Gouvernement, budget: Bayrou consulte et compose

François Bayrou, qui a tenu à appeler personnellement chaque chef de groupe, s'entretiendra ensuite avec Gabriel Attal, à la fois le chef de file des députés macronistes Ensemble pour la République (EPR), et président du parti Renaissance, qui lui a marqué son soutien. (AFP)
François Bayrou, qui a tenu à appeler personnellement chaque chef de groupe, s'entretiendra ensuite avec Gabriel Attal, à la fois le chef de file des députés macronistes Ensemble pour la République (EPR), et président du parti Renaissance, qui lui a marqué son soutien. (AFP)
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Publié le Lundi 16 décembre 2024

Gouvernement, budget: Bayrou consulte et compose

  • François Bayrou, qui a tenu à appeler personnellement chaque chef de groupe, s'entretiendra ensuite avec Gabriel Attal, à la fois le chef de file des députés macronistes Ensemble pour la République (EPR)
  • Suivront les chefs de groupe socialistes, Boris Vallaud pour l'Assemblée et Patrick Kanner pour le Sénat, avec le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui n'ont pas l'intention d'entrer au gouvernement mais se sont montrés prêts à discuter

PARIS: François Bayrou a commencé lundi à consulter les forces politiques en même temps qu'il compose son gouvernement, en quête d'un chemin étroit qui lui permettrait de faire passer, sans majorité, un budget, après le gel du précédent par la censure.

Le nouveau Premier ministre reçoit les groupes parlementaires de l'Assemblée nationale "par leur ordre d'importance" numérique dans cette chambre. A eux de décider de la composition de leur délégation, avec ou sans chef de parti.

La présidente du groupe des députés Rassemblement national, Marine Le Pen et celui du parti Jordan Bardella sont arrivés à 9H00 à l'hôtel Matignon. La leader frontiste avait fustigé dimanche une "méprisable coalition des contraires" mais ne censurera pas "a priori". Les deux responsables d'extrême-droite avaient déploré ne pas avoir été reçus assez tôt par l'ancien Premier ministre Michel Barnier.

François Bayrou, qui a tenu à appeler personnellement chaque chef de groupe, s'entretiendra ensuite avec Gabriel Attal, à la fois le chef de file des députés macronistes Ensemble pour la République (EPR), et président du parti Renaissance, qui lui a marqué son soutien.

Suivront les chefs de groupe socialistes, Boris Vallaud pour l'Assemblée et Patrick Kanner pour le Sénat, avec le Premier secrétaire du PS Olivier Faure, qui n'ont pas l'intention d'entrer au gouvernement mais se sont montrés prêts à discuter sur différents sujets, comme d'une "conférence sociale" sur les retraites ou de la taxation des hauts revenus, autant de propositions que soutient le MoDem, le parti de François Bayrou.

Le chef de file des députés Droite républicaine (DR) Laurent Wauquiez viendra seul. Son parti LR conditionne la participation de la droite au gouvernement au "projet" que leur présentera François Bayrou.

La France insoumise, qui a déjà promis la censure, a refusé de rencontrer François Bayrou lundi dans ce cadre, par "crainte" selon Jean-Luc Mélenchon "que tout ça soit à nouveau une comédie".

"Personnalités"

Parallèlement à ces consultations, qui se poursuivront mardi, M. Bayrou peaufine son équipe qu'il veut resserrée et dominée par des "personnalités" d'expérience, en laissant Mayotte touchée par un ouragan meurtrier aux mains d'Emmanuel Macron.

François Bayrou, qui a revu dimanche soir Emmanuel Macron, s'est défini dimanche comme "un Premier ministre de plein exercice et de complémentarité" avec le président qui avait hésité jusqu'à la dernière minute à le nommer.

François Bayrou n'a toutefois pas l'intention de batailler sur les postes régaliens, qui relèvent du domaine dit "réservé", selon une source gouvernementale.

Le MoDem détient actuellement le ministère des Affaires étrangères, avec Jean-Noël Barrot.

