Christian Louboutin trouve «beaucoup d'intérêt» dans «certaines formes de laideur

Cette photo d'archive prise le 14 décembre 2020 à Paris montre le créateur de mode français Christian Louboutin.(Franck Fife/AFP)
Cette photo d'archive prise le 14 décembre 2020 à Paris montre le créateur de mode français Christian Louboutin.(Franck Fife/AFP)
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Publié le Dimanche 17 octobre 2021

Christian Louboutin trouve «beaucoup d'intérêt» dans «certaines formes de laideur

  • Les accessoires doivent interroger, mais sans culpabiliser celui qui les porte, résume le styliste, président du jury des accessoires de mode du festival international de Hyères
  • « J'adore David Lynch, certains films que j'ai vus étaient repoussants, mais cela ne m'a pas du tout empêché d'aimer son travail, d'aller voir ses films suivants »

HYÈRES, France : Christian Louboutin, créateur des iconiques escarpins à la semelle rouge, s'est laissé séduire par des accessoires aussi «repoussants» que certains films de David Lynch. Car «la provocation» est un élément «très classique» dans la mode, relève-t-il dans un entretien.

Les accessoires doivent interroger, mais sans culpabiliser celui qui les porte, résume le styliste, président du jury des accessoires de mode du festival international de Hyères, dans le sud de la France, qui s'achève dimanche. 

Q - Quels sont les critères qui vous ont guidé dans le choix des finalistes?

R - L'émotion et l'interrogation. Cela n'a pas besoin d'être une chose que j'aime ou que je porterais, mais il faut que cela me porte à vouloir en savoir plus. Dans certaines formes de laideur, il y a beaucoup d’intérêt. Cela ne doit pas être +beau+ au sens classique, cela doit interroger, cela doit frapper.

J'adore David Lynch, certains films que j'ai vus étaient repoussants, mais cela ne m'a pas du tout empêché d'aimer son travail, d'aller voir ses films suivants... Il y a des films qui sont très beaux et très angoissants. La provocation est un facteur tout à fait classique de la mode finalement.

On est dans une période assez repoussante. Quand je vois des sabots en plastique, je trouve ça hyper repoussant, (mais) il y a beaucoup de (ces) choses qui sont considérées très à la mode.

Q - Quel est le rôle des accessoires dans la mode?

R - Mettre l'accent. L'un des finalistes parlait d'une forme d'inutilité. Les bijoux, on les porte, mais ils n'ont aucune fonction +utile+, contrairement au vêtement ou au soulier.

Le rôle de l'accessoire est de mettre des accents très personnels dans une forme de standardisation vestimentaire, l'accessoire parle plus de la personnalité, de manière subtile.

Car les messages ne doivent pas être trop démonstratifs, il faut les sentir en filigrane. Si les gens veulent acquérir quelque chose que vous faites, c'est pour se sentir bien avec, pas pour se sentir coupables ou responsables.

Q - Vous avez présenté votre dernière collection de chaussures à l'Atelier des lumières à Paris avec une performance et un show immersif. Est-ce que la pandémie et le virtuel ont changé la façon de montrer la mode?

R - Tout est bien à essayer, il n'y a pas de raison de montrer la mode de façon figée et de s'y tenir. Les choses bougent. Il y a de nouvelles technologies qui permettent de faire des choses assez incroyables, très évocatrices.

Parmi ces technologies, le mapping (une technologie multimédia qui permet de projeter de la lumière sur des volumes et recréer des images de grande taille sur des monuments: ndlr). C'est toujours bien de jouer avec cela. J'ai un goût pour le théâtre, le music hall. Tout ce qui est divertissement m'a toujours intéressé. Nous n'en sommes encore qu'aux prémices, une histoire est en train de s'installer.

L'accessoire de mode plus fort que jamais dans son «inutilité»

C'est un objet "inutile" comme une œuvre d'art et qui en dit long sur celui qui le porte: l'accessoire est prisé des maisons de luxe et des créateurs de mode indépendants, qui se l'approprient pour transmettre des messages écologiques et sociétaux.

Il y a deux ans, la créatrice des bijoux Capucine Huguet est partie avec des glaciologues en Arctique pour "voir et comprendre". Avant de concevoir une collection de bagues dédiée à la fonte des glaces.

"Les bijoux sont des vecteurs de personnalité, ils expriment beaucoup: notre religion, notre vie amoureuse... Ils doivent aussi représenter une valeur environnementale", explique à l'AFP la jeune femme, l'une des dix finalistes de festival international de mode à Hyères (Var) dans la catégorie accessoires. 

Chaque bague représente un aspect de la fonte des glaces. L'une, imposante, s'inspire des icebergs "naturellement sculptés" par les éléments, et sa structure rappelle celle "hexagonale et cristalline des flocons de neige".

- Sabots «dépression» -

Les pièces sont réalisées à partir "d'or ou d'argent recyclé, les pierres sont tracées éthiques et tout est fabriqué sur demande" dans l'atelier parisien de la styliste.

Le finaliste américain Benjamin Spencer a créé pendant le confinement sa collection de sabots en plastique, "une réflexion sur la santé mentale pendant la pandémie" de Covid-19. 

Anxiété, dépression, chaque paire de chaussures, plus au moins portables, s'inspire d'une maladie.

"Porter une chaussure qui symbolise une émotion négative contribue à combattre cette émotion", dit-il. Des sabots massifs bleu lavande semblent lourds, mais s'avèrent, une fois chaussés, très légers et ergonomiques.

La Française Mathilde Heintz transforme les vieux vêtements en sacs pour donner "la désirabilité à des choses qu'on ne veut plus mettre".

Les sacs de Lou Chartres ont une fonction supplémentaire: ils deviennent oreillers de voyage, permettant même de dormir debout ou sur l'épaule de celui qui le porte.

Avec ses sacs qui font référence à la cloche au cou des vaches de montagne ou qui s'accrochent au poignet avec un anneau nasal (celui qu'on fixe aux naseaux des taureaux), Manon Marcelot "veut reconnecter les secteurs d'élevage et de maroquinerie".

Les bagues et bracelets de la Japonaise Rayna Amuro, en argent et osier, synthétisent le contraste entre "l'organique et l'artificiel créé par l'homme".

"L'accessoire, c'est comme une architecture, cela change tout. Cela donne un style, c'est votre style, votre choix", dit à l'AFP Pascale Mussard, présidente du festival de Hyères.

- Bourgeoise ou punk -

Après 40 ans chez Hermès, elle a oeuvré pour la création d'une catégorie spécifique (depuis 2017) au festival de Hyères, dont la 36e édition s'achève dimanche.

"Par des accessoires, on peut aller sur des chemins que la mode regarde un peu moins, comme le handicap, le développement durable, l'éthique, qui intéressent les jeunes", souligne Pascale Moussard, rappelant qu'une pièce gagnante (un "patch" pour les seins), en 2019, était destinée aux femmes après un cancer du sein.

"Avant, une femme ne sortait jamais sans son chapeau et ses gants, souvent assortis. Dans les années 1970, l'accessoire n'avait plus la même place. Aujourd'hui il reprend de l'importance", dit-elle.

"Ces jeunes qui font des accessoires, c'est nouveau. Avant, c'était intégré dans les maisons de mode. Mais comme il n'est plus aussi codifié qu'autrefois, l'accessoire permet beaucoup de liberté" et de s'identifier par exemple à des courants en marge, "tels que les punks".

L'accessoire permet de "mettre des accents très personnels dans une forme de standardisation vestimentaire", dit à l'AFP Christian Louboutin, président du jury accessoires. Contrairement aux vêtements ou chaussures, les bijoux n'ont "aucune utilité", mais les talismans qui nous protègent sont associés à cet univers.  

Membre du jury et lauréat de l'édition précédente, Ddiddue Etcheberry, estime que l'accessoire doit "raconter une histoire".

"La pollution visuelle ne laisse plus respirer. Peut-être faut-il qu'il y ait dans une boutique, comme dans un musée, des oreillettes pour raconter l'objet, son origine, les matières et l'histoire de la personne qui l'a créé", avance-t-il.


Le Haïtien Louis-Philippe Dalembert prix Goncourt de la poésie

L'écrivain français Louis-Philippe Dalembert (Photo, AFP).
L'écrivain français Louis-Philippe Dalembert (Photo, AFP).
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  • Né dans un quartier populaire de Port-au-Prince en 1962, enfant et adolescent passionné de livres, Louis-Philippe Dalembert est diplômé en journalisme et docteur en littérature comparée en France
  • L'Académie Goncourt a décerné trois autres prix mardi.

 

PARIS: L'écrivain haïtien Louis-Philippe Dalembert a reçu mardi le prix Goncourt de la poésie pour l'ensemble de son oeuvre, a annoncé le jury dans un communiqué.

L'auteur de "Milwaukee Blues", roman qui faisait partie des quatre finalistes du prix Goncourt 2021, est l'auteur d'une dizaine de recueils de poèmes.

Le dernier en date, édité également cette année-là, s'appelle "Ces îles de plein sel et autres poèmes" (éditions Point).

Né dans un quartier populaire de Port-au-Prince en 1962, enfant et adolescent passionné de livres, Louis-Philippe Dalembert est diplômé en journalisme et docteur en littérature comparée en France. Il a reçu le Prix de la langue française en 2019, remis par un jury qui mêle membres de l'Académie française et de l'Académie Goncourt.

L'Académie Goncourt a décerné trois autres prix mardi.

Le Goncourt du premier roman est allé à Eve Guerra pour "Rapatriement", paru en janvier aux éditions Grasset. Le récit des difficultés du rapatriement en France du corps du père de la narratrice, tué dans un accident de travail au Cameroun, est l'occasion d'une réflexion sur son histoire familiale.

Le Goncourt de la nouvelle a consacré un recueil de Véronique Ovaldé, "À nos vies imparfaites", publié en avril aux éditions Flammarion.

Enfin, pour le Goncourt de la biographie, le choix du jury s'est porté sur celle de Madame de Sévigné, célèbre épistolière du XVIIe siècle, par Geneviève Haroche-Bouzinac, professeure à l'université d'Orléans.

L'Académie Goncourt a changé lundi soir de président, en élisant à ce poste Philippe Claudel, qui succède à Didier Decoin.

Les prix Goncourt, dits de printemps, sont attribués par le même jury que le célèbre prix Goncourt, plus prestigieuse des récompenses littéraires françaises décernée fin octobre ou début novembre.


Sur internet, des appels au boycott des stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza

La chanteuse américaine Lizzo arrive pour le Met Gala 2024 au Metropolitan Museum of Art le 6 mai 2024 à New York (Photo, AFP).
La chanteuse américaine Lizzo arrive pour le Met Gala 2024 au Metropolitan Museum of Art le 6 mai 2024 à New York (Photo, AFP).
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  • «Ils savent qu'ils auraient dû en parler depuis longtemps, mais maintenant que nous avons initié ce mouvement, ils commencent à briser le silence»
  • Selon le site spécialisé Social Blade, Kim Kardashian a perdu plus de 814.000 abonnés sur Instagram en un mois

WASHINGTON: Sur les réseaux sociaux, les appels à bloquer les comptes de célébrités influentes s'intensifient, un mouvement qui vise à sanctionner les stars restées silencieuses sur la guerre à Gaza.

Les chanteuses américaines Beyoncé et Taylor Swift ou encore la star de téléréalité et femme d'affaires Kim Kardashian figurent parmi les cibles de cette mobilisation propalestinienne. Et la vague de réprobation prend de l'ampleur depuis la récente tenue en grande pompe du gala du Met, grand messe annuelle de la mode à New York à laquelle a participé le gratin du showbiz.

Sur TikTok, le hashtag "blockout2024" cumulait lundi plus de 30.000 publications. Des vidéos égrénant les noms des invités du gala et les autres personnalités à "bloquer" recensaient des milliers de "likes".

"Quand ils bombardaient Rafah où il y a des milliers d'enfants, on entendait davantage parler de la tenue de Zendaya que de ce qui se passait" dans cette ville de la bande de Gaza, dénonce une internaute du nom de Shompa. "En les bloquant, vous les frappez au portefeuille".

Selon le site spécialisé Social Blade, Kim Kardashian a perdu plus de 814.000 abonnés sur Instagram en un mois, Selena Gomez plus d'un million, l'acteur Dwayne Johnson dit "The Rock" plus de 397.000 et Beyoncé environ 700.000.

"Ils savent qu'ils auraient dû en parler depuis longtemps, mais maintenant que nous avons initié ce mouvement, ils commencent à briser le silence. C'est en train de marcher, continuez à bloquer!", se réjouit sur TikTok une influenceuse nommée Muna.

«Très délicat»

La chanteuse Lizzo a publié  une vidéo dans laquelle elle invite sa communauté à collecter des fonds pour aider un médecin à Gaza à mettre sa famille à l'abri, pour le Soudan ou le Congo.

Sous sa publication, un "merci" de l'une de ses abonnées, puis une pluie de commentaires négatifs: "Je vais continuer de la bloquer", "c'est de la connerie (...) elle fait juste ça car elle est sur la liste", etc.

Depuis le conflit à Gaza déclenché par l'attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre, des militants propalestiniens et pro-israéliens exhortent les célébrités à prendre position sur les réseaux sociaux.

Pour David Jackson, chercheur en sciences politiques spécialiste de la mobilisation des jeunes, ces appels s'expliquent en partie par l'implication traditionnelle des stars aux Etats-Unis dans la sphère politique et le fait que les réseaux sociaux donnent aux internautes l'impression de connaître personnellement leurs idoles.

"Ne pas prendre position sur une question importante, ou prendre une position impopulaire, peut conduire à une plus grande désapprobation du public" envers une star, dit l'expert à l'AFP.

Or "ce conflit est très, très délicat à gérer pour une célébrité", souligne Natasha Lindstaedt, professeure à l'université d'Essex qui a étudié le militantisme des stars. "Et même des déclarations qui semblent pouvoir être acceptées universellement peuvent contrarier les gens", poursuit-elle.

L'actrice américaine Susan Sarandon a ainsi été remerciée par son agence UTA après avoir pris la parole lors d'un rassemblement propalestinien en novembre. L'humoriste Jerry Seinfeld s'est retrouvé récemment sous le feu des critiques pour s'être rapproché d'Israël.

Marie-Antoinette 

Ce récent mouvement de boycott est parti d'une vidéo, depuis supprimée, dans laquelle la créatrice de contenus Haley Kalil se filmait avec en fond sonore un passage du film Marie-Antoinette de Sofia Coppola. On y voit la reine de France lancer "let them eat cake!" ("qu'ils mangent de la brioche!").

Cette phrase célèbre, qui symbolise la condescendance des puissants envers les plus pauvres, a enflammé les réseaux sociaux alors que la population palestinienne de la bande de Gaza ravagée est menacée par la famine.

"Il est temps de bloquer toutes les célébrités, les influenceurs et les riches qui n'utilisent pas leurs ressources pour aider ceux qui en ont cruellement besoin", lance l'influenceuse Rae, dite "Lady from the outside", appelant à mettre en place une "guillotine numérique" contre ces personnalités.

L'indignation des internautes a été attisée par la démesure du gala du Met la semaine dernière, où selon le New York Times, un couvert coûtait 75.000 dollars, une table entière 350.000 dollars.

Sur les réseaux, les comparaisons ont ainsi fleuri entre l'événement new-yorkais et le film dystopique "Hunger Games". Celui-ci dépeint une élite qui participe à de somptueux banquets et organise des jeux cruels pendant qu'une partie de la population meurt de faim.

Difficile pour autant d'évaluer l'impact financier du mouvement sur les célébrités, "à moins qu'elles ne soient complètement boycottées", estime Mme Lindstaedt. "Mais dans le cas de Taylor Swift ou de Beyoncé il n'y a aucune chance que cela arrive".


Meryl Streep, l'exception hollywoodienne

L'actrice américaine Meryl Streep (Photo, AFP).
L'actrice américaine Meryl Streep (Photo, AFP).
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  • D'une beauté atypique, cette blonde au front haut et au nez légèrement dévié ne correspond pas aux canons hollywoodiens
  • En cinquante ans de carrière, «The Queen Meryl» a récolté presque toutes les distinctions, dont un record de 21 nominations aux Oscars

PARIS: Actrice à la longévité exceptionnelle, Meryl Streep, qui recevra mardi soir une Palme d'or d'honneur au 77e Festival de Cannes, a défié les règles hollywoodiennes en incarnant des femmes intenses au fil d'une impressionnante filmographie.

En cinquante ans de carrière, "The Queen Meryl" a récolté presque toutes les distinctions, dont un record de 21 nominations aux Oscars et 3 statuettes dorées.

