Sommet Med-7 en Corse: le front européen anti-Erdogan peine à naître

En conclusion du sommet, les sept pays méditerranéens membres de l’UE ont appelé la Turquie au dialogue, tout en brandissant sans détour des menaces de sanctions (Photo, AFP)
En conclusion du sommet, les sept pays méditerranéens membres de l’UE ont appelé la Turquie au dialogue, tout en brandissant sans détour des menaces de sanctions (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 12 septembre 2020

Sommet Med-7 en Corse: le front européen anti-Erdogan peine à naître

  • Le 10 septembre, en Corse, les pays du sud de l’Europe ont tenu un sommet dans le cadre du sommet Med-7 lancé en 2016
  • De la Corse, pays natal de Napoléon Bonaparte, Emmanuel Macron voulait adresser un message « musclé » à son homologue turc en avançant que « la Turquie n’était plus un partenaire » de l’Europe en Méditerranée 

PARIS : Le 10 septembre, en Corse, les pays du sud de l’Europe ont tenu un sommet dans le cadre du sommet Med-7 lancé en 2016. À l’initiative du président français, les agissements de la Turquie en Méditerranée orientale étaient au centre du débat et des préoccupations, à la veille du sommet européen des 24 et 25 septembre 2020. Paris tentait de trouver une position commune pour défendre la souveraineté européenne et contrecarrer la « tentation impérialiste » de certains acteurs. Mais l’objectif français d’imposer des « lignes rouges » face à la progression turque ne fait pas l’unanimité.

En conclusion du sommet, les sept pays méditerranéens membres de l’Union européenne (UE) ont appelé la Turquie au dialogue, tout en brandissant sans détour des menaces de sanctions si Ankara persistait dans son « jeu hégémonique » en Méditerranée. Mais la Turquie ne semble pas se résigner, considérant les divisions européennes, la position atlantique ambiguë et prudente de Washington, et l’ouverture opportuniste de Moscou.

Les tensions en Méditerranée renferment des enjeux multiples, qui ne se limitent pas à la lutte pour le gaz et pour d’autres sources d’énergie. Elles sont intimement liées aux grands équilibres stratégiques à l’heure du recul américain et au moment où l’éclipse de l’Europe en Méditerranée a facilité l’émergence d’une nouvelle équation stratégique, confirmant la montée de la Turquie et de la Russie.

Le choix de Porticcio, sur l'île de Beauté, n’est pas fortuit. De la Corse, pays natal de Napoléon Bonaparte, Emmanuel Macron voulait adresser un message « musclé » à son homologue turc en avançant que « la Turquie n’[était] plus partenaire » de l’Europe en Méditerranée. En réponse à la tentative française de perturber le rêve néo-ottoman d’Erdogan, la présidence turque s’est lancée dans des joutes verbales, évoquant le réflexe colonialiste de l’« arrogant Macron Bonaparte ». Au-delà des divergences dans les approches, la France a obtenu du sommet Med-7 une position forte en prélude au sommet européen de Bruxelles, d’ici à deux semaines. Concrètement, la déclaration finale agite le spectre de sanctions européennes si Ankara continue de contester les droits d'exploration gazière de la Grèce et de Chypre dans cette zone.

« Nous soutenons que si la Turquie ne progresse pas sur la voie du dialogue et ne met pas un terme à ses activités unilatérales, l'UE est prête à élaborer une liste de mesures restrictives supplémentaires qui pourraient être évoquées lors du Conseil européen des 24 et 25 septembre 2020 », déclare le président français. Mais il semble que le diable se trouve dans les détails car Ankara, qui plaide en apparence pour un dialogue sans conditions, hausse le ton, Erdogan promettant de « déchirer les cartes géographiques qui lèsent les droits de la Turquie ». De même, Athènes, qui recherche la solidarité européenne, exige que les navires turcs d’exploration se retirent avant tout dialogue, car les responsables grecs craignent la stratégie de « grignotage » ou du « fait accompli » d’Erdogan 

Litiges historiques

Le président turc estime que les arrangements conclus après la fin de l’Empire ottoman, et à l’issue de la guerre contre la Grèce à cette même époque, ont favorisé Athènes qui, selon lui, s’est alors emparée de plusieurs îles proches de la Turquie. En Méditerranée comme dans la mer Égée et autour de Chypre, les litiges historiques s’ajoutent au problème de l’exploration gazière et pétrolière pour assombrir le tableau. La phase actuelle est surtout liée aux activités de l’exploration turque dans les eaux contestées depuis la fin de 2019, et à l’accord du tracé de frontières maritimes passé entre la Turquie et le gouvernement de Tripoli en Libye. 

