Jean-François Charnier: «AlUla, un pôle de visibilité internationale pour le patrimoine et la création»

Le district de la vieille ville AlUla (Photo, fournie).
Le district de la vieille ville AlUla (Photo, fournie).
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Publié le Jeudi 03 juin 2021

Jean-François Charnier: «AlUla, un pôle de visibilité internationale pour le patrimoine et la création»

  • L’expérience française dans la préservation de lieux patrimoniaux protégés n’est plus à démontrer, et AlUla s’inscrit dans la volonté du Royaume de développer une région touristique de premier plan
  • Jean-François Charnier livre à Arab News en français un avant-goût des enjeux du projet et des richesses qui attendent les futurs visiteurs du site

PARIS: Le projet de rénovation d’AlUla, écrin de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, est unique au monde. L’un des plus grands sites culturels de la planète est aujourd’hui le théâtre d’une collaboration exceptionnelle, où la France joue un rôle prépondérant.

Jean-François Charnier, conservateur général du patrimoine, directeur scientifique de l’Agence française pour le développement d'AlUla, a récemment mis en lumière le projet AlUla, véritable musée à ciel ouvert, à Paris lors de la Menart Fair, première foire internationale d’art contemporain, destinée à promouvoir des artistes du Maghreb et du Moyen-Orient. Il répond aux questions d’Arab News en français, livrant un avant-goût des enjeux du projet, et des richesses qui attendent les visiteurs du site.

«L’un des objectifs est notamment de permettre la rencontre des créateurs locaux avec des artistes internationalement reconnus sur des projets à forte visibilité» (Photo fournie)

Vous participez à la Menart Fair, quel regard portez-vous sur cet événement culturel ?

Nous savons l’importance que revêtent les rencontres de ce type pour le Proche-Orient dans la découverte et la mise en valeur de jeunes talents. Nous avons bien conscience que de tels événements en Arabie saoudite permettent l’émergence de ces talents. Ils sont d’ailleurs nombreux dans le Royaume. Plusieurs initiatives culturelles d’AlUla sont développées en partenariat avec des jeunes artistes saoudiens. L’un des objectifs est notamment de permettre la rencontre des créateurs locaux avec des artistes internationalement reconnus sur des projets à forte visibilité.

Je considère la création artistique comme l’expression de l’âme d’un pays, ou en tout cas d’une culture. Les jeunes artistes mettent tout leur cœur, parfois inconsciemment d’ailleurs, à exprimer cet esprit de leur temps, dans ses enjeux et ses interrogations. Ce sont les questionnements de ces jeunes artistes, et parfois leurs réponses, qui préparent le futur de leur pays. L’image que l’on va retenir de l’Arabie saoudite, ce sera notamment celle qu’exprimeront et matérialiseront certains créateurs. Notre rôle, c’est de les aider à concrétiser ce travail et que cette réflexion devienne utile localement et visible à l’international.

«Archéologues et géologues vont entamer un échange avec les artistes dans un programme de résidences qui va commencer cet automne» (Photo fournie)

Comment l’Agence française pour le développement d'AlUla contribue-t-elle à la valorisation du site ?

Depuis sa création en 2018 dans le cadre d’un accord intergouvernemental entre l’Arabie Saoudite et la France, l’Afalula co-construit avec son partenaire de Royal Commission of AlUla (RCU) un programme dédié à la création très ambitieux. Nous œuvrons au quotidien avec les équipes de la RCU pour imaginer ces projets. Ainsi, au cœur de l’oasis d’AlUla, nous participons au développement d’un district dédié à la création, composé de résidences d’artistes, d’ateliers, et d’écoles d’art. Il sera très vivant, et contribuera fortement à l’image d’AlUla. Au sein ce district, nous souhaitons créer notamment ce que l’on appelle la Perspectives Gallery, un musée d’art moderne et contemporain qui mettra en dialogue des œuvres issues de tous les continents avec des créations locales et du monde arabe. Nous avons également prévu un grand programme de commandes monumentales qui seront disposées dans le paysage, dans le désert, dialoguant avec les rochers, le sable et de la lumière, le soleil.

