Dix ans après la révolution égyptienne, les activistes se souviennent

Un manifestant s'éloigne de la place Tahrir, un drapeau égyptien à la main, le 8 juillet 2011. (AFP).
Un manifestant s'éloigne de la place Tahrir, un drapeau égyptien à la main, le 8 juillet 2011. (AFP).
Short Url
Publié le Vendredi 29 janvier 2021

Dix ans après la révolution égyptienne, les activistes se souviennent

  • C’était il y a dix ans. Un vent de liberté soufflait sur le monde arabe
  • Le 25 janvier, des gens décident de descendre dans la rue pour rendre hommage à Khaled Saïd, tué par des policiers

C’était il y a dix ans. Un vent de liberté soufflait sur le monde arabe. Le 14 janvier 2011, le président tunisien Zine el-Abidine Ben Ali quittait le pouvoir après vingt-trois ans de règne, chassé par des manifestations. Suivait le président égyptien Hosni Moubarak, le 11 février, au dix-huitième jour d’une révolte populaire qui a débuté officiellement le 25 janvier.

Ce jour-là – qui correspond à la journée nationale de la police, jour férié en Égypte –, des gens décident de descendre dans la rue pour rendre hommage à Khaled Saïd, tué par des policiers. Accusé de trafic de drogue, ce dernier est arrêté puis torturé par les forces de l’ordre à Alexandrie. Sa mort est devenue le symbole de la violence policière en Égypte, et a contribué au déclenchement de la révolution égyptienne de 2011.

Samer* avait 16 ans à cette époque. «C’était un jour presque normal pour l’adolescent que j’étais. On avait un déjeuner de famille, puisque c’est un jour chômé. Petit à petit, on a vu et on a entendu au loin les manifestants. Je me rappelle mon père qui m’avait dit: «La police va arrêter toutes ces personnes, et c’est dommage parce qu’on ne va plus entendre parler de tous ces jeunes.» Mais les manifestants ne partaient pas. Leur nombre augmentait au fil des heures. Moi, ne je comprenais pas ce qui se passait ce jour-là», raconte le jeune homme à Arab News en français.

«Je ne connaissais presque rien de l’histoire de l’Égypte. J’avais étudié la période pharaonique à l’école, mais je n’avais aucune connaissance de l’histoire contemporaine de mon pays. Je ne connaissais pas mon pays. J’ai été éduqué dans une école française. On étudiait l’éducation civique française. La citoyenneté version égyptienne était synonyme de nationalisme et de glorification du président. Je vivais donc dans ma bulle», poursuit Samer.

 

«Grâce à ce mouvement, les filles ont eu le courage de se soulever contre la mentalité patriarcale de la société. Et je suis l’une de ces filles».

 

Basma Mustafa

Basma Mustafa est aujourd’hui une journaliste d’investigation. «Le 25 janvier, cette année-là, j’étais à l’université et je terminais mes examens», se rappelle-t-elle.

«À la sortie de la salle, j’ai découvert que l’armée avait envahi le campus, et je ne savais pas pourquoi. Mon père m’a appelée pour me demander de rentrer immédiatement à la maison. J’ai passé toute cette période de grandes manifestations coincée à la maison et je suivais les événements sur Internet. Je n’avais aucun intérêt pour la politique. Je me concentrais sur mes études à cette époque, comme le faisait toute fille qui se soumettait aux désirs de sa famille conservatrice.»

Pour Milad Assad, tout a commencé par le coup de fil d’un ami, Mina Daniel, au début du mois de janvier 2011. «J’étais en dernière année scolaire. Mina voulait organiser une manifestation après l’explosion [d’une voiture piégée, attentat qui causa la mort de 21 personnes] qui avait eu lieu pendant le nouvel an devant une église copte à Alexandrie. J’ai ainsi réussi à organiser une mini-manifestation dans mon école. Trente minutes plus tard, une vingtaine de soldats ont envahi l’école et j’ai été convoqué chez le directeur de l’établissement pour être interrogé. Après deux heures de menaces et de questions, on m’a laissé partir.»

Le 25 janvier, ayant pris connaissance de la manifestation, Milad se précipite sur son ordinateur pour rechercher les causes de cette contestation. «J’ai ainsi décidé de rejoindre le plus proche regroupement de chez moi, c’était à Khlosy, Choubra. C’est en participant à cette manifestation, au moment où j’arrivais près de la place Tahrir, que j’ai été arrêté. J’ai passé trois jours entre les mains de la police. On m’a finalement laissé repartir, après que j’ai signé un papier affirmant que je ne participerai plus aux manifestations. Je suis donc sorti et je suis allé directement vers la place Tahrir, où j’ai fumé ma première cigarette.»

