A la frontière italienne, l'immigration clandestine change de visage

Des membres de l'ONG Médecins du Monde (MdM) patrouillent à la recherche de migrants le 29 novembre 2019 dans le port de Montgenèvre, dans les Alpes françaises, près de la frontière italienne. En raison de la pression policière, les migrants prennent de plus en plus de risques pour traverser la frontière. (PHILIPPE DESMAZES / AFP)
Des membres de l'ONG Médecins du Monde (MdM) patrouillent à la recherche de migrants le 29 novembre 2019 dans le port de Montgenèvre, dans les Alpes françaises, près de la frontière italienne. En raison de la pression policière, les migrants prennent de plus en plus de risques pour traverser la frontière. (PHILIPPE DESMAZES / AFP)
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Publié le Samedi 20 février 2021

A la frontière italienne, l'immigration clandestine change de visage

  • Franco Capra, maire du village italien frontalier de Clavière, note toutefois qu'"il y avait beaucoup plus de personnes qui cherchaient à passer la frontière fin décembre que maintenant"
  • Pour les migrants, c'est l'opportunité de faire une pause après un périple jonché de nombreuses épreuves

MONTGENÈVRE : Dans la station de ski désertée de Montgenèvre (Hautes-Alpes), policiers et militants associatifs patrouillent à la recherche de migrants épuisés qui tentent de déjouer les contrôles. Une immigration qui change de visage, l'Asie remplaçant l'Afrique, les familles les hommes seuls.

Dans cette ville devenue ces dernières années l’un des principaux points de passage entre l’Italie et la France, une vingtaine de bénévoles participent régulièrement à des maraudes médicalisées pour porter assistance à des migrants en proie à l'extrême fatigue, au froid et à la faim, indique le Dr Philippe de Botton, président de Médecins du Monde, présente depuis près de deux ans dans la commune.

"Plus les forces de l’ordre sont présentes, plus les obstacles sont dressés, plus les personnes exilées prendront des risques pour les contourner", regrette Michel Rousseau, coprésident de l’association Tous Migrants. Trois jeunes migrants sont morts dans les Hautes-Alpes en 2018 et 2019, peu après avoir franchi la frontière.

Franco Capra, maire du village italien frontalier de Clavière, note toutefois qu'"il y avait beaucoup plus de personnes qui cherchaient à passer la frontière fin décembre que maintenant". 

"La Croix-Rouge cherche à convaincre les familles de ne pas franchir la frontière et les accompagne à Oulx [à 15 km de Montgenèvre] où elles peuvent être accueillies dans un refuge mais certaines tentent leur chance", poursuit-il.

Parti pour échapper aux combats, Feeruz, un Afghan de 38 ans, est lui parvenu jusqu'à Briançon. "Je pense aller vers Marseille ou en Angleterre", témoigne-t-il.

Afghans et Iraniens 

Depuis l'ouverture du Refuge solidaire de Briançon en 2017, 11.500 personnes y ont été accueillies. On y propose notamment un hébergement d’urgence et de premiers soins. 

Pour les migrants, c'est l'opportunité de faire une pause après un périple jonché de nombreuses épreuves. "Les gens nous témoignent des brutalités et des vols qu’ils ont subis (lors de leur transit via la) Croatie", explique notamment Marie-Danielle, 71 ans, bénévole au Refuge.

Ces derniers mois, les patrouilles de Médecins du Monde ont constaté une baisse des arrivées, mais aussi une modification du profil des migrants: ce sont désormais des familles entières et non des hommes seuls qui tentent de traverser la frontière. 

Et de plus en plus d'Asiatiques tentent l'aventure, alors qu'auparavant les arrivées concernaient principalement des Subsahariens. L’an dernier, 354 Afghans (+2.000% par rapport en 2019) et 150 Iraniens (+650%) ont fait l’objet d’une procédure de non-admission, selon les chiffres de la préfecture.

"Depuis janvier, nous voyons beaucoup d’Afghans et d’Iraniens, confirme Alain Mouchet, un des administrateurs du Refuge solidaire.

Mais même si le nombre de migrants semble en recul - les refus d'entrées sur le territoire national ont baissé de 60% depuis le pic de 2018 - les forces de l'ordre ne baissent pas la garde.

Humanitaires et policiers sous pression

M. Rousseau, de l’association Tous Migrants, dénonce "des techniques d’intimidation" des forces de l’ordre comme "la filature des véhicules, les contrôles multiples, les amendes abusives" à l’encontre des militants de son association.

"Les policiers sont conscients que les migrants ne sont pas des délinquants", mais une soixantaine d'agents doivent faire face à la pression exercée par "la présence quotidienne de militants de tous bords", se défend Vincent Guillermin, secrétaire départemental du syndicat Alliance Police nationale.

