Algérie-France: la crise après l'impasse de la politique mémorielle

Les dernières déclarations de M. Macron «sont de nature à heurter non seulement les autorités algériennes mais aussi une grande partie des Algériens». (Photo, AFP)
Les dernières déclarations de M. Macron «sont de nature à heurter non seulement les autorités algériennes mais aussi une grande partie des Algériens». (Photo, AFP)
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Publié le Mardi 05 octobre 2021

Algérie-France: la crise après l'impasse de la politique mémorielle

  • «C'est un vieux couple qui ne peut plus vivre ensemble mais qui sait qu'il ne peut pas se séparer»
  • «Les Algériens sont imprévisibles. Mais côté français, au bout d'un moment, on va vouloir éviter la rupture car la diaspora qui représente pas loin de 2 millions de personnes pourrait se trouver déchirée»

ALGER : Depuis Alger, les critiques d'Emmanuel Macron contre un "système politico-militaire" en place en Algérie sont perçues comme "électoralistes", mais elles traduisent aussi selon des experts le dépit du président français après l'apparent échec de sa politique de réconciliation mémorielle.

Alger a décidé samedi le "rappel immédiat" de son ambassadeur à Paris, en réaction à des propos relayés par le journal Le Monde où M. Macron affirme que l'Algérie, après son indépendance en 1962, s'est construite sur "une rente mémorielle", entretenue par "le système politico-militaire" et questionne l'existence d'une nation algérienne avant la colonisation française. 

Dimanche, des sources militaires françaises ont indiqué qu'Alger avait interdit de facto le survol de son territoire aux avions militaires français en guise de riposte.

Kader Abderrahim, directeur de recherche à l'institut IPSE à Paris, a cependant minimisé l'ampleur de la crise. "C'est un vieux couple qui ne peut plus vivre ensemble mais qui sait qu'il ne peut pas se séparer", dit-il à l'AFP, en soulignant à quel point les intérêts sont entremêlés. 

"Les Algériens sont imprévisibles. Mais côté français, au bout d'un moment, on va vouloir éviter la rupture car la diaspora qui représente pas loin de 2 millions de personnes pourrait se trouver déchirée".

A Alger, l'ambiance est électrique. Le quotidien L'Expression, proche du pouvoir, a estimé que M. Macron s'est laissé aller à "une digression impardonnable, qui n'a jamais été commise par aucun président français".

«Une sortie de route calculée» ?

Hassen Kacimi, un expert algérien des questions migratoires, juge que M. Macron a surtout un objectif électoraliste à l'approche de la présidentielle d'avril 2022. "Les politiques en France sont en pleine campagne, Macron aussi", a-t-il dit à l'AFP, en estimant qu'en France, "l'ambiance est dominée par un discours d'extrême-droite".

En outre, a-t-il estimé, "les relations entre la France et l'Algérie ne sont jamais sorties du prisme raciste colon/colonisé où l'Algérie a toujours été traitée de haut, de manière méprisante".

Un point de vue que tempère l'expert parisien de l'IPSE en soulignant que "pour la première fois, nous avons deux chefs d'Etat (en France et en Algérie) qui n'ont pas connu la guerre d'Algérie".

Abdelaziz Rahabi, ancien diplomate et ex-ministre algérien voit lui aussi des visées "électoralistes" dans les propos de M. Macron. Selon lui, pendant les quatre premières années de tout mandat présidentiel français, l'Algérie est "perçue comme un client et partenaire sécuritaire, et comme un épouvantail la dernière année".

Hasni Abidi, directeur du centre d'études Cermam à Genève, est convaincu qu'il s'agit d'une "sortie de route calculée par le président français", basée sur "des éléments de langage de ses proches conseillers".

Pour cet expert, c'est le résultat d'une "déception" de M. Macron notamment face au "retour peu enthousiaste d'Alger à son chantier de reconnaissance mémorielle".

Algérie-France : Réactions de la presse algérienne

La crise entre l'Algérie et la France provoquée par des déclarations critiques du président Emmanuel Macron est appelée à durer, estime lundi la presse algérienne en soulignant le caractère "inédit" de cette brouille.

"Les relations algéro-françaises semblent déjà entrées dans une phase critique, vingt-quatre heures après la diffusion de graves propos tenus par Emmanuel Macron ce jeudi à l'Elysée. Des mesures ont été prises, d'autres pourraient survenir incessamment. Entre Alger et Paris, règne désormais une crise inédite", écrit le quotidien Le Soir d'Algérie.

Les propos de M. Macron "continuent de susciter la colère et l'indignation en Algérie. Sa sortie (...)  plonge les deux pays dans une phase de tension qui risque de durer", estime pour sa part le journal Liberté.

"Jamais (...) les relations entre les deux capitales souvent passionnées et passionnelles, compte tenu de la dimension historique, culturelle et humaine qui lie les deux pays, n'ont atteint une telle détérioration, malgré les zones de turbulences passagères qu'elles connaissent épisodiquement", fait remarquer ce quotidien.

"La crise s'installe", titre en Une le quotidien francophone El Watan qui estime que l'état des relations bilatérales entre l'Algérie et la France "pourrait se compliquer davantage dans les jours à venir, vu que les propos en question (de M. Macron) continuent de susciter des réactions".

La classe politique a également unanimement condamné les critiques de M. Macron, à l'instar du Mouvement de la société pour la paix (MSP), principale formation islamiste en Algérie, qui a qualifié ses propos de  "déclaration de guerre à l'Algérie".

Sur les réseaux sociaux, un hashtag appelant à expulser l'ambassadeur de France à Alger est parmi les plus partagés par les internautes algériens sur Twitter depuis dimanche.

«Humiliation collective»

Selon M. Abidi, le rapport de l'historien français Benjamin Stora remis à M. Macron en janvier et "censé apaiser les liens a finalement contribué à la montée des tensions". Alger l'a rejeté comme "non objectif", reprochant l'absence de "reconnaissance officielle par la France des crimes de guerre et contre l'humanité perpétrés pendant les 130 années de l'occupation de l'Algérie".  

Les dernières déclarations de M. Macron "sont de nature à heurter non seulement les autorités algériennes mais aussi une grande partie des Algériens", souligne M. Abidi.

"Considérer le droit à la vérité comme une rente aux mains du pouvoir représente une humiliation collective" puisqu'"en Algérie il y a consensus autour de cette question", affirme-t-il.

Pour Kader Abderrahim, au contraire, "les paroles du président Macron sont frappées au coin du bon sens". "Il était temps de dire les choses sur la rente mémorielle, la nature du régime politique, il a dit tout haut ce que les Algériens ne cessent de répéter depuis des années maintenant, notamment avec le Hirak", le mouvement pro-démocratie né en février 2019.

Pour l'expert, M. Macron fait aussi le constat que "la nature du régime n'a pas changé". Après avoir soutenu son homologue Abdelmadjid Tebboune lors de son élection en 2019 il a "dû accepter qu'aujourd'hui Tebboune est seul, isolé".

La réaction d'Alger correspond surtout à "une nouvelle tentative du régime" de "jouer sur la fibre nationaliste", selon le spécialiste.


Israël a rendu à Gaza 30 corps de Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages 

Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza. (AFP)
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  • "Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès
  • Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre

GAZA: Israël a rendu vendredi à l'hôpital Nasser les corps de 30 Palestiniens en échange de deux dépouilles d'otages israéliens restituées la veille par le mouvement islamiste palestinien Hamas, a indiqué à l'AFP cet établissement du sud de la bande de Gaza.

"Les corps de 30 prisonniers palestiniens ont été reçus de la partie israélienne dans le cadre de l'accord d'échange", a précisé l'hôpital, situé à Khan Younès.

Les otages avaient été enlevés lors de l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre 2023, qui avait déclenché la guerre dans la bande Gaza.

Au total, en échange de 15 dépouilles d'Israéliens, 225 dépouilles de Palestiniens ont été rendues conformément aux termes de l'accord de cessez-le feu en vigueur depuis le 10 octobre.

Depuis cette date, le Hamas a également rendu deux dépouilles d'otages non-israéliens, un Thaïlandais et un Népalais.

Le mouvement islamiste a jusqu'à présent restitué les restes de 17 des 28 corps qui se trouvaient encore à Gaza et auraient dû être rendus au début de la trêve, assurant que localiser les autres dépouilles est "complexe" dans le territoire dévasté par deux ans de guerre.

Des équipes égyptiennes autorisées à entrer dans le territoire palestinien par Israël participent aux recherches avec des engins de chantiers.

Lundi soir, le Hamas avait rendu à Israël les restes d'un otage, identifié comme étant ceux d'Ofir Tzarfati, dont une partie de la dépouille avait déjà été récupérée en deux fois.

Les retards successifs dans la remise des corps des otages ont provoqué la colère du gouvernement israélien, qui a accusé le Hamas de violer l'accord de trêve. Et les familles des otages ont exigé des mesures plus sévères pour contraindre le groupe palestinien à se conformer à l'accord.

Dix corps d'otages du 7-Octobre seraient encore à Gaza, ainsi que celui d'un soldat mort durant une guerre en 2014. Tous sont israéliens sauf un Tanzanien et un Thaïlandais.

Par ailleurs, à deux reprises depuis le 10 octobre, Israël a mené des bombardements massifs sur Gaza en représailles à des tirs qui ont tué trois de ses soldats. Le 19 octobre, les bombardements israéliens avaient fait au moins 45 morts et mardi 104.

Le Hamas, qui dément avoir tiré sur les soldats israéliens, a accusé Israël de violer le cessez-le-feu.


Frappe israélienne sur le sud du Liban: un mort 

Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre. (AFP)
Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre. (AFP)
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  • Vendredi, un drone a visé un homme à moto dans le village de Kounine, selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Le ministère de la Santé a fait état d'un mort et d'un blessé
  • Cette frappe intervient au lendemain de l'incursion d'une unité israélienne dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal

BEYROUTH: Une frappe israélienne a tué vendredi un homme qui circulait à moto dans le sud du Liban, a annoncé le ministère de la Santé, ce qui porte à au moins 25 le nombre de morts dans des raids israéliens au cours du mois d'octobre.

Malgré le cessez-le-feu ayant mis fin en novembre 2024 à la guerre entre le Hezbollah et Israël, ce dernier continue de mener des frappes régulières au Liban, affirmer viser la formation pro-iranienne.

Vendredi, un drone a visé un homme à moto dans le village de Kounine, selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle). Le ministère de la Santé a fait état d'un mort et d'un blessé.

Israël n'a pas réagi dans l'immédiat.

Cette frappe intervient au lendemain de l'incursion d'une unité israélienne dans le village frontalier de Blida, où les soldats ont tué un employé municipal.

Le président Joseph Aoun a demandé à l'armée de "faire face" à toute nouvelle incursion israélienne en territoire libanais.

Ces derniers jours, l'aviation israélienne a intensifié ses frappes au Liban, affirmant viser des membres ou des infrastructures du Hezbollah.

Selon un bilan compilé par l'AFP à partir des données du ministère de la Santé, au moins 25 personnes, dont un Syrien, ont été tuées depuis le début du mois.

L'ONU avait indiqué mardi que 111 civils avaient été tués au Liban par les forces israéliennes depuis la fin de la guerre.

Lors d'un entretien vendredi avec son homologue allemand Johann Wadephul, en visite à Beyrouth, le ministre libanais des Affaires étrangères Youssef Rajji lui a demandé "d'aider à faire pression sur Israël pour qu'il cesse ses agressions".

"Seule une solution diplomatique, et non militaire, peut assurer la stabilité et garantir le calme dans le sud", a assuré le ministre libanais, selon ses propos rapportés par l'Ani.

Il a assuré que "le gouvernement libanais poursuit la mise en œuvre progressive de sa décision de placer toutes les armes sous son contrôle".

Le Hezbollah est sorti très affaibli du conflit et les Etats-Unis exercent une intense pression sur le gouvernement libanais pour que le mouvement chiite livre ses armes à l'armée nationale, ce qu'il refuse jusqu'à présent.

 


Liban: le chef de l'Etat demande à l'armée de «s'opposer à toute incursion israélienne»

Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit. (AFP)
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  • Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens"
  • Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière"

BERYROUTH: Le président libanais Joseph Aoun a demandé jeudi à l'armée de "s'opposer à toute incursion israélienne", après la mort d'un employé municipal d'un village du sud du Liban où une unité israélienne a pénétré pendant la nuit.

Dans un communiqué, le chef de l'Etat a condamné cette opération et "demandé à l'armée de faire face à toute incursion israélienne (...) pour défendre le territoire libanais et la sécurité des citoyens".

Selon l'Agence nationale d'information (Ani, officielle), "dans une agression grave et sans précédent", une unité israélienne "appuyée par des véhicules a effectué une incursion dans le village de Blida, à plus d'un kilomètre de la frontière".

Cette unité "a investi le bâtiment de la municipalité du village, où dormait Ibrahim Salamé, un employé municipal, qui a été tué par les soldats de l'ennemi", a ajouté l'Ani.

Le ministère de la Santé a confirmé la mort de l'employé municipal.

Des villageois cités par l'Ani ont indiqué que l'incursion avait duré plusieurs heures et que les forces israéliennes s'étaient retirées à l'aube.

Sur X, le Premier ministre libanais Nawaf Salam a dénoncé "une agression flagrante contre les institutions de l'Etat libanais et sa souveraineté".