TAHRIR
Un manifestant, le visage peint aux couleurs du drapeau national et l'inscription "Révolution" (thawra) en arabe. (AFP).

«Pour moi, la révolution a débuté le 25 janvier 2011, quand nous avons décidé de descendre dans la rue pour protester contre les exactions des forces de l’ordre, connues pour leur abus, avec entre autres les affaires de torture dans les prisons et l’impunité dont les policiers bénéficient», explique pour sa part Karim Abdel Radi, avocat. En effet, les forces de l’ordre défendaient le régime avec véhémence en opprimant toute voix dissidente. Sous l’ère Moubarak, la peur était l’arme du pouvoir. Le degré d’oppression durant les trente années de sa présidence, avait surpassé celle des anciens présidents égyptiens comme Anouar el-Sadate ou Gamal Abdel Nasser.

«Honnêtement, à cette époque, je ne savais pas que la situation allait évoluer de cette façon et que les manifestations allaient se poursuivre. J’imaginais qu’on aurait affaire à une manifestation de masse qui se terminerait à la fin de la journée», explique l’avocat.

Ceux qui sont descendus le 25 janvier étaient en majorité des militants des droits humains comme lui, mais aussi des étudiants, des intellectuels ou des jeunes intéressés par l’action publique. Les islamistes n’y ont pas participé. «Mais le grand nombre de manifestants nous a donné l’espoir qu’une révolution était en marche. En prenant la place Tahrir au Caire, nous avons cru que ce mouvement allait briser le statu quo et qu’il n’y aurait plus de retour en arrière.»

Basma, arrêtée trois fois

Basma a été arrêtée trois fois durant ces dix dernières années. Une première fois en 2016, après une enquête sur le meurtre de Giulio Regeni, un étudiant italien tué au Caire. «J’ai finalement été relâchée après des pressions venues de Rome». La deuxième arrestation a eu lieu au mois de mars 2020 après la diffusion d’un reportage sur la crise du coronavirus. «J’ai été libérée après quatorze heures seulement; on m’a demandé de me concentrer sur des sujets artistiques et non politiques.» La troisième fois, c’était au mois d’octobre 2020, alors qu’elle se rendait à Louxor afin d’enquêter sur le meurtre d’un jeune tué par la police. «J’ai été emprisonnée plusieurs jours, puis j’ai été libérée à la suite de pressions. Mais des membres des renseignements sont venus à deux reprises me rendre visite plus tard. C’est à ce moment-là que j’ai décidé de partir.»

Tout a basculé le 28 janvier

Le lendemain, Samer passe toute la nuit devant son ordinateur, sur Internet, à faire des recherches. «Cette nuit-là, j’avais assez lu assez de choses sur le Web et sur les réseaux sociaux pour comprendre que ce régime criminel nous avait volé de notre identité. Je me suis réveillé vers midi, le deuxième jour.» C’était le 28 janvier. Samer découvre un pays en ébullition. «Mon père était scotché devant la télé, bouche bée.» Les autorités avaient coupé Internet et les réseaux des téléphones portables ce jour-là, ce qui a indigné davantage encore les Égyptiens. «Les gens sont devenus fous. Ce 28 janvier, il y avait beaucoup plus de manifestants que le 25. Un grand nombre de gens ont ainsi décidé de monter sur la vague et de se joindre au mouvement, notamment les partisans des Frères musulmans, qui s’étaient moqués des jeunes lors de la manifestation du 25 janvier», se rappelle Samer. «Bien que je sois contre les Ikhwans, ils font partie de la société égyptienne, et leur présence a rendu cette contestation plus représentative.»

TAHRIR
La place Tahrir au Caire le 25 mars 2020, quelques heures avant le couvre-feu de deux semaines annoncé l'an dernier pour lutter contre la Covid-19. (AFP).  

C’est ce jour-là, le 28, que tout a basculé pour Samer. «Pour la première fois, je sentais que je n’étais plus en sécurité. Nous vivions dans l’illusion que le régime de Moubarak nous procurait une certaine sécurité, mais en réalité, non. Certes, nous vivions sous une forme de stabilité politique mais, en fait, tous ceux qui n’appartenaient pas au cercle proche du pouvoir pouvaient finir comme Khaled Saïd», explique le jeune homme.

«À un certain moment, une marche se rapproche de notre rue en scandant: “Le peuple veut la chute du régime.” Ce n’étaient pas des cris, mais des rugissements. Je n’oublierai jamais de ma vie ce moment. Ma sœur et moi avons supplié mon père de descendre voir ce qui se passait. Une fois dans la rue, si vous saviez le nombre de personnes que nous connaissions et qui étaient dans cette marche… C’était incroyable. J’entendais les gens rugir: “À bas Moubarak, à bas la dictature!”»

Samer se rappelle avoir rencontré quelqu’un durant la manifestation qui lui a dit: «Moubarak est resté tellement longtemps au pouvoir qu’il y a à l’intérieur de chacun de nous un petit Moubarak qui priorise sa sécurité, sa richesse et son mode de vie.»

Karim Abdel Radi considère lui aussi que le 28 janvier fut un jour exceptionnel. «À la sortie des mosquées, après la prière du vendredi, les gens se sont réunis par centaines de milliers. C’était une vraie contestation populaire, regroupant toute les catégories d’Égyptiens. La scène était incroyable. On exhortait nos parents à nous rejoindre, on leur disait que la liberté était pour nous, mais aussi pour eux. À chaque mètre traversé, la foule augmentait. On a brisé tous les barrages de police qui voulaient interdire la manifestation. Quand le stock de grenades lacrymogènes fut épuisé, les policiers ont disparu, nous laissant alors le chemin libre pour reprendre la place Tahrir. Puis l’armée a remplacé la police, mais les militaires nous ont paru plus coopératifs, d’autant que la foule sur place était énorme. Ce jour-là, on respirait la liberté.»

Le 2 février, les pro-Moubarak sont venus sur des chevaux et des chameaux et ils ont attaqué les manifestants, les ont piétinés et les ont frappés violemment, tuant plusieurs d’entre eux. En tout, les violences ont fait près de huit cent cinquante morts.

Bien qu’elle soit restée chez elle au début, Basma Mustafa a suivi de près ces événements extraordinaires qui ont bouleversé l’Égypte à plus d’un titre. «Au fond de moi, je sentais que cette révolution me représentait à un niveau personnel. Tout a basculé pour moi quand mon père a été arrêté au mois de mars parce qu’il avait violé le couvre-feu. Je suis alors descendue sur la place Tahrir pour participer aux manifestations. Je suis redevable à la révolution. Grâce à elle, je me suis forgée ma personnalité actuelle, celle d’une personne qui sait dire non quand quelque chose ne lui convient pas. Je suis devenue indépendante et j’ai décidé d’habiter seule. C’est depuis cet événement que j’ai décidé de devenir journaliste. De réaliser mes rêves.» Selon elle, les filles et les femmes ont joué un rôle essentiel durant la révolution. Elles ont mené des manifestations. Certaines d’entre elles ont perdu leur vie également. Ce mouvement a aussi permis de mettre en lumière la place importante de la femme et les droits que cette dernière doit avoir au sein de la société égyptienne. «Grâce à ce mouvement, les filles ont eu le courage de se soulever contre la mentalité patriarcale de la société. Et je suis l’une de ces filles. Cela a logiquement entraîné davantage d’indépendance. Un grand nombre de jeunes ont décidé de quitter le cocon familial pour habiter seul, trouver un travail, et être autonome financièrement», fait observer la militante.

«À un certain moment, une marche se rapproche de notre rue en scandant: “Le peuple veut la chute du régime.” Ce n’étaient pas des cris, mais des rugissements. Je n’oublierai jamais de ma vie ce moment.»

 

Samer, un activiste copte

Milad, complètement "changé" par son arrestation

L’arrestation de Milad Assad l’a complément changé. «Je suis devenu vindicatif. On ne m’a pas frappé, mais j’ai été humilié. Durant trois jours, mes mains étaient liées et mes yeux bandés. J’ai été interrogé à plusieurs reprises. Ils me demandaient à chaque fois: “Qui t’a payé pour descendre manifester?” J’avais surtout en tête les images de l’attentat contre l’église, quelques semaines auparavant, et mon impuissance face à cette situation. J’étais simplement un jeune homme en quête de justice», affirme-t-il.

Samer, de son côté, a été blessé durant les protestations populaires. «Je suis descendu régulièrement dans la rue, non seulement pour manifester, mais parfois pour aider, pour nettoyer après les rassemblements, pour apporter des plats aux manifestants», se rappelle-t-il. Le combat s’est poursuivi après la chute de Moubarak, puisque c’est l’armée qui a pris le pouvoir. C’étaient des jours extrêmement violents, et c’est d’ailleurs durant cette période que le jeune homme a été blessé.