Elle a collaboré avec Michael Cimino, Sydney Pollack, Clint Eastwood, Steven Spielberg, Steven Soderbergh ...

"J'ai tout ce dont je pouvais rêver", reconnaissait-elle en 2011 après son 3e Oscar. "Laissons-en un peu aux autres ! Franchement, je comprends qu'on en ait assez de Streep. Même moi, ça me choque!"

Qualifiée de meilleure actrice au monde - titre que cette femme discrète rejetait catégoriquement -, elle s'est longtemps présentée comme une mère de quatre enfants, mariée au même homme pendant 45 ans et qui, accessoirement faisait du cinéma.

"Elle est la personne la plus dépourvue de mystère que je connaisse. Elle est très simplement une jeune Américaine, charmante, saine, attirante, intelligente", affirmait Alan J.Pakula en 1982. "Mais dès qu'elle joue, elle est la femme la plus mystérieuse qui soit".

D'une beauté atypique, cette blonde au front haut et au nez légèrement dévié ne correspond pas aux canons hollywoodiens. A ses débuts en 1976, le producteur Dino de Laurentiis la juge même "trop laide" pour le remake de "King Kong".

Récits de femmes 

Née le 22 juin 1949 dans le New Jersey, Mary Louise Streep grandit dans une famille heureuse de la classe moyenne et découvre les joies de la scène au lycée.

Dotée d'une excellente mémoire et d'un don pour les accents, elle suit le master de théâtre de Yale.

A Broadway, elle jongle entre les rôles et se fait repérer par Hollywood. C'est Robert de Niro dans "Taxi Driver" qui l'a convainc de tenter le cinéma : "Je me suis dit que j'aimerais être une actrice de sa trempe quand je serai grande !".

"Consternée" par ses débuts à l'écran dans "Julia" (1977), elle s'entête et décroche sa première nomination aux Oscars dès son deuxième film dans "Voyage au bout de l'enfer" (1978), où elle contrebalance le récit masculin sur la guerre du Vietnam.

Elle contraste avec d'autres actrices en incarnant des femmes ordinaires, voire antipathiques, qui racontent une autre histoire du XXe siècle.

Dans "Kramer contre Kramer" - son premier Oscar (1979) - elle joue une mère qui quitte sa famille avant d'exiger la garde de son fils. Elle témoigne ainsi de la vie de millions d'Occidentales, déchirées entre leur foyer et leur besoin d'indépendance.

Aussi à l'aise dans le mélo - "La maîtresse du lieutenant français" (1981) - elle est inoubliable en rescapée de la Shoah dans "Le Choix de Sophie" (2e Oscar) et en Karen Blixen dans "Out of Africa" (1985).

La comédie contre l'obsolescence

A la quarantaine, voyant les propositions diminuer, elle ose la comédie "La mort vous va si bien" (1992). Trois ans plus tard, Clint Eastwood lui offre un de ses plus beaux rôles dans "Sur la route de Madison".

Même coup de maître en 2006 avec la comédie "Le Diable s'habille en Prada" qui lui permet, aux portes de la soixantaine, d'insuffler un élan extraordinaire à sa carrière. Totalement décomplexée, elle renoue avec la comédie musicale "Mamma Mia!" (2008) et décroche son troisième Oscar pour "La Dame de Fer".

"Loin de disparaître dans la traditionnelle obsolescence post-cinquantaine, elle a défié les conventions hollywoodiennes et atteint de nouveaux sommets", a écrit son biographe Michael Schulman. "Aucune actrice née avant 1960 n’obtient un rôle à Hollywood sans qu’il ait d'abord été refusé par Meryl".

Doyenne de l'élite progressiste hollywoodienne, ardente opposante de Trump, "Sainte Meryl" est poussée de son piédestal lorsqu'éclate #MeToo en 2017. "VOTRE SILENCE est LE problème", lui assène Rose McGowan, l'une des premières actrices à dénoncer Harvey Weinstein. Meryl Streep assure tout ignorer du comportement du producteur qu'elle qualifiait de "Dieu".

L'actrice a reversé ses cachets de "La Dame de Fer" à son projet de musée national de l'Histoire des femmes et levé 15 millions de dollars avec George Clooney pour soutenir la grève des acteurs et scénaristes en 2023.