Les fondateurs juifs de Ben & Jerry’s soutiennent la décision de boycott de la Cisjordanie

«La décision de mettre fin à la vente de glace dans les territoires occupés est l’une des décisions les plus importantes prises par l’entreprise», selon Bennett Cohen et Jerry Greenfield. (Fichier/AFP)
«La décision de mettre fin à la vente de glace dans les territoires occupés est l’une des décisions les plus importantes prises par l’entreprise», selon Bennett Cohen et Jerry Greenfield. (Fichier/AFP)
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Publié le Jeudi 29 juillet 2021

Les fondateurs juifs de Ben & Jerry’s soutiennent la décision de boycott de la Cisjordanie

  • Cette décision intervient dans un contexte de pressions exercées par le gouvernement israélien, la Knesset et les États-Unis pour que l’entreprise revienne sur sa position
  • La présidente de l’entreprise du Vermont dément que la décision ait été motivée par l’antisémitisme

LONDRES: Les cofondateurs juifs du fabricant de glace américain Ben & Jerry’s ont apporté leur soutien «sans équivoque» à l’entreprise pour sa décision «courageuse» de ne plus vendre de produits en Cisjordanie occupée.

Cette décision intervient alors que le géant des glaces du Vermont suscite de vives réactions. En effet, le gouvernement israélien a fait pression sur Unilever, société mère de l’entreprise, et la présidente du conseil d’administration de Ben & Jerry’s été contrainte de nier les accusations d’antisémitisme.

Bennett Cohen et Jerry Greenfield, qui ont fondé l’entreprise en 1978, ont écrit dans un article pour The New York Times: «Nous sommes les fondateurs de Ben & Jerry’s. Nous sommes également juifs et fiers de l’être. Cela fait partie de ce que nous sommes et de la manière dont nous nous sommes identifiés tout au long de notre vie. Lorsque notre entreprise a commencé à se développer à l’international, Israël a été l’un de nos premiers marchés étrangers. Nous étions – et nous le sommes toujours – des partisans de l’État d’Israël, mais il est possible de soutenir Israël et de s’opposer à certaines de ses politiques, tout comme nous nous sommes opposés aux politiques du gouvernement américain.»

«Par conséquent, nous soutenons sans équivoque la décision de l’entreprise de mettre fin à ses activités dans les territoires occupés que la communauté internationale, y compris l’ONU, considère comme une occupation illégale», ont-ils ajouté.

Bien qu’ils ne soient plus à la tête de Ben & Jerry’s, les deux fondateurs estiment que la société se trouve «du bon côté» de l’histoire.

«La décision de mettre fin à la vente de glace dans les territoires occupés est l’une des décisions les plus importantes prises par l’entreprise au cours de ses 43 ans d’existence.»

«Le fait que nous soutenons la décision de l’entreprise n’est pas une contradiction, ni un acte antisémite. En effet, nous pensons que cet acte peut et doit être considéré comme un progrès des concepts de justice et de droits de l’homme, principes fondamentaux du judaïsme», soulignent-t-il, ajoutant qu’il convient de noter que Ben & Jerry’s continuerait à vendre ses produits en Israël.

Dans un communiqué, le géant des glaces a annoncé qu’il s’était séparé de la société israélienne chargée de la fabrication et de la distribution de ses produits dans la région. «Bien que Ben & Jerry’s ne soit plus vendu dans les territoires palestiniens occupés, nous resterons en Israël dans le cadre d’un autre arrangement. Nous partagerons une mise à jour à ce sujet dès que nous serons prêts», indique-t-il.

Unilever a affirmé qu’il était «pleinement engagé» à poursuivre ses activités en Israël, malgré les fortes pressions politiques contre cette décision dans le pays et à l’étranger.

Le Premier ministre israélien, Naftali Bennett, a promis d’«agir de manière agressive» pour que l’entreprise revienne sur sa décision, tandis que le représentant permanent d’Israël auprès des Nations unies, Gilad Erdan, a reproché à l’assemblée de favoriser un environnement dans lequel Israël est condamné par la communauté internationale alors que d’autres pays, comme la Syrie et l’Iran, font l’objet d'un examen moins minutieux.

«Lorsque ce conseil ne parvient pas à prendre des mesures strictes contre les pires violations des droits de l’homme dans le monde, comme en Iran et en Syrie, et qu’il s’en prend plutôt au seul État juif du monde, il n’est pas étonnant que des entreprises comme Ben & Jerry’s et Unilever se permettent de boycotter Israël», a-t-il souligné.

Mercredi, 90 des 120 membres de la Knesset ont signé une lettre adressée à Ben & Jerry’s lui demandant de revenir sur sa décision «honteuse, immorale et regrettable», ajoutant qu’elle pourrait constituer une violation de la loi israélienne.

Le gouvernement israélien a également écrit à 35 États américains appliquant des lois antiboycott pour leur demander d’envisager de prendre des mesures contre Ben & Jerry’s, tandis qu’à New York, le propriétaire juif d’un magasin Ben & Jerry’s s’est engagé à faire don de 10% de tous ses bénéfices à Israël.

«Nous ne pouvions pas rester les bras croisés sans rien dire », a déclaré Joel Gasman, le propriétaire du magasin. «La décision de l’entreprise a certainement nui à nos résultats et à la valeur globale de notre magasin. Nous craignions un boycott de la part des clients. Nous le craignons toujours.»

Dans la ville de North Hempstead, à Long Island, qui a signé des lois locales contre les boycotts d’Israël en 2017, les responsables ont qualifié la décision de «dangereuse et anti-Israël».

Selon le maire de la ville, Judi Bosworth, «les lois anti-BDS de North Hempstead garantissent que l’argent des contribuables n’est jamais utilisé pour faire des affaires avec ou soutenir une entreprise qui s’engage dans un boycott d’Israël».

«North Hempstead est une communauté d’unité et d’inclusion. Nous restons engagés dans la lutte contre l’intolérance et nous demeurons inébranlables dans notre condamnation de ce mouvement BDS.»

La présidente du conseil d’administration de Ben & Jerry’s, Anuradha Mittal, a toutefois dénoncé les critiques à l’encontre de l’entreprise et réfuté les accusations d’antisémitisme.

«Je suis fière de @benandjerrys pour avoir pris position afin de mettre fin à la vente de ses glaces dans les territoires palestiniens occupés, a-t-elle tweeté. Cette action n’est pas antisémite. Je ne suis pas antisémite. La haine ignoble dont on m’a accablée ne m’intimide pas. S’il vous plaît, travaillez pour la paix et non pour la haine!»

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.