Soudan: La Banque mondiale suspend son aide alors que le pays manque de liquidités

En coupant court à la transition démocratique avec l'arrestation de la quasi-totalité des dirigeants civils par les militaires, l'armée a franchi «un palier qui annonce de graves risques pour le Soudan», assure un rapport de l'International Crisis Group (ICG). (AFP)
En coupant court à la transition démocratique avec l'arrestation de la quasi-totalité des dirigeants civils par les militaires, l'armée a franchi «un palier qui annonce de graves risques pour le Soudan», assure un rapport de l'International Crisis Group (ICG). (AFP)
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Publié le Mercredi 27 octobre 2021

Soudan: La Banque mondiale suspend son aide alors que le pays manque de liquidités

  • Le chef de l'armée a redit mardi son appui à la «normalisation avec Israël», semblant lancer un message indirect aux Etats-Unis.
  • Mais surtout, prévient ICG, «des troubles longs au Soudan seraient un désastre supplémentaire» dans une région déjà déchirée par les conflits

KHARTOUM: Le Soudan venait tout juste de retrouver le concert des nations après des décennies d'isolement mais le putsch mené par l'armée met un coup d'arrêt à sa réintégration et surtout à l'aide internationale, estiment les experts.

Pour Alex de Waal, patron du cercle de réflexion World Peace Foundation, la transition civile promise en 2019 était l'unique lumière au bout du tunnel pour un pays englué dans le marasme économique et politique après 30 ans de pouvoir de l'autocrate Omar el-Béchir, bête noire des Américains.

En donnant des gages de démocratie, les autorités de transition "servaient l'intérêt national en menant un train, certes lent, de réformes avec une assistance internationale", affirme-t-il à l'AFP.

Elles avaient obtenu un allègement conséquent de la dette colossale du Soudan, la levée des sanctions de Washington qui a longtemps accusé le pouvoir Béchir de soutenir le "terrorisme" et avaient permis une relative stabilisation de la monnaie nationale.

La Banque mondiale a suspendu son aide en faveur du Soudan

La Banque mondiale a annoncé mercredi avoir suspendu son aide en faveur du Soudan après le renversement du gouvernement civil par les militaires.

"Le groupe de la Banque mondiale a suspendu lundi les décaissements dans toutes ses opérations au Soudan et il a cessé de traiter toute nouvelle opération alors que nous surveillons et évaluons de près la situation", a indiqué dans une déclaration écrite David Malpass, le président de l'institution. La Banque mondiale participait notamment au processus d'allègement de la dette du pays.

Ces autorités - le gouvernement d'Abdallah Hamdok, renversé lundi, et le Conseil de souveraineté formé de civils et de militaires et dirigé par le général Burhane - se sont installées en août 2019 à Khartoum quatre mois après la mise à l'écart du président Béchir sous la pression de la rue et de l'armée.

Désormais seul aux commandes du pays, le chef de l'armée, le général Abdel Fattah al-Burhane, a redit mardi son appui à la "normalisation avec Israël", semblant lancer un message indirect aux Etats-Unis.

En janvier 2021, le Soudan a signé les accords dits "d'Abraham" sur la normalisation avec Israël et obtenu simultanément une aide financière des Etats-Unis, quelques semaines après le retrait de Khartoum de la liste américaine des Etats accusés de financer le terrorisme.

Problème de liquidités 
Mais cette main tendue risque de rester sans effet.

En coupant court à la transition démocratique avec l'arrestation de la quasi-totalité des dirigeants civils par les militaires, l'armée a franchi "un palier qui annonce de graves risques pour le Soudan", assure un rapport de l'International Crisis Group (ICG).

Car, rappelle le centre de recherche, "les généraux se sont entêtés malgré les mises en garde" des émissaires occidentaux qui se sont succédé à Khartoum jusque quelques heures avant le putsch. 

La réponse n'a pas tardé. Les Etats-Unis ont "suspendu" 700 millions de dollars d'aide et l'Union européenne a menacé de faire de même.

"Si la communauté internationale, notamment les bailleurs occidentaux et la Banque mondiale, mettent à exécution leurs menaces, les progrès réalisés pour stabiliser l'économie seront réduits à néant", estime M. de Waal.

Une telle sanction tomberait au pire moment pour le Soudan où l'inflation reste très élevée à 365%.

Et les soutiens qu'on prête au général Burhane ne suffiront pas, préviennent les experts.

"Même s'il a des appuis arabes, il ne pourra dégager qu'un peu de liquidités, sans pouvoir compenser l'aide financière massive" des bailleurs internationaux, affirme M. de Waal.

Et l'aspect financier n'est probablement qu'un moindre mal dans un pays parmi les plus pauvres au monde. 

En défendant leur coup de force, les généraux "font courir le risque au Soudan d'être extrêmement isolé", martèle-t-il. Ce pays d'Afrique de l'Est risque de "retourner à l'époque où il était mis au ban par le reste du monde".

Un «désastre» de plus 

Mais surtout, prévient ICG, "des troubles longs au Soudan seraient un désastre supplémentaire" dans une région déjà déchirée par les conflits, de la Corne de l'Afrique en passant par l'Afrique du Nord et le Sahel.

