17 octobre 1961: Appel à la reconnaissance des événements comme crime d'Etat

Soixante ans après, le massacre de manifestants algériens à Paris par les forces de l'ordre françaises a été commémoré dimanche par de multiples manifestations en France. (AFP)
Soixante ans après, le massacre de manifestants algériens à Paris par les forces de l'ordre françaises a été commémoré dimanche par de multiples manifestations en France. (AFP)
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Publié le Lundi 18 octobre 2021

17 octobre 1961: Appel à la reconnaissance des événements comme crime d'Etat

  • À Paris et en région parisienne, en pleine guerre d’Algérie, des forces de polices dirigées par le préfet Maurice Papon se sont livrées à une chasse à l’homme
  • Le chantier de la réconciliation mémorielle consacré à la guerre d’Algérie, voulu par le président français, Emmanuel Macron, est un dossier complexe, semé d’écueils

PARIS: Le chantier de la réconciliation mémorielle consacré à la guerre d’Algérie, voulu par le président français, Emmanuel Macron, est un dossier complexe, semé d’écueils: d’une part parce que la relation diplomatique entre Paris et Alger s’est dégradée, et d’autre part en raison d’un contexte politique français pré-électoral particulièrement centré sur les questions conservatrices et identitaires. Certains sont contre la repentance quand d’autres se prononcent, au contraire, pour la reconnaissance des crimes coloniaux parmi lesquels figurent les événements du 17 octobre 1961.  

À Paris et en région parisienne, en pleine guerre d’Algérie, des forces de polices dirigées par le préfet Maurice Papon se sont livrées à une chasse à l’homme. Selon les chiffres connus à ce jour, près de 30 000 Algériens manifestaient pacifiquement à l’appel du Front de libération nationale (FLN) pour protester contre le couvre-feu qui leur avait été imposé depuis le 5 octobre 1961. Près de 12 000 manifestants ont été arrêtés et embarqués dans les bus de la RATP à destination du stade Pierre-de-Coubertin, du Palais des sports et du Parc des expositions, transformés en centre de rétention. Nombreux sont ceux qui ont été frappés et blessés. Plusieurs dizaines de personnes – selon les historiens, le chiffre exact reste encore à déterminer – ont perdu la vie, et leurs corps ont été jetés dans la Seine.

Dans une déclaration à la presse, l’historien Fabrice Riceputi, auteur du livre Ici on noya les Algériens, révèle que ces événements font l’objet d’une intense bataille politique et mémorielle. Des témoins de l’époque, des militants et des historiens ont cherché à faire toute la lumière sur un drame longtemps minimisé par le pouvoir politique et occulté de la mémoire collective.

60e anniversaire

«Alors que ce devait être une manifestation pacifique destinée à exprimer leur refus de subir un couvre-feu, les Algériens de France ont été massacrés au cœur de Paris par les forces de police sous ordre de l’État. Cette manifestation a été réprimée dans le sang», déclare à Arab News en français Samia, une Algérienne qui était présente à la manifestation organisée dimanche dernier à l’appel de nombreuses associations de France pour commémorer le 60e anniversaire des événements. «Cet anniversaire était très attendu. À travers cette démarche mémorielle, la communauté algérienne en France s’attendait à une reconnaissance de ce crime. Hélas, cela n’a été le cas», regrette-t-elle, faisant référence au communiqué de l’Élysée publié le 16 octobre, la veille de la date anniversaire.

 

EN BREF

Ce rassemblement a été organisé à Paris dimanche après l’appel lancé par de nombreuses associations, des organisations syndicales et des partis politiques de gauche comme 17 octobre: contre l’oubli, me Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap), Per a Pace (une association corse), le Réseau d’entraide vérité et justice, SOS Racisme, l’Agence de promotion des cultures et du voyage (APVC), l’Union juive pour la paix (UJFP), l’Association des travailleurs maghrébins en France (ATMF),  la Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR). On compte également des organisations syndicales et des partis politiques: la Fédération syndicale unitaire (FSU), le Mouvement national lycéen (MNL), le Syndicat national des enseignements secondaires (Snes), la Confédération générale du travail (CGT), Europe Écologie-Les Verts (EELV), Génération.s, La France insoumise (LFI), le Parti de gauche et l’Union communiste libertaire (UCL).