Reste à savoir si Sébastien Lecornu, un fidèle d'Emmanuel Macron que le chef de l'État a hésité à nommer à Matignon, souhaite rempiler à son poste.

M. Bayrou a reçu vendredi le ministre de l'Intérieur sortant Bruno Retailleau (LR), à qui il a laissé le pilotage de la crise à Mayotte, touché par un cyclone meurtrier, comme un gage de la poursuite de sa mission au gouvernement.

Mais le maintien de ce ministre clivant divise. Les socialistes contestent d'abord son projet d'une nouvelle loi immigration. Le président du Sénat Gérard Larcher (LR) a plaidé pour que soit reconduit son collègue de parti.

"Elargir" au PS ?

L'ancien ministre de l'Industrie Roland Lescure, dont le nom avait circulé pour Matignon, a plaidé lundi sur RTL pour "élargir" à des ministres socialistes mais ces derniers menacent d'exclure les prétendants.

"J'ai vu avec intérêt les énormes bougés du Parti socialiste et d'une partie de la gauche", a-t-il expliqué, estimant que la promesse de ne pas censurer si le gouvernement ne présente pas de 49.3 "ne peut fonctionner que s'ils décident d'entrer au gouvernement".

La France insoumise qui menace d'emblée de censurer le futur gouvernement, met en balance l'union de la gauche: "toute personne qui rentrera dans ce gouvernement se mettra à distance de manière irrémédiable du Nouveau Front populaire", a prévenu son coordinateur Manuel Bompard sur TF1.

Le temps presse pour la formation du gouvernement car c'est lui qui portera le nouveau projet de loi de finances pour 2025, interrompu par la censure, alors que le déficit s'aggrave et que les agences de notation froncent les sourcils.

Le nouveau Premier ministre a reçu dimanche le ministre sortant du Budget Laurent Saint-Martin, avant l'examen par les députés lundi du projet de la loi spéciale qui permettra la continuité de l'État, en l'absence de budget adopté dans les temps.

Il s'est aussi entretenu samedi avec le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, et le président de la Cour des comptes Pierre Moscovici. Autant de profils possibles pour Bercy, comme celui aussi de Roland Lescure.


Le PDG de CMA CGM assure «ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale» des médias qu'il possède

Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC. (AFP)
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  • "Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media
  • Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique"

PARIS: Auditionné à l'Assemblée nationale mercredi, Rodolphe Saadé, PDG du groupe CMA CGM, a assuré "ne pas s'immiscer dans la ligne éditoriale" des médias qu'il possède, quelques jours après l'acquisition du média vidéo Brut, qui suit celle de BFMTV ou RMC.

"Les journaux ou chaînes de télévision qu'on a rachetés ont une indépendance, ce sont des journaux qui sont nuancés, qui offrent le pluralisme. Je ne m'immisce pas dans la ligne éditoriale de ces journaux", a-t-il déclaré lors d'une audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée.

Il répondait au député France insoumise René Pilato qui suggérait une "grande loi de séparation des entreprises et des médias".

"Si des investisseurs comme le groupe CMA CGM ne viennent pas, ces médias malheureusement tombent", a ajouté M. Saadé, rappelant que le secteur des médias est "très sinistré".

"Tout ce qu'on fait c'est leur donner cette bouffée d'oxygène (...) On ne leur demande pas de dire blanc ou de dire noir, ça c'est eux qui gèrent", a poursuivi le milliardaire, président de l'armateur CMA CGM, dont la branche médias est CMA Media.

Selon lui, les médias ne "représentent qu'une part modeste" des investissements de son groupe, "moins de 5%", mais "répondent à un enjeu majeur, la vitalité démocratique".

"Dans un monde traversé par les +fake news+, je crois que les industriels ont un rôle à jouer pour défendre le pluralisme, l'indépendance et la qualité de l'information. Si nous voulons continuer à produire de l'information en France et résister à la domination des grandes plateformes, nous devons garantir des groupes de médias solides capables de créer des contenus de qualité et de les diffuser sur tous les supports", a-t-il défendu.

