Le plan mondial du G7 sur les infrastructures fait face à une myriade d'obstacles

Le président chinois Xi Jinping s'exprime lors d'un point de presse à la fin du Forum « La nouvelle route de la soie » ou « Belt & Road Forum » à Pékin, en avril 2019. (Photo, AFP)
Le président chinois Xi Jinping s'exprime lors d'un point de presse à la fin du Forum « La nouvelle route de la soie » ou « Belt & Road Forum » à Pékin, en avril 2019. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 17 juin 2021

Le plan mondial du G7 sur les infrastructures fait face à une myriade d'obstacles

  • L’initiative B3W, pour Build Back Better World, doit permettre des investissements massifs dans les pays en développement, alors que les Chinois tissent leur influence à coups de milliards de dollars
  • Les griefs contre Pékin sont nombreux: manque de transparence, corruption ou encore non-respect des droits humains, des droits sociaux et de l'environnement

WASHINGTON : Le plan mondial sur les infrastructures proposé par les pays du G7 doit offrir aux pays en développement une alternative crédible aux « Nouvelles routes de la soie » de la Chine qui suscitent de vives critiques. A condition de surmonter une montagne d'obstacles sur le terrain.

Désireux d'impliquer leurs alliés dans la rivalité stratégique qui oppose les Etats-Unis à la Chine, Joe Biden a convaincu le G7 de lancer cette initiative, baptisée Build Back Better World (B3W, Reconstruire le monde en mieux) qui doit permettre des investissements massifs dans les pays en développement. Un domaine dans lequel les Chinois tissent leur influence à coups de milliards de dollars.

Le projet de Pékin « n'a pas tenu bon nombre de ses promesses et a généré la défiance de nombreux pays, créant une ouverture pour l'initiative B3W », résume Eswar Prasad, professeur à l'Université Cornell et spécialiste de la Chine.

Pékin avait lancé son initiative en 2013 pour développer les infrastructures terrestres et maritimes pour relier l'Asie, l'Europe et l'Afrique à la Chine.

Mais huit ans plus tard, les griefs sont nombreux: appels d'offres « non transparents », soupçons de corruption pour obtenir les marchés ou encore non-respect des droits humains, des droits sociaux et de l'environnement.

A titre d'exemple, la construction d'une centrale hydroélectrique sur l'île indonésienne de Sumatra a été largement décriée pour les dommages causés à la forêt tropicale qui abrite le primate le plus rare au monde, l'orang-outan de Tapanuli. 

L'Occident reproche également à Pékin d'inciter les pays émergents à trop s'endetter pour des projets qui n'ont pas toujours une utilité économique.

« A ce jour, les risques tant pour les États-Unis que les pays bénéficiaires soulevés par la mise en oeuvre (de l'initiative chinoise) dépassent largement ses avantages », selon les conclusions d'un groupe d'experts du Council on Foreign Relations (CFR).

Des ponts et des villas

En Afrique notamment, la Chine est parvenue à remporter des contrats en proposant des projets beaucoup moins chers que ceux de la concurrence.

Et, « petit à petit, les Chinois ont éliminé la concurrence des entreprises locales », raconte un spécialiste du développement sur ce continent, sous couvert d'anonymat.

« Au Mali, il y avait un seul pont sur le fleuve Niger à Bamako, il y en a désormais trois, bientôt quatre », ajoute-t-il, soulignant que les projets ont été accompagnés de cadeaux aux chefs politiques locaux tels que la construction de villas.

Le projet du G7 est présenté par la Maison Blanche comme « un partenariat d'infrastructures (...) de haute qualité et transparent dirigé par les grandes démocraties pour aider à réduire les besoins en infrastructures de plus de 40 000 milliards de dollars dans le monde en développement ».

Prestige

Les dirigeants du G7 espèrent jouer le rôle de catalyseurs pour attirer le financement privé.