Récemment, la situation s’est aggravée avec la signature par l’Égypte et la Grèce d’un accord sur le tracé de leurs frontières maritimes et la plate-forme continentale de la Grèce, ce qui met en cause l’accord turco-libyen. La solidarité de la France avec la Grèce et la Chypre et l’envoi simultané de frégates et d’avions de combat comme gestes de « diplomatie forte » ont entraîné un durcissement de la position turque et la menace ouvertes d’ouvrir les hostilités avec la Grèce.

Ce défi turc dans la Méditerranée orientale, qui s’ajoute à l’ingérence turque en Libye et en Syrie, met les puissances européennes à l’épreuve, car Ankara ne lésine pas sur les moyens, notamment avec les dossiers de l’immigration clandestine et ceux de l’asile politique, qui représentent pour l’Europe un cauchemar. À ce propos, la France, particulièrement défensive face à la Turquie, tout comme la Grèce, doit encore convaincre des partenaires européens parfois frileux de l'opportunité d'une riposte alors qu'Ankara menace régulièrement d'utiliser le levier migratoire à l'encontre de l'UE. 

Ces pratiques du chantage et le jeu de l’ouverture avec la Russie depuis 2016 incitent les États-Unis et plusieurs pays européens à adopter des positions conciliantes vis-à-vis de la Turquie. Hypothèse vérifiée lors du sommet Med-7 pendant lequel l’Espagne, l’Italie, le Portugal et Malte se sont montrés hésitants, craignant de nouvelles vagues d’immigrants déferlant en Europe !

Ankara, fort de sa position géopolitique, brandit aussi la présence turque en Europe, la « solidarité » des musulmans en Europe et les échanges économiques comme des moyens pour « neutraliser » toute position européenne forte visant à contrecarrer la stratégie expansionniste d’Ankara. 

En attendant le sommet européen de Bruxelles, le succès de la tentative française pour former un front européen anti-Erdogan semble loin d’être assuré, et Emmanuel Macron devrait se contenter de son offre de dialogue constructif pour limiter les dégâts.


La diplomatie française estime qu'Israël doit faire preuve de « la plus grande retenue » au Liban

Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
Le drapeau français flotte sur le lac d'Enghien, à Enghien-les-Bains, dans la banlieue nord de Paris, le 25 avril 2025. (Photo Thibaud MORITZ / AFP)
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  • l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, Hezbollah.
  • Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

PARIS : La France a exhorté mercredi Israël « à faire preuve de la plus grande retenue » au Liban après la frappe israélienne qui a touché Beyrouth dimanche dernier, et a souligné que le démantèlement des sites militaires du Hezbollah revenait « exclusivement aux forces armées libanaises ».

Malgré un cessez-le-feu entré en vigueur le 27 novembre après plus d'un an de guerre entre Israël et le Hezbollah, l'armée israélienne continue de mener des frappes au Liban, affirmant viser des combattants et des infrastructures du mouvement libanais, très affaibli, qui affirme de son côté respecter l'accord.

Le week-end dernier, Israël a assuré avoir visé un entrepôt de missiles.

Le Liban avait alors demandé à Washington et Paris, garants de l'accord de cessez-le-feu, de « contraindre Israël à cesser immédiatement ses attaques ».

« La France rappelle que le respect du cessez-le-feu s'impose à toutes les parties sans exception afin de garantir la sécurité des populations civiles des deux côtés de la Ligne bleue », la frontière de facto délimitée par les Nations unies, a souligné mercredi Christophe Lemoine, porte-parole du ministère français des Affaires étrangères.

« La France appelle donc Israël à faire preuve de la plus grande retenue et à se retirer au plus vite des cinq points toujours occupés sur le territoire libanais », a-t-il ajouté lors d'un point presse.

Une commission regroupant le Liban, Israël, les États-Unis, la France et l'ONU est chargée de superviser l'application du cessez-le-feu.

Beyrouth presse la communauté internationale de faire pression sur Israël pour qu'il mette fin à ses attaques et se retire des cinq positions frontalières où il s'est maintenu dans le sud du pays, malgré l'accord.


Les services de sécurité des Émirats déjouent un transfert illégal d'armes vers le Soudan

Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
Les autorités ont saisi environ cinq millions de munitions de type Goryunov (7,62 x 54 mm) retrouvées dans l'avion. (AFP)
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  • Les services de sécurité ont réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises 
  • Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays

ABU DHABI: Les services de sécurité des Émirats arabes unis ont déjoué une tentative de transfert illégal d'armes et d'équipements militaires aux forces armées soudanaises, a déclaré mercredi le procureur général des Émirats arabes unis, Hamad Saif al-Chamsi.

M. Al-Chamsi a déclaré que les services de sécurité avaient réussi à empêcher le transfert d'une quantité d'équipements militaires aux forces armées soudanaises après l'arrestation de membres d'une cellule impliquée dans la médiation non autorisée, le courtage et le trafic illicite d'équipements militaires, sans avoir obtenu les licences nécessaires auprès des autorités compétentes.

Les prévenus ont été arrêtés lors d'une inspection de munitions dans un avion privé dans l'un des aéroports du pays.

L'avion transportait environ cinq millions de munitions de type Goryunov (54,7 x 62 mm).

Les autorités ont également saisi une partie du produit financier de la transaction en possession de deux suspects dans leurs chambres d'hôtel.

M. Al-Chamsi a déclaré que l'enquête avait révélé l'implication de membres de la cellule des chefs militaires soudanais, notamment l'ancien chef des services de renseignement Salah Gosh, un ancien officier de l'agence de renseignement, un ancien conseiller du ministre des Finances et une personnalité politique proche du général Abdel Fattah al-Burhan et de son adjoint Yasser al-Atta. Plusieurs hommes d'affaires soudanais ont également été impliqués.

Selon les enquêteurs, les membres de la cellule ont conclu un marché d'équipement militaire portant sur des fusils Kalachnikov, des munitions, des mitrailleuses et des grenades d'une valeur de plusieurs millions de dollars.

Les armes ont été transférées de l'armée soudanaise à une société d'importation des Émirats arabes unis en utilisant la méthode de transfert des HAWALADARS.

La transaction a été facilitée par l'intermédiaire d'une société appartenant à un membre fugitif de la cellule travaillant pour les forces armées soudanaises, en coordination avec le colonel Othman al-Zubair, responsable des opérations financières au sein de l'armée soudanaise.

De faux contrats et de fausses factures commerciales ont été utilisés pour prétendre que les paiements concernaient un contrat d'importation de sucre.

L'enquête a conclu que ces transactions avaient été effectuées à la demande du comité d'armement des forces armées soudanaises, présidé par Al-Burhan et son adjoint Al-Atta, en toute connaissance de cause et avec leur approbation. Les membres de la cellule ont été directement chargés de négocier et de finaliser les transactions par Ahmed Rabie Ahmed al-Sayed, une personnalité politique proche du commandant en chef soudanais et responsable de la délivrance des certificats et des approbations des utilisateurs finaux.

Les enquêteurs ont confirmé que Salah Gosh jouait un rôle central dans la gestion du trafic illégal d'équipements militaires aux Émirats arabes unis, en coordination avec d'autres membres de la cellule.

Le groupe a réalisé une marge bénéficiaire de 2,6 millions de dollars (1 dollar = 0,88 euro) par rapport à la valeur réelle des deux transactions, qu'il s'est répartie entre lui et plusieurs complices. La part de Gosh a été retrouvée en possession du suspect Khalid Youssef Mukhtar Youssef, ancien officier de renseignement et ex-chef de cabinet de Gosh.

La cargaison saisie était arrivée à l'aéroport des Émirats arabes unis à bord d'un avion privé en provenance d'un pays étranger.

L'avion s'était posé pour faire le plein et avait officiellement déclaré qu'il transportait un lot de fournitures médicales.

Cependant, la cargaison militaire a été découverte sous la supervision du ministère public, sur la base de mandats judiciaires émis par le procureur général.

Les autorités ont également saisi des copies des contrats relatifs aux deux transactions, de faux documents d'expédition, ainsi que des enregistrements audio et des messages échangés entre les membres de la cellule.

L'enquête a permis de découvrir plusieurs sociétés appartenant à un homme d'affaires soudano-ukrainien, dont une opérant aux Émirats arabes unis.

Ces sociétés ont fourni à l'armée soudanaise des armes, des munitions, des grenades et des drones, en collaboration avec les membres de la cellule et le responsable financier de l'armée.

L'une des sociétés figure sur la liste des sanctions américaines.

Les enquêtes en cours ont révélé que les intérêts financiers et les profits du groupe sont étroitement liés à la poursuite du conflit interne au Soudan.

Le procureur général a souligné que cet incident représentait une grave atteinte à la sécurité nationale des Émirats arabes unis, en faisant de leur territoire une plateforme pour le trafic illégal d'armes à destination d'un pays en proie à des troubles civils, en plus de constituer des infractions pénales punissables par la loi.

Il a conclu en déclarant que le ministère public poursuivait ses procédures d'enquête en vue de déférer les suspects à une procédure judiciaire d'urgence.

Les résultats définitifs seront annoncés à la fin de l'enquête.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Retailleau engage la procédure de dissolution d'Urgence Palestine

Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau intervient lors d'un débat sur le narcotrafic à l'Assemblée nationale française à Paris, le 29 avril 2025. (Photo Ludovic MARIN / AFP)
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  • A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine.
  • Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

PARIS : A la veille du 1er mai, Bruno Retailleau a annoncé  mecredi l'engagement de la procédure de dissolution du groupe Urgence Palestine, ainsi que de Lyon Populaire, qui appartient à l'ultra droite, après avoir lancé mardi celle du groupe antifasciste La Jeune Garde.

Invité de CNews/Europe 1, le ministre de l'Intérieur a justifié la dissolution d'Urgence Palestine en affirmant qu'il fallait « taper sur les islamistes ». « L'islamisme est une idéologie qui essaie d'instrumentaliser une religion. Il y a une défiguration de la foi », a-t-il dit.

« Il ne faut pas défigurer la juste cause des Palestiniens », a poursuivi M. Retailleau, qui a insisté sur le fait que « beaucoup de nos compatriotes musulmans professent une foi parfaitement compatible avec les valeurs de la République ».

Créé au lendemain de l'attaque sans précédent du Hamas dans le sud d'Israël le 7 octobre 2023, qui a déclenché la guerre à Gaza, le collectif Urgence Palestine dit rassembler « des citoyens, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l'auto-détermination du peuple palestinien ». 

Le groupe organise régulièrement des manifestations, qui ont parfois été interdites par les autorités.

« À l'heure où le peuple palestinien est confronté au génocide, à la famine, où les Israéliens cherchent à détruire et à anéantir le peuple palestinien, que fait le gouvernement français ? Il veut dissoudre notre collectif, c'est insupportable », a réagi Omar Al Soumi, l'un des militants d'Urgence Palestine.

« C'est la réalité d'une France complice du génocide », a-t-il accusé dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux.

Urgence Palestine a reçu de nombreux messages de soutien de la part d'organisations de l'extrême gauche et de la gauche radicale. 

« Non à la dissolution d'Urgence Palestine », a écrit sur Instagram le Nouveau Parti Anticapitaliste, dénonçant « des prétextes pour faire taire les voix solidaires avec la Palestine ! ».

L'eurodéputée insoumise Rima Hassan a également critiqué les dissolutions engagées contre la Jeune Garde et Urgence Palestine.

« La dérive autoritaire et fasciste de Macron est aussi réelle, tangible et concrète », a-t-elle réagi sur X.

Tsedek!, qui se présente comme un « collectif juif décolonial », a aussi apporté son soutien à ces deux organisations.

« Le gouvernement qui appelle à la dissolution d’Urgence Palestine, c’est la République qui reprend ses droits et réaffirme que l’antisémitisme ne passera pas en France », s'est au contraire félicitée Sarah Aizenman, présidente du collectif « Nous vivrons », auprès de l'AFP. 

« Cette organisation ne défend pas les droits des Palestiniens, elle soutient une organisation terroriste », a accusé Mme Aizenman.

Les annonces de procédures de dissolution contre La Jeune Garde et Urgence Palestine interviennent à la veille des rassemblements du 1er-Mai et pourraient tendre le climat des manifestations, notamment à Paris, selon un haut responsable de la police.

Le ministre de l'Intérieur et le préfet de police de Paris, Laurent Nuñez, ont par avance prévenu qu'aucun débordement ne serait toléré.

Environ 15 000 personnes sont attendues jeudi pour la manifestation parisienne.