L’eurodéputé (EELV) Damien Carême dénonce lui la "pression exercée par les forces de l’ordre", qu'il attribue au "gouvernement qui veut glaner des voix à l’extrême droite".

"En 2020, mon parquet n’a été saisi d’aucune plainte à l’encontre de policier ou de gendarme pour des faits de violence policière ou pour toute autre infraction", répond le procureur de la République de Gap, Florent Crouhy, dont "la priorité absolue, c’est de lutter contre les personnes qui font rentrer illégalement les étrangers en France pas contre celles qui les accueillent en France".

Soupçonnés d’avoir aidé des migrants à passer la frontière, deux maraudeurs âgés de 28 et 31 ans, seront jugés le 22 avril à Gap. L’aide à l’entrée d’un étranger en situation irrégulière reste passible de cinq ans de prison et de 30.000 euros d’amende. 

L’an dernier, 78 passeurs ont été interpellés dans les Hautes-Alpes, contre 30 en 2019, 31 en 2018, 34 en 2017 et 6 en 2016.

Depuis la loi asile et immigration de 2018, l’aide à la circulation n’est plus un délit si cette aide est réalisée dans un but exclusivement humanitaire, comme c’était déjà le cas pour l’aide au séjour depuis 2012.


La flottille pour Gaza quitte la Tunisie, direction le territoire palestinien

Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire. (AFP)
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  • Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place
  • Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser"

BIZERTE: Après plusieurs reports, la flottille internationale pour Gaza a quitté lundi la Tunisie pour mettre le cap sur le territoire palestinien assiégé par Israël, dans le but de "briser le blocus israélien" et d'ouvrir un "corridor" humanitaire.

"Nous essayons d'envoyer un message à la population de Gaza, (de lui dire) que le monde ne l'a pas oubliée", a dit à l'AFP la militante écologiste suédoise Greta Thunberg avant d'embarquer dans le port de Bizerte, dans le nord de la Tunisie.

"Lorsque nos gouvernements ne prennent pas leurs responsabilités, nous n'avons pas d'autre choix que de prendre les choses en main", a-t-elle ajouté.

Une vingtaine de bateaux venus de Barcelone (Espagne) ont quitté Bizerte, les derniers étant partis à l'aube lundi, selon un photographe de l'AFP sur place.

Yasemin Acar, du comité de coordination de la partie maghrébine de la flottille, a posté sur Instagram des images de bateaux tunisiens prenant aussi la mer ces dernières heures, avec le message "le blocus de Gaza doit cesser", "nous partons par solidarité, dignité et pour la justice".

Les embarcations arrivées d'Espagne s'étaient transférées à Bizerte après un séjour mouvementé à Sidi Bou Saïd, près de Tunis.

La "Global Sumud Flotilla", accueillie par des rassemblements de soutien, a indiqué que deux de ses bateaux avaient été visés par des attaques de drones deux nuits de suite la semaine passée, publiant des vidéos à l'appui. Après la deuxième annonce, les autorités tunisiennes ont dénoncé "une agression préméditée" et dit mener une enquête.

L'eurodéputée franco-palestinienne Rima Hassan qui, comme Greta Thunberg, avait été détenue à bord du "Madleen" lors d'une précédente traversée vers Gaza, a dit à l'AFP redouter "bien entendu" de nouvelles attaques, ajoutant: "on se prépare aux différents scénarios".

Selon elle, les personnalités les plus en vue - dont l'actrice française Adèle Haenel - ont été réparties entre les deux plus gros bateaux de coordination "de manière à équilibrer et (ne) pas concentrer toutes les personnalités visibles dans un seul et même bateau".

Le départ de Tunisie a été repoussé à plusieurs reprises en raison de motifs de sécurité, de retard dans les préparatifs pour certains bateaux et de la météo.

La Global Sumud Flotilla ("sumud" signifie "résilience" en arabe), qui comprend aussi des embarcations parties ces derniers jours de Corse (France), Sicile (Italie) et Grèce, avait initialement prévu d'atteindre le territoire palestinien à la mi-septembre, après deux tentatives bloquées par Israël en juin et juillet.

 


Les ministres du Groupe E3 condamnent les frappes israéliennes à Doha

Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
Cette photo satellite obtenue le 10 septembre auprès de Planet Labs PBC et datée du 24 janvier 2025 montre le complexe qui abritait les membres du bureau politique du groupe militant palestinien Hamas et qui a été pris pour cible par une frappe israélienne le 9 septembre, dans la capitale du Qatar, Doha. (AFP)
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  • Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza
  • Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas

PARIS: Les ministres des Affaires étrangères de l’Allemagne, de la France et du Royaume-Uni ont condamné, dans une déclaration conjointe, les frappes israéliennes ayant visé Doha le 9 septembre. Ils estiment que ces attaques constituent une violation de la souveraineté du Qatar et représentent un risque d’escalade supplémentaire dans la région.

