Débat en Irak sur la restitution d'archives du parti Baas de Saddam

Statue déboulonnée de Saddam Hussein à Bagdad en avril 2003. (Eric Feferberg/AFP)
Statue déboulonnée de Saddam Hussein à Bagdad en avril 2003. (Eric Feferberg/AFP)
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Publié le Vendredi 11 septembre 2020

Débat en Irak sur la restitution d'archives du parti Baas de Saddam

  • Dossiers d'adhésion au Baas et lettres de délation de citoyens ordinaires contre des voisins accusés de critiquer Saddam Hussein font partie d’un lot d’archives découvert par des soldats américains en 2003
  • Numérisés et stockés à la Hoover institution, les 48 tonnes de documents ont été discrètement ramenées à Bagdad le 31 août, et immédiatement cachées dans un lieu tenu secret

BAGDAD : De précieuses archives du régime de Saddam Hussein secrètement restituées à l'Irak ont mis au jour le douloureux passé du pays, suscitant l'espoir de pouvoir élucider le sort de proches disparus depuis longtemps mais aussi la crainte d'une nouvelle effusion de sang.

Cinq millions de pages de documents internes du Baas avaient été retrouvés dans le siège partiellement inondé du parti à Bagdad, quelques mois seulement après l'invasion américaine qui a mis fin au règne de Saddam Hussein en 2003.

Deux hommes avaient été appelés par des soldats américains pour déchiffrer les dossiers en arabe de ce parti depuis dissous et interdit : Il s'agit de Kanan Makiya, un opposant et archiviste de longue date, et Moustafa al-Kazimi, alors écrivain et activiste, aujourd'hui Premier ministre irakien.

"Nous sommes entrés dans le sous-sol inondé avec des lampes de poche, parce que l'électricité était coupée", raconte à l'AFP M. Makiya par téléphone depuis les États-Unis.

"En lisant ces documents, Moustafa et moi avions compris que nous étions tombés sur quelque chose d'énorme", dit-il.

Il y avait notamment des dossiers d'adhésion au Baas et des lettres de délation de citoyens ordinaires contre des voisins accusés de critiquer Saddam Hussein.

Alors que Bagdad s'enfonçait dans les violences confessionnelles, M. Makiya a convenu avec les autorités américaines de transférer les archives aux États-Unis, une décision qui demeure controversée.

Les documents ont été numérisés et stockés à la Hoover Institution, un groupe de réflexion à l'Université de Stanford, avec un accès limité aux chercheurs sur place.

Mais le 31 août, les 48 tonnes de documents ont été discrètement ramenées à Bagdad et immédiatement cachées dans un lieu tenu secret, raconte à l'AFP un haut responsable irakien.

Aucun des deux gouvernements n'a annoncé le transfert de ces documents et Bagdad n'envisage pas d'ouvrir les archives au public, a-t-il précisé.

"Début d'un fil"

Mais des milliers de familles pourraient avoir un intérêt personnel dans ces archives.

"Saddam a détruit le peuple irakien. On ne peut pas garder le silence sur une chose comme ça", affirme Ayyoub Al-Zaidy, 31 ans.

Son père, Sabar, a disparu après avoir été mobilisé pour l'invasion du Koweït en 1990.

La famille n'a pas reçu de notification de sa mort ou de sa capture, et espère que les archives du Baas élucideront son sort.

"Ces documents sont peut-être le début d'un fil qui va nous permettre de savoir s'il est toujours en vie", espère Hasina, la mère d'Ayyoub, âgée de 51 ans.

Elle n'a rien pu obtenir de l'ancien régime sur le sort de son époux et a peu d'espoir d'y parvenir aujourd'hui, même avec le retour des archives : "je serai morte avant qu'ils ne les rendent publiques".

D'autres estiment que les archives pourraient aider le pays à empêcher que sa sanglante histoire ne se reproduise.

"Beaucoup de jeunes disent aujourd'hui que +Saddam était bon+" pour le pays, explique à l'AFP le réalisateur irakien Mourtadha Faysal.

M. Faysal avait 12 jours lorsque son père a été arrêté dans la ville de Najaf lors d'un soulèvement en 1991. Depuis, on ne sait rien de lui.

Il souhaite l'ouverture des archives pour en finir avec l'idée que le régime du Baas était meilleur que la classe politique fragmentée d'aujourd'hui.

"Les gens devraient comprendre comment ne pas créer un autre dictateur. Cela est déjà en train de se produire -- nous avons beaucoup de petits dictateurs aujourd'hui", souligne-t-il.

Les divisions sur le Baas restent profondes en Irak.

"L'ouverture des archives au public prouverait que le parti Baas était patriotique", affirme à l'AFP un ancien membre de second rang du parti.

"Horreur"

Mais "l'Irak n'est pas prêt", estime Abbas Kazem, directeur de l'Initiative pour l'Irak au Atlantic Council, qui s'est penché sur les documents pour ses ouvrages sur l'histoire et la société irakiennes.

L'Irak "n'a pas entamé une réconciliation, qui permettrait à ces archives de jouer un rôle", affirme-t-il faisant état de documents impliquant même des responsables actuels.

"Les baasistes ont tout documenté, depuis les blagues jusqu'aux exécutions", dit-il.

Les États-Unis disposent toujours d'archives irakiennes saisies après l'invasion, y compris "des dossiers gouvernementaux encore plus dangereux", explique à l'AFP un autre responsable irakien.

Les événements sanglants racontés dans ces documents feront un jour partie du passé lointain de l'Irak, espère M. Makiya.

Selon lui, "on ne peut pas se souvenir des gloires de la Mésopotamie et de l'empire abbasside, et oublier les 35 années d'horreur réelle que l'Irak moderne a vécu".

"Cela fait autant partie de ce que signifie être un Irakien aujourd'hui que ces choses romantiques", dit-il.


Attentat à Damas: la Turquie ne laissera pas la Syrie «entraînée dans l'instabilité», affirme Erdogan

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  • Selon le chef de l'Etat turc, "cet acte terroriste odieux", attribué par les autorités syriennes à un membre du groupe jihadiste Etat islamique (EI), vise notamment à saper "la culture du vivre ensemble et la stabilité de notre région"
  • Le groupe EI avait pris le contrôle de vastes pans des territoires syrien et irakien au début de la guerre civile syrienne, qui a éclaté en 2011, proclamant la création d'un "califat" transfrontalier en 2014

Istanbul: La Turquie, soutien des nouvelles autorités à Damas, ne laissera pas la Syrie se faire "entraîner à nouveau dans l'instabilité", a affirmé lundi le président turc Recep Tayyip Erdogan, au lendemain d'un attentat dans une église à Damas qui a fait au moins 22 morts.

"Nous ne permettrons jamais que la Syrie, pays voisin et frère, qui pour la première fois après des années d'oppression et de guerre envisage son avenir avec espoir, soit entraînée à nouveau dans l'instabilité par des groupes terroristes", a écrit M. Erdogan sur X.

Selon le chef de l'Etat turc, "cet acte terroriste odieux", attribué par les autorités syriennes à un membre du groupe jihadiste Etat islamique (EI), vise notamment à saper "la culture du vivre ensemble et la stabilité de notre région".

Le groupe EI avait pris le contrôle de vastes pans des territoires syrien et irakien au début de la guerre civile syrienne, qui a éclaté en 2011, proclamant la création d'un "califat" transfrontalier en 2014.

Les forces kurdes syriennes soutenues par les Etats-Unis l'ont vaincu en 2019, mais les jihadistes ont maintenu une présence, en particulier dans le vaste désert syrien.


Israël: les secours annoncent 23 blessés après des tirs de missiles depuis l'Iran

La police israélienne a dit être déployée sur au moins deux points d'impact, un à Haïfa (nord) et un à Ness Ziona (au sud de Tel-Aviv). (AFP)
La police israélienne a dit être déployée sur au moins deux points d'impact, un à Haïfa (nord) et un à Ness Ziona (au sud de Tel-Aviv). (AFP)
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  • Un total de 23 personnes ont été blessées dans tout le pays lors des attaques, dont "deux dans un état modéré et les autres légèrement blessées", a affirmé à des journalistes Eli Bin, chef du Magen David Adom (MDA)
  • Plus tôt dans la journée, ce service de secours avait fait état de 16 blessés, alors que les opérations se poursuivaient pour venir en aide aux victimes des frappes de la nuit

JERUSALEM: Une organisation israélienne de premiers secours a annoncé dimanche avoir pris en charge 23 blessés après des tirs de missiles depuis l'Iran, tandis que la télévision publique diffusait des images d'importants dégâts "dans le centre" d'Israël.

Un total de 23 personnes ont été blessées dans tout le pays lors des attaques, dont "deux dans un état modéré et les autres légèrement blessées", a affirmé à des journalistes Eli Bin, chef du Magen David Adom (MDA), l'équivalent israélien de la Croix-Rouge.

Plus tôt dans la journée, ce service de secours avait fait état de 16 blessés, alors que les opérations se poursuivaient pour venir en aide aux victimes des frappes de la nuit.

La chaîne publique KAN 11 a diffusé des images d'importants dégâts "dans le centre du pays", sans plus de précisions, montrant un immeuble de plusieurs étages à la façade totalement détruite et des bâtiments gravement endommagés autour.

"Plusieurs immeubles résidentiels de deux étages ont été gravement endommagés, certains se sont effondrés", a décrit un secouriste du MDA, Moti Nissan, à propos d'un des sites d'intervention de l'organisation, sans préciser lequel compte tenu des restrictions imposées par la censure militaire.

La police israélienne a dit être déployée sur au moins deux points d'impact, un à Haïfa (nord) et un à Ness Ziona (au sud de Tel-Aviv).

Israël a lancé le 13 juin une attaque d'une ampleur sans précédent sur l'Iran avec l'ambition affichée d'empêcher le pays de se doter de la bombe atomique, objectif que la République islamique a toujours nié poursuivre.

Son armée a frappé des centaines de sites militaires ou liés au programme nucléaire iranien, décapité l'état-major général des forces armées, et tué une dizaine de scientifiques du nucléaire.

Les tirs de missiles et de drones iraniens ont fait 25 morts en Israël. En Iran, les frappes israéliennes ont fait plus de 400 morts et 3.056 blessés, en majorité des civils, a indiqué samedi le ministère de la Santé.

Les Etats-Unis ont annoncé avoir frappé des sites nucléaires iraniens dans la nuit de samedi à dimanche.

Ces attaques américaines "auront des conséquences éternelles", a averti le ministre iranien des Affaires étrangères Abbas Araghchi, affirmant que l'Iran se réservait "toutes les options pour défendre sa souveraineté, ses intérêts et son peuple".


Fermer le détroit d'Ormuz serait «extrêmement dangereux», prévient l'UE

Cette image extraite d'une vidéo fournie par le site officiel des Gardiens de la révolution iranienne via SEPAH News le 20 juillet 2019 montre des membres du Corps des Gardiens de la révolution islamique montant à bord du pétrolier battant pavillon britannique Stena Impero dans le détroit d'Ormuz. (AFP/Archives)
Cette image extraite d'une vidéo fournie par le site officiel des Gardiens de la révolution iranienne via SEPAH News le 20 juillet 2019 montre des membres du Corps des Gardiens de la révolution islamique montant à bord du pétrolier battant pavillon britannique Stena Impero dans le détroit d'Ormuz. (AFP/Archives)
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  • « Les craintes de représailles et d'escalade de la guerre sont énormes, en particulier la fermeture du détroit d'Ormuz par l'Iran, qui serait extrêmement dangereuse et n'arrangerait personne », a insisté Mme Kallas devant la presse.
  • Près de 20 % du pétrole mondial transite par ce détroit, au large des côtes iraniennes, et sa fermeture pourrait bouleverser le marché mondial et provoquer une flambée des prix. 

BRUXELLES : La cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a averti lundi que la fermeture du détroit d'Ormuz par l'Iran « serait extrêmement dangereuse », rappelant que l'Union européenne appelait à une solution diplomatique et à la désescalade.

Réunis à Bruxelles, les ministres européens des Affaires étrangères se concentrent sur une solution diplomatique après les frappes américaines sans précédent contre les sites nucléaires iraniens.

« Les craintes de représailles et d'escalade de la guerre sont énormes, en particulier la fermeture du détroit d'Ormuz par l'Iran, qui serait extrêmement dangereuse et n'arrangerait personne », a insisté Mme Kallas devant la presse.

Près de 20 % du pétrole mondial transite par ce détroit, au large des côtes iraniennes, et sa fermeture pourrait bouleverser le marché mondial et provoquer une flambée des prix. 

L'UE fait appel à la diplomatie. « Nous avons eu des entretiens avec le ministre iranien Abbas Araghchi vendredi, et l'Iran s'est montré ouvert à la discussion sur le nucléaire, mais aussi sur les questions de sécurité plus larges qui affectent l'Europe. Il est donc essentiel de poursuivre ce dialogue », a exhorté Kaja Kallas.

De son côté, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a réclamé « l'arrêt des frappes » afin d'éviter une « guerre éternelle » avec l'Iran.

« Il n'y a pas de solution durable à ce problème par la voie militaire et seule la négociation permettra d'encadrer strictement de manière durable le programme nucléaire iranien », a-t-il déclaré avant la réunion avec ses homologues européens.

« L'Europe peut apporter son expérience, sa compétence et sa connaissance fine de ces questions pour ouvrir un espace de négociation conduisant à un encadrement de ces activités déstabilisatrices de l'Iran », a-t-il assuré.

La France rejette « toute tentative d'organisation d'un changement de régime par la force » en Iran, a ajouté Jean-Noël Barrot. « Il serait illusoire et dangereux de penser que l'on peut provoquer un tel changement par la force et par les bombes. »