« Le Build Back Better World, c'est ce que nous faisons déjà, mais avec une mobilisation publique notamment des Etats-Unis plus forte », tempère Thierry Déau, fondateur et dirigeant du groupe Meridiam spécialisé dans le développement et le financement de projets d'infrastructures. Plus de financement privé signifie qu'il faudra plus de transparence aussi, dit-il.

Pour le spécialiste du développement en Afrique qui préfère rester anonyme, « il n'y a pas tant un problème de capitaux qu'un problème d'absorption d'importantes sommes d'argent » lié aux difficultés techniques et à l'insécurité endémique.

Comment convaincre des entreprises de mettre sur pied des projets au Sahel face à la menace terroriste? Une fois les projets réalisés comme des écoles, comment s'assurer qu'un enseignant acceptera de s'installer loin de tout? Comment sécuriser les infrastructures, qui à peine réalisées, sont susceptibles d'être détruites par des milices locales?

« Le B3W doit trouver un écho auprès des dirigeants des pays en développement », estiment Matthew Goodman et Jonathan Hillman, experts au Center For Strategic International Studies dans une note, selon qui « beaucoup seront impatients d'élargir leurs options » et s'offrir « le prestige » de la marque B3W.

En contrepartie, ils devront accepter davantage de contrôle, des coûts plus élevés et des délais de réalisation plus longs.

Enfin, la grande question est de savoir quels rôles vont endosser le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, institutions historiquement au cœur du développement.

Car si elles devront s'impliquer pour montrer qu'elles restent incontournables, elles doivent ménager les intérêts concurrents de leurs principaux actionnaires.

Le FMI et la BM, qui n'ont pas souhaité réagir, pourraient devenir « un champ de bataille d'influence, avec un G7 et une Chine tentant de façonner les modèles de prêt de ces institutions en fonction de leurs propres intérêts économiques et géopolitiques », estime Eswar Prasad.


Un médecin syrien condamné à perpétuité en Allemagne pour crimes contre l'humanité sous Assad

L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle. (AFP)
L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle. (AFP)
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  • Agé de 40 ans, il réfutait toutes les accusations, parmi lesquelles celles d'avoir mis le feu aux parties génitales d'un adolescent et d'avoir administré une injection létale à un détenu qui avait résisté aux coups
  • "Il a tué deux personnes et blessé grièvement neuf autres", a affirmé en rendant son verdict le juge Christoph Koller, soulignant que ces actes commis en 2011 et 2012 "s'inscrivaient dans la réaction brutale du régime dictatorial et injuste d'Assad"

FRANCFORT: Un médecin syrien, accusé de tortures d'opposants au régime de Bachar al-Assad, a été condamné à la prison à vie lundi par la justice allemande, après un procès fleuve de plus de trois ans à Francfort.

Arrivé en Allemagne en 2015, où il a exercé comme chirurgien orthopédique jusqu'à son arrestation en 2020 après avoir été reconnu par d'autres réfugiés syriens, Alaa Moussa était jugé pour de multiples crimes sur des détenus dans des hôpitaux militaires de Damas et de Homs durant la guerre civile en Syrie.

Agé de 40 ans, il réfutait toutes les accusations, parmi lesquelles celles d'avoir mis le feu aux parties génitales d'un adolescent et d'avoir administré une injection létale à un détenu qui avait résisté aux coups.

"Il a tué deux personnes et blessé grièvement neuf autres", a affirmé en rendant son verdict le juge Christoph Koller, soulignant que ces actes commis en 2011 et 2012 "s'inscrivaient dans la réaction brutale du régime dictatorial et injuste d'Assad" aux manifestations des opposants.

Dénonçant "une violation massive des droits de l'Homme" par l'accusé, le juge a souligné que le verdict était aussi une façon de montrer "que la souffrance des victimes n'est pas oubliée".