Sur le plan des idées, ce qui nous guide est d’imaginer notamment un dialogue inédit entre science et art. Une certaine vision cartésienne a séparé l’artistique de l’intellectuel, la nature de l’Homme. Nous souhaitons renouer le lien entre l’artistique et le scientifique. Archéologues et géologues vont entamer un échange avec les artistes dans un programme de résidences qui va commencer cet automne. Cela va contribuer à l’idée qu’AlUla sera une destination co-construite avec les artistes. Nous essayons de penser l’ensemble du développement comme un tout autour de cette oasis : les institutions, le design, l’aménagement urbain, l’architecture, dans l’objectif de créer un havre de paix et de méditation. AlUla va être un grand pôle de visibilité internationale pour le patrimoine et la création.

«AlUla, c’est le cœur patrimonial de l’Arabie saoudite et de la Péninsule Arabique» (Photo fournie)

 En quoi l'expertise française apporte-t-elle une valeur ajoutée au projet ?

Dans le domaine culturel, la France occupe une place particulière, par ses traditions historiques, culturelles, ses grands projets, ses grands musées, et son rayonnement international. Le royaume d’Arabie saoudite a compris que la France était un partenaire clé et fiable dans le domaine culturel.

L’expérience française dans la préservation de lieux culturels protégés n’est plus à démontrer, et AlUla s’inscrit dans la volonté du Royaume de développer une région touristique de premier plan. La création du Louvre Abu Dhabi – Jean-François Charnier a dirigé le projet – a démontré que la France est capable d’ouvrir un musée dont la résonnance est mondiale.

«Quiconque dans le monde voudra créer un musée et réfléchi à la manière de le penser par rapport à un lieu, une communauté, devra venir à Hégra pour s’en inspirer» (Photo fournie)

Quelle est la particularité d’AlUla ?

AlUla, c’est le cœur patrimonial de l’Arabie saoudite et de la Péninsule Arabique. Le projet est un instrument de développement local, de transformation économique, de reconnaissance nationale et internationale. Ce travail de révélation culturelle à travers les projets de recherche archéologiques, anthropologiques, des projets muséaux, de la création, en fera de façon naturelle une destination touristique mondiale. Les 50 000 habitants d’AlUla participeront largement aux différents projets et initiatives avec la création de nombreuses opportunités professionnelles, de formation, de développement économique.

Dans ce lieu sont rassemblés des sites exceptionnels à fort potentiel d’attractivité. Le site nabatéen d’ Hégra, classé à l’Unesco, aura un rôle majeur en termes de visibilité, tout comme le site historiquement important de Dadan, avec ses statues monumentales de plus de deux mètres, qui constitue certainement l’un des sites le plus important de la Péninsule Arabique. Sans compter l’oasis elle-même, des formations rocheuses exceptionnelles qui n’ont rien à envier aux plus beaux sites naturels d’Amérique du Nord, d’extraordinaires formations volcaniques de basalte noir, etc.

La valorisation du développement culturel évoqué plus haut va enrichir cette destination. Nous souhaitons garder une cohérence dans l’ensemble du développement, qui aille du site archéologique aux formes architecturales, et au développement des infrastructures, pour que l’ensemble présente une image cohérente et forte, alliant beauté, importance patrimoniale, et offre touristique de grande qualité.

C’est un lieu exceptionnel, et quand j’y vais, j’y passe toujours de merveilleux moments. J’ai aussi vraiment l’impression de participer à un projet historique. Quiconque dans le monde voudra créer un musée et réfléchi à la manière de le penser par rapport à un lieu, une communauté, devra venir à Hégra pour s’en inspirer.


Diriyah: écrin d’histoire, une exposition qui transporte les parisiens au cœur de l’Arabie Saoudite

D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle. Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale. (Photo Arlette Khouri)
D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle. Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale. (Photo Arlette Khouri)
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  • D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle
  • Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale

PARIS: À peine franchi le seuil du Grand Palais Immersif à Paris, le visiteur de l’exposition « Diriyah : un écrin d’histoire » quitte le tumulte parisien pour se retrouver transporté au cœur de l’Arabie saoudite.
Le parcours débute par un long couloir aux murs sobres, délicatement éclairés, recouverts de tapis tissés artisanalement et ponctués de chants d’oiseaux.
À son terme, une porte massive en bois brut, sculptée selon la tradition ancestrale de Diriyah : l’immersion commence, dans une atmosphère d’apaisement et de sérénité.