Selon eux, cette action militaire compromet également les négociations en cours visant à la libération des otages encore détenus et à la conclusion d’un accord de cessez-le-feu à Gaza. « Nous appelons toutes les parties à intensifier leurs efforts pour parvenir à un cessez-le-feu immédiat », ont-ils insisté.

Les trois pays européens ont exprimé leur solidarité avec le Qatar, soulignant son rôle clé dans la médiation menée avec l’Égypte et les États-Unis entre Israël et le Hamas. Ils appellent les parties à « faire preuve de retenue » et à saisir l’opportunité de rétablir la paix.

Les ministres ont réaffirmé que la priorité devait rester la mise en place d’un cessez-le-feu permanent, la libération des otages et l’acheminement massif d’aide humanitaire à Gaza pour enrayer la famine. Ils demandent l’arrêt immédiat des opérations militaires israéliennes dans la ville de Gaza, dénonçant les déplacements massifs de civils, les pertes humaines et la destruction d’infrastructures vitales.

Ils exhortent par ailleurs à garantir aux Nations unies et aux ONG humanitaires un accès sûr et sans entrave à l’ensemble de la bande de Gaza, y compris dans le Nord.

Enfin, le Groupe E3 a rappelé sa condamnation « sans équivoque » des crimes commis par le Hamas, qualifié de mouvement terroriste, qui doit, selon eux, « libérer immédiatement et sans condition les otages, être désarmé et écarté définitivement de la gouvernance de la bande de Gaza ».


L’ONU adopte une résolution franco-saoudienne pour la paix israélo-palestinienne sans le Hamas

L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
L'ancienne ministre allemande des Affaires étrangères et présidente de la 80e session de l'Assemblée générale des Nations Unies, Annalena Baerbock, s'exprime lors d'une réunion de l'Assemblée générale pour voter sur la solution de deux États à la question palestinienne au siège des Nations Unies (ONU), le 12 septembre 2025 à New York. (AFP)
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  • Résolution adoptée par 142 voix pour, 10 contre — dont Israël et les États-Unis
  • Le vote précède un sommet de haut niveau co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre

​​​​​​NEW YORK : L’Assemblée générale des Nations unies a voté massivement vendredi en faveur de l’adoption de la « Déclaration de New York », une résolution visant à relancer la solution à deux États entre Israël et la Palestine, sans impliquer le Hamas.

Le texte a été approuvé par 142 pays, contre 10 votes négatifs — dont Israël et les États-Unis — et 12 abstentions. Il condamne fermement les attaques du Hamas du 7 octobre 2023, exige le désarmement du groupe, la libération de tous les otages, et appelle à une action internationale collective pour mettre fin à la guerre à Gaza.

Intitulée officiellement « Déclaration de New York sur le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution à deux États », la résolution a été présentée conjointement par l’Arabie saoudite et la France, avec le soutien préalable de la Ligue arabe et de 17 États membres de l’ONU.

Le texte souligne la nécessité de mettre fin à l’autorité du Hamas à Gaza, avec un transfert des armes à l’Autorité palestinienne, sous supervision internationale, dans le cadre d’une feuille de route vers une paix durable. Celle-ci inclut un cessez-le-feu, la création d’un État palestinien, le désarmement du Hamas, et une normalisation des relations entre Israël et les pays arabes.

L’ambassadeur de France, Jérôme Bonnafont, qui a présenté la résolution, l’a qualifiée de « feuille de route unique pour concrétiser la solution à deux États », soulignant l’engagement de l’Autorité palestinienne et des pays arabes en faveur de la paix et de la sécurité. Il a aussi insisté sur l’urgence d’un cessez-le-feu immédiat et de la libération des otages.

Ce vote intervient à quelques jours d’un sommet de haut niveau de l’ONU, co-présidé par Riyad et Paris le 22 septembre, où le président Emmanuel Macron s’est engagé à reconnaître officiellement un État palestinien.

La représentante américaine, Morgan Ortagus, s’est vivement opposée à la résolution, la qualifiant de « coup de communication malvenu et malavisé » qui récompenserait le Hamas et nuirait aux efforts diplomatiques authentiques.

Elle a dénoncé la mention du « droit au retour » dans le texte, estimant qu’il menace le caractère juif de l’État d’Israël.

« Cette résolution est un cadeau au Hamas,» a déclaré Mme Ortagus, ajoutant que le désarmement du Hamas et la libération des otages étaient la clé de la fin de la guerre. Elle a exhorté les autres nations à se joindre aux États-Unis pour s'opposer à la déclaration.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com