Interrogé par Arab News en français, Gilles Manceron, historien, spécialiste du colonialisme français et l’un des responsables de la Ligue des droits de l’homme, estime que «la répression du 17 octobre 1961 est un crime d’État. C’est pour cela que la déclaration du président de la république, le communiqué paru sur le site de l’Élysée ce samedi 16 octobre, n’est pas satisfaisant. Il faut saluer l’emploi du mot “crime”. C’est un petit progrès, car François Hollande parlait d’une violente répression. Pour autant, Emmanuel Macron ne qualifie pas [les événements] de “crime d’État”. Le fait qu’il cite le préfet Maurice Papon laisse considérer que c’est un crime de préfecture qui a été commis, alors que non: c’est un crime qui a été commis à la suite d’une décision d’une partie des ministres de l’époque, notamment le Premier ministre, Michel Debré».

De son côté, Richard Wagman, représentant de l’Union juive pour la paix, nous explique: «Il est important pour nous d’être présents aujourd’hui parce que, en 1942, un certain Maurice Papon, qui était secrétaire général de la préfecture de Gironde, a fait déporter 1 600 Juifs, y compris des enfants. Vingt ans plus tard, en 1961, le même Maurice Papon se trouvait à la Préfecture de police de Paris, et c’est lui qui a orchestré le massacre de 200 Algériens dans les rues de Paris. Que ce soit contre la minorité juive ou contre les colonisés de la communauté algérienne, ici, en France, il a continué à commettre des crimes d’État contre ces minorités en toute impunité.» 

Au micro d’Arab News en français, Benoît Martin, secrétaire général de la section départementale de la CGT de Paris, révèle que la présence de son organisation à cette manifestation est extrêmement importante pour montrer que la classe ouvrière est solidaire. «Ce crime d’État n’a pas été reconnu hier par le président de la république, qui n’a pas mis en cause l’État, mais Maurice Papon; c’est normal, mais il faudra aller encore plus loin dans la reconnaissance de la responsabilité dans ce crime du 17 octobre 1961, alors que des négociations étaient engagées pour obtenir la paix et le désengagement de l’armée française en Algérie. […] Aujourd’hui, il est important que la vérité soit dite», estime-t-il.

D’autres événements commémoratifs ont été programmés en Seine-Saint-Denis, à Bagnolet, Montreuil, Noisy-le-Sec, ou encore dans les villes de Colombes, Gennevilliers, Bagneux, Malakoff et Châtillon.

 

«Sens aigu des responsabilités»

À l’occasion de la Journée nationale de l’immigration, qui marque le 60e anniversaire du massacre du 17 octobre 1961, le président algérien, Abdelmadjid Tebboune, souligne dans un discours adressé à la diaspora algérienne que «des exactions qui révèlent l’horreur des massacres abjects et des crimes contre l’humanité resteront gravées dans la mémoire collective». Le président algérien réaffirme le «souci ferme» exprimé par l’Algérie de traiter les dossiers de l’histoire et de la mémoire «sans complaisance ni compromissions», estimant que leur traitement se fera avec «le sens aigu des responsabilités que requiert un traitement impartial et intègre, loin des engouements et de la prédominance de la pensée colonialiste arrogante sur des lobbies incapables de s’affranchir eux-mêmes de leur extrémisme chronique».