Une répression des manifestants anti-armée dans la rue depuis lundi dans la capitale soudanaise engendrerait "une effusion de sang à Khartoum mais aussi très certainement le retour de la guerre civile au Darfour (ouest) et Kordofan-Sud (sud)", deux régions meurtries par des années de conflits, renchérit M. de Waal.

Fin 2020, Khartoum a annoncé des accords de paix avec des groupes rebelles mais les revendications locales pourraient ressurgir dans un pays où les armes circulent largement.

Pour empêcher la spirale de violences, l'Union africaine doit "explicitement menacer de gels des avoirs et d'interdiction de voyager les dirigeants autorisant à tuer des manifestants ou rétifs à revenir aux accords de transition", préconise l'ICG.

Quant aux pays arabes de longue date proches de l'armée soudanaise, ils doivent selon l'ICG "appeler les nouvelles autorités à faire preuve de retenue". Car "ils ne gagneront rien à l'instabilité du Soudan".


Nucléaire : Paris, Berlin et Londres exhortent Téhéran à entamer des négociations sans « préconditions »

Les bâtiments du siège de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) se reflètent dans les portes arborant le logo de l'agence lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l'AIEA à Vienne, en Autriche, le 13 juin 2025.  (Photo de Joe Klamar / AFP)
Les bâtiments du siège de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) se reflètent dans les portes arborant le logo de l'agence lors de la réunion du Conseil des gouverneurs de l'AIEA à Vienne, en Autriche, le 13 juin 2025. (Photo de Joe Klamar / AFP)
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  • es ministres des Affaires étrangères français, britannique et allemand ont « incité l'Iran à revenir au plus vite, sans préconditions, à la table des négociations » sur le programme nucléaire iranien.
  • Abbas Araghchi a estimé que « L'agression israélienne contre l'Iran en pleine négociation avec les États-Unis sur le nucléaire porte un coup à la diplomatie », a-t-il déclaré.

PARIS : Selon une source diplomatique française, les ministres des Affaires étrangères français, britannique et allemand ont « incité l'Iran à revenir au plus vite, sans préconditions, à la table des négociations » sur le programme nucléaire iranien.

Lundi soir, Jean-Noël Barrot, David Lammy et Johann Wadephul ont eu un entretien avec la haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, Kaja Kallas, et ont en outre « appelé l'Iran à éviter toute fuite en avant contre les intérêts occidentaux, toute extension régionale et toute escalade nucléaire », comme la non-coopération avec l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), la sortie du Traité sur la non-prolifération (TNP) ou le franchissement de seuils d'enrichissement, selon la même source.

Dans la nuit de lundi à mardi, le ministère iranien des Affaires étrangères a fait état d'un appel entre le ministre iranien des Affaires étrangères et chef négociateur pour le nucléaire et ses homologues français, britannique et allemand ainsi que Kaja Kallas. 

Abbas Araghchi a estimé que « L'agression israélienne contre l'Iran en pleine négociation avec les États-Unis sur le nucléaire porte un coup à la diplomatie », a-t-il déclaré.

La France, l'Allemagne et le Royaume-Uni, ainsi que l'UE, sont membres avec la Chine et la Russie d'un accord sur le nucléaire conclu en 2015 et dont les États-Unis s'étaient retirés unilatéralement.

Paris, Berlin et Londres, qui forment le groupe E3, avaient entrepris des discussions avec Téhéran l'an passé pour tenter de trouver un nouvel accord sur le nucléaire.

Parallèlement, les États-Unis avaient entamé des négociations indirectes en début d'année, qui butaient sur la question de l'enrichissement d'uranium iranien.

Un nouveau cycle de négociations était prévu la semaine dernière, mais il a été annulé après les frappes israéliennes.

Les États-Unis et leurs alliés occidentaux, ainsi qu'Israël, que des experts considèrent comme la seule puissance nucléaire au Moyen-Orient, accusent depuis longtemps la République islamique d'Iran de chercher à se doter de l'arme atomique, ce qu'elle a toujours nié.

Par ailleurs, des messages ont été transmis par les ministres français, britannique et allemand à Israël « sur la nécessité de ne pas cibler les autorités, les infrastructures et les populations civiles », selon une source diplomatique française.


Gaza: la Défense civile annonce 20 personnes tuées par des tirs israéliens en allant chercher de l'aide

Une série d'événements meurtriers se sont produits depuis l'ouverture le 27 mai à Gaza de centres d'aide gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les Etats-Unis et Israël. (AFP)
Une série d'événements meurtriers se sont produits depuis l'ouverture le 27 mai à Gaza de centres d'aide gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les Etats-Unis et Israël. (AFP)
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  • "Vingt martyrs et plus de 200 blessés du fait de tirs de l'occupation (armée israélienne, NDLR), dont certains dans un état grave, ont été transférés" vers des hôpitaux de la bande de Gaza, a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile
  • Compte tenu des restrictions imposées aux médias dans la bande de Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans annoncés par la Défense civile

GAZA: La Défense civile de Gaza a indiqué que 20 personnes avaient été tuées lundi par des tirs de l'armée israélienne en allant chercher de l'aide humanitaire dans le territoire palestinien ravagé par les bombardements après plