Essais nucléaires : Macron reconnaît la «dette» de la France envers la Polynésie

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Publié le Mercredi 28 juillet 2021

Essais nucléaires : Macron reconnaît la «dette» de la France envers la Polynésie

  • Après 17 essais nucléaires au Sahara, la France avait transféré en 1966 son champ de tir en Polynésie française
  • Le dernier a eu lieu le 27 janvier 1996 après la décision du président Jacques Chirac de reprendre les tirs malgré le moratoire décidé trois ans plus tôt par son prédécesseur, François Mitterrand

PAPEETE: Sans demander pardon, Emmanuel Macron a affirmé que la France avait "une dette" à l'égard de la Polynésie française pour avoir réalisé près de 200 essais nucléaires dans le Pacifique pendant 30 ans, jusqu'en 1996.

"J'assume et je veux la vérité et la transparence avec vous", a affirmé mardi à Papeete (mercredi matin à Paris) le chef de l'Etat, en s'adressant aux responsables polynésiens au dernier jour de sa première visite dans l'immense archipel.

Reconnaissant que ce dossier sensible affectait "la confiance" entre Papeete et Paris, il a notamment annoncé que les victimes de ces essais, dont certains souffrent de cancer, devaient être mieux indemnisées.

"La nation a une dette à l'égard de la Polynésie française. Cette dette est le fait d'avoir abrité ces essais, en particulier ceux entre 1966 et 1974, dont on ne peut absolument pas dire qu'ils étaient propres", a-t-il déclaré, applaudi par l'assistance.

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Emmanuel Macron signant la fin de son discours en Polynésie française. (AFP). 

En 1966, la France a transféré son champ de tir du Sahara vers la Polynésie française, sur les atolls de Mururoa et Fangataufa. Là, elle a procédé en 30 ans à 193 nouveaux essais, atmosphériques jusqu'en 1974, puis souterrains.

De 1966 à 1996, 193 essais nucléaires en Polynésie française

Après 17 essais nucléaires au Sahara, la France transfère en 1966 son champ de tir en Polynésie française, sur les atolls de Mururoa et Fangataufa, où elle procédera à 193 nouveaux essais en trente ans, non sans dommages pour la population locale qui réclame pardon et réparation.


Les atolls de Mururoa et Fangataufa sont situés dans l'archipel des Tuamotu, où étaient basées les installations du Centre d'expérimentation du Pacifique (CEP). Sur les 193 essais nucléaires effectués, dont 12 de sécurité (sans explosion), 167 ont eu lieu à Mururoa.


Du 2 juillet 1966, date du premier essai français dans le Pacifique-sud, jusqu'au dernier, le 27 janvier 1996, 46 tirs ont lieu dans l'atmosphère - au sol ou en altitude -, puis 147 dans des puits souterrains. D'abord dans la couronne des atolls, puis à partir de 1979 au milieu des lagons pour éviter le tassement des récifs. 

polynesie

 


Le 24 août 1968, la France fait exploser au-dessus de Fangataufa sa première bombe H (thermonucléaire) de 2,6 mégatonnes (Mt) - une bombe à fusion, beaucoup plus puissante que celle à fission.


En juin 1995, le président Jacques Chirac annonce la reprise des tirs français, mettant fin à un moratoire décidé trois ans plus tôt par son prédécesseur, François Mitterrand, et respecté par les grandes puissances nucléaires, à l'exception de la Chine. 


Cette dernière série de tirs, de 30 à 120 kt, se déroule du 5 septembre 1995 au 27 janvier 1996, à Mururoa et Fangataufa. Elle doit permettre à Paris de disposer des données nécessaires pour passer au stade de la simulation en laboratoire.


Mais la reprise des tirs déclenche un tonnerre de protestations et met la France en position d'accusée sur la scène internationale. Des huit tirs programmés, six seulement auront lieu, jusqu'à l'annonce de l'arrêt définitif des essais, le 29 janvier, et de la décision de la France de signer le Traité d'interdiction complète des essais nucléaires.


Mais pour les Polynésiens et les personnels affectés aux essais, les conséquences vont bien au-delà de l'arrêt des tirs: environ 2.000 personnes résidaient pendant les essais dans le secteur défini par une loi d'indemnisation votée en 2010. Et certains de ces essais ont eu des retombées radioactives "très importantes" en raison des conditions météorologiques sur les îles alentour, selon un rapport de la commission de la défense du Sénat de septembre 2013.


