Début d'exercices militaires conjoints Arménie/Etats-Unis, au grand dam de Moscou

Des militaires arméniens assistent à la cérémonie d'ouverture des exercices conjoints Eagle Partner 2023 arméno-américains au centre de formation de Zar, à l'extérieur d'Ashtarak (Photo, AFP).
Des militaires arméniens assistent à la cérémonie d'ouverture des exercices conjoints Eagle Partner 2023 arméno-américains au centre de formation de Zar, à l'extérieur d'Ashtarak (Photo, AFP).
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Publié le Mardi 12 septembre 2023

Début d'exercices militaires conjoints Arménie/Etats-Unis, au grand dam de Moscou

  • Si la Russie a négocié un cessez-le-feu à l'automne 2020, son influence sur les belligérants est en berne
  • Ces exercices sont vus d'un très mauvais oeil par Moscou, qui a convoqué vendredi l'ambassadeur d'Arménie

EREVAN: L'Arménie et les Etats-Unis ont entamé lundi des exercices militaires conjoints, au moment où ce pays du Caucase ne cache pas sa frustration grandissante vis-à-vis de son traditionnel allié russe, en plein conflit ukrainien.

Selon Erevan, les exercices Eagle Partner 2023, prévus jusqu'au 20 septembre, visent à "augmenter le niveau inter-opérationnel" des forces américaines et arméniennes participant à des opérations de maintien de la paix.

"Nous confirmons que la cérémonie d'ouverture des exercices a débuté", a indiqué lundi après-midi à l'AFP un porte-parole de l'armée américaine pour l'Europe et l'Afrique.

Selon Washington, "environ 85 soldats américains s'entraîneront aux côtés de quelque 175 soldats arméniens" dans les centres de formation Zar et Armavir, situés près d'Erevan.

Ces exercices sont vus d'un très mauvais oeil par Moscou, qui a convoqué vendredi l'ambassadeur d'Arménie en dénonçant des "mesures inamicales". Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, a souligné dimanche que la Russie ne voyait "rien de bon dans les tentatives d'un pays agressif membre de l'Otan de pénétrer dans le Caucase", pré carré de la Russie.

Lundi, le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov a lui indiqué qu'un tel rapprochement entre Erevan et Washington "nécessit(ait) une analyse très, très approfondie", tout en martelant que la Russie souhaitait poursuivre "un dialogue étroit avec la partie arménienne".

En réponse, le porte-parole du département d'Etat Matthew Miller a estimé que "la Russie, qui a envahi deux de ses voisins au cours des années récentes, devrait s'abstenir de donner des leçons aux pays de la région sur leurs arrangements de sécurité".

Il a réitéré le fait qu'il s'agissait d'"exercices de routine qui ne sont pas liés à d'autres évènements".

Frustrés par la Russie 

Mais à Erevan la frustration règne face à l'incapacité de la Russie de soutenir l'Arménie face à l'Azerbaïdjan, et le manque d'engagement des forces de maintien de la paix russes dans le conflit opposant les deux voisins.

Les deux pays rivaux du Caucase se sont livré deux guerres pour le contrôle de l'enclave montagneuse du Nagorny-Karabakh, qu'ils se disputent depuis des décennies. La dernière, en 2020, s'est soldée par une défaite de l'Arménie, qui a dû céder des territoires à l'Azerbaïdjan dans et autour du Nagorny-Karabakh.

Les tensions entre Bakou et Erevan se sont aggravées ces derniers mois, l'Azerbaïdjan bloquant le corridor de Latchine, l'unique route reliant l'Arménie au Nagorny-Karabakh, ce qui a provoqué d'importantes pénuries dans l'enclave peuplée majoritairement d'Arméniens.

La Russie, qui dispose d'un contingent de soldats de la paix sur place, n'a pas contenu la crise et a été accusée d'inaction à de multiples reprises par l'Arménie.

"En plaçant ses espoirs dans les Russes, l'Arménie a perdu, compte tenu de ce qui nous arrive. Alors essayons maintenant avec les Américains", lance à l'AFP Mariam Anahamian, une habitante d'Erevan, 27 ans.

"La Russie n'a pas respecté ses engagements pendant la guerre et a même aggravé notre situation", accuse Arthour Khatchadourian, agent de sécurité de 51 ans.

Aux yeux du Premier ministre arménien, Nikol Pachinian, Moscou est soit "incapable de maintenir le contrôle sur le corridor de Latchine, soit il n'en a pas la volonté".

Dans une diatribe inédite, il a même qualifié d'"erreur stratégique" la dépendance d'Erevan en matière sécuritaire à l'égard de la Russie.

Autre nouveauté pour l'Arménie, l'épouse de M. Pachinian s'est rendue à Kiev la semaine dernière pour participer à une rencontre des conjoints de dirigeants organisée par la femme du président ukrainien Volodymyr Zelensky sur des questions humanitaires.

"Les Arméniens sont frustrés par la Russie, qui n'a pas réussi à les aider pendant la guerre du Karabakh ni à gérer ses conséquences", résume l'analyste indépendant Arkadi Doubnov, ajoutant que Moscou "semble également manquer d'un plan clair, d'une stratégie dans le Caucase".

«Nouvelles alliances»

Enlisée dans sa guerre en Ukraine et isolée sur la scène internationale, "la Russie affaiblie perd rapidement son influence dans son arrière-cour de l'ère soviétique", a-t-il affirmé.

Si la Russie a négocié un cessez-le-feu à l'automne 2020 et déployé ses soldats de la paix au Nagorny-Karabakh, son influence sur les belligérants est en berne.

L'Union européenne et les Etats-Unis se sont ainsi imposés au premier plan de la médiation entre les ennemis jurés du Caucase, même si aucun progrès n'a eu lieu jusqu'ici.

Lundi, Dmitri Peskov a ainsi affirmé que Moscou n'avait reçu "aucun signal officiel" d'Erevan pour sortir de l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC), une alliance militaire chapeautée par la Russie.

L'Azerbaïdjan turcophone, dont les dépenses militaires dépassent l'ensemble du budget de l'Arménie grâce à sa manne pétrolière, est soutenu par son puissant allié turc.

Et "le Kremlin n'a ni les ressources, ni la volonté d'aider l'Arménie, et laisse l'Azerbaïdjan et la Turquie poursuivre leurs objectifs", assure M. Doubnov. Dans ce contexte, "l'Arménie essaie maintenant de forger de nouvelles alliances solides", souligne-t-il.


Guerre à Gaza: la Colombie rompt ses liens diplomatiques avec Israël

Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza. (AFP).
Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza. (AFP).
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  • Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza
  • Israël a immédiatement accusé M. Petro de "récompenser" le mouvement islamiste palestinien Hamas qui a, de son côté, salué l'annonce du dirigeant colombien, la qualifiant de "victoire"

BOGOTA: Le président de la Colombie Gustavo Petro a annoncé mercredi la rupture des liens diplomatiques avec Israël, qualifiant le gouvernement du Premier ministre Benjamin Netanyahu de "génocidaire" dans sa conduite de la guerre à Gaza.

Israël a immédiatement accusé M. Petro de "récompenser" le mouvement islamiste palestinien Hamas qui a, de son côté, salué l'annonce du dirigeant colombien, la qualifiant de "victoire".

M. Petro avait vivement critiqué, à plusieurs reprises, la guerre menée par Israël dans la bande de Gaza après les attaques sans précédent du Hamas dans le sud du territoire israélien le 7 octobre.

"Demain (jeudi), les relations diplomatiques avec l'Etat d'Israël seront rompues (parce qu'il a) un gouvernement, un président génocidaire", a déclaré mercredi le président colombien, lors d'un discours prononcé devant plusieurs milliers de partisans à Bogota à l'occasion du 1er-Mai.

En Israël, le chef du gouvernement est le Premier ministre, Benjamin Netanyahu, tandis que le président, Isaac Herzog, a  un rôle avant tout symbolique.

"On ne peut pas revenir aux époques de génocide, d'extermination d'un peuple entier", a déclaré le président colombien. "Si la Palestine meurt, l'humanité meurt", a-t-il lancé, déclenchant les vivats de la foule.

Le ministre israélien des Affaires étrangères Israël Katz a aussitôt réagi en qualifiant Gustavo Petro d'"antisémite". "Le président colombien avait promis de récompenser les meurtriers et violeurs du Hamas, aujourd'hui il a tenu promesse", a écrit M. Katz sur X.

