Rétractation de Takieddine: suspension de l'interrogatoire de Sarkozy, reprise mercredi à Paris

L'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine fait un geste alors qu'il arrive à l'office de lutte contre la corruption (OCLCIFF) à Nanterre, le 17 novembre 2016, pour son audition après avoir reconnu avoir livré trois valises remplies d'argent liquide du dirigeant libyen à l'ancien président français Nicolas Sarkozy. (AFP).
L'homme d'affaires franco-libanais Ziad Takieddine fait un geste alors qu'il arrive à l'office de lutte contre la corruption (OCLCIFF) à Nanterre, le 17 novembre 2016, pour son audition après avoir reconnu avoir livré trois valises remplies d'argent liquide du dirigeant libyen à l'ancien président français Nicolas Sarkozy. (AFP).
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Publié le Mardi 03 octobre 2023

Rétractation de Takieddine: suspension de l'interrogatoire de Sarkozy, reprise mercredi à Paris

  • Nicolas Sarkozy a ensuite été entendu «en interrogatoire de première comparution par les magistrats instructeurs dans le cadre de l'information judiciaire ouverte en mai 2021» après la rétractation de Ziad Takieddine
  • L'ex-chef de l'État, qui a contesté toute participation aux faits, est suspecté d'avoir donné son aval ou laissé faire plusieurs personnes qui auraient tenté d'escroquer la justice pour le disculper dans le dossier libyen, qui sera, lui, jugé début 2025

PARIS : Vers une nouvelle mise en cause pour Nicolas Sarkozy ? L'interrogatoire de l'ex-chef de l'Etat par un juge d'instruction à Paris a été suspendu mardi soir pour reprendre mercredi, dans l'enquête sur des manœuvres frauduleuses pour le disculper dans l'affaire du financement libyen de sa campagne présidentielle 2007.

L'interrogatoire de M. Sarkozy, suspendu mardi soir vers 19h30, se poursuivra mercredi, a indiqué une source judiciaire.

Mardi, des journalistes de l'AFP avaient constaté l'arrivée de M. Sarkozy vers 10h00 en voiture, tandis que ses avocats, qui n'ont pas souhaité s'exprimer, étaient venus de leur côté.

Nicolas Sarkozy a ensuite été entendu "en interrogatoire de première comparution par les magistrats instructeurs dans le cadre de l'information judiciaire ouverte en mai 2021" après la rétractation de Ziad Takieddine, selon une source judiciaire.

"Sa convocation porte sur les chefs de recel de subornation, association de malfaiteurs en vue de la préparation d'escroqueries en bande organisée et association de malfaiteurs en vue de la corruption de personnels judiciaires étrangers", a précisé cette source.

En fonction de la teneur de ses déclarations devant le magistrat instructeur et l'appréciation qu'en fera celui-ci, M. Sarkozy pourrait ressortir de cet interrogatoire mis en examen ou sous le statut moins incriminant de témoin assisté, qui lui donne un accès au dossier tout en excluant un procès le concernant.

L'ex-chef de l'État, qui a contesté toute participation aux faits, est suspecté d'avoir donné son aval ou laissé faire plusieurs personnes qui auraient tenté d'escroquer la justice pour le disculper dans le dossier libyen, qui sera, lui, jugé début 2025.

Gravité majeure

Outre M. Sarkozy, la justice soupçonne au moins neuf protagonistes d'avoir participé, à des degrés et moments divers, à cette opération, parmi lesquels la reine des paparazzis Mimi Marchand, l'escroc Noël Dubus ou encore le défunt financier Pierre Reynaud.

Le premier événement qui a attiré l'attention de la justice est la spectaculaire volte-face de l'intermédiaire franco-libanais Ziad Takieddine, dans une interview à Paris Match-BFMTV mi-novembre 2020, puis dans une lettre adressée un mois plus tard aux magistrats instructeurs français.

A ces deux occasions, M. Takieddine avait assuré que la campagne de M. Sarkozy n'avait pas été financée par les Libyens, une déclaration contraire à ses précédentes affirmations dans le dossier.

Pour les enquêteurs, selon un chiffrage récemment établi, au moins 608 000 euros auraient pu être utilisés dans cette opération.

Une partie des protagonistes auraient ensuite, dans le premier semestre 2021, également cherché une hypothétique preuve que le retentissant document libyen, publié dans l'entre-deux-tours de la présidentielle 2012 par Mediapart et évoquant un financement de la campagne 2007 de M. Sarkozy à hauteur de 50 millions d'euros, était un faux.

Ils auraient encore tenté d'obtenir la libération au Liban d'un fils Kadhafi dans l'espoir que la famille du défunt dictateur libyen facilite la mise hors de cause de M. Sarkozy.

Dans cette "affaire d'une gravité majeure", selon les mots du juge d'instruction dans une ordonnance de fin 2021, l'ex-chef de l'Etat a fermement contesté toute participation aux faits incriminés pendant douze heures lors de son audition libre mi-juin, devant les enquêteurs financiers de l'office central contre la corruption (OCLCIFF).

Il a indiqué avoir été mis au courant du souhait de M. Takieddine de changer de version par Mimi Marchand en octobre 2020, un mois avant que l'information ne soit publique.

Mais "aucun élément concret matériel, de téléphonie, ne peut m'incriminer dans cette folie, ni de près, de ni de loin", a assuré M. Sarkozy.

Longuement interrogé sur son agenda et sa téléphonie de la fin 2020 et du début 2021, qui suggèrent des rendez-vous ou conversations à des moments-clés avec des protagonistes du dossier, M. Sarkozy a évoqué quelques "coïncidences" et nié tout contact significatif avec la plupart des mis en cause.

Pour lui, "toute cette petite bande n'a que pour seule préoccupation de se faire mousser les uns par rapport aux autres" en prétendant être en contact avec lui, a encore dit l'ex-président.

L'agenda judiciaire de M. Sarkozy, qui promeut actuellement son dernier livre "Le temps des combats", est très chargé.

Outre le procès du financement libyen, il sera jugé en novembre en appel dans le dossier Bygmalion.

Dans une autre affaire, celle dite "Bismuth", le Conseil constitutionnel a ouvert jeudi la voie à un éventuel nouveau procès pour raisons procédurales.

"Je suis propre", avait assuré début septembre M. Sarkozy, interrogé sur l'ensemble de ces mises en cause judiciaires.


Lille: enquête ouverte après les propos sur internet d'une étudiante gazaouie

L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
L'Institut d'études politiques (IEP) de Sciences Po à Lille. (AFP)
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  • Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie

LILLE: Le parquet de Lille a annoncé jeudi avoir ouvert une enquête pour apologie du terrorisme et apologie de crime contre l'humanité concernant les publications sur les réseaux sociaux d'une étudiante gazaouie, dont Sciences Po Lille a annulé l'inscription mercredi.

"Une enquête a été ouverte pour apologie du terrorisme, apologie de crime contre l'humanité avec utilisation d'un service de communication au public en ligne", a écrit la procureure de la République de Lille, Carole Etienne, à l'AFP.

Des captures d'écran circulant sur les réseaux sociaux montrent qu'un compte, attribué à cette étudiante par des internautes et fermé depuis, a repartagé des messages appelant à tuer des juifs.

Elle a été désinscrite de l'Institut d'études politiques de Lille, où elle devait étudier à partir de septembre, en raison du contenu de certaines de ses publications qui "entre en contradiction frontale avec les valeurs portées par Sciences Po Lille", a indiqué l'établissement mercredi.

"Pourquoi on est passé à travers? Il y a quand même une question, il faut y répondre", a reconnu jeudi sur RMC François-Noël Buffet, ministre auprès du ministre de l'Intérieur.

"Il y aura des poursuites qui seront engagées et sur la base de ces éléments-là, elle est susceptible d'être renvoyée dans son pays, bien évidemment", a-t-il ajouté.

"Administrativement, semble-t-il, je suis très prudent, il n'y avait pas de difficulté particulière, sauf que sur les réseaux sociaux, voilà, on s'en est rendu compte", a-t-il ajouté, précisant que "les services des titres de séjour relèvent du ministère des Affaires étrangères".

Sollicité par l'AFP, Sciences Po Lille a expliqué avoir "accueilli cette étudiante sur proposition du consulat général de France à Jérusalem".

L'incident a fait largement réagir dans la classe politique, jusqu'au gouvernement.

"Une étudiante gazaouie tenant des propos antisémites n'a rien à faire en France", a réagi sur X le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot. Il a indiqué avoir "demandé à ce qu'une enquête interne soit diligentée pour que cela ne puisse en aucun cas se reproduire".

Le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, a souligné sur le même réseau social avoir "demandé de faire fermer ce compte haineux", et a martelé que "les propagandistes du Hamas n'ont rien à faire dans notre pays".


Restitutions coloniales: le gouvernement français annonce un projet de loi

La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
La ministre française de la Culture Rachida Dati (G) et la ministre française des Sports, de la Jeunesse et de la Vie associative Marie Barsacq quittent le Palais présidentiel de l'Élysée à Paris, le 30 juillet 2025, après la réunion hebdomadaire du conseil des ministres. (AFP)
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  • Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation
  • Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises

PARIS: Le gouvernement français a présenté mercredi en conseil des ministres un projet de loi-cadre visant à faciliter la restitution à leur pays d'origine de biens culturels pillés pendant la colonisation.

S'appliquant en priorité aux pays africains mais de "portée géographique universelle", ce texte vise à accélérer le retour dans leur pays d'origine de biens culturels appartenant aux collections nationales françaises.

Ils doivent revenir à des "Etats qui, du fait d'une appropriation illicite, en ont été privés" entre 1815 et 1972, selon le ministère français de la Culture.

Ce projet de loi-cadre crée une dérogation au principe d'inaliénabilité pour les œuvres des collections nationales françaises. Les oeuvres à restituer devront avoir été acquises "dans une situation de vol, de pillage, de cession ou de libéralité obtenue par contrainte ou violence ou d'une personne qui ne pouvait en disposer", a précisé le ministère.

La décision de sortie des collections pour opérer cette restitution ne passera plus par un processus législatif au cas par cas mais pourra intervenir sur seul décret du Conseil d'Etat et après avis, le cas échéant, d'une commission scientifique bilatérale.

Cette commission devra en effet documenter et déterminer, si besoin, le caractère illicite de l'appropriation des oeuvres réclamées à travers un travail qui associerait des experts et historiens français et l'Etat demandeur, selon le ministère.

Concernant la période historique retenue, 1815 correspond à la date d'un règlement des conquêtes napoléoniennes qui est dû à un premier mouvement de restitution d'œuvres à l'échelle européenne. 1972 est celle de l'entrée en application de la convention internationale de l'Unesco protégeant les biens culturels contre le trafic illicite.


Droits de douane: la France déçue de l'accord UE-USA

Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
Le ministre français de l'Économie, des Finances et de la Souveraineté industrielle et numérique, Eric Lombard, s'exprime lors d'une séance de questions au gouvernement à l'Assemblée nationale française, la chambre basse du parlement français, à Paris, le 10 juin 2025. (AFP)
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  • La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir
  • Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission"

PARIS: La France, déçue de l'accord commercial annoncé dimanche entre l'Union européenne (UE) et les Etats-Unis, a plaidé lundi pour que l'Europe se montre plus ferme lors des négociations à venir sur ses modalités d'application.

Le président français Emmanuel Macron n'avait pas réagi lundi. Mais son Premier ministre François Bayrou a évoqué un "jour sombre" pour l'Europe, qui "se résout à la soumission".

Se projetant vers la suite, le ministre de l'Economie Eric Lombard a lui estimé lundi soir que "cet accord n'est pas complet" et que "le travail continue". Car "l'accord n'est pas finalisé et nous veillerons à ce qu'il soit amélioré", a-t-il dit dans une interview à Libération.

"Les discussions doivent se poursuivre pour les produits pharmaceutiques - on comprend que certains génériques seront exemptés -, sur l'acier, sur l'aluminium, sur les produits chimiques, sur les semi-conducteurs et sur les vins et les produits agricoles", précise-t-il.

"Il ne faudrait pas que cet accord soit la fin de l'histoire, auquel cas nous nous serions tout simplement juste affaiblis", avait estimé sur France Inter dès lundi matin le ministre français délégué au Commerce extérieur, Laurent Saint-Martin.

"Maintenant, il va y avoir une négociation technique" et "nous pouvons nous saisir de cette séquence pour nous renforcer", a-t-il ajouté.

Le président américain Donald Trump et la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen ont annoncé dimanche en Ecosse un accord douanier prévoyant que les produits européens exportés aux Etats-Unis soient taxés à 15%.

Avec l'espoir d'éviter une escalade commerciale, l'UE s'est aussi engagée à 750 milliards de dollars d'achats d'énergie - visant notamment à remplacer le gaz russe - et à 600 milliards d'investissements supplémentaires aux Etats-Unis.

A Paris, si on concède que cet accord va apporter de la "stabilité" aux entreprises, on insiste surtout sur son caractère "déséquilibré", selon les termes utilisés par plusieurs membres du gouvernement.

"Notre responsabilité aujourd'hui, c'est de faire en sorte que cet accord, in fine, soit le moins déséquilibré possible", a déclaré sur RTL le ministre de l'Industrie et de l'Energie Marc Ferracci.

- Prochains jours déterminants -

MM. Ferracci et Saint-Martin ont plaidé pour un "rééquilibrage" portant sur les services, en particulier le numérique, en rappelant que si la balance commerciale des Etats-Unis avec l'Europe est déficitaire pour les biens, celle des services est excédentaire.

Concernant les échanges de biens, la France affichait en 2024 un excédent commercial de 16,4 milliards de dollars à l'égard des Etats-Unis selon les Américains, mais les Douanes françaises évoquent pour la même période un déficit de 4,2 milliards d'euros.

Les négociateurs européens devront utiliser "l'ensemble des outils qui sont à leur disposition" et notamment envisager "de limiter l'accès des entreprises américaines aux marchés publics européens", a insisté M. Ferracci.

Du côté des entreprises, Patrick Martin, le président du Medef, première organisation patronale française, a estimé que "si les choses sont bien ce qui nous a été annoncé, ce n'est pas admissible". "Il faut continuer à négocier", selon lui.

La CPME, deuxième organisation patronale, a dit anticiper "des répercussions désastreuses" pour les petites et moyennes entreprises. Et le mouvement des ETI (Meti) a évoqué "des conséquences particulièrement préoccupantes pour les entreprises de taille intermédiaire".

Selon les secteurs, les sentiments sont ambivalents.

"Il y a du soulagement parce que cet accord donne de la visibilité", a déclaré à l'AFP Emmanuel Guichard, délégué général de la Fédération des entreprises de la beauté (FEBEA). Mais "ce n'est pas un bon accord pour nous, tout simplement parce qu'on avait 0% de droits de douane en janvier vers les Etats-Unis et maintenant on va être à 15%."

"La catastrophe est évitée", en référence aux 30% de droits de douane évoqué par M. Trump, "mais les prochains jours seront déterminants pour le secteur français des vins et spiritueux", déclare dans un communiqué la Fédération des Exportateurs de Vins et Spiritueux (FEVS), à laquelle se joint l’ensemble des interprofessions françaises (CNIV) et de la filière.

Dans l'agroalimentaire, l'organisation patronale du secteur, l'Ania, a dénoncé un "accord clairement inéquitable (...) qui fragilise notre position".

Seuls les secteurs qui pourraient bénéficier d'une exemption de droits de douane, comme l'aéronautique, se sont montrés complètement soulagés.

Le Gifas (Groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) a salué dans une déclaration transmise à l'AFP une exonération "bonne pour une industrie équilibrée entre la France et les Etats-Unis" et qui permettra de "conserver des emplois qualifiés en France à tous les niveaux de la chaîne de sous-traitance."

Les organisations patronales et les fédérations des filières économiques affectées par cet accord seront reçues mercredi à Bercy.