Poutine appelle les Russes au patriotisme avant un scrutin sans opposants

«Je compte sur votre sens citoyen de la responsabilité, de la pondération et du patriotisme, sur votre souci d'élire des députés qui travailleront pour le bien et au nom de notre Russie bien-aimée», a déclaré le président russe. (Photo, AFP)
«Je compte sur votre sens citoyen de la responsabilité, de la pondération et du patriotisme, sur votre souci d'élire des députés qui travailleront pour le bien et au nom de notre Russie bien-aimée», a déclaré le président russe. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 16 septembre 2021

Poutine appelle les Russes au patriotisme avant un scrutin sans opposants

  • L'essentiel de l'opposition anti-Poutine a été bannie du scrutin, apogée de mois de répression entamés avec l'arrestation de sa figure de proue, Alexeï Navalny
  • Le court discours de Poutine intervient à quelques heures du début d'un marathon électoral de trois jours

 MOSCOU: Vladimir Poutine a appelé jeudi ses concitoyens à faire preuve de "patriotisme" à quelques heures du début des élections législatives, un scrutin dont l'essentiel des détracteurs du Kremlin ont été bannis.      

"Je compte sur votre sens citoyen de la responsabilité, de la pondération et du patriotisme, sur votre souci d'élire des députés qui travailleront pour le bien et au nom de notre Russie bien-aimée", a déclaré le président russe dans une vidéo publiée sur le site du Kremlin dans la nuit. 

Le président russe a lancé cet appel alors qu'il est à l'isolement, car un foyer de dizaines de cas de la Covid-19 a été identifié dans son entourage, illustrant les difficultés de Moscou à enrayer l'épidémie sur fond de campagne de vaccination poussive.

Son porte-parole, Dmitri Peskov, a dès lors jugé possible que M. Poutine utilise le système de vote en ligne au lieu de se rendre aux urnes, du fait de sa quarantaine, précisant qu'il s'est inscrit pour pouvoir le faire. 

Le court discours de M. Poutine intervient à quelques heures du début d'un marathon électoral de trois jours, comprenant des législatives mais aussi des dizaines d'élections régionales et locales. 

Le vote se déroulera du 17 au 19 septembre, afin de limiter le risque épidémique, et les premiers bureaux de vote ouvriront en Extrême-Orient, à 20H00 GMT jeudi. Des résultats sont attendus après 18H00 GMT dimanche. 

L'essentiel de l'opposition anti-Poutine a été bannie du scrutin, apogée de mois de répression entamés avec l'arrestation de sa figure de proue, Alexeï Navalny, alors qu'il rentrait en Russie en janvier après un empoisonnement dont il accuse le Kremlin. 

L'ensemble de son mouvement a depuis été interdit pour "extrémisme" et nombre de ses alliés de premier plan ont été contraints à l'exil, assignés à résidence ou interdits de candidatures. 

Jeudi, le puissant Comité d'enquête russe a indiqué ouvrir une enquête contre onze personnes, dont il va demander l'incarcération, accusées d'avoir appelé sur la messagerie cryptée Telegram à "des troubles de masses" durant les élections. 

Quelque 108 millions de Russes sont appelés aux urnes pour élire les 450 députés de la chambre basse du Parlement, la Douma. La moitié sont désignés au scrutin proportionnel de liste, l'autre au mode majoritaire uninominal.

L'Ukraine dénonce la tenue d'élections russes sur son territoire

KIEV: Kiev a dénoncé jeudi la tenue des élections législatives russes en Crimée annexée par Moscou ainsi que la participation à ce vote des habitants de l'Est séparatiste prorusse de l'Ukraine.

"Ce qu'elle (la Russie) fait en y organisant ses élections nationales, relève d'une violation du droit international", a déclaré le chef de la diplomatie ukrainienne Dmytro Kouleba lors d'une conférence de presse.

La Russie a distribué plus de 600 000 passeports dans l'Est séparatiste de l'Ukraine, tandis que la Crimée est considérée par Moscou comme partie intégrante de son territoire. 

Des bureaux de vote sont prévus en Crimée dans le cadre des législatives qui se tiennent en Russie de vendredi à dimanche. Les habitants des régions séparatistes peuvent participer au scrutin de manière électronique ou voter dans la région russe de Rostov, frontalière de l'Ukraine.   

"L'occupation russe prendra fin" un jour, a estimé M. Kouleba, quand "cela aura lieu" la Russie "va devoir payer". 

Vote intelligent

M. Navalny a appelé depuis sa prison ses sympathisants à voter "intelligent", en soutenant les candidats – bien souvent des communistes – les mieux placés pour mettre en difficulté celui du parti au pouvoir, Russie Unie.

"Depuis 2003, soit depuis PRESQUE 20 ANS, aucun candidat indépendant n'a remporté une victoire aux élections à la Douma", a rappelé M. Navalny mercredi dans un message publié sur ses réseaux sociaux.

Impopulaire, sur fond de scandales de corruption et de baisse du niveau de vie, Russie Unie compte moins de 30% d'opinions favorables selon les sondages. 

Mais la formation devrait néanmoins s'imposer, faute de concurrence réelle, les autres partis représentés à la Douma - communistes, nationalistes et centristes - étant dans l'ensemble dans la ligne du Kremlin. 

M. Poutine, au pouvoir depuis plus de vingt ans, a aussi fait campagne pour sa formation à sa manière, en annonçant notamment une aide financière exceptionnelle pour 42 millions de retraités, un électorat clé. 

Les autorités russes ont en outre multiplié les efforts pour limiter l'impact du "vote intelligent", qualifié "d'extrémiste" et d'illustration des ingérences occidentales dans les élections.

Géants américains ciblés

Moscou accuse en particulier les géants de l'internet de s'immiscer dans ses affaires en refusant de supprimer des contenus jugés illégaux. La diplomatie russe a signifié la semaine dernière sa colère à l'ambassadeur américain sur ce sujet.

Des représentants d'Apple et Google ont en outre été convoqués jeudi devant une commission de la chambre haute du Parlement, le Conseil de la Fédération, alors que les compagnies américaines n'ont pas supprimé l'application "Navalny" de leurs plateformes.

Twitter, Facebook ou encore Telegram ont été condamnés à maintes reprises ces derniers mois pour leur refus d'effacer des publications.       


Turquie: nouveau coup judiciaire contre le principal parti d'opposition

Un tribunal turc a révoqué mardi la direction d'Istanbul du principal parti de l'opposition, le CHP, pour des irrégularités présumées lors de son congrès en 2023. Une décision dénoncée comme "un coup d'Etat judiciaire" par le parti qui va faire appel. (AFP)
Un tribunal turc a révoqué mardi la direction d'Istanbul du principal parti de l'opposition, le CHP, pour des irrégularités présumées lors de son congrès en 2023. Une décision dénoncée comme "un coup d'Etat judiciaire" par le parti qui va faire appel. (AFP)
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  • Le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) a remporté une large victoire face à l'AKP du président Recep Tayyip Erdogan lors des élections municipales de 2024 et progresse dans les sondages
  • Le tribunal annule les résultats du congrès provincial du CHP, excluant son chef à Istanbul, Özgür Celik, ainsi que 195 membres de la direction et délégués de ce parti

ISTANBUL: Un tribunal turc a révoqué mardi la direction d'Istanbul du principal parti de l'opposition, le CHP, pour des irrégularités présumées lors de son congrès en 2023. Une décision dénoncée comme "un coup d'Etat judiciaire" par le parti qui va faire appel.

Cette mesure apparaît comme un nouvel épisode de la guerre que livrent les autorités turques au premier parti d'opposition et surtout à ses figures populaires, dont le maire d'Istanbul emprisonné, Ekrem Imamoglu.

Le Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate) a remporté une large victoire face à l'AKP du président Recep Tayyip Erdogan lors des élections municipales de 2024 et progresse dans les sondages.

Dans son jugement, dont l'AFP a pu consulter une copie, le tribunal annule les résultats du congrès provincial du CHP, excluant son chef à Istanbul, Özgür Celik, ainsi que 195 membres de la direction et délégués de ce parti.

Par ces procédures, l'objectif est d'évincer l'actuel président du parti, Özgür Özel, en faisant annuler le résultat du congrès national du CHP.

S'exprimant mardi soir à l'issue d'une réunion d'urgence des instances du parti à Ankara, M.Özel a juré de "ne pas capituler" et dénoncé une "décision politiquement et légalement nulle et non avenue".

"Nous sommes confrontés à un coup d'Etat judiciaire", a-t-il enchainé lors d'un entretien à la chaine de télévision privée Halk TV, accusant les autorités de vouloir "modifier les résultats électoraux par voie de justice".

"Ils menacent de me retirer la direction du parti. Je vais me battre en retour". a-t-il promis.

Pression judiciaire croissante 

Le CHP subit une pression judiciaire croissante via un grand nombre d'enquêtes et d'interpellations visant ses élus, accusés de corruption, comme au sein de la municipalité d'Istanbul, la plus riche et la plus importante ville de Turquie, dont le maire est depuis mars derrière les barreaux.

L'arrestation de l'édile, Ekrem Imamoglu, figure populaire de l'opposition et principal adversaire potentiel du président Recep Tayyip Erdogan à la prochaine échéance présidentielle, avait déclenché un mouvement de contestation inédit dans ce pays depuis douze ans.

Sont de fait suspendues mardi "toutes les décisions prises au cours du congrès provincial d'Istanbul" du CHP qui avait eu lieu le 8 octobre 2023, d'après le jugement rendu.

La mesure suppose également "la réintégration temporaire" des personnes élues lors du précédent congrès ou la nomination d'un comité provisoire qui serait jugé approprié par le tribunal.

Au congrès d'octobre 2023, Özgür Celik, élu à la direction du parti à Istanbul avec le soutien d'Ekrem Imamoglu, l'avait emporté face à son concurrent, Cemal Canpolat, un proche de l'ancien président du CHP, Kemal Kilicdaroglu.

Ce dernier avait été le candidat malheureux de l'opposition à la présidentielle de 2023.

Le parquet a ouvert une enquête contre M. Celik et neuf autres responsables du parti pour des allégations de "fraude électorale", ce qui peut leur valoir jusqu'à trois ans de prison.

Pour l'analyste politique Berk Esen joint par l'AFP, la décision de mardi contre la direction d'Istanbul est une "répétition" avant une nouvelle procédure judiciaire contre le CHP lui-même, afin de l'affaiblir en tant que force d'opposition dans la perspectives des prochaines élections.

M. Esen y voit le signe d'une "évolution vers une autocratie totale (qui) signale la fin du multipartisme dans le pays tel que nous le connaissons".

"Le gouvernement prend des mesures calculées pour éliminer Ekrem Imamoglu, qu'il considère comme la seule véritable menace électorale, et pour réduire le CHP à une opposition sous contrôle", assure-t-il.

 


Les «doubles standards» occidentaux sur Gaza et l'Ukraine sont un «échec» : Premier ministre espagnol

 Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez s'adresse aux journalistes après une réunion avec le roi Felipe VI d'Espagne au Palais Marivent à Palma de Majorque, le 29 juillet 2025. (AFP)
Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez s'adresse aux journalistes après une réunion avec le roi Felipe VI d'Espagne au Palais Marivent à Palma de Majorque, le 29 juillet 2025. (AFP)
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  • Pedro Sanchez : Gaza représente "l'un des épisodes les plus sombres des relations internationales" de ce siècle
  • Son pays encourage l'Europe à prendre des mesures plus sévères à l'encontre d'Israël

LONDRES : La politique de deux poids deux mesures de l'Occident sur l'Ukraine et Gaza menace sa position mondiale, a déclaré le premier ministre espagnol au Guardian.

Pedro Sanchez, qui a accusé Israël de commettre un génocide à Gaza, s'exprimait avant de s'entretenir avec son homologue britannique Keir Starmer à Londres mercredi.

M. Sanchez s'est réjoui que d'autres pays européens suivent l'Espagne dans la reconnaissance d'un État palestinien, mais il a critiqué la réaction générale du continent à la guerre.

"C'est un échec", a-t-il déclaré. "C'est un échec. La réalité, c'est aussi qu'au sein de l'UE, certains pays sont divisés sur la manière d'influencer Israël.

"Mais à mon avis, ce n'est pas acceptable et nous ne pouvons pas durer plus longtemps si nous voulons accroître notre crédibilité face à d'autres crises, comme celle à laquelle nous sommes confrontés en Ukraine.

Il a ajouté : "Les racines de ces guerres sont complètement différentes mais, en fin de compte, le monde regarde l'UE et la société occidentale et demande : "Pourquoi faites-vous deux poids deux mesures quand il s'agit de l'Ukraine et quand il s'agit de Gaza ?"

M. Sanchez a déclaré qu'il encourageait l'Europe à prendre des mesures plus sévères à l'encontre d'Israël, y compris sur le plan financier.

"Ce à quoi nous assistons actuellement à Gaza est peut-être l'un des épisodes les plus sombres des relations internationales du 21ème siècle, et à cet égard, je dois dire que l'Espagne a été très active au sein de l'UE et de la communauté internationale", a-t-il ajouté.

"Au sein de l'UE, ce que nous avons fait jusqu'à présent, c'est préconiser la suspension du partenariat stratégique que l'UE entretient avec Israël.


L'UE met l'accord avec le Mercosur sur la table, suspense à Paris

Des agriculteurs et des membres de la Fédération nationale bovine manifestent près de l'ambassade du Brésil à Paris, le 9 juillet 2025, pour montrer leur opposition à un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (MERCOSUR). (AFP)
Des agriculteurs et des membres de la Fédération nationale bovine manifestent près de l'ambassade du Brésil à Paris, le 9 juillet 2025, pour montrer leur opposition à un éventuel accord de libre-échange entre l'Union européenne (UE) et le Marché commun du Sud (MERCOSUR). (AFP)
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  • La Commission européenne s’apprête à approuver l’accord de libre-échange UE-Mercosur, en y ajoutant des clauses de sauvegarde pour apaiser les inquiétudes françaises sur l’impact pour l’agriculture
  • La France, en pleine instabilité politique, reste prudente mais divisée, entre intérêts économiques et critiques de l’opposition

BRUXELLES: La France donnera-t-elle son feu vert? La Commission européenne s'apprête à approuver mercredi l'accord commercial avec les pays latino-américains du Mercosur, avec un geste pour tenter de convaincre Paris et rassurer les agriculteurs.

L'adoption par les commissaires européens est la première étape avant de soumettre ce traité de libre-échange aux Etats membres et aux eurodéputés dans les mois qui viennent.

L'exécutif européen remet ce dossier sensible sur la table au moment où la France est de nouveau plongée dans une tempête politique. Le gouvernement pourrait tomber lundi lors d'un vote de confiance très mal engagé pour le Premier ministre François Bayrou.

Selon une source européenne, Bruxelles veut aller vite et espère un accord des Vingt-Sept avant la fin 2025, tant que le Brésilien Lula occupe la présidence tournante du Mercosur.

Cet accord doit notamment permettre à l'Union européenne d'exporter davantage de voitures, de machines et de spiritueux en Argentine, au Brésil, en Uruguay et au Paraguay.

En retour, il faciliterait l'entrée de viande, sucre, riz, miel ou soja sud-américains, au risque de fragiliser certaines filières agricoles européennes.

Pour la présidente de la Commission, Ursula von der Leyen, "c'est un accord gagnant-gagnant avec des avantages significatifs pour les consommateurs et les entreprises" des deux continents.

Mais depuis la conclusion des négociations en décembre dernier, les syndicats des agriculteurs européens sont vent debout.

"Le combat se poursuit", a prévenu lundi le premier syndicat agricole français, la FNSEA, en en appelant au chef de l'Etat Emmanuel Macron.

La France, qui a mené la fronde au sein des Vingt-Sept, voyait jusqu'ici le projet d'accord comme une menace pour des filières comme le bœuf, la volaille, le sucre et l'éthanol et réclamait des mesures de sauvegarde supplémentaires.

- "Trahison" -

Pour rassurer le gouvernement français, la Commission pourrait annoncer mercredi un geste, fruit de plusieurs semaines de négociations: des clauses de sauvegarde renforcées pour les "produits agricoles sensibles".

L'exécutif européen s'engagerait à intervenir en cas d'impacts négatifs de l'accord sur certaines filières, selon une source européenne.

Juridiquement, cet ajout ne nécessite pas de renégociation avec les pays du Mercosur, mais les Européens devront tout de même expliquer à leurs partenaires latino-américains pourquoi ils ont procédé ainsi.

Cette modification suffira-t-elle à la France ?

Sollicités par l'AFP, le gouvernement et l'Elysée n'ont pas souhaité réagir à ce stade.

Mais "la France estime, sous réserve d'une analyse approfondie" que cela "va dans le bon sens", assure une source diplomatique. "Il faudra bien sûr s'assurer de l’efficacité de ce dispositif" de sauvegarde, ajoute-t-elle.

Dans l'opposition, le RN dénonce déjà une "trahison" d'Emmanuel Macron si la France change de pied tandis que LFI appelle à la "mobilisation générale" contre ce "passage en force".

Au Parlement européen, le centriste Pascal Canfin promet de son côté une initiative transpartisane pour tenter de "suspendre l'adoption" de l'accord, "en l'absence de transparence et de garanties claires".

Mais l'accord avec le Mercosur compte aussi de nombreux partisans en Europe, à commencer par l'Allemagne qui veut offrir de nouveaux débouchés à ses entreprises industrielles. Plus encore depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche et la mise en place de taxes douanières sur les produits européens qui entrent aux Etats-Unis.

L'Union européenne a besoin "très rapidement" de nouveaux partenaires commerciaux, ne cesse de répéter le chancelier allemand Friedrich Merz.

Selon Bruxelles, l'accord avec le Mercosur permettrait aux exportateurs européens d'économiser plus de 4 milliards d'euros de droits de douane par an en Amérique latine.

Si la France maintient son opposition à l'accord, elle ne pourrait le faire capoter à elle seule. Il lui faudrait réunir une "minorité de blocage", soit au moins quatre Etats représentant plus de 35% de la population de l'Union européenne.