Outre BFMTV, RMC, et désormais Brut, CMA Media possède les journaux La Tribune et La Tribune Dimanche, La Provence et Corse Matin. Le groupe vient également de racheter la chaîne télé Chérie 25 (NRJ Group).

Vendredi, les Sociétés des journalistes (SDJ) de BFMTV, RMC et La Tribune avaient déploré qu'"une prise de position de Rodolphe Saadé sur l'actualité politique et sociale du pays (ait) été diffusée à l'antenne de BFMTV" jeudi.

Il s'agissait d'extraits écrits tirés d'une tribune publiée dans La Provence après le mouvement "Bloquons tout" du 10 septembre. "Les entreprises ne sont pas des adversaires, elles sont des partenaires de la Nation", y écrivait notamment M. Saadé.

 


Faure «sur sa faim» après son entretien avec Lecornu, resté «très flou» sur ses intentions

Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions". (AFP)
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  • Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu
  • Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland

PARIS: Le patron du Parti socialiste, Olivier Faure, est ressorti "sur sa faim" de son entretien mercredi avec le Premier ministre Sébastien Lecornu, resté selon lui "très flou sur ses intentions".

"Pour l'instant, nous sommes restés sur notre faim et nous verrons bien ce qu'il a à nous dire dans les prochains jours", a déclaré le premier secrétaire du PS, à l'issue de sa première rencontre à Matignon, qui a duré près de deux heures.

Si M. Lecornu était "là pour refaire François Bayrou, les mêmes causes produiraient les mêmes effets et nous censurerions dès la (déclaration) de politique générale", que prononce chaque nouveau Premier ministre, a-t-il prévenu à la veille d'une importante journée de mobilisation syndicale.

Il était accompagné par le chef de file des députés socialistes Boris Vallaud, celui des sénateurs Patrick Kanner, et la maire de Nantes Johanna Rolland.

A propos de la journée d'actions de jeudi, il a expliqué que ces manifestations seraient "aussi un élément du rapport de force que nous devons installer avec un exécutif qui, jusqu'ici, n'a pas fait la démonstration de sa capacité à comprendre la colère et même l'exaspération des Français".

Olivier Faure a également dit qu'il ne souhaitait pas "voir revenir sur la table une loi immigration", estimant que le Premier ministre macroniste était "tiraillé par une droite qui lorgne de plus en plus vers l'extrême droite" et avait  "beaucoup de problèmes dans son propre socle commun".

"Nous ne cherchons pas la censure, nous ne cherchons pas la dissolution, nous ne cherchons pas la destitution. Nous cherchons à ce que les Français soient entendus", a-t-il plaidé, en citant un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

"Il y a des mesures qui sont très majoritaires dans le pays, pour la taxe Zucman" sur les hauts patrimoines, "pour en finir" avec la réforme des retraites, pour "rendre du pouvoir d'achat", notamment à travers "un taux différentiel de CSG", a-t-il détaillé.


Des socialistes au RN, Lecornu reçoit ses opposants avant une grande journée d'action

Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025.  (AFP)
Le nouveau Premier ministre français Sébastien Lecornu (C) participe à une réunion lors de sa visite au centre départemental de santé de Macon, dans le centre-est de la France, le 13 septembre 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre Sébastien Lecornu entame une série de réunions avec les oppositions avant une grande journée de mobilisation, dans un climat tendu marqué par les revendications sociales et les divergences sur le plan de redressement budgétaire

PARIS: Sébastien Lecornu reçoit mercredi ses opposants politiques, à la veille d'une journée importante de mobilisation sociale, sans grande marge de manœuvre pour discuter, au vu des lignes rouges qu'ils posent et des menaces de censure.

Tous les dirigeants de gauche - à l'exception de La France insoumise qui a refusé l'invitation -  ainsi que ceux du Rassemblement national vont défiler dans le bureau du nouveau Premier ministre, à commencer par les socialistes à 09H30.

Sébastien Lecornu a déjà échangé la semaine dernière avec les responsables du "socle commun" de la droite et du centre, ainsi que les syndicats et le patronat.

"Le premier qui doit bouger, c'est le gouvernement", a estimé pour sa part le président du groupe des députés Liot Laurent Panifous, reçu mardi, ajoutant que "le sujet des retraites ne peut pas être renvoyé uniquement à 2027".

François Bayrou avait obtenu la mansuétude du PS sur le budget 2025 en ouvrant un "conclave" sur la réforme des retraites, qui s'est soldé par un échec. Puis il a présenté à la mi-juillet un sévère plan de redressement des finances publiques qui a fait hurler toutes les oppositions.

Mercredi, "ça va être un round d'observation. La veille des grosses manifs, on sera dur, exigeant. Ce qui se joue ce n'est pas au premier chef un sujet budgétaire", mais un "sujet démocratique" car ce sont les "battus qui gouvernent", anticipe un responsable socialiste.

- Gestes -

Ces entretiens ont lieu sous la pression de la rue, alors qu'une mobilisation massive est attendue jeudi, de l'ordre de celles contre la réforme des retraites en 2023. Les syndicats contestent notamment les mesures budgétaires "brutales" de François Bayrou.

Avant d'entamer les discussions, Sébastien Lecornu a fait plusieurs gestes en direction de la gauche et de l'opinion: retrait de la proposition impopulaire de supprimer deux jours fériés, et promesse de ne pas rouvrir le conclave sur les retraites.

Il a aussi consacré son premier déplacement samedi à l'accès aux soins, avant d'annoncer la suppression très symbolique, dès l'an prochain, des avantages restants octroyés aux ex-Premiers ministres.

Les socialistes ont eux posé leurs conditions dès dimanche face aux offres appuyées de dialogue du Premier ministre.

Ils considèrent que le plan Bayrou "ne doit pas servir de base de discussion", alors que Sébastien Lecornu a l'intention d'en faire un point de départ, puis de mettre les parlementaires devant leur responsabilité pour l'amender.

- "Rupture" -

Mercredi, les socialistes viendront avec en main un sondage Ifop commandé par le parti montrant que les Français, quelles que soient leurs sensibilités, plébiscitent les mesures poussées par le PS.

Parmi elles, la création d'une taxe de 2% sur les patrimoines supérieurs à 100 millions d'euros - la fameuse taxe Zucman, qui enflamme ce débat budgétaire - à laquelle 86% des sondés sont favorables, dont 92% des sympathisants Renaissance et 89% des sympathisants LR.

Le Premier ministre a cependant déjà fermé la porte à cette taxe, tout en reconnaissant que se posaient "des questions de justice fiscale".

La taxe Zucman, "c'est une connerie, mais ils vont la faire quand même parce que ça permet d'obtenir un accord de non-censure" avec la gauche, a de son côté prédit mardi Marine Le Pen, sans pour autant fermer la porte à une mise à contribution des plus fortunés.

"Si la rupture consiste à un retour aux sources socialistes du macronisme, c'est contraire à l'aspiration majoritaire du pays", a également mis en garde la cheffe des députés RN, attendue à 16H00 à Matignon avec Jordan Bardella.

Un avertissement auquel le patron des députés LR Laurent Wauquiez a fait écho mardi en dénonçant "la pression du PS", craignant qu'il "n'y ait plus rien sur l'immigration, la sécurité ou l'assistanat" dans le budget.

Autre point au cœur des discussions, le niveau de freinage des dépenses. La présidente de l'Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a appelé dimanche à chercher un accord autour "de 35 à 36 milliards" d'euros d'économies, soit moins que les 44 milliards initialement prévus par François Bayrou, mais plus que les 21,7 milliards du PS.

"Les socialistes donnent l'air d'être déterminés et de poser des conditions mais c'est un moyen de rentrer dans les négociations", estime Manuel Bompard, coordinateur de LFI, grinçant sur la politique des "petits pas" du PS, au détriment des "grands soirs".