"Nous apprécions grandement la position du président colombien Gustavo Petro (...) que nous considérons comme une victoire pour les sacrifices de notre peuple et sa cause qui est juste", a déclaré pour sa part dans un communiqué la direction du Hamas, en appelant d'autres pays d'Amérique latine à "rompre" leurs relations avec Israël.

 


Mobilisation en soutien à Gaza: affrontements et interpellations sur les campus américains

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  • A l'université du Texas à Dallas, la police a démantelé mercredi un campement de manifestants et arrêté au moins 17 personnes pour "intrusion criminelle" mercredi, a indiqué l'établissement.
  • Les forces de l'ordre ont également arrêté plusieurs personnes à l'université new-yorkaise de Fordham University et ont évacué un campement installé dans la matinée sur le campus, ont indiqué des responsables

LOS ANGELES: La police a été déployée mercredi sur plusieurs campus américains, où de nouvelles arrestations ont eu lieu, après être intervenue à Los Angeles et New York, théâtres d'une mobilisation étudiante contre la guerre à Gaza qui secoue les Etats-Unis.

A l'université du Texas à Dallas, la police a démantelé mercredi un campement de manifestants et arrêté au moins 17 personnes pour "intrusion criminelle" mercredi, a indiqué l'établissement.

Les forces de l'ordre ont également arrêté plusieurs personnes à l'université new-yorkaise de Fordham University et ont évacué un campement installé dans la matinée sur le campus, ont indiqué des responsables.

Et environ 300 personnes ont été interpellées à New York sur deux sites universitaires, a dit mercredi la police de la ville lors d'une conférence de presse.

Au cours de la nuit de mardi à mercredi, les forces de l'ordre ont délogé manu militari des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de la prestigieuse université Columbia à Manhattan, d'où est partie la mobilisation estudiantine de soutien à Gaza.

"La police s'est montrée brutale et agressive avec eux", a assuré à l'AFP Meghnad Bose, un étudiant de Columbia ayant assisté à la scène.

"Ils ont arrêté des gens au hasard (...) plusieurs étudiants ont été blessés au point qu'ils ont dû être hospitalisés", a dénoncé une coalition de groupes étudiants pro-palestiniens de Columbia dans une publication Instagram.

"Je regrette que nous en soyons arrivés là", a réagi mercredi Minouche Shafik, la présidente de l'université.

Les manifestants se battent "pour une cause importante", mais les récents "actes de destruction" menés par des "étudiants et militants extérieurs" l'ont conduite à recourir aux forces de l'ordre, a-t-elle expliqué, dénonçant par ailleurs "des propos antisémites" proférés lors de ces rassemblements.

D'autres campements avaient également été démantelés tôt mercredi sur les campus de l'Université de l'Arizona à Tucson, et à l'Université de Wisconsin-Madison, respectivement dans le sud-ouest et le nord du pays, selon des médias locaux.


Mobilisation en soutien à Gaza: affrontements et intervention de la police sur le campus de la UCLA à Los Angeles

Des agents de la CHP marchent près d'un campement de partisans des Palestiniens de Gaza, sur le campus de l'UCLA, à Los Angeles, Californie, États-Unis, le 1er mai 2024. (Reuters)
Des agents de la CHP marchent près d'un campement de partisans des Palestiniens de Gaza, sur le campus de l'UCLA, à Los Angeles, Californie, États-Unis, le 1er mai 2024. (Reuters)
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  • Manifestants et contre-manifestants se sont opposés à coups de bâton et se sont lancé des projectiles
  • Quelques heures plus tôt, la police de New York avait délogé des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de l'université Columbia, campus américain d'où est partie la mobilisation estudiantine pro-palestinienne

LOS ANGELES : Des affrontements ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi en marge d'un rassemblement étudiant dénonçant la guerre menée par Israël à Gaza à l'Université UCLA, à Los Angeles, dernier épisode d'un mouvement étudiant qui secoue les Etats-Unis.

Les heurts ont éclaté quand un important groupe de contre-manifestants, pour beaucoup masqués, a attaqué un campement pro-palestinien installé sur une pelouse de l'UCLA, selon un photographe de l'AFP sur place.

