Dans « L’argent du terrorisme », Nathalie Goulet dénonce le laxisme politique et l’absence de mesures concrètes 

« L’argent du Terrorisme » publié par les éditions du « Cherche midi ». (Photo fournie)
« L’argent du Terrorisme » publié par les éditions du « Cherche midi ». (Photo fournie)
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Publié le Mardi 27 mai 2025

Dans « L’argent du terrorisme », Nathalie Goulet dénonce le laxisme politique et l’absence de mesures concrètes 

  • Pour Goulet, il est essentiel d’alerter, sur les liens profonds entre criminalité financière et terrorisme
  • Goulet dénonce aussi le laxisme des responsables politiques dans le monde et insiste sur l’urgence de définir des mesures concrètes et coordonnées à l’échelle internationale

PARIS: Trois ans après son premier livre « l’Abécédaire du financement du terrorisme », publié en 2022, la Sénatrice de l’Orme Nathalie Goulet revient à la charge avec un ouvrage, dense et détaillé intitulé « L’argent du Terrorisme » publié par les éditions du « Cherche midi ».

Cela veut-il dire que pendant les trois années qui séparent la publication des deux ouvrages, rien n’a été fait pour tarir les sources de financement des réseaux terroristes ?

« Oui ou presque » rétorque la sénatrice, qui est membre de la commission des finances du Sénat, en répondant à Arab News en français.

Dans son livre, Goulet explique que s’agissant des grandes peurs contemporaines que sont le terrorisme, le trafic de drogue, ou l’immigration clandestine, une constante traverse les crises et relie les réseaux: « l’argent sale »

Pour elle, il est essentiel de s’acharner, de revenir à la charge, sur un sujet d’une grande gravité, puisqu’il met en danger des vies humaines et mine des sociétés.

Il est essentiel aussi d’alerter, sur les liens profonds entre criminalité financière et terrorisme, et de dénoncer le laxisme des responsables politiques dans le monde et insiste sur l’urgence de définir des mesures concrètes et coordonnées à l’échelle internationale.

Dans son livre, Goulet explique que s’agissant des grandes peurs contemporaines que sont le terrorisme, le trafic de drogue, ou l’immigration clandestine, une constante traverse les crises et relie les réseaux, « l’argent sale », et plus précisément, sa capacité à être blanchi. 

A l’origine de cela, explique-t-elle, un faisceau d’activités illicites, drogue, prostitution, contrefaçon, trafic d’armes, piraterie, traite d’êtres humains qui toutes génèrent des masses colossales d’argent sale. 

Une fois cet argent blanchi, il peut être réinjecté dans l’économie légale, pour servir à l’enrichissement personnel ou, plus grave encore, alimenter des réseaux terroristes.

Ce circuit est aujourd’hui fluide, mondialisé, parfaitement adapté aux outils modernes, les réseaux criminels utilisent désormais les mêmes canaux que les groupes terroristes pour transférer et camoufler leurs fonds. 

« Ils sont pluridisciplinaires : un peu de drogue, un peu de contrefaçon, un peu de trafic humain, un peu de terrorisme. Ils savent diversifier leurs activités mieux que n’importe quelle multinationale », ironise la sénatrice.

Le développement des crypto-monnaies est venu ajouter une couche d’invisibilité à ces circuits déjà opaques, « aujourd’hui, 100% des dossiers de criminalité organisée ou de financement du terrorisme impliquent des crypto-monnaies, en tout ou partie », révèle Nathalie Goulet, citant des sources d’Interpol et d’Europol.

Derrière une paire de baskets ou un faux médicament, il y a des réseaux mafieux et parfois des filières de financement du Hezbollah ou du Jihad islamique, « une chemise contrefaite peut sembler inoffensive, mais elle participe à un écosystème global de violence »

Face à cette sophistication technologique, les services de renseignement et les autorités financières peinent à suivre, alors que le cadre juridique, constate-t-elle, évolue lentement, les coopérations internationales demeurent fragmentaires, et les paradis fiscaux prospèrent.

Une simple chemise contrefaite...

Ce qui frappe dans l’analyse de Goulet, c’est la dimension sociale et quotidienne de ces mécanismes, la sénatrice insiste sur le rôle du consommateur, souvent involontairement complice.

A titre d’exemple elle cite entre autres la contrefaçon, qui est perçue comme un crime sans victime. 

Pourtant, derrière une paire de baskets ou un faux médicament, il y a des réseaux mafieux et parfois des filières de financement du Hezbollah ou du Jihad islamique, « une chemise contrefaite peut sembler inoffensive, mais elle participe à un écosystème global de violence », avertit-elle.

Il en va de même pour certaines cagnottes en ligne, ou même la zakat (l’aumône religieuse musulmane), parfois collectée en espèces sans traçabilité. 

« Une mosquée en région parisienne peut collecter plus d’un million d’euros en zakat durant le Ramadan. Si ce cash est mal orienté, il peut alimenter des réseaux douteux », alerte-t-elle.

Plus critique encore, Goulet fustige le laxisme de l’Union Européenne en ce qui concerne la gestion de ses subventions, et affirme que « au nom de la diversité, l’Union européenne finance parfois ses propres ennemis ».

Elle cite les milliards d’euros dont la Cour des comptes européenne a récemment perdu la trace, et qui sont des aides accordées à des organisations islamistes radicales.

La sénatrice dénonce le financement des universités ou d’organisations liées aux Frères musulmans, qu’elle accuse de « créer du séparatisme » au sein des sociétés européennes. 

Elle cible aussi certaines campagnes de promotion du voile, payées avec l’argent des contribuables européens, alors que dans d’autres régions du monde, des femmes sont emprisonnées ou assassinées pour avoir osé l’enlever.

Des actions concrètes

Ce combat, Goulet le mène aussi à travers des actions concrètes, questions parlementaires, propositions de lois, conférences.

Elle milite notamment pour la création d’une agence européenne anti-blanchiment, le renforcement des contrôles sur les ONG, la traçabilité des dons religieux, et une lutte beaucoup plus rigoureuse contre la fraude et l’évasion fiscale.

Elle évoque aussi le rôle structurant de la corruption, notamment en Afrique et au Moyen-Orient, où les flux d’or, les routes de la drogue et les crises migratoires sont intimement liés.

« Si on observe la carte des conflits africains, on les retrouve là où il y a du trafic d’or. Ce n’est pas un hasard », affirme-t-elle.

La France a-t-elle fait sa part ? Sur certains aspects, oui, « La coopération entre services de renseignement s’est nettement améliorée, et des lois ont été adoptées, notamment en 2021, pour mieux encadrer le financement des associations », note la sénatrice.

Mais elle regrette que la volonté politique demeure inégale, « il y a eu des conférences internationales, comme “No Money for Terror”, (organisée par le président Emmanuel Macron en 2018) mais les actes ne suivent pas toujours », déplore-t-elle. 

Pour Goulet, il est temps que les citoyens comprennent que le blanchiment n’est pas une infraction abstraite, que « Ce n’est pas un crime sans victime, c’est un crime qui prive nos hôpitaux, nos écoles, nos politiques sociales de ressources vitales. C’est un crime démocratique », conclut-elle.

Et c’est peut-être là, la mission la plus urgente de son combat : éveiller les consciences, faire comprendre à chacun qu’un simple geste, un achat, un don, une ignorance peut participer à une chaîne de violence mondiale. 

 


La reconnaissance d'un Etat palestinien est «un devoir moral» et «une exigence politique», dit Macron

Lors d'une conférence de presse à Singapour, Emmanuel Macron a affirmé que les Européens devaient "durcir la position collective" contre Israël. (AFP)
Lors d'une conférence de presse à Singapour, Emmanuel Macron a affirmé que les Européens devaient "durcir la position collective" contre Israël. (AFP)
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  • La France copréside avec l'Arabie saoudite du 17 au 20 juin à l'ONU, à New York, une conférence internationale sur la solution dite à deux Etats, israélien et palestinien
  • Sans dire clairement s'il reconnaîtrait un Etat palestinien à cette occasion, Emmanuel Macron a estimé vendredi que "la création d'un Etat palestinien" sous conditions était "pas simplement un devoir moral, mais une exigence politique"

SINGAPOUR: Le président français Emmanuel Macron a déclaré vendredi que la reconnaissance d'un Etat palestinien n'était "pas simplement un devoir moral, mais une exigence politique", tout en énumérant plusieurs conditions pour franchir le pas, avant une conférence à l'ONU sur le sujet à laquelle il participera le 18 juin.

Lors d'une conférence de presse à Singapour, il a aussi affirmé que les Européens devaient "durcir la position collective" contre Israël, "s'il n'y a pas une réponse qui est à la hauteur de la situation humanitaire qui est apportée dans les prochaines heures et les prochains jours" dans la bande de Gaza.

Dans ce cas, l'Union européenne devra "appliquer" ses "règles", "c'est-à-dire mettre un termes à des processus qui supposent le respect des droits de l'Homme, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, et appliquer des sanctions", a-t-il estimé, en référence à l'accord d'association entre les Vingt-Sept et Israël, qui va être réexaminé.