D’emblée, l’exposition plonge le public dans une expérience multisensorielle. Les projections géantes des portes sculptées des maisons de la cité, décorées de pigments minéraux aux motifs simples et joyeux, rappellent le raffinement discret de l’architecture locale.
Plus loin, un salon inspiré des habitations traditionnelles accueille les visiteurs. Assis au son apaisant du oud, ils dégustent café et figues, un goûter authentique qui évoque l’hospitalité saoudienne.

L’exposition déroule ensuite une série d’images monumentales retraçant la vie quotidienne d’autrefois : cavalerie, danses, vannerie et artisanats. Mais le point d’orgue du parcours est une immersion totale d’environ quatre minutes dans les rues de Diriyah.
Le spectateur se retrouve au milieu des habitants, partagé entre marchés animés, activités agricoles et scènes de fête : une expérience surprenante, qui donne l’impression de voyager sans quitter Paris.

Diriyah ne se limite pas à son passé. Située aux portes de Riyad, elle est aujourd’hui au cœur de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, un vaste plan de développement qui fait du patrimoine et de la culture des leviers de rayonnement international.

Cette exposition n’est pas seulement une prouesse visuelle : elle incarne l’esprit d’une cité majeure de l’histoire saoudienne. Diriyah, berceau de l’État saoudien, est en effet le lieu où la dynastie Al Saoud a vu le jour au XVIIIᵉ siècle, au sein du site d’At-Turaif.
Inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO, At-Turaif est un ensemble exceptionnel de palais et de demeures en briques de terre crue, restaurés avec soin et visités aujourd’hui par des millions de personnes. Il permet de revivre les origines politiques et culturelles du Royaume.

Mais Diriyah ne se limite pas à son passé. Située aux portes de Riyad, elle est aujourd’hui au cœur de la Vision 2030 de l’Arabie saoudite, un vaste plan de développement qui fait du patrimoine et de la culture des leviers de rayonnement international.
Diriyah s’étend sur 11,7 km² et se compose de quartiers mêlant espaces résidentiels, commerciaux et culturels. Le projet de développement prévoit plus de 30 hôtels, des parcs, des zones de loisirs, ainsi que la création de 178 000 emplois.

Depuis son ouverture au public en 2022, Diriyah a déjà attiré plus de trois millions de visiteurs.

Parmi ses joyaux contemporains, les terrasses de Bujairi séduisent par leurs restaurants raffinés et leurs boutiques, tandis que le wadi Hanifa, une vallée verdoyante transformée en oasis moderne, invite à la promenade entre arbres nouvellement plantés, pistes cyclables et sentiers équestres.
Ce mélange de patrimoine et de modernité fait de Diriyah une destination unique, alliant mémoire historique, innovation et respect de l’environnement.

« Nous voulons que les visiteurs s’imprègnent pleinement de la vie de Diriyah, qu’ils ressentent son passé, son présent et son avenir », explique Saeed Abdulrahman Metwali, directeur général de la stratégie d’orientation touristique et du design.
Selon lui, l’expérience immersive proposée à Paris est une manière de donner un avant-goût de la richesse culturelle et humaine que Diriyah réserve à ses visiteurs : « À travers ces images, on découvre les habitants, les marchés, les maisons et l’âme de la cité. L’idée est d’offrir une perception vivante et authentique, qui incite à venir découvrir Diriyah sur place. »

Les chiffres confirment d’ailleurs cet engouement : depuis son ouverture au public en 2022, Diriyah a déjà attiré plus de trois millions de visiteurs.
L’objectif est ambitieux : en accueillir 50 millions d’ici 2030, grâce à une offre hôtelière et culturelle sans cesse enrichie.

L’exposition parisienne, de courte durée (du 12 au 14 septembre), illustre la volonté de Diriyah de s’ouvrir à l’international et témoigne de sa stratégie visant à se positionner comme un lieu mondial du tourisme culturel, où se conjuguent tradition et modernité.


Un documentaire met en lumière le patrimoine environnemental des monts Al-Arma

La chaîne de montagnes Al-Arma est située dans la réserve royale du roi Khalid, au nord-est de Riyad. (SPA)
La chaîne de montagnes Al-Arma est située dans la réserve royale du roi Khalid, au nord-est de Riyad. (SPA)
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  • Le film présente de superbes images panoramiques des montagnes d'Al-Arma
  • Le film sera diffusé sur la chaîne Thaqafiya et disponible sur la plateforme Shahid

RIYAD: L'Autorité de développement de la réserve royale Imam Abdulaziz bin Mohammed a annoncé la production d'un nouveau film documentaire sur les monts Al-Arma, un point de repère environnemental situé dans la réserve royale du roi Khalid, au nord-est de Riyad.

