L'offensive du gouvernement Biden sur la concurrence peine à produire des résultats

Le président américain Joe Biden prononce un discours lors de la cérémonie d'ouverture du IXe Sommet des Amériques au Microsoft Theater, le 8 juin 2022 à Los Angeles, en Californie. (Photo, Anna Moneymaker/Getty Images/AFP)
Le président américain Joe Biden prononce un discours lors de la cérémonie d'ouverture du IXe Sommet des Amériques au Microsoft Theater, le 8 juin 2022 à Los Angeles, en Californie. (Photo, Anna Moneymaker/Getty Images/AFP)
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Publié le Dimanche 16 juillet 2023

L'offensive du gouvernement Biden sur la concurrence peine à produire des résultats

  • Depuis deux ans que l'avocate Lina Kahn a été nommée à sa tête par le président Biden, la FTC a échoué devant les tribunaux à bloquer une série de fusions ou d'acquisitions
  • La ligne actuelle tend à n'empêcher le rapprochement de deux entreprises que s'il est prouvé qu'il occasionnerait un préjudice manifeste pour les consommateurs

NEW YORK : Décidée à défendre plus activement le droit de la concurrence, quitte à empêcher une série de fusions géantes, l'agence américaine dédiée, la FTC, vient d'essuyer un nouveau revers dans le dossier Microsoft et Activision, tandis que sa stratégie est contestée par l'opposition républicaine.

Une juge fédérale de San Francisco a débouté mardi la Federal Trade Commission (FTC), qui lui demandait de suspendre le rachat de l'éditeur de jeux vidéo Activision par Microsoft annoncé en janvier 2022.

«La FTC n'a pas démontré qu'elle était capable de prouver que cette opération était susceptible d'affaiblir la concurrence dans cette industrie», a écrit Jacqueline Scott Corley, dans sa décision en référé.

L'agence a fait appel --rejeté vendredi-- et peut aussi attendre que l'affaire soit examinée sur le fond mais son action est désormais très mal engagée.

Depuis deux ans que l'avocate Lina Kahn a été nommée à sa tête par le président Biden, la FTC a échoué devant les tribunaux à bloquer une série de fusions ou d'acquisitions, parmi lesquelles le rachat du spécialiste de réalité virtuelle Within par Meta.

«Le bilan n'est pas bon», considère John Lopatka, professeur de droit à l'université Penn State.

La FTC «a une approche offensive vis-à-vis de transactions qui n'auraient pas été contestées si l'on s'en tenait à une approche conventionnelle du droit de la concurrence», dit-il. «Et ces actions ont été, dans l'ensemble, des échecs.»

Sous la houlette de Lina Kahn, le régulateur tente de faire changer la doctrine dominante depuis un demi-siècle en matière de fusions aux Etats-Unis.

La ligne actuelle tend à n'empêcher le rapprochement de deux entreprises que s'il est prouvé qu'il occasionnerait un préjudice manifeste pour les consommateurs, une définition beaucoup plus restreinte que celle en pratique avant les années 1970.

- Bataille perdue? -

Mais le changement voulu par le gouvernement Biden, qui vise à préserver la concurrence autant qu'à protéger directement les consommateurs, ne peut intervenir concrètement que via les tribunaux, et non par la loi, car le Congrès douche presque systématiquement les rares initiatives sur le sujet.

«Les agences (gouvernementales) ne peuvent pas changer les choses à moins de convaincre les tribunaux de les suivre», résume John Lopatka.

«C'est une bataille difficile, qu'elle va probablement perdre», renchérit Keith Hylton, professeur de droit à l'université de Boston, au sujet de Lina Kahn, «parce qu'il lui faudrait des années, bien plus longtemps que la durée de sa présidence.»

Et l'opposition républicaine au Congrès ne fait pas mystère de son hostilité à l'égard de la trentenaire, qui serait vraisemblablement débarquée en cas d'alternance politique.

«Elle essaye de rompre brutalement avec la norme qui a fait le succès de l'Amérique», a clamé jeudi l'élu républicain à la Chambre des représentants Jim Jordan lors de l'audition de Mme Kahn, dont il a qualifié le bilan de «désastre».

Lors de la même audition, son collègue Kevin Kiley, républicain lui aussi, l'a accusée de dilapider l'argent du contribuable à coups de procédures judiciaires hasardeuses.

«Notre mission est de promouvoir la concurrence», a répondu l'intéressée, impassible. «Tout ce qui nous intéresse, c'est que les entreprises se conforment la loi

Les quelques succès majeurs du gouvernement Biden sont venus de procédures intentées par le ministère de la Justice, et non par la FTC, lesquelles ont mené notamment l'éditeur Penguin Random House à renoncer à absorber son rival Simon & Schuster.

Le département de la Justice a aussi poussé les courtiers en assurance Aon et Willis Towers Watson à renoncer à une union avant même que la question ne soit tranchée par un magistrat.

De la même manière, «il est possible que la position de la FTC ait un effet dissuasif, qui ne se voit pas dans les chiffres», avance Keith Hylton.

Pour lui, «si vous rendez une fusion plus coûteuse», en partie à cause de frais d'avocats importants pour triompher des objections du régulateur, «vous en aurez moins».


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".