Quand un opéra «immersif» tente sa chance avec les mesures sanitaires

La soprano française Armelle Khourdoian (à droite) et le baryton français Laurent Arcaro interprètent La Traviata de Giuseppe Verdi lors d'un opéra immersif à la Fondation Dosne Thiers à Paris le 7 juin 2021. BERTRAND GUAY / AFP
La soprano française Armelle Khourdoian (à droite) et le baryton français Laurent Arcaro interprètent La Traviata de Giuseppe Verdi lors d'un opéra immersif à la Fondation Dosne Thiers à Paris le 7 juin 2021. BERTRAND GUAY / AFP
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Publié le Vendredi 11 juin 2021

Quand un opéra «immersif» tente sa chance avec les mesures sanitaires

  • A la Fondation Dosne-Thiers, imposante demeure du XIXe siècle dans le 9e arrondissement de Paris, une «Traviata» de Verdi en format réduit --trois chanteurs, trois musiciens--, est proposée jusqu'au 9 juillet devant une trentaine de personnes
  • Les interprètes sont à peine à deux mètres de l'assistance, donnant un côté très intime à cette expérience lancée il y a 15 ans dans le palais vénitien Barbarigo Minotto

"Merci de garder vos distances": la consigne sanitaire omniprésente est la dernière chose qu'on aimerait entendre dans un opéra immersif. Mais ceux qui viennent d'importer l'expérience de Venise à Paris ont quand même tenté le coup.

A la Fondation Dosne-Thiers, imposante demeure du XIXe siècle dans le 9e arrondissement de Paris, une "Traviata" de Verdi en format réduit --trois chanteurs, trois musiciens--, est proposée jusqu'au 9 juillet devant une trentaine de personnes.

Les interprètes sont à peine à deux mètres de l'assistance, donnant un côté très intime à cette expérience lancée il y a 15 ans dans le palais vénitien Barbarigo Minotto et intitulée "musica a palazzo" (musique au palais).

La soprano Armelle Khourdoïan, qui interprète Violetta Valéry -- une courtisane à Paris dont tombe amoureux Alfredo Germont, avant que leur amour soit contrarié par le père de ce dernier--, entre dans le "salon vert" de la maison et lance des "buona sera" au public. 

Elle chante ses arias et ses duos avec Alfredo (le ténor Christophe Poncet de Solages), plongeant son regard dans celui des spectateurs.

Pas besoin de décor puisque le duo évolue dans cette salle richement décorée et ornée de copies de tableaux dont "L'Ecole d'Athènes" de Raphaël, ou encore d'une statuette représentant Napoléon au-dessus d'une cheminée.

Opéra sans filtre ?

Mais l'opéra s'avère plus intimiste qu'immersif car l'expérience originale supposait que la dispute entre les deux amants se déroule au milieu du public debout, que la courtisane pleure sur l'épaule d'un spectateur ou meure à ses pieds. Une interaction impossible avec les règles sanitaires en vigueur.

"A Venise, les gens entrent tellement dedans, je me souviens de cet Anglais incroyable. Quand Violetta est morte, il a sauté pour l'aider et voir si ça allait, parce qu'il était dans l'histoire. Les gens pleurent et rient vraiment", explique à l'AFP Patrizia Di Paolo, la metteuse en scène. "Il n'y a pas de filtre, les émotions sont explosives". 

Mais "on n'a pas hésité (à lancer l’expérience à Paris) car la vie doit continuer et les gens ont besoin de cette injection de joie", poursuit-elle.

L'Italienne se dit également émue que la demeure où se joue l'opéra soit située tout près du cimetière de Montmartre, où repose la courtisane qui a inspiré, à Alexandre Dumas fils, son roman "La Dame aux Camélias". L'adaptation théâtrale avait inspiré à Verdi son célébrissime opéra.

Du côté des interprètes, et malgré l'absence d'immersion, la proximité est suffisante pour leur donner une expérience différente de la scène.

"On sent un petit peu le malaise des gens et en même temps ils sont pris aussi par l'émotion", sourit la soprano Armelle Khourdoïan.

"L’avantage est que je peux aller dans l’extrême dans les pianissimos (morceaux joués très doucement), je peux chuchoter, et (...) on va être plus proche de l'émotion grâce à ça".

Dans le public, Virginie De Meneval, employée de banque, est très émue "d'avoir Violetta juste devant" elle. "En plus j’étais au premier rang, je ne perdais pas une note", dit-elle. 

Quant à Pierre Bettinger, directeur commercial, il a eu "l'impression de vivre l'histoire et l'émotion qu'ils essayaient de faire partager", malgré les contraintes.

"Ils le font avec le regard, avec des gestes inclusifs, c’est très impressionnant. Au début, ça surprend un peu, c’est un peu déstabilisant, mais quand on se laisse prendre au jeu, on est happé par ce spectacle", poursuit-il.


La fête de la musique sous le signe du dialogue culturel franco-saoudien

Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. (Photo Fournie)
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  • Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays.
  • L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines.

RIYAD : Du 20 au 26 juin 2025, la Fête de la Musique résonnera dans trois grandes villes d’Arabie saoudite : Riyad, Khobar et Djeddah. À l’initiative de l’ambassade de France, en collaboration avec l’Alliance française, Saudi Music Hub, Unstable, Hayy Jameel et MDL Beast, une série d’événements musicaux viendra marquer ce rendez-vous culturel international devenu emblématique.

Née en France en 1982, la Fête de la Musique s’est imposée comme un événement planétaire célébré dans plus de 120 pays. Fidèle à son principe fondateur, elle vise à rendre la musique accessible à tous gratuitement. Elle reste, cette année encore, un puissant vecteur de dialogue culturel. En Arabie saoudite, cette célébration musicale prend une dimension particulière, s’inscrivant dans un contexte de renouveau artistique et d’ouverture culturelle, en pleine résonance avec les objectifs de Vision 2030.

L’édition 2025 proposera une programmation riche et éclectique, reflet de la vitalité des scènes française et saoudienne contemporaines. Des artistes français seront présents, comme Karimouche, figure singulière du spoken word et de la chanson engagée, ou DJ SÔNGE, productrice électro aux univers immersifs et afro-futuristes.

Ces artistes partageront la scène avec des talents saoudiens tels que Kosh, beatmaker fusionnant rythmes traditionnels et basses électroniques, ou Seera, jeune espoir de la scène folk locale. Plusieurs artistes émergents, sélectionnés avec soin en collaboration avec les partenaires saoudiens, viendront compléter cette mosaïque sonore.

Chacune des villes participantes offrira une atmosphère unique. Riyad ouvrira le bal le 20 juin avec une nuit musicale au Unstable, lieu hybride emblématique de la scène urbaine saoudienne. Le 21 juin, Khobar prendra le relais au Saudi Music Hub, un espace dédié à la formation musicale, pour une soirée plus intimiste. Enfin, Djeddah clôturera cette semaine de célébration les 25 et 26 juin, au cœur du centre culturel Hayy Jameel, avec deux concerts présentés par des artistes féminines marquantes.

Au-delà des concerts, ces rencontres musicales seront l'occasion de moments de partage, de découvertes et d'échanges, favorisant la création de liens entre artistes et publics des deux pays. En soutenant la circulation des talents et la coopération artistique, la France réaffirme son engagement en faveur de la diversité culturelle et du dialogue entre les sociétés.

La Fête de la Musique 2025 est ainsi bien plus qu’un simple rendez-vous festif : elle est le symbole vivant d’une amitié en construction, portée par des sons, des voix et des émotions partagées.


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi.