Le racisme yeux dans les yeux avec l'historien Pascal Blanchard

L'historien Pascal Blanchard pose lors d'une séance photo à Paris, le 19 octobre 2021. JOEL SAGET / AFP
L'historien Pascal Blanchard pose lors d'une séance photo à Paris, le 19 octobre 2021. JOEL SAGET / AFP
Short Url
Publié le Mercredi 20 octobre 2021

Le racisme yeux dans les yeux avec l'historien Pascal Blanchard

  • Sur la couverture, des suprémacistes blancs australiens qui reprennent l'habit du Ku Klux Klan, et fixent l'objectif du photographe dans les yeux, bras croisés
  • Caricatures insultantes d'Africains, images de zoos humains, de la ségrégation ou de l'apartheid, affiches antisémites virulentes, photos de mouvements d'extrême droite... Beaucoup de visuels révulsent

PARIS : C'est frontalement que l'historien Pascal Blanchard a choisi de regarder le racisme dans un livre choc publié jeudi, qui expose les images parfois violentes, parfois insidieuses, d'une humanité jamais débarrassée du fléau.

"Le Racisme en images: déconstruire ensemble" (éditions de La Martinière), coécrit avec l'anthropologue Gilles Boëtsch, rassemble près de 250 images sur plus de deux siècles.

Sur la couverture, des suprémacistes blancs australiens qui reprennent l'habit du Ku Klux Klan, et fixent l'objectif du photographe dans les yeux, bras croisés. "Elle a été pensée comme une image qui doit faire peur", remarque Pascal Blanchard.

Caricatures insultantes d'Africains, images de zoos humains, de la ségrégation ou de l'apartheid, affiches antisémites virulentes, photos de mouvements d'extrême droite... Beaucoup de visuels révulsent.

Mais tout n'est pas aussi transparent dans l'imagerie raciste, et le livre le démontre en exposant des photos qui pour un certain public, à une certaine époque, pouvaient passer pour neutres, ordinaires.

"Quand on dit image raciste, les gens partent de l'hypothèse qu'elle va être très violente, ou immédiatement lisible. Ils ne se rendent pas compte qu'il y a une gradation dans le racisme. On dira: attends, cette image-là n'est pas raciste... Non: elle ne l'est pas pour l'un, mais elle est pour l'autre qui est visé", explique l'historien.

Pascal Blanchard a été l'un des premiers historiens français à renouveler, en dehors de l'université, l'histoire de la colonisation et de l'immigration. Il s'est attiré de nombreuses critiques avec ses ouvrages précédents, perçus par ses détracteurs comme militants, non scientifiques ou relevant d'une histoire-spectacle, comme "Sexe, race & colonies" (2018).

«On prend le venin»

Loin des concepts propres aux "décoloniaux", "Le Racisme en images" déploie un style encyclopédique et grand public pour pointer nos préjugés les plus destructeurs. Car "il est complexe de définir la nature d'images qui, sans être explicitement racistes, fabriquent du préjugé, de la hiérarchie et de l'exclusion", lit-on en introduction.

Au sommaire, un casting prestigieux: l'ancien footballeur Lilian Thuram, les écrivains Leïla Slimani, Alain Mabanckou et Didier Daeninckx, l'académicien Pascal Ory, ou encore les historiens Pap Ndiaye et Johann Chapoutot, entre autres, commentent chacun une image.

Lilian Thuram a choisi un dessin de La Noiraude, une vache. C'est le surnom que donnaient à ce Guadeloupéen certains camarades de Bois-Colombes, en région parisienne. Dans le dessin animé, la vache noire était "dépressive" et "n'arrêtait pas de dire des bêtises". "Pourquoi ont-ils décidé que la vache blanche serait supérieure en intelligence à la noire?", se demande l'ex-capitaine des Bleus, sans avoir la réponse.

Le cliché du tzigane voleur de poules, de l'Africain cannibale, du Juif cupide... "Ce sont des choses qui sont rentrées dans notre culture. Bien sûr on a l'intelligence de prendre de la distance et de dire: stop, pas moi. Oui mais! Nous l'avons dans notre culture. L'image a popularisé un discours raciste savant. Elle fabrique un bain, et c'est difficile de détourner les yeux pour ne pas la voir", relève Pascal Blanchard.

"Et je ne crois pas qu'il faille détruire les statues, brûler les livres, supprimer les images. Il faut partir de ce qui a été produit pour l'expliquer aux générations futures", poursuit l'auteur. "Je dirais que c'est une forme de vaccin: on prend le venin, et on l'utilise pour déconstruire et débattre".


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Short Url
  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
Short Url
  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
Short Url
  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».