduction du nombre de parlementaires et de la "simplification du millefeuille administratif".

Mais ils jugent "délétère" de proposer la proportionnelle en échange du cumul des mandats, soutenu avec force par François Bayrou.

Le président du parti Horizons Edouard Philippe défend pour sa part le scrutin majoritaire, qui "impose un lien entre un député et les électeurs d'un territoire". Il pourrait soutenir la proportionnelle "si était rétablie la possibilité de cumuler un mandat exécutif local et le mandat parlementaire".

Les indépendants du groupe Liot sont "plutôt largement très défavorables" à réformer le mode de scrutin, selon son président Laurent Panifous.

A droite, Les Républicains (LR) y sont fermement opposés, comme l'a rappelé Laurent Wauquiez.

"La proportionnelle aboutira à ce qu'on va institutionnaliser le chaos politique qu'on connaît en ce moment", a tonné le patron de la droite dimanche, avant de critiquer mardi la "hiérarchie des priorités" du gouvernement dans un pays "qui est ruiné" et "où il y a une telle explosion de l'insécurité et de l'immigration", au vu des "menaces" sur le plan international.

Le gouvernement souhaite pouvoir légiférer à ce sujet "avant la fin de la session parlementaire si le débat est mûr", a précisé mercredi sa porte-parole LR Sophie Primas.

D'autres partis, notamment à gauche, souhaitent une évolution du mode de scrutin.

Mais le PS est divisé. L'ancien président François Hollande est pour, tandis que son Premier secrétaire Olivier Faure est contre à titre personnel.

Le député PS Emmanuel Grégoire a rappelé mardi que "derrière ce mot un peu vague de proportionnelle, se cache une subtilité immense, immense, de déclinaisons pratiques".