Les assaillants ont tenté d'enfoncer une barricade improvisée autour du campement, composée de barrières métalliques et de panneaux de contreplaqué. Manifestants et contre-manifestants se sont ensuite opposés à coups de bâton et se sont lancé des projectiles.

«La violence en cours à l'UCLA est absolument abjecte et inexcusable», a fustigé la maire de Los Angeles, Karen Bass, ajoutant que la police de la ville était déployée sur le campus.

Cette dernière a indiqué avoir été appelée en renfort par la direction après «de nombreux actes de violence commis dans le campement à l'intérieur du campus».

Tôt mercredi, les policiers étaient toujours présents en grand nombre sur le site universitaire.

Quelques heures plus tôt, la police de New York avait délogé des manifestants pro-palestiniens barricadés dans un bâtiment de l'université Columbia, intervenant manu militari sur le campus américain d'où est partie la mobilisation estudiantine pro-palestinienne.

Le campement de tentes installé sur la pelouse du site a été démantelé, a pu constater une journaliste de l'AFP dans la nuit de mardi à mercredi.

Environ 300 personnes ont été interpellées, a indiqué la police new-yorkaise.

Dans le sud-ouest du pays, la police de l'Université de l'Arizona a annoncé mercredi matin avoir utilisé du gaz lacrymogène pour disperser «un rassemblement illégal».

En Caroline du Nord, sur la côte est, la police est intervenue mardi pour évacuer un campement sur un campus de Chapel Hill, arrêtant plusieurs manifestants dans un face-à-face tendu.

- Accord -

Depuis deux semaines, les mobilisations de soutien à Gaza se multiplient à travers les campus américains, de la Californie aux grandes universités du nord-est, en passant par le sud et le centre du pays -- rappelant les manifestations contre la guerre du Vietnam.

Les étudiants appellent les établissements à couper les ponts avec des mécènes ou entreprises liés à Israël, et dénoncent le soutien de Washington à son allié israélien.

Se distinguant ainsi des autres institutions, l'université Brown dans l'Etat de Rhode Island a annoncé mardi avoir trouvé un accord avec les manifestants, prévoyant le démantèlement de leur campement en échange d'un vote de l'université en octobre sur d'éventuels «désinvestissements dans des +sociétés qui rendent possible et profitent du génocide à Gaza+».

A Columbia, les négociations entre direction et groupes étudiants n'avaient pas abouti. «Les événements de la nuit dernière sur le campus ne nous ont pas donné le choix», avait écrit la présidente de l'université, Minouche Shafik, dans une lettre rendue publique demandant à la police de New York d'intervenir sur le campus.

A Los Angeles, le président de l'UCLA Gene Block avait mis en garde avant les heurts de la nuit contre la présence de personnes extérieures à l'université.

Dimanche, des militants pro-palestiniens et pro-israéliens, soutenus par de nombreux manifestants extérieurs au campus, en étaient venus aux mains, avec des bousculades et des insultes.

«Beaucoup de manifestants et de contre-manifestants pratiquent leur militantisme de manière pacifique. Mais d'autres emploient des méthodes franchement choquantes et honteuses», avait écrit M. Block dans un message posté mardi sur le site de l'université.

«Ces incidents ont provoqué, tout particulièrement chez nos étudiants juifs, une profonde anxiété et de la peur», a-t-il ajouté.

- A 6 mois de la présidentielle -

Depuis le début du mouvement, des centaines de personnes - étudiants, enseignants et militants - ont été interpellées, parfois arrêtées et poursuivies en justice dans plusieurs universités du pays.

Les images de policiers anti-émeutes intervenant sur les campus, à la demande des universités, ont fait le tour du monde et on fait vivement réagir le monde politique, à six mois de la présidentielle dans un pays polarisé.

Joe Biden «doit faire quelque chose» contre ces «agitateurs payés», a déclaré mardi soir sur Fox News le candidat républicain Donald Trump. «Il nous faut mettre fin à l'antisémitisme qui gangrène notre pays aujourd'hui», a-t-il ajouté.

«Occuper par la force un bâtiment universitaire est la mauvaise approche» et ne représente «pas un exemple de manifestation pacifique», avait tonné avant l'intervention de la police John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche.