Forever Is Now, ou l'art contemporain au pied des pyramides

Shuster + Moseley est le studio d'art conceptuel de Claudia Moseley et Edward Shuster. (Fournie)
Shuster + Moseley est le studio d'art conceptuel de Claudia Moseley et Edward Shuster. (Fournie)
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Publié le Dimanche 31 octobre 2021

Forever Is Now, ou l'art contemporain au pied des pyramides

  • Art of Egypt, entreprise privée située en Égypte, est conçue à partir d’une plate-forme innovante et avant-gardiste qui agit comme un opérateur culturel
  • La pandémie a, en quelque sorte, fermé l’espace consacré des galeries pour propulser l’art «hors les murs»

BEYROUTH:  C’est la première fois depuis quatre mille cinq cents ans qu’un tel événement a lieu sur l’esplanade et au pied des grandes pyramides de Gizeh: des artistes vivants vont fusionner leur art avec celui de l’Égypte antique. En effet, l’idée d’installer des œuvres contemporaines au pied de la septième et dernière merveille du monde, inscrite au patrimoine de l’humanité de l’Unesco, est inédite.

L’exposition Forever Is Now, commissionnée par Art of Egypt, se tiendra du 21 octobre au 7 novembre. Elle réunira sur l’esplanade de Gizeh les œuvres de dix artistes contemporains locaux, régionaux et internationaux, ainsi que le robot hyperréaliste Ai-DA, capable, grâce à son intelligence artificielle, de produire des peintures, des sculptures et des performances.

Art of Egypt, entreprise privée située en Égypte, est conçue à partir d’une plate-forme innovante et avant-gardiste qui agit comme un opérateur culturel. Son objectif est la défense du développement durable de l'art, avec pour axes principaux la préservation culturelle et la démocratisation.

Elle part du principe que, si le passé et les trésors antiques de l’Égypte sont célèbres dans le monde entier, peu de gens connaissent les œuvres des artistes égyptiens d’aujourd’hui. Son action est donc principalement orientée vers la promotion des créateurs égyptiens contemporains à l’international.

Les artistes de Forever is Now

Royaume-Uni: Shuster + Moseley est le studio d'art conceptuel de Claudia Moseley et Edward Shuster. Ce duo d’artistes crée des mobiles lumineux, des installations sculpturales et des environnements immersifs et méditatifs. Leur travail comprend des œuvres temporaires et permanentes destinées à des espaces publics, à des projets commerciaux, à des collections privées ainsi qu’à des expositions internationales.

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Shuster + Moseley est le studio d'art conceptuel de Claudia Moseley et Edward Shuster. (Fournie)

 

Russie: Alexander Ponomarev est diplômé de l'École des beaux-arts d'Orel (1973) et du Collège d'ingénierie nautique d'Odessa (1979). Il a été officier d'équipage à bord de différents navires de la marine russe avant de choisir la carrière d'artiste.

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Alexander Oonomarev. (Fournie)

États-Unis: Le langage sculptural développé par Gisela Colon est singulier: il s’apparente à une forme de minimalisme organique. Son art se situe à l'intersection de l'art et de la science. Ses sculptures immaculées activées par la lumière sont créées à partir de matériaux de la haute technologie tels que l'acrylique optique et la fibre de carbone aérospatiale.

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Gisela Colon. (Fournie)

Brésil: Joao Trevisan est un peintre et sculpteur qui habite Sao Paulo. Il expose régulièrement depuis 2014. Ses œuvres interrogent la valeur des déchets: poids et légèreté, tension et équilibre. Le cœur de sa pratique artistique est la performance. Il se définit comme un promeneur qui observe et collectionne des objets.

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Joao Trevisan. (Fournie)

France: JR expose librement dans les rues du monde, de la banlieue parisienne aux bidonvilles du Brésil, en passant par les rues de New York, attirant l'attention de gens qui ne sont pas des visiteurs typiques des musées. Les collages monumentaux et les trompe-l’œil caractérisent son art.

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JR portrait. (Fournie)

Italie: Lorenzo Quinn, sculpteur figuratif de premier plan, est très connu pour sa représentation des émotions humaines telles que l'amour et la foi, qu’elles soient représentées sur une échelle monumentale ou plus intime. Ses mains humaines, particulièrement expressives, sont célèbres.

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Lorenzo Quinn. (Fournie)

Royaume-Uni: Les sculptures minimalistes baptisées «Surfaces» ont permis à Stephen Cox RA d’accéder à la notoriété internationale. Austères mais chatoyantes, ses œuvres n’en sont pas moins «abstraites». En 1979, il part pour l'Italie, où il commence à sculpter la pierre, créant des reliefs architecturaux.

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Stephen Cox. (Fournie)

Égypte: Moataz Nasr vit et travaille au Caire. Après des études d'économie, il décide de changer d'orientation et ouvre un atelier dans le Vieux Caire. Cet autodidacte a acquis une reconnaissance locale marquée par de nombreux prix avant de percer sur la scène artistique internationale en 2001. Il a notamment remporté le Grand Prix de la 8e Biennale internationale du Caire.

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Moataz Nasr. (Fournie)

Égypte: Sherin Guirguis est une artiste qui interroge la différence et la complexité inhérentes à la politique des lieux. En utilisant le site, le texte et des histoires récupérées au fondement de chaque série, elle développe des projets qui engagent le public dans un dialogue sur le pouvoir, l'agencement et la transformation sociale à travers l'art.

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Sherin Guirguis. (Fournie)

Arabie saoudite: le prince Sultan ben Fahd considère l'art comme un voyage entre les souvenirs immatériels et les cultures tangibles. De ses dessins abstraits, ses peintures, ses sculptures et ses installations se dégage un thème central: la culture matérielle de son pays natal. Dans sa pratique, il en réinterprète l'histoire ainsi que les récits traditionnels et les transpose avec des moyens contemporains.

 

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Le prince Sultan Ben Fahd. (Fournie)

«Hors les murs»

La pandémie a, en quelque sorte, fermé l’espace consacré des galeries pour propulser l’art «hors les murs». Art of Egypt a donc saisi cette opportunité pour organiser des événements artistiques dans les espaces publics du Caire, proposant aux riverains et à la communauté d’y participer gratuitement. Parallèlement à ces initiatives orientées vers la société, Art of Egypt organise plusieurs activités ludo-éducatives et interactives.

Par exemple, une session parrainée par l’Unesco, qui s’adresse aux élèves des écoles du gouvernorat de Gizeh, porte sur le patrimoine culturel immatériel et sur la manière de le sauvegarder.

La fondatrice d’Art of Egypt, Nadine Abdel Ghaffar, est une entrepreneuse pluridisciplinaire passionnée par l’art, le design et la culture. Elle s’est emparée d’un grand nombre de projets en tant que productrice culturelle.

Forte de son expérience et de son engagement dans la promotion de l'art et du patrimoine égyptiens, elle fonde en 2017Art of Egypt, qu’elle conçoit comme un cabinet de conseil en art et un opérateur culturel. Promue Chevalier de l’ordre français des Arts et des Lettres, elle est invitée par UN Women (ONU Femmes, une agence de l’ONU qui défend l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, NDLR), au mois de janvier 2020, à donner une conférence sur le rôle des femmes égyptiennes dans le paysage artistique de leur pays à travers le prisme du changement social.

Source d’inspiration monumentale

Forever Is Now est une exposition d'art internationale qui reflète l'influence mondiale profonde de l'Égypte ancienne et, dans le même temps, s'appuie sur l'inclusion continue des pratiques culturelles contemporaines. La vocation de Forever Is Now est d’être interculturelle et de montrer comment l'Égypte ancienne constitue une source d'inspiration monumentale pour les artistes à travers l'histoire.

«J'ai toujours été en admiration devant cette extraordinaire civilisation et ses découvertes dans les domaines des sciences, des arts, des mathématiques, de la justice sociale, du développement culturel et de l'innovation», confie Nadine Abdel Ghaffar.

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Nadine Abdel Ghaffar, fondatrice de Art of Egypt, au lancement de l'exposition Forever Is Now. (Fournie)

«La culture égyptienne est un don fait à l'humanité et le but de cette exposition est de mettre en valeur ces trésors dans un dialogue avec le contemporain à l'échelle internationale. L'Égypte ancienne a influencé les artistes du monde entier. À notre tour, nous apportons le monde en Égypte et nous amenons l'Égypte au monde à travers l'art. C'est un privilège de se tenir au pied de ces monuments qui ont survécu aux troubles, aux guerres et aux pandémies et qui ont perduré. Cette exposition est un gage d'espoir pour l'humanité et un humble hommage à une civilisation qui résiste à l'épreuve du temps», ajoute-t-elle.

L’exposition Forever Is Now a été rendue possible grâce à la contribution et à la participation de nombreux acteurs, comme les Dr Khaled el-Enany et Sameh Choukri, respectivement ministre des Affaires étrangères et ministre du Tourisme et des Antiquités, qui l’ont placée sous les auspices de leurs ministères.

Le Dr Zahi Hawass, archéologue et égyptologue égyptien de renom, a apporté ses lumières au sujet du parcours et du tracé de cette exposition qui se tient sur le plateau de Gizeh. Son expertise archéologique fut particulièrement précieuse pour définir la manière dont il était possible d’associer les monuments du site avec les œuvres des artistes contemporains.

Le projet bénéficie également de l’apport du Dr Peter Der Manuelian, professeur d’égyptologie à l’université de Harvard et responsable du projet Giza.


La bibliothèque Jadal est une oasis culturelle dans la province orientale de l'Arabie saoudite

Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
Ali Al-Herz (photo) a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres. (Photo Fournie)
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  • Ali Al-Herz a transformé sa maison en une bibliothèque contenant plus de 37 000 livres, offrant aux visiteurs un espace où la mémoire, la philosophie et la culture prennent vie.
  • adal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

DHAHRAN : Dans le village tranquille d'Umm Al-Hamam, situé dans la province orientale de l'Arabie saoudite, une passion de longue date pour les livres s'est transformée en un havre culturel.

Ali Al-Herz, bibliophile et archiviste littéraire, a transformé sa maison en une bibliothèque d'exception nommée Jadal, un véritable trésor contenant plus de 37 000 livres, plus de 100 000 journaux et magazines, ainsi que des antiquités, dont certaines datent de plus d'un siècle.

Mais Jadal n'est pas seulement une bibliothèque, c'est bien plus que cela. C'est un musée à explorer, un espace philosophique propice à la réflexion et un rempart contre l'oubli des histoires culturelles importantes.

Al-Herz a déclaré à Arab News : « Depuis ma naissance, j'ai été entouré des livres de ma mère. J'ai grandi immergé dans cette passion, à tel point qu'elle m'a complètement envahi ; je suis devenu un rat de bibliothèque. »

L'étincelle qui a tout déclenché a été la rencontre d'Al-Herz avec l'épopée Sirat Antar à l'âge de 13 ans. « À partir de cette épopée, et à travers elle, j'ai commencé à explorer d'autres mondes », a-t-il déclaré. 

C'est cette curiosité et cette fascination qui ont finalement conduit Al-Herz à créer l'une des initiatives les plus originales du royaume d'Arabie saoudite.

Le nom « Jadal » signifie « débat » ou « discussion » en arabe, reflétant l'esprit curieux de la bibliothèque. Pour Al-Herz, l'objectif n'est pas seulement de préserver les textes, mais aussi l'idée de questionner et d'explorer les idées.

Al-Herz a déclaré : « J'ai choisi ce nom pour la bibliothèque, car il est profondément ancré dans l'histoire philosophique de la Grèce antique, ainsi que dans notre propre tradition culturelle arabo-islamique, en particulier dans notre héritage religieux. »

L'atmosphère philosophique imprègne les trois salles principales, nommées d'après Socrate, Platon et Aristote, qui accueillent les visiteurs dans un univers dédié à la lecture et à la réflexion. 

Des manuscrits rares, des textes anciens, des journaux et des antiquités ont été soigneusement archivés. Chaque pièce est un murmure du passé qui s'adresse à l'avenir. 

Al-Herz explique : « Même mon intérêt récent pour l'achat de livres s'est principalement orienté vers les éditions rares et les imprimés anciens, afin de créer une harmonie entre patrimoine et modernité. »

Mais Jadal ne se laisse pas envahir par la nostalgie, car Al-Herz organise toutes les deux semaines une réunion littéraire. Cet événement fait revivre une tradition qui était autrefois importante dans la vie intellectuelle des Arabes.

C'est un environnement où écrivains, universitaires et penseurs se réunissent autour d'un café arabe pour échanger des idées dans une atmosphère animée. 

À une époque où les gens recherchent des informations instantanées en ligne, Al-Herz continue d'utiliser des méthodes traditionnelles. « Il y a une lutte permanente entre deux générations », observe-t-il. « La victoire reviendra finalement à cette dernière génération, une fois que ma génération aura disparu. Les bibliothèques papier seront alors transformées en musées. »

Il a peut-être raison, mais pour l'instant, au cœur de la campagne de Qatif, la bibliothèque Jadal continue d'exister, et c'est un lieu où l'encre, la mémoire, le débat et le patrimoine continuent de façonner l'âme culturelle du Royaume. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com 


Amin Maalouf apporte un soutien inattendu aux langues régionales

Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
Cette photographie montre la façade de l'Institut de France avant la présentation de la 9e édition du Dictionnaire de l'Académie française, qui est le dictionnaire officiel de la langue française, à Paris, le 14 novembre 2024. (Photo de Ludovic MARIN / POOL / AFP)
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  • Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs,
  • Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale.

PARIS : Une initiative d'un collectif visant à enseigner le patrimoine littéraire dans les langues régionales de France a reçu lundi  un soutien inattendu : celui du secrétaire perpétuel de l'Académie française, Amin Maalouf.

M. Maalouf, écrivain franco-libanais, a été élu en 2023 à la tête d'une institution dont la mission est de veiller au rayonnement et à l'intégrité de la langue française.

Toutefois, il soutient la démarche du Collectif pour les littératures en langues régionales, qui suggère un enseignement de ce type au collège ou au lycée, a indiqué ce collectif à l'AFP.

Ce dernier a écrit au Premier ministre François Bayrou et à la ministre de l'Éducation nationale, Elisabeth Borne, pour leur proposer un corpus d'œuvres en langues régionales destiné aux professeurs, afin de sensibiliser à la « richesse de la production littéraire » dans d'autres langues que le français. 

« M. Maalouf, comme nous, est convaincu qu'il est nécessaire que les élèves français découvrent ces trésors culturels », écrit ce collectif à M. Bayrou, qui parle lui-même le béarnais.

Le Collectif pour les littératures en langues régionales a constitué, avec l'aide de spécialistes, un recueil intitulé Florilangues, comprenant 32 textes en langue originale (de l'alsacien au tahitien, en passant par le basque ou le corse), traduits en français.

On y trouve entre autres un poème en provençal de Frédéric Mistral (prix Nobel de littérature en 1904) intitulé Mirèio, une chronique en breton de Pierre-Jakez Hélias intitulée Bugale ar Republik, un court récit en créole martiniquais de Raphaël Confiant intitulé Bitako-a, ainsi qu'une chanson en picard d'Alexandre Desrousseaux intitulée Canchon dormoire (plus connue sous le nom de P'tit Quinquin).

« Il ne s'agit pas de donner des cours de langues régionales, mais de présenter des œuvres issues des littératures en langues régionales, que ce soit en français ou en version bilingue », précise le collectif.

Idéalement, selon lui, les élèves aborderaient des langues issues d'autres régions que la leur. « Pourquoi seuls les élèves antillais apprendraient-ils qu'il existe une littérature en créole ? », demande ce collectif, qui présente son initiative à la presse lors d'une visioconférence lundi après-midi. 


L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle

L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
L'artiste saoudien Ahaad Alamoudi présente « The Social Health Club » à Bâle. (Photo Fournie)
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  • Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif.
  • « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018.

RIYAD : Ce mois-ci, l'artiste saoudienne Ahaad Alamoudi fait monter la température au Basel Social Club qui se tient jusqu'au 21 juin dans la ville suisse avec sa dernière installation, « The Social Health Club ». 

Fraîchement conçue, cette installation baignée de jaune, ancrée dans les œuvres passées de l'artiste, offre une expérience sensorielle riche et complexe ainsi qu'un commentaire culturel incisif. Elle marque également une première pour l'artiste avec un élément de performance en direct.

Basée à Djeddah, Alamoudi est connue pour créer des installations multimédias immersives s'inspirant de la dynamique complexe de son pays natal en pleine évolution. « The Social Health Club » s'articule autour d'objets trouvés au marché Haraj de Djeddah en 2018, notamment divers équipements de sport, dont un rameur.

« Ce sont des pièces que j'ai chinées dans des brocantes. J'aime le fait qu'aucune instruction n'accompagne ces machines : je ne connais ni leur nom, ni leur provenance, ni leur fabricant. Mais elles font désormais partie du paysage urbain dans lequel j'évolue. J'ai essayé de créer un espace ludique », a-t-elle déclaré à Arab News. 

Dans « The Social Health Club », les équipements, peints principalement dans un jaune vif et saturé, restent intacts, symbolisant une culture obsédée par l'auto-optimisation. Au cœur de l'installation se trouve un caméo représentant un fer à repasser peint en jaune, déjà présent dans son œuvre vidéo de 2020 intitulée « Makwah Man » (Makwah signifie « fer à repasser » en arabe).

« Beaucoup de mes œuvres sont issues d'un récit que je crée dans une vidéo. Dans « Makwah Man », cet homme vêtu d'une thobe jaune repasse un long morceau de tissu jaune au milieu du désert. Et pendant qu'il repasse, il nous dit comment vivre notre vie. Mais en nous disant comment vivre notre vie, il commence aussi à remettre en question la sienne, à comprendre le rôle du pouvoir, à prendre conscience de la pression du changement et de l'adaptation », explique Alamoudi. 

« Le jaune est présent dans la vidéo, mais l'artiste porte également une thobe jaune. Il y a aussi, dans cette version présentée à Art Basel, un portant de thobes jaunes qui tournent dans l'exposition. Pour moi, la thobe jaune est un symbole unificateur. J'essaie de dire que nous vivons tous cela différemment. Ainsi, dans la performance (pour « The Social Health Club »), un culturiste local vêtu d'une thobe jaune fera des exercices sur ces machines. Il n'a pas de règles à suivre. Il ne connaît rien, ne sait pas comment utiliser « correctement » l'équipement. Il entrera dans l'espace et utilisera les machines comme il le pourra.

« La performance sera enregistrée. Mais je pense que c'est plutôt une activation », a-t-elle poursuivi. « Ce n'est pas l'œuvre elle-même. L'œuvre existe sous la forme des machines. 

« Le Social Health Club » a été créé en étroite collaboration avec la conservatrice Amal Khalaf. Ensemble, ils se sont rendus à Djeddah où Alamoudi a pu découvrir avec elle des « machines un peu inhabituelles, différentes des machines classiques que l'on trouve dans les salles de sport et dont tout le monde connaît immédiatement l'utilité », explique Alamoudi.

« Elle est vraiment incroyable », a-t-elle poursuivi. « Nous avons vraiment construit cet espace ensemble. En gros, j'ai principalement créé la vidéo ; tout le reste a été construit à partir de là. Elle m'a beaucoup aidée. Elle s'est vraiment intéressée aux changements sociaux et à la manière dont nous les abordons. Notre collaboration a été parfaite. »

Le jaune domine chaque centimètre carré de l'œuvre, de manière délibérée et intense. 

« Je suis obsédé par les symboles dans certaines de mes œuvres. Et cela s'accompagne également d'une couleur », explique Alamoudi. « Je voulais mettre en valeur quelque chose de luxueux, de coloré, presque comme de l'or, mais qui n'est pas de l'or. Son apparence est assez austère. » 

Le jaune est à la fois une invitation et un avertissement. « Je pense que le jaune est également assez trompeur. J'aime cette couleur qui incite les gens à s'approcher pour voir ce qui se passe, mais qui les amène en même temps à se demander ce que c'est  elle est si agressive qu'elle en devient un peu inconfortable. »

L'interaction du spectateur est essentielle à la signification de l'œuvre. 

« Je pense que les machines représentent quelque chose et qu'elles véhiculent quelque chose, mais elles sont en réalité activées par les gens, par ce que les gens font avec elles », explique Alamoudi. « C'est pourquoi j'encourage beaucoup de spectateurs à interagir avec les œuvres, à les utiliser ou à essayer de les utiliser sans aucune instruction. Beaucoup de personnes qui entrent dans l'espace peuvent avoir peur de les toucher ou d'interagir avec elles. La présence de l'artiste qui active les structures ajoute une autre dimension à l'œuvre elle-même. »

Elle espère que les visiteurs se sentiront libres d'explorer les œuvres, sans être encombrés par des attentes.

« Les gens sont censés les utiliser à leur guise. Ils peuvent s'asseoir dessus, se tenir debout dessus, les toucher — ils peuvent aussi les laisser tranquilles », conclut-elle en riant. 

Ce texte est la traduction d'un article paru sur Arabnews.com