"Et donc oui, nous devons durcir notre position parce que c'est aujourd'hui une nécessité, mais j'ai encore l'espoir que le gouvernement d'Israël infléchira la sienne et que nous aurons enfin une réponse humanitaire", a-t-il ajouté.

La France copréside avec l'Arabie saoudite du 17 au 20 juin à l'ONU, à New York, une conférence internationale sur la solution dite à deux Etats, israélien et palestinien.

Sans dire clairement s'il reconnaîtrait un Etat palestinien à cette occasion, Emmanuel Macron a estimé vendredi que "la création d'un Etat palestinien" sous conditions était "pas simplement un devoir moral, mais une exigence politique".

Il en a énuméré les conditions : "libération des otages" détenus par le Hamas, "démilitarisation" du mouvement islamiste palestinien, sa "non-participation" à la gouvernance de cet Etat, une "réforme de l'Autorité palestinienne", la reconnaissance, par le futur Etat, d'Israël et de "son droit à vivre en sécurité", et la "création d'une architecture de sécurité dans toute la région".

"C'est ce que nous essaierons de consacrer par un moment important le 18 juin ensemble, et j'y serai", a-t-il dit au sujet de la conférence à l'ONU.

 


Bayrou et Retailleau, des destins liés malgré les désaccords

Le Premier ministre français François Bayrou (à droite) prononce un discours avec le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau après une réunion du Comité interministériel de contrôle de l'immigration (CICI) à l'hôtel Matignon à Paris, le 26 février 2025. (AFP)
Le Premier ministre français François Bayrou (à droite) prononce un discours avec le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau après une réunion du Comité interministériel de contrôle de l'immigration (CICI) à l'hôtel Matignon à Paris, le 26 février 2025. (AFP)
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  • Le Premier ministre centriste François Bayrou et son vibrionnant ministre de l'Intérieur devenu patron de la droite Bruno Retailleau ont paradoxalement besoin l'un de l'autre malgré leurs différences

PARIS: Duo improbable, comme les deux faces d'une même pièce, le Premier ministre centriste François Bayrou et son vibrionnant ministre de l'Intérieur devenu patron de la droite Bruno Retailleau ont paradoxalement besoin l'un de l'autre malgré leurs différences.

Quand le patron de la place Beauvau a été élu à la tête des Républicains le 18 mai, François Bayrou lui a transmis sur X ses "chaleureuses" félicitations et souligné sa "magnifique" victoire, souhaitant faire "cause commune" avec lui au gouvernement.

La désormais double casquette du Vendéen est même "une force" pour le gouvernement, a-t-il appuyé mardi sur BFMTV, en qualifiant de "sérieuses" ses propositions contre l'islam radical, alors même que le président Emmanuel Macron lui a demandé de revoir sa copie.

Le nouveau patron de LR considère pour sa part que sa large élection a "tranché" la question de son maintien au gouvernement du centre et de la droite.

Or privé de majorité et en difficulté pour faire adopter un prochain budget très contraint, François Bayrou ne peut pas gouverner sans la droite et prendre le risque que cette dernière rejoigne les rangs de l'opposition pour le censurer.

- "Vice-Premier ministre" -

Nommé à Matignon il y a seulement cinq mois, François Bayrou "a envie de durer". Il "ne veut pas se prendre de claques" sur le prochain budget et pour ne fâcher personne, il "endort tout le monde", rapporte un ancien ministre social-libéral.

Du coup "ça rame" à Matignon, qui reste flou sur ses intentions.

De son côté Bruno Retailleau bénéficie à son poste d'une exposition médiatique et d'un champ d'action qui pourraient servir ses ambitions élyséennes.

Ministre et président de LR, "ça redonne une réalité à la droite, un rayonnement qu'elle n'avait pas eu depuis longtemps", souligne une ministre "amie" du patron de Beauvau. "Ca le met dans le paysage" en même temps que "ça l'expose".

"Bruno est quelqu'un de loyal", fait valoir un ministre de droite, qui doute que l'opinion, "à qui on explique tous les jours que tout va mal", comprenne son éventuel départ du gouvernement "pour des questions électoralistes".

Mais "ça va être compliqué de faire avec un poids-lourd" comme lui, qui pèse désormais autant qu'un "vice-Premier ministre", souligne un conseiller ministériel.

Quand le chef du gouvernement était lundi en Loire-Atlantique pour un comité de la mer, c'est Bruno Retailleau qui est allé à la rencontre des agriculteurs près de l'Assemblée nationale avec la ministre LR Annie Genevard.

Ministre ou candidat en campagne ? "Je suis un enfant de la ruralité", a commencé M. Retailleau en défendant l'agriculture française et en ignorant à quelques mètres de lui le patron de Renaissance Gabriel Attal, pourtant son partenaire de gouvernement.

- "Entre-deux" -

Depuis sa victoire à la présidence de LR, le nouveau patron de la droite a bondi dans les sondages. Mais "est-ce parce qu'il est Bruno Retailleau ou parce qu'il est ministre de l'Intérieur ?" se demande un membre du gouvernement.

"Que le gouvernement soit traversé de tentations présidentielles au détriment de l'efficacité gouvernementale, c'est dangereux", prévient un député macroniste. "On ne peut pas avoir le beurre et l'argent du beurre".

"Soit les Républicains sont en soutien, soit ils quittent le gouvernement. On ne peut pas rester dans un entre deux", estimait un autre élu Renaissance après que la porte-parole LR Sophie Primas avait évoqué "la fin" prochaine du macronisme, provoquant un tollé dans le camp présidentiel.

Pendant que François Bayrou est accusé de "se planquer", Bruno Retailleau, soucieux de ne pas se faire accuser de "dilution" dans le macronisme, cherche à se démarquer en promettant un projet de "rupture" en 2027.

De quoi tendre la cohabitation entre ministres qui s'apparente déjà à de la cacophonie. Chacun y va de sa proposition au risque de contredire le Premier d'entre eux. "Chacun existe" mais "il y a un chef", a tenté de rappeler mardi François Bayrou tout en assumant avoir voulu des ministres "poids-lourds".

Si Bruno Retailleau "veut concourir à la présidentielle, il devra sortir" du gouvernement, pense un proche du Premier ministre. "Donc ça va nous causer encore des emmerdes".


L'UE et six de ses Etats membres ratifient le traité pour protéger la haute mer

Cette photographie prise le 19 avril 2024 montre la baie des anges dans la ville de Nice, sur la Côte d'Azur, où se dérouleront certains des matchs de football des Jeux olympiques de Paris 2024. (AFP)
Cette photographie prise le 19 avril 2024 montre la baie des anges dans la ville de Nice, sur la Côte d'Azur, où se dérouleront certains des matchs de football des Jeux olympiques de Paris 2024. (AFP)
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  • L'Union européenne et six de ses Etats membres ont ratifié mercredi le traité pour protéger la haute mer, à quelques jours de la conférence de l'ONU sur les océans organisée en France
  • Cela porte à 29 le nombre de ratifications, encore loin des 60 nécessaires pour l'entrée en vigueur du traité

Nations unies, États-Unis: L'Union européenne et six de ses Etats membres ont ratifié mercredi le traité pour protéger la haute mer, à quelques jours de la conférence de l'ONU sur les océans organisée en France et qui a fait de son entrée en vigueur une priorité.

L'UE ainsi que Chypre, la Finlande, la Hongrie, la Lettonie, le Portugal et la Slovénie, ont déposé auprès des Nations unies leurs instruments de ratification du texte adopté en juin 2023 après des années de négociations, a indiqué la mission européenne à l'ONU dans un communiqué. La France et l'Espagne l'avaient déjà fait en début d'année.

C'est un "pas historique vers la protection des océans du monde et la préservation de l'équilibre délicat des écosystèmes de la planète", a commenté le commissaire européen à la Pêche et aux Océans, Costas Kadis, appelant tous les pays à suivre cet exemple.

Cela porte à 29 le nombre de ratifications, encore loin des 60 nécessaires pour l'entrée en vigueur du traité.

La coalition d'ONG High Seas Alliance a salué une "étape majeure". Mais "il faut augmenter la pression politique", a insisté sa directrice Rebecca Hubbard dans un communiqué.

Alors que la France et les ONG de défense de l'environnement avaient espéré que le traité prenne vie à l'occasion de la conférence de l'ONU sur les océans à Nice du 9 au 13 juin, il n'y a plus aucune chance que cela se produise. Le traité ne pourra en effet entrer en vigueur que 120 jours après la 60e ratification.

Malgré tout, la priorité "numéro un" de la France qui accueille la conférence "est d'obtenir les 60 ratifications pour l'entrée en vigueur. Si ce n'est pas à Nice, au moins dans un avenir très proche", a commenté cette semaine l'ambassadeur français à l'ONU Jérôme Bonnafont.

Le traité historique vise à mettre à l'abri des écosystèmes marins vitaux pour l'humanité menacés par des pollutions multiples, dans les eaux internationales qui couvrent près de la moitié de la planète.

Il prévoit notamment la création d'aires marines protégées où certaines activités pourraient être limitées. Si le texte n'en donne pas de liste, cela pourrait inclure la pêche ou l'extraction minière, qui dépendent aussi toutefois d'autres organisations internationales.