Sami Al-Harbi, directeur de la communication de l'autorité, a déclaré que le film présente des images panoramiques époustouflantes des monts Al-Arma, ainsi que des points de vue d'experts et de chercheurs qui discutent de leur importance environnementale et historique particulière.

Il a ajouté que le film sera diffusé sur la chaîne Thaqafiya et disponible sur la plateforme Shahid.

M. Al-Harbi a déclaré que cette production médiatique s'inscrivait dans le cadre des efforts déployés par l'autorité pour sensibiliser à l'environnement et promouvoir l'écotourisme durable, conformément aux objectifs de la Saudi Vision 2030.


Rare découverte d'un tableau de Rubens que l'on croyait disparu

Un tableau du célèbre peintre Pierre Paul Rubens (1577-1640), que l'on pensait disparu depuis 1613, a été retrouvé à Paris dans un hôtel particulier, a indiqué mercredi le commissaire-priseur à l'origine de cette découverte. (AP)
Un tableau du célèbre peintre Pierre Paul Rubens (1577-1640), que l'on pensait disparu depuis 1613, a été retrouvé à Paris dans un hôtel particulier, a indiqué mercredi le commissaire-priseur à l'origine de cette découverte. (AP)
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  • "C'est un chef d'oeuvre, un Christ en croix, peint en 1613, qui avait disparu, et que j'ai retrouvé en septembre 2024 lors de l'inventaire et de la vente d'un hôtel particulier du 6e arrondissement à Paris", a précisé à l'AFP Jean-Pierre Osenat
  • "C'est rarissime et une découverte inouïe qui marquera ma carrière de commissaire-priseur", a-t-il ajouté.

PARIS: Un tableau du célèbre peintre Pierre Paul Rubens (1577-1640), que l'on pensait disparu depuis 1613, a été retrouvé à Paris dans un hôtel particulier, a indiqué mercredi le commissaire-priseur à l'origine de cette découverte.

"C'est un chef d'oeuvre, un Christ en croix, peint en 1613, qui avait disparu, et que j'ai retrouvé en septembre 2024 lors de l'inventaire et de la vente d'un hôtel particulier du 6e arrondissement à Paris", a précisé à l'AFP Jean-Pierre Osenat, président de la maison de vente éponyme, qui mettra le tableau aux enchères le 30 novembre.

"C'est rarissime et une découverte inouïe qui marquera ma carrière de commissaire-priseur", a-t-il ajouté.

"Il a été peint par Rubens au summum de son talent et été authentifié par le professeur Nils Büttner", spécialiste de l'art allemand, flamand et hollandais du XVe au XVIe siècle et président du Rubenianum, un organisme situé à Anvers près de l'ancienne maison-atelier de Rubens et chargé de l'étude de son oeuvre, selon M. Osenat.

"J'étais dans le jardin de Rubens et je faisais les cent pas pendant que le comité d'experts délibérait sur l'authenticité du tableau quand il m'a appelé pour me dire +Jean-Pierre on a un nouveau Rubens !+", a-t-il raconté avec émotion.

"C'est tout le début de la peinture baroque, le Christ crucifié est représenté, isolé, lumineux et se détachant vivement sur un ciel sombre et menaçant. Derrière la toile de fond rocheuse et verdoyante du Golgotha, apparait une vue montrant Jérusalem illuminée, mais apparemment sous un orage", a-t-il détaillé.

Ce tableau "est une vraie profession de foi et un sujet de prédilection pour Rubens, protestant converti au catholicisme", a poursuivi M. Osenat, précisant que l'oeuvre est dans un "très bon état" de conservation.

Sa trace a été remontée à partir d'une gravure et il a été authentifié à l'issue d'une "longue enquête et d'examens techniques comme des radiographies et l'analyse des pigments", a encore précisé le commissaire-priseur.

Si le peintre a réalisé nombre de tableaux pour l'Eglise, ce chef d'oeuvre, d'une dimension de 105,5 sur 72,5 centimètres, était probablement destiné à un collectionneur privé. Il a appartenu au peintre académique du XIXe siècle William Bouguereau puis aux propriétaires de l'hôtel particulier parisien où il été retrouvé.