L'Égypte coordonne avec la Grèce le retour des victimes du bateau de migrants et met en garde contre les itinéraires irréguliers

L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016. (File/AFP)
L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016. (File/AFP)
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  • Le ministère a ajouté que l'ambassade était en contact avec les familles des personnes décédées afin d'organiser le transfert des dépouilles dans leur pays d'origine
  • Présentant ses condoléances aux familles des victimes, le ministère a renouvelé son avertissement aux citoyens concernant les risques de la migration irrégulière, exhortant les Égyptiens à protéger leur vie en utilisant des moyens de transport légaux

DUBAI: Les mesures prises par l'Égypte ont reçu le soutien de la communauté internationale, l'Union européenne s'étant engagée à verser 200 millions d'euros de subventions en mars 2024 pour renforcer la gestion des frontières.
Le ministre égyptien des Affaires étrangères, Badr Abdelatty, a demandé à l'ambassade égyptienne à Athènes de renforcer la coordination avec les autorités grecques, a rapporté Ahram Online mardi.

Cette mesure vise à soutenir les survivants et à accélérer le rapatriement des corps des victimes une fois les procédures légales achevées.

Le ministère a ajouté que l'ambassade était en contact avec les familles des personnes décédées afin d'organiser le transfert des dépouilles dans leur pays d'origine.

Présentant ses condoléances aux familles des victimes, le ministère a renouvelé son avertissement aux citoyens concernant les risques de la migration irrégulière, exhortant les Égyptiens à protéger leur vie en utilisant des moyens de transport légaux et réglementés.

L'Égypte a intensifié ses efforts pour freiner la migration irrégulière depuis le lancement d'une stratégie nationale en 2016, les responsables soulignant que le pays ne sera pas utilisé comme voie de transit vers l'Europe.

Les autorités affirment qu'aucun bateau de migrants n'a quitté les côtes égyptiennes depuis l'introduction de la stratégie, bien que l'Égypte accueille près de 10 millions de ressortissants étrangers, y compris des réfugiés, des demandeurs d'asile et des migrants de 133 pays.

L'approche a continué à évoluer au fil des ans, tout récemment avec l'adoption du plan d'action national 2024-2026 par le Comité national pour la lutte et la prévention de la migration illégale et de la traite des personnes.

Des initiatives antérieures ont également soutenu ces efforts, notamment le programme "Lifeboats" de 2019, qui a alloué 250 millions EGP pour créer des opportunités d'emploi dans les villages considérés comme les plus vulnérables à la migration irrégulière.

Les mesures prises par l'Égypte ont bénéficié d'un soutien international, l'Union européenne s'étant engagée à verser 200 millions d'euros de subventions en mars 2024 pour renforcer la gestion des frontières, les capacités de recherche et de sauvetage et les efforts de lutte contre le trafic de migrants.


Explosion du port de Beyrouth: un juge libanais en Bulgarie pour l'enquête

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  • Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort
  • Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban"

BEYROUTH: Le juge libanais Tarek Bitar s'est déplacé mercredi en Bulgarie pour interroger le propriétaire du navire lié à l'explosion meurtrière dans le port de Beyrouth en 2020, a indiqué un responsable judiciaire à l'AFP.

Un tribunal bulgare avait refusé le 10 décembre d'extrader Igor Grechushkin, un citoyen russo-chypriote de 48 ans, faute d'assurances suffisantes du Liban qu'il n'appliquerait pas la peine de mort.

M. Grechushkin est désigné par les autorités libanaises comme le propriétaire du Rhosus, le navire qui transportait le nitrate d'ammonium débarqué dans le port de Beyrouth dans un entrepôt, où il avait explosé suite à un incendie, faisant plus de 200 morts, des milliers de blessés et d'importants dégâts.

Arrêté à l'aéroport de Sofia en septembre sur la base d'une notice rouge d'Interpol, il est accusé par les autorités judiciaires libanaises d'"introduction d'explosifs au Liban, acte terroriste ayant entraîné la mort d'un grand nombre de personnes et désactivation de machines dans le but de faire couler un navire", selon le parquet bulgare.

"M. Bitar est parti pour Sofia mercredi" et doit interroger M. Grechushkin jeudi, a précisé sous couvert d'anonymat un responsable de la justice libanaise à l'AFP.

L'ambassade libanaise à Sofia s'est occupée de trouver un traducteur et un huissier chargé de prendre en note l'interrogatoire, qui se fera en présence d'autorités judiciaires bulgares, a précisé la même source.