Les Polynésiens considèrent que les essais sont la cause de nombreux cancers dans l'archipel. Le dépôt de dossiers auprès du Comité d'indemnisation des victimes des essais nucléaires (Civen), a été jugé "particulièrement complexe du fait de l'insularité ou de la complexité des dossiers d'indemnisation sanitaire", par le ministère de la Santé.


Les essais dans le Pacifique ont également eu des conséquences sur l'environnement, comme des fissures dans la barrière de corail.

"Je veux vous dire clairement que les militaires qui les ont faits ne vous ont pas menti. Ils ont pris les mêmes risques", a estimé Emmanuel Macron.

Mais, a-t-il ajouté, "Je pense que c'est vrai qu'on n'aurait pas fait ces mêmes essais dans la Creuse ou en Bretagne. On l'a fait ici parce que c'était plus loin, parce que c'était perdu au milieu du Pacifique". 

Il a cependant déclaré "assumer pleinement" et défendu le choix fait par le général de Gaulle, puis poursuivi par ses successeurs, de doter la France de l'arme nucléaire, notamment pour protéger la Polynésie française.

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Accolade entre Emmanuel Macron et son homologue polynésien Edouard Fritch. (AFP). 

«Démagogie»

Dans son discours, le président n'a pas fait la demande de "pardon" exigée par des associations de victimes ou le chef indépendantiste Oscar Temaru, à l'initiative d'une manifestation ayant réuni plusieurs milliers de personnes dans les rues de Papeete le 17 juillet. 

"Je pourrais me débarrasser du sujet en disant +excuses+, comme on le fait quand on bouscule quelqu'un pour pouvoir continuer sa route, c'est trop facile. Et c'est trop facile pour un président de la République de ma génération de dire en quelque sorte +mes prédécesseurs ont eu tort, le pire a été fait, excuses et indemnités+".

"Il n'y a aucune avancée dans ce discours, que de la démagogie (...) Les mensonges d'Etat continuent", a regretté le père Auguste Uebe-Carlson, président de l'association 193, sur la chaîne Polynésie 1ère.

Mais le président de la Polynésie, l'autonomiste Edouard Fritch, s'est félicité qu'Emmanuel Macron veuille "enfin que la vérité soit mise sur la table" après "25 ans de silence".

Sur la question sensible des indemnisations, Emmanuel Macron a estimé qu'elle était "trop lente" et annoncé une amélioration du traitement des dossiers, alors que le nombre de personnes indemnisées pour avoir contracté des maladies radio-induites reste "particulièrement faible", selon le ministre des Outre-mer Sébastien Lecornu.

Il a par ailleurs indiqué que les archives sur les essais "seront ouvertes", à l'exception des données militaires les plus sensibles. 

Ces annonces interviennent cinq ans après la reconnaissance, par le président François Hollande, lors d'une visite en 2016, de "l'impact sur l'environnement et la santé" de 30 années d'essais. Il avait alors pris une série d'engagements, dont certains ne sont pas encore concrétisés, comme l'ouverture d'un Centre de mémoire des essais nucléaires.

Dans son discours entamé et conclu par quelques mots en polynésien, Emmanuel Macron a loué le "pacte unique, intime, sensible, entre la République et la Polynésie française" malgré les "heures sombres et les morsures de l'Histoire". "Il y a un en même temps" car "vous êtes à la fois profondément polynésiens et profondément patriotes", a-t-il ajouté, en assurant qu'il défendrait leur volonté de "résister" pour "faire revivre et transmettre" leur culture. 

Sur le plan économique, Emmanuel Macron a annoncé un prêt de 300 millions en appui aux investissements, notamment pour développer la compagnie aérienne Air Tahiti Nui, ainsi que de nouvelles mesures de défiscalisation. Rappelant que l'Etat consacrait plus d'un milliard et demi d'euros à la Polynésie chaque année, il a précisé que plus de 600 millions avaient été engagés pour faire face à la crise du Covid-19.

Après avoir visité l'hôpital de Papeete à son arrivée samedi, il a de nouveau exhorté les Polynésiens à se faire vacciner, "seul moyen pour nous sortir" de la crise, en soulignant que sur les 230.000 doses envoyées dans l'archipel, 110.000 restaient encore disponibles.

M. Macron a également rencontré mardi à Papeete une délégation de responsables politiques, coutumiers et religieux, venue de Wallis et Futuna, qui vont célébrer jeudi les 60 ans de leur statut de Territoire d'Outre-mer (TOM). Le chef de l'Etat n'avait pu se rendre dans cet archipel pour des raisons sanitaires.

Emmanuel Macron a ensuite présidé en visioconférence le Conseil des ministres, depuis l'avion le ramenant en métropole.


Laurent Wauquiez dépose une proposition de loi pour interdire le voile aux mineures

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  • Sa proposition vise à modifier la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public
  • Il apparaît toutefois peu probable que ce texte soit examiné avant deux mois : la journée annuelle réservée aux propositions du groupe LR n’est prévue que le 22 janvier

PARIS: Le chef des députés Les Républicains Laurent Wauquiez a déposé lundi une proposition de loi pour interdire aux mineures de porter le voile dans l'espace public, mais son examen rapide semble peu probable et sa constitutionnalité mise en doute par des juristes.

M. Wauquiez veut interdire "à tout parent d'imposer à sa fille mineure ou de l'autoriser à porter, dans l'espace public, une tenue destinée à dissimuler sa chevelure", selon l'article unique de sa proposition de loi.

Il s'appuie notamment sur un rapport sur les Frères musulmans commandé par le gouvernement et publié en mai dernier, relatant l'augmentation "massive et visible du nombre de petites filles portant le voile".

Il estime que "le voilement de jeunes filles" heurte les principes républicains "les plus fondamentaux", tels que la "protection de l'enfant", "la liberté de conscience" et "l'égalité entre les hommes et les femmes".

Sa proposition vise à modifier la loi du 11 octobre 2010 interdisant la dissimulation du visage dans l'espace public.

Il apparaît toutefois peu probable que ce texte soit examiné avant deux mois : la journée annuelle réservée aux propositions du groupe LR n’est prévue que le 22 janvier.

En outre, des professeurs de droit public interrogés par l'AFP émettent de sérieuses réserves quant à la conformité avec la Constitution de cette proposition déjà formulée, tout en la circonscrivant aux moins de 15 ans, par le patron des députés macronistes Gabriel Attal en mai - même si celui-ci n'avait pas déposé de texte.

Pour la constitutionnaliste Anne-Charlène Bezzina, elle n'a "aucune chance d'être conforme", rappelant que la loi sur la dissimulation du visage que son texte vient modifier a un motif de "sécurité à l'ordre public" et ne "vise aucune religion en particulier".

Or, M. Wauquiez cible très clairement le voile islamique dans l'espace public, contrevenant "au principe de liberté de religion", ajoute l'enseignante.

Jean-Philippe Derosier, professeur de droit public à l’Université de Lille, se dit également "très réservé".

Bien que le texte se heurte au principe de liberté religieuse, Laurent Wauquiez justifie sa démarche par la "préservation des droits de l’enfant", ce qui est "assez habile", reconnaît-il, mais insuffisant pour garantir sa conformité constitutionnelle.

Assimiler le port du voile par une mineure à "une forme d’asservissement" reste juridiquement fragile. "Incontestablement, une fillette de 9 ans pourrait le faire par mimétisme ou sous l'effet d’une instrumentalisation", observe-t-il. "Mais une adolescente de 16 ans peut davantage le porter par conviction personnelle."

Il rappelle par ailleurs que l’interdiction de dissimulation du visage est justifiée par des raisons de sécurité, avec la nécessité de pouvoir "identifier les personnes", un raisonnement difficilement transposable au fait de se couvrir la chevelure.


Quatre associations musulmanes portent plainte contre un sondage Ifop

Le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, pose dans la grande mosquée de Lyon le 30 septembre 2025. (AFP)
Le recteur de la grande mosquée de Lyon, Kamel Kabtane, pose dans la grande mosquée de Lyon le 30 septembre 2025. (AFP)
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  • Les Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) du Loiret, de l'Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X auprès du tribunal judiciaire de Paris après la publication le 18 novembre du sondage Ifop
  • Les CDCM sont l'échelon départemental du Conseil français du culte musulman (CFCM), ex-instance de représentation de l'islam auprès des pouvoirs publics, tombée en disgrâce en 2021

PARIS: Quatre associations du culte musulman ont porté plainte lundi pour dénoncer le manque d'objectivité supposé d'un sondage Ifop sur le rapport des fidèles à l'islam, ont annoncé leurs avocats à l'AFP.

Les Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) du Loiret, de l'Aube, des Bouches-du-Rhône et de Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X auprès du tribunal judiciaire de Paris après la publication le 18 novembre du sondage Ifop "Etat des lieux du rapport à l'islam et à l'islamisme des musulmans de France".

Les CDCM sont l'échelon départemental du Conseil français du culte musulman (CFCM), ex-instance de représentation de l'islam auprès des pouvoirs publics, tombée en disgrâce en 2021.

Ce sondage "viole le principe d'objectivité posé par la loi du 19 juillet 1977 relative à la publication et la diffusion des sondages d'opinion", se "fonde sur des questions orientées" et se "focalise sur des résultats minoritaires mis en avant à des fins polémiques", accusent les avocats Mes Raphaël Kempf et Romain Ruiz, dans un communiqué.

Selon eux, le sondage distille "le poison de la haine dans l'espace public", renforçant "les amalgames".

Contacté par téléphone, François Kraus, directeur du pôle politique/actualités de l'Ifop, a indiqué qu'il répondrait à l'AFP par écrit, ce qu'il n'avait pas fait dans l'après-midi.

Le CFCM avait déjà dans un communiqué vendredi déploré "une nouvelle mise à l’index des citoyens français de confession musulmane et de leurs pratiques religieuses", avec des analyses et données "contestables".

L'enquête Ifop, basée sur un échantillon de 1.005 personnes de religion musulmane, a été commandée par le média confidentiel "Ecran de veille", qui se présente comme "le mensuel pour résister aux fanatismes".

L'attention médiatique et politique s'est beaucoup focalisée sur le sous-échantillon des 15-24 ans, constitué de 291 personnes, et révélant une forte pratique (87% se considèrent religieux, 67% disent prier "au moins une fois par jour", 83% font le ramadan)

François Kraus écrit dans sa conclusion sur le site de l'Ifop que "cette enquête dessine très nettement le portrait d'une population musulmane traversée par un processus de réislamisation, structurée autour de normes religieuses rigoristes et tentée de plus en plus par un projet politique islamiste".

Le sondage a provoqué de vives réactions, l'extrême droite y voyant un signe d'"islamisation", tandis que des représentants de la communauté musulmane ont regretté "une stigmatisation".

"A mal poser les questions, on finit toujours par fabriquer les peurs qu’on prétend mesurer", affirmait dans son billet hebdomadaire le recteur de la Grande mosquée de Paris Chems-eddine Hafiz.

Le politiste Haouès Seniguer qualifie pour sa part de raccourci "grossier et réducteur" l'idée, sous-jacente selon lui au sondage, qu'une observance stricte de l'islam soit la porte d'entrée mécanique vers l'islamisme.


Macron invité de RTL mardi matin

 Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué. (AFP)
Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué. (AFP)
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  • Après sa participation au G20 ce week-end à Johannesburg et une visite au Gabon, le chef de l'Etat Français a décollé lundi pour l'Angola, où il doit participer au sommet Union européenne-Union africaine
  • Emmanuel Macron se rendra notamment jeudi à Varces (Isère), sur un site de l'armée de terre, où il pourrait annoncer l'instauration d'un service militaire volontaire

PARIS: Emmanuel Macron, en déplacement en Afrique en ce début de semaine, sera l'invité de RTL mardi matin à 07h35, a annoncé la radio lundi dans un communiqué.

Le président de la République sera notamment interrogé sur la situation internationale, alors qu'une nouvelle réunion de la "coalition des volontaires" au soutien de l'Ukraine est prévue mardi en visioconférence.

Après sa participation au G20 ce week-end à Johannesburg et une visite au Gabon, le chef de l'Etat a décollé lundi pour l'Angola, où il doit participer au sommet Union européenne-Union africaine.

M. Macron sera aussi interrogé sur "les menaces qui pèsent sur la France", selon le communiqué de RTL.

Emmanuel Macron se rendra notamment jeudi à Varces (Isère), sur un site de l'armée de terre, où il pourrait annoncer l'instauration d'un service militaire volontaire.