Procès 13 novembre: dans «l'horreur» du Bataclan, «des corps, des corps, des corps»

Ce croquis réalisé le 16 septembre 2021, montre une vue générale de la salle d'audience provisoire aménagée pour le procès des attentats de Paris du 13 novembre 2015, au palais de justice à Paris. (AFP)
Ce croquis réalisé le 16 septembre 2021, montre une vue générale de la salle d'audience provisoire aménagée pour le procès des attentats de Paris du 13 novembre 2015, au palais de justice à Paris. (AFP)
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Publié le Samedi 18 septembre 2021

Procès 13 novembre: dans «l'horreur» du Bataclan, «des corps, des corps, des corps»

  • «Nous marchons dans du sang coagulé, au milieu de morceaux de chair, de dents, de téléphones qui sonnent»
  • «On a tout fouillé. Ma hantise, c'était de passer à côté d'un blessé ou d'un corps, caché dans un trou de souris»

PARIS : "Des corps, des corps, des corps": au procès des attentats du 13 novembre 2015, un enquêteur a fait revivre à la salle d'audience, mètre par mètre, sa progression "dans l'horreur" de la salle de spectacle parisienne du Bataclan le soir des attentats.


Il est cinq heures du matin. L'assaut de la force d'intervention de la police parisienne (BRI) est terminé, les otages ont été libérés, les derniers blessés évacués. Patrick Bourbotte, désigné coordinateur des constatations pour la brigade criminelle de Paris, s'apprête à entrer dans la salle de concert où 90 personnes ont été mitraillées par un commando de trois jihadistes.


Il croise un policier de la BRI. "Il me dit +Bonne chance. Vous allez être dans l'horreur pendant des heures+".


"Nous rentrons dans la salle. C'est quasiment indescriptible mais il faut le décrire", dit à la barre l'enquêteur de 51 ans, chauve et barbu, en costume gris.


"L'ambiance est saisissante, lugubre, froide. La lumière est blanche ce qui rend l'endroit blafard. Les plafonds sont très hauts, ça donne un aspect de cathédrale".


"Les corps sont enchevêtrés. Il y en a un nombre... on n'avait jamais vu ça. Nous marchons dans du sang coagulé, au milieu de morceaux de chair, de dents, de téléphones qui sonnent".


Sa voix se hache, il souffle longuement avant de pouvoir continuer à parler. "Des corps, des corps, des corps", articule-t-il.

«Hantise»

Le plan de la salle est affiché sur l'écran géant derrière la cour et, pendant plusieurs heures, Patrick Bourbotte entraîne la salle d'audience - remplie - sur ses pas.


Au fil de sa progression, il recense les écrous métalliques, les balles "ensanglantées", les trois fusils d'assaut Kalachnikov retrouvées, la tête "intacte" d'un assaillant qui s'est fait exploser, retrouvée sur la scène. Le "plafond défoncé" par "l'instinct de survie" de ceux qui ont fui par les combles, le "sol bleu-vert qui disparaît sous le sang séché".


Les constatations, dira-t-il, s'apparentent à celles qu'on fait sur "une scène de crash aérien".


"On a tout fouillé. Ma hantise, c'était de passer à côté d'un blessé ou d'un corps, caché dans un trou de souris", confie-t-il aussi.


Zone par zone, il compte les victimes, une à une. Un corps "face contre terre" dans ce couloir. Là, "huit corps enchevêtrés, saisis par la mort en même temps". Au niveau de la "zone D", le bar, il y a sept victimes - quatre hommes, trois femmes. "On a l'impression d'une exécution individuelle, les uns après les autres". La fosse de la salle de spectacles, enfin, la zone "la plus macabre", où 44 corps ont été trouvés.


"Il faut comprendre les dégâts que ça peut faire. Ce n'est pas simplement un orifice d'entrée et de sortie. Ce sont des crânes explosés, des visages méconnaissables".

«22 secondes»

Après des heures à décrire l'horreur, l'enquêteur veut la faire écouter. Dans la salle de concert a été trouvé un dictaphone qui a enregistré l'intégralité de l'attaque. Il n'en diffusera qu'un très court extrait, "rien qui ne permettra d'identifier des victimes". 


"C'est pour comprendre le côté brusque de cet instant de barbarie. Ça ne dure que 22 secondes, qui durent une éternité. Mais c'est nécessaire".


Quelques parties civiles se lèvent et sortent. Au micro, un avocat redonne le numéro d'assistance psychologique pour ceux qui écoutent via la webradio.


Le groupe Eagles of Death Metal résonne, interrompu par des salves de tirs. L'audio se coupe, silence. 


Du reste des 2H38 d'enregistrement, il ne lira que quelques extraits. "Je vais glisser ma voix dans celle des terroristes, ce qui n'est pas la chose la plus facile à faire".


Il hausse le ton. "Cache-toi ou je tire! Lève-toi ou je te tue!", crie-t-il dans le micro. "Pourquoi vous bombardez nos frères en Syrie? On est venu ici pour faire la même chose. Viens ici toi, viens! On va vous bombarder ici sur terre. Nous, on n'a pas besoin d'avions". "Je t'avais prévenu de pas bouger... Vous connaissez Daech, l'Etat islamique?".


Sur la "bande son", les enquêteurs ont compté les coups de feu de cette "séquence" de 32 minutes: 258, en rafale et au coup par coup.


Le procès des attentats jihadistes du 13 novembre 2015 (130 morts et plus de 350 blessés), les plus meurtriers commis en France, doit reprendre lundi. 


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.