La justice libanaise espère obtenir des informations sur la cargaison de nitrate d'ammonium et en particulier son commanditaire. Elle veut aussi savoir si Beyrouth était la destination finale du navire.

Le juge indépendant Tarek Bitar avait repris en début d'année l'enquête qu'il avait dû interrompre en janvier 2023, se heurtant à l'hostilité d'une grande partie de la classe politique, notamment du Hezbollah qui l'accusait d'impartialité, avant d'être poursuivi pour insubordination.

Son enquête a pu reprendre après l'entrée en fonction du président Joseph Aoun et de son Premier ministre, qui ont promis de préserver l'indépendance de la justice, à la suite de la guerre entre Israël et le Hezbollah dont le mouvement chiite soutenu par l'Iran est sorti très affaibli à l'automne 2024.


«Des habitants meurent de froid»: Gaza frappé par de nouvelles intempéries

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs. (AFP)
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  • "Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa)
  • "Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré

GAZA: De nouvelles pluies hivernales se sont abattues cette semaine sur la bande de Gaza, déjà ravagée par la guerre, faisant au moins 18 morts depuis le début des intempéries.

Des Palestiniens poussant une voiture dans une rue inondée, une charrette tirée par un âne progressant difficilement à travers les eaux, des tentes et des abris de fortune de déplacés inondés: la situation s'aggrave dans un territoire palestinien en ruines.

"Avec les fortes pluies et le froid apportés par la tempête Byron, des habitants de la bande de Gaza meurent de froid", a écrit lundi sur X Philippe Lazzarini, le chef de l'agence de l'ONU chargée des réfugiés palestiniens (Unrwa).

"Nos aides attendent depuis des mois d'entrer à Gaza. Elles permettraient de couvrir les besoins de centaines de milliers de personnes en détresse", a-t-il déploré.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre après deux années de guerre entre Israël et le mouvement islamiste Hamas, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Nourrissons «en danger»

Selon le ministère de la Santé de Gaza, dirigé par le Hamas, un nouveau-né est décédé lundi des suites d'une hypothermie sévère causée par un froid extrême. Le ministère ajoute qu'il avait été admis à l'hôpital il y a deux jours et placé en soins intensifs.

Trois enfants étaient décédés dans des conditions similaires la semaine dernière, d'après la Défense civile, organisation de premiers secours opérant sous l'autorité du mouvement islamiste.

Si un cessez-le-feu est entré en vigueur en octobre, l'ONU estime que l'aide humanitaire arrive en quantité insuffisante face à l'ampleur des besoins de la population démunie.

Environ 1,3 million de personnes, sur une population de plus de deux millions d'habitants dans le territoire, ont actuellement besoin d'un hébergement d'urgence, selon les Nations unies, qui mettent en garde contre un risque croissant d'hypothermie.

Les nourrissons encourent particulièrement un "grand danger" avec les conditions hivernales, avertit l'organisation.

«Reconstruire le territoire»

La Défense civile de Gaza avait indiqué vendredi qu'au moins 16 personnes étaient mortes en 24 heures des suites de l'effondrement de bâtiments ou des effets du froid.

Outre le nourrisson, le porte-parole de l'organisation, Mahmoud Bassal, a fait état mardi d'un autre décès après l'effondrement du toit d'un bâtiment à la suite de fortes pluies dans le nord-ouest de la ville de Gaza.

Il a précisé que la maison avait déjà été endommagée par des frappes aériennes pendant la guerre.

Des images de l'AFP montrent des secouristes extraire le corps d'un Palestinien des décombres d'un bâtiment. Non loin, des proches en deuil pleurent.

"Nous appelons le monde à résoudre nos problèmes et à reconstruire le territoire afin que nous puissions avoir des maisons au lieu (...) de vivre dans la rue", a déclaré Ahmed al-Hossari, qui a perdu un membre de sa famille.

La bande de Gaza connaît généralement un épisode de fortes pluies à la fin de l'automne et en hiver, mais l'état de dévastation du territoire, des conséquences de la guerre, a rendu ses habitants plus vulnérables.