"Outre les difficultés inhérentes à un délai de 12 ans, le régime syrien a tenté jusqu'à sa chute (en décembre 2024, ndlr) d'exercer une influence sur la procédure" allemande, a-t-il poursuivi, évoquant des menaces sur des proches des témoins.

Etant donné la gravité des faits, la condamnation à la perpétuité d'Alaa Moussa a été assortie d'une peine de sûreté pour une durée non encore définie (qui sera décidée au bout de quinze ans d'incarcération).

Lors de son procès commencé le 19 janvier 2022, entouré de hautes mesures de sécurité, Alaa Moussa avait été confronté à plus d'une cinquantaine de témoins et d'anciennes victimes.

Certains avaient témoigné masqués et beaucoup avaient fait état de menaces et d'intimidation à l'encontre de leur famille restée au pays alors que l'ombre des services secrets syriens planait sur les audiences.

Une situation qui s'est détendue après la chute, durant le procès, du dictateur Bachar al-Assad, renversé en décembre 2024 et désormais réfugié en Russie.

Parmi les témoins, un ancien lieutenant d'Alep, âgé aujourd'hui d'une quarantaine d'années, emprisonné après avoir refusé de tirer sur des manifestants en novembre 2011.

"Puni pour ses actes" 

Il avait affirmé avoir vu Alaa Moussa infliger des injections à des malades allongés sur le sol, qui sont décédés peu après, dans l'hôpital militaire où il sévissait.

"Aucun tortionnaire, quel que soit le lieu où il a commis son crime, ne peut être certain d'échapper à la justice. Il devra toujours s'attendre à être puni pour ses actes", a asséné le juge Christoph Koller lors de son verdict.

L'Allemagne a déjà poursuivi et jugé des auteurs de crimes contre l'humanité et de crimes de guerre commis hors de son territoire, notamment des Syriens et des Irakiens, au nom du principe juridique de compétence universelle.

Il y a deux semaines, la justice allemande avait ainsi condamné à la prison à vie un ancien chef d'une milice syrienne soutenant l'ex-président Bachar al-Assad, reconnu coupable notamment de meurtre, d'actes de torture et de séquestration entre 2012 et 2014.

Lors du premier procès au monde sur des exactions du régime de Bachar al-Assad tenu en Allemagne, Anwar Raslan, un ex-gradé des services de renseignement syriens, avait été condamné en janvier 2022 à la prison à vie pour le meurtre de 27 prisonniers et des faits de torture sur au moins 4.000 autres, en 2011 et 2012, dans la prison Al-Khatib.

Des procès sur les crimes commis en Syrie ont également eu lieu ailleurs en Europe, notamment en France et en Suède.

Le conflit en Syrie, déclenché par des protestations pacifiques violemment réprimées en 2011, a fait plus d'un demi-million de morts, déplacé des millions de personnes et ravagé l'économie et les infrastructures du pays.


Ukraine: l'aide européenne compense le désengagement américain, selon le Kiel Institute

Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
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  • « L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.
  • Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

PARIS : Selon l'institut de recherche allemand Kiel Institute, une hausse de l'aide des pays européens à l'Ukraine a permis début 2025 de combler le vide laissé par le désengagement de la nouvelle administration américaine de Donald Trump.

« L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.

Alors que « les États-Unis, qui étaient auparavant le plus gros donateur à l'Ukraine, n'ont pas annoncé de nouvelle enveloppe depuis début janvier », l'Ukraine a tout de même reçu plus d'aide de janvier à avril 2025 qu'en moyenne les années précédentes sur la même période. 

« Reste à savoir s'il s'agit d'une hausse temporaire ou du début d'une évolution plus durable du rôle de l'Europe en tant que principal soutien de l'Ukraine », a déclaré Christoph Trebesch, qui dirige l'équipe du Kiel Institute chargée de suivre les engagements en faveur de l'Ukraine, cité dans le communiqué.

Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

En revanche, « il est frappant de constater le peu d'aide allemande allouée ces derniers mois », a-t-il commenté. « Au lieu d'augmenter son soutien après l'arrivée de Trump au pouvoir, nous observons une forte baisse de l'aide allemande par rapport aux années précédentes. »

« La tendance est la même pour l'Italie et l'Espagne », a-t-il précisé. 

Au 30 avril 2025, 294 milliards d'euros au total ont été alloués à des dépenses précises en faveur de l'Ukraine (sur 405 milliards promis), selon les derniers chiffres du Kiel Institute. Les 111 milliards restants ont été promis à long terme, mais pas encore alloués.

Sur la somme déjà donnée, 140 milliards d'euros correspondent à de l'aide militaire, 133 milliards à de l'aide financière et 21 milliards à de l'aide humanitaire.

Les principaux donateurs sont l'Union européenne et ses membres (131 milliards d'euros donnés ou alloués), les États-Unis (115 milliards) et le Royaume-Uni (19 milliards).

En matière d'aide militaire, l'Europe, le Royaume-Uni compris, « dépasse pour la première fois depuis juin 2022 les États-Unis », selon le Kiel Institute. Les Européens ont déjà donné ou alloué 72 milliards d'euros d'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre, contre 65 milliards pour les États-Unis. 


Les dirigeants du G7, dont Trump, se rejoignent au Canada tandis qu'un conflit oppose l'Iran et Israël

Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
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  • Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël.
  • La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

KANANASKIS, CANADA : Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël, alors que leurs dirigeants, dont le président américain, se retrouvent pour un sommet sous tension dans les Rocheuses canadiennes.

Il s'agit du premier grand sommet depuis que Donald Trump est revenu au pouvoir en janvier, ce qui a fragilisé l'unité du club des grandes démocraties industrialisées (Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis, France, Italie et Japon).

Le président américain, qui n'a cessé de menacer le Canada ces derniers mois, est arrivé en fin de journée dans ce pays, avec sur la tête une casquette blanche portant son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l'Amérique »).

Pour cette réunion qui se déroule à Kananaskis, dans le parc national de Banff, dans l'ouest du Canada, il retrouvera ses alliés du G7 ainsi que les dirigeants de nombreux autres pays invités : l'Inde, l'Ukraine, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Australie seront notamment présents.

La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

Mais parviendront-ils à parler d'une voix commune, notamment sur cette région du monde ?

Israël a stupéfié le monde vendredi en ouvrant un nouveau front avec une campagne militaire surprise et massive contre l'Iran.

Selon une source gouvernementale citée par l'AFP, les dirigeants du G7 travaillent à une déclaration commune. Reste à décider s'il s'agit d'appeler à la désescalade ou simplement de soutenir Israël en affirmant que le pays a le droit de se défendre. 

Mais cette guerre n'est pas le seule enjeu des discussions à Kananaskis. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est parmi les invités et doit s'entretenir avec Donald Trump

Le président américain, qui s'est rapproché de façon spectaculaire de Moscou, a de nouveau eu un entretien téléphonique samedi avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier lui a dit être prêt à un nouveau round de négociations.

De leur côté, les Européens tentent de convaincre Donald Trump de promulguer de nouvelles sanctions contre Moscou, ciblant plus précisément les ventes de pétrole russe. 

Tous les pays souhaitent par ailleurs aborder l'aspect commercial avec le président Trump. En imposant des taxes douanières d'au moins 10 % sur la plupart des produits entrant aux États-Unis, ce dernier a dévié le cours de la mondialisation et menacé l'économie mondiale d'un ralentissement général. 

Ce sommet du G7 est la première visite du président américain sur le sol canadien depuis qu'il a menacé son voisin du nord, estimant qu'il serait préférable qu'il devienne le 51^e État américain.

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, et Donald Trump se rencontreront lundi matin lors d'un tête-à-tête. Outre MM. Carney et Zelensky, le dirigeant américain doit aussi rencontrer la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum.