En ville comme à la campagne, les tiers-lieux en plein essor

Au soleil, sur les pelouses du parc du Jardin de Montsouris, à Paris le 31 mai 2020. (Bertrand Guay / AFP
Au soleil, sur les pelouses du parc du Jardin de Montsouris, à Paris le 31 mai 2020. (Bertrand Guay / AFP
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Publié le Dimanche 03 octobre 2021

En ville comme à la campagne, les tiers-lieux en plein essor

  • Ces espaces partagés entre diverses activités doivent trouver leur «voie d'équilibre économique» pour subsister
  • Trente millions d'euros devraient contribuer à mettre sur pied une centaine de «manufactures de proximité», permettant la mutualisation d'outils

PARIS : Cafés solidaires, sites de «coworking», ateliers... «Antidotes au repli sur soi» pour Jean Castex, les tiers-lieux sont en plein essor. Mais ces espaces partagés entre diverses activités doivent trouver leur «voie d'équilibre économique» pour subsister, prévient la principale organisation du secteur.

A deux pas du parc Montsouris à Paris (XIVe arrondissement), le «Village Reille» a ouvert en janvier. Artisans, artistes et associations seront accueillis dans cet ancien couvent franciscain jusqu'en avril 2022, avant qu'un projet immobilier le remodèle définitivement.

«Nous souhaitons avant tout mettre le site à disposition de ceux qui n'ont pas accès au marché du soin, de l'accueil, de l'insertion», résume Simon Laisney, fondateur de la coopérative Plateau Urbain, qui réunit plus d'une cinquantaine de petites structures.

«Une parenthèse enchantée» qui, de ses propres mots, profite à Marie-Laure Nicaise, 61 ans. Elle fabrique des biscuits sur place. «C'est une synergie qui fonctionne», raconte la pâtissière. «Je gère aussi le Locavore (qui permet aux producteurs locaux de vendre sans gros intermédiaire, ndlr). Et les hébergés me donnent toujours un coup de main pour décharger mes palettes».

Les «hébergés», ce sont par exemple Moussa et Demba, la vingtaine, qui discutent ce jour-là devant la buvette éphémère. Ils font partie de la soixantaine de jeunes précaires qui résident dans le centre d'hébergement social attenant. Le couvent abrite aussi une colocation interculturelle entre jeunes et réfugiés.

Si elle est au cœur du projet du Village Reille, la solidarité n'est pas forcément le dénominateur commun à toutes les initiatives.

«Dans les métropoles en particulier, c'est davantage sous l'angle des espaces de coworking que se structure l'activité», détaille Patrick Lévy-Waitz, président de France Tiers-Lieux, qui accompagne le développement de ces espaces partagés.

D'après une étude menée par l'association, sur 900 des 2.500 tiers-lieux recensés (environ 150.000 travailleurs), près de 75% proposent des espaces de cotravail. Et près de la moitié d'entre eux s'investissent dans la transition écologique auprès d'acteurs spécialisés, qu'il s'agisse de professionnels du recyclage ou des circuits courts. Ils sont autant (49%) à intégrer un atelier de production artisanal ou un «fablab», espace ouvert où les machines et les connaissances sont mises en commun. Enfin, 30% prodiguent des formations au numérique, la même proportion s'adonnant à des activités culturelles.

Le gouvernement s'est appuyé sur les recommandations de ce rapport pour bâtir un plan de 130 millions d'euros dévoilé fin août par Jean Castex pour appuyer le développement de ces sites.

«Ces tiers-lieux, c'est un facteur de fédération d'une société qui en a bien besoin. Vous êtes un antidote au repli sur soi», avait lancé alors le Premier ministre aux locataires du WIP situé à Colombelles (Calvados). Grâce à des outils numériques, cet espace permet de visiter des musées ou d'assister à des concerts à distance.

- Sites «nourriciers» -

Trente millions d'euros doivent plus particulièrement contribuer à mettre sur pied une centaine de «manufactures de proximité», permettant la mutualisation d'outils. Ce label intéresse par exemple La Machinerie à Amiens, lieu qui mêle coworking, fablab et incubateur d'activités s'inscrivant dans le champ de l'économie sociale et solidaire, et qui compte bien répondre à l'appel à projets.

Un autre type de tiers-lieux fleurit en zone rurale: les sites «nourriciers», qui regroupent des activités de production agricole ou de transformation alimentaire (potagers partagés, associations pour le maintien d'une agriculture paysanne ou Amap, restauration écolo, etc.).

Ainsi l'Hermitage, ancien domaine agricole de 25 hectares situé en Picardie, développe des initiatives avec agriculteurs et entrepreneurs locaux: société de conseil sur la transition énergétique, micro-ferme, brasserie artisanale... L'entraide y joue un rôle important. «Notre maraîchère forme au métier un jeune apprenti d'Auteuil d'origine malienne», raconte le cofondateur du lieu, Jean Karinthi.

Qu'il s'agisse d'un «café solidaire, de la location d'ateliers ou de la vente de formations», «la pérennité d'un tiers-lieu passe par une voie d'équilibre économique», souligne Patrick Lévy-Waitz.

Pour lui, le succès à long terme de ces espaces dépend financièrement d'un «modèle hybride public-privé», via des aides des collectivités territoriales et d'agences de l'Etat. Un moyen de compenser l'investissement foncier nécessaire et les coûts de fonctionnement, qui sont encore des freins à ces projets.


Taxe Zucman : «truc absurde», «jalousie à la française», selon le patron de Bpifrance

Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française". (AFP)
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  • M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde"
  • Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier"

PARIS: Nicolas Dufourcq, patron de Bpifrance, la banque publique d'investissement, a critiqué avec virulence mercredi l'idée d'une taxe Zucman, évoquant un "truc absurde", et "une histoire de jalousie à la française".

M. Dufourcq, qui était interrogé sur RMC, a estimé que la taxe, dont le principe est d'imposer chaque année les contribuables dont la fortune dépasse 100 millions d'euros à hauteur de 2% de celle-ci, était "un truc complètement absurde", mais qui selon lui "n'arrivera pas".

Mais "ça panique les entrepreneurs : ils ont construit leur boîte et on vient leur expliquer qu'on va leur en prendre 2% tous les ans. Pourquoi pas 3? Pourquoi pas 4? C'est invraisemblable!", a-t-il déclaré.

Notant qu'avec la taxe Zucman, ils "paieraient tous en papier (en actions, NDLR) leurs 2%", M. Dufourcq a observé : "C'est moi, c'est la Bpifrance qui va gérer ce papier" : "Donc demain j'aurai 2% du capital de LVMH, dans 20 ans 20%, 20% du capital de Pinault-Printemps-Redoute (Kering, NDLR), 20% du capital de Free. C'est délirant, c'est communiste en réalité, comment est-ce qu'on peut encore sortir des énormités comme ça en France!?"

"Ces gens-là tirent la France. Il faut les aider (...) au lieu de leur dire qu'on va leur piquer 2% de leur fortune".

Il a observé que "si on pique la totalité de celle de Bernard Arnault, ça finance 10 mois d'assurance-maladie", mais qu'après "il n'y a plus d'Arnault".

"Il n'y a pas de trésor caché", a estimé M. Dufourcq, qui pense que cette taxe "n'arrivera jamais", et n'est évoquée que "pour hystériser le débat" politique.

Pour lui, il s'agit "d'une pure histoire de jalousie à la française, une haine du riche, qui est soi-disant le nouveau noble", rappelant les origines modestes de François Pinault ou Xavier Niel: "c'est la société française qui a réussi, on devrait leur dresser des statues".

"Il y a effectivement des fortunes qui passent dans leur holding des dépenses personnelles", a-t-il remarqué, "c'est ça qu'il faut traquer, et c'est ce sur quoi le ministère des Finances, je pense, travaille aujourd'hui".

Mais il y a aussi "beaucoup de Français qui passent en note de frais leurs dépenses personnelles", a-t-il observé. "Regardez le nombre qui demandent les tickets dans les restaus", pour se les faire rembourser.


IA: Google investit 5 milliards de livres au Royaume-Uni avant la visite de Trump

Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays. (AFP)
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  • Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat
  • Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres

LONDRES: Le géant américain Google a annoncé mardi un investissement de 5 milliards de livres (5,78 milliards d'euros) sur deux ans au Royaume-Uni, notamment dans un centre de données et l'intelligence artificielle (IA), en amont de la visite d'Etat de Donald Trump dans le pays.

Cette somme financera "les dépenses d'investissement, de recherche et développement" de l'entreprise dans le pays, ce qui englobe Google DeepMind (le laboratoire d'IA du géant californien), a indiqué le groupe dans un communiqué.

Google ouvre mardi un centre de données à Waltham Cross, au nord de Londres, dans lequel il avait déjà annoncé l'an dernier injecter un milliard de dollars (850 millions d'euros). La somme annoncée mardi viendra aussi compléter ce financement, a précisé un porte-parole de l'entreprise à l'AFP.

Le Royaume-Uni s'apprête à accueillir Donald Trump pour une deuxième visite d'Etat mercredi et jeudi, après une première visite en 2019 lors de son premier mandat.

Le président américain sera accompagné par plusieurs grands patrons, notamment de la tech. Des annonces d'investissements sont attendues ainsi que la signature d'un accord technologique avec Londres.

Selon un responsable américain, qui s'exprimait auprès de journalistes, dont l'AFP, en amont de la visite, les annonces se porteront à "plus de dix milliards, peut-être des dizaines de milliards" de dollars.

Le gouvernement britannique avait déjà dévoilé dimanche plus d'un milliard de livres d'investissements de banques américaines dans le pays, là aussi en amont de la visite d'Etat du président Trump.

Et l'exécutif britannique a annoncé lundi que Londres et Washington allaient signer un accord pour accélérer les délais d'autorisation et de validation des projets nucléaires entre les deux pays.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités.

Le partenariat avec Washington, baptisé "Atlantic Partnership for Advanced Nuclear Energy", doit lui aussi être formellement signé lors de la visite d'État de Donald Trump.

 


La note française menacée de passer en catégorie inférieure dès vendredi

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne. (AFP)
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  • La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne
  • Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie

PARIS: Fitch sera-t-elle vendredi la première agence de notation à faire passer la note souveraine française en catégorie inférieure? Les économistes, qui le pensaient il y a quelques jours, discernent des raisons d'en douter, mais ce ne pourrait être que partie remise.

Fitch ouvre le bal des revues d'automne des agences de notation. Toutes, au vu de l'état des finances publiques françaises et de la crise politique persistante depuis la dissolution, classent la France AA- ou équivalent (qualité de dette "haute ou bonne"), avec, pour certaines comme Fitch, une "perspective négative".

Ce qui préfigure une dégradation: en ce cas, la France basculerait en catégorie A (qualité "moyenne supérieure"), et devrait verser à ceux qui investissent dans sa dette une prime de risque supérieure, accroissant d'autant les remboursements de cette dette.

Pour Eric Dor, directeur des études économiques à l'IESEG School of Management, une dégradation serait "logique". D'abord parce que la situation politique n'aide pas à mettre en œuvre "un plan crédible d'assainissement budgétaire", comme Fitch l'exigeait en mars.

Mais aussi pour effacer "une incohérence" : 17 pays européens sont moins bien notés que la France alors qu'ils ont - à très peu d'exceptions près - des ratios de finances publiques meilleurs que les 5,8% du PIB de déficit public et 113% du PIB de dette publique enregistrés en France en 2024.

Coup d'envoi 

Depuis mardi, la nomination rapide à Matignon de Sébastien Lecornu pour succéder à François Bayrou, tombé la veille lors du vote de confiance, ravive l'espoir d'un budget 2026 présenté en temps et heure.

Lucile Bembaron, économiste chez Asterès, juge ainsi "plausible" que Fitch "attende davantage de visibilité politique" pour agir.

D'autant, remarque Hadrien Camatte, économiste France chez Natixis, que les finances publiques n'ont pas enregistré cette année de nouveau dérapage inattendu, et que "la croissance résiste".

L'Insee a même annoncé jeudi qu'en dépit du "manque de confiance" généralisé, celle-ci pourrait dépasser la prévision du gouvernement sortant - 0,7% - pour atteindre 0,8% cette année.

Anthony Morlet-Lavidalie, responsable France à l'institut Rexecode, observe aussi que Fitch, la plus petite des trois principales agences internationales de notation, "donne rarement le coup d'envoi" des dégradations.

Mais il estime "très probable" que la principale agence, S&P Global, abaissera le pouce lors de sa propre revue, le 28 novembre.

Selon ses calculs, la France ne sera en effet pas en mesure de réduire à moins de 5% son déficit public l'an prochain, contre les 4,6% qu'espérait François Bayrou.

Les économistes affirment cependant qu'une dégradation ne troublerait pas les marchés, "qui l'ont déjà intégrée", relève Maxime Darmet, économiste senior chez Allianz Trade.

Syndrome 

La dette française s'y négocie déjà à un taux bien plus coûteux que la dette allemande, dépassant même l'espace d'une journée, mardi, le taux de la dette italienne.

Les marchés donnent déjà à la France une "notation implicite" bien plus basse que sa note actuelle de AA-, estime M. Morlet-Lavidalie.

Il craint des taux qui resteraient "durablement très élevés", provoquant "un étranglement progressif", avec des intérêts à rembourser captant "une part significative de la dépense publique, alors qu'on a des besoins considérables sur d'autres postes".

L'économiste décrit une France en proie au "syndrome du mauvais élève".

"Lorsqu'on avait 20/20", explique-t-il - la France était jusqu'à 2012 notée AAA, note maximale qu'a toujours l'Allemagne - "on faisait tout pour s'y maintenir. Maintenant on dit que 17/20 (AA-) ça reste une très bonne note. Bientôt ce sera +tant qu'on est au-dessus de la moyenne, c'est pas si mal+. Quand on est la France, en zone euro, on devrait quand même être un peu plus ambitieux que cela!", dit-il à l'AFP.

Pour autant, même abaissée à A+, "la dette française resterait de très bonne qualité", relativise M. Camatte, préférant souligner "la forte épargne des ménages et une position des entreprises qui reste très saine".