Avec la prise de pouvoir des Frères musulmans, la contestation s’est poursuivie. «En tant que coptes, les Ikhwans étaient les grands méchants qui voulaient voiler nos mères et nos sœurs», se souvient le jeune activiste.

Les Frères musulmans ont gouverné de la pire manière; ils ont voulu s’accaparer le pouvoir. «C’était une bataille différente, parce que les Égyptiens étaient beaucoup plus unifiés pour les combattre. Durant la présidence de Mohammad Morsi, je suis passé d’un révolutionnaire au type le plus déprimé au monde», ajoute-t-il.

Pour Karim Abdel Radi, «nous avons perdu quand les Frères musulmans et l’armée ont décidé que la révolution était terminée avec la chute de Moubarak et qu’il fallait vider les rues pour organiser, plus tard, des élections. L’armée et les Ikhwans sont des groupes organisés, ils possèdent les médias, l’argent et le pouvoir, face à une population qui n’avait, elle, que la place Tahrir et les réseaux sociaux. À la suite des pressions exercées notamment sur les pauvres, profitant d’un contexte social désastreux, ils ont organisé un scrutin selon leurs conditions, entraînant ainsi l’échec effectif de la révolution avec l’élection de Mohammad Morsi puis le coup d’État d’Abdel Fattah el-Sissi».

«En prenant la place Tahrir au Caire, nous avons cru que ce mouvement allait briser le statu quo et il n’y aurait plus de retour en arrière»

 

Karim Abdel Radi

La prison ou l’exil

Une décennie plus tard, la situation des révolutionnaires n’est guère à envier. Les autorités ont poursuivi tout le monde: tous ceux qui ont fait partie de la révolution, et pas seulement les Frères musulmans. Les activistes ont été pourchassés, leurs familles menacées. Une grande partie d’entre eux se trouve désormais en prison, ou a dû s’exiler.

«De mon côté, explique Karim Abdel Radi, j’ai voulu rester et poursuivre le combat, mais en vain. J’ai finalement décidé de partir il y a trois mois, après les pressions et les menaces que j’ai subies. Vouloir changer les choses est devenu quelque chose de très difficile aujourd’hui, malgré le fait que Sissi est peu apprécié par la population. Mais il dirige le pays d’une main de fer, étouffant toute opposition et toute opinion contraire. Je considère que nous sommes une génération vaincue. Nous avons perdu espoir, nos rêves de démocratie et de liberté ont disparu.»

Du côté de Basma Mustafa, le constat est identique: «C’est aussi à cause de la révolution que, dix ans plus tard, j’ai dû quitter mon pays et vivre à Beyrouth en exil. Et c’est vraiment quelque chose de triste. Aujourd’hui, c’est la désillusion. J’ai perdu la flamme qui me poussait à tout donner pour mon pays. Mes rêves se sont finalement transformés en cauchemars. Elle garde toutefois «un sentiment très positif de la révolution de janvier 2011, même si elle n’a pas abouti politiquement. En revanche, sur le plan social et culturel, beaucoup de changements ont eu lieu. Ceux qui y ont participé sont nés de nouveau.»

C’est aussi en exil que se trouve Milad Assad: «Je me retrouve dans ma chambre en train de revoir des vidéos de la révolution, écouter des chants révolutionnaires, et je pleure tout le temps. Mon ami Mina Daniel a été tué. Je suis déprimé en repensant à ces trois années au cours desquelles j’ai essayé de changer les choses. J’étais prêt à mourir pour mon pays et, à la fin, je me suis enfui, je ne peux plus retourner en Égypte, je ne peux même plus renouveler mon passeport. Je voudrais simplement retrouver mes amis. Qu’ils prennent l’État, mais qu’ils libèrent mes amis et qu’ils nous laissent vivre en paix. Je ne désire rien de plus.»

«Je ne sais pas comment sera l’avenir, mais ce que je sais c’est que je ne suis pas seul, et c’est très important. Maintenant, on se connaît, on se parle et on échange», précise Samer à Arab News en français. «L’important n’est pas ce qui s’est passé entre 2011 et 2021, mais ce qui va se passer après, parce que c’est ça qui compte. À la question: “Qu’est-ce qui reste de la révolution?”, une personne qui m’est chère, Nina Attallah, répondait il y a quelques jours: “Nous.” Il y a toujours un groupe qui continue à se battre sur le terrain, qui défie le régime actuel sur plusieurs fronts, et c’est ce qui compte», conclut-il.

* Le prénom a été changé pour des raisons de sécurité.


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Short Url
  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Short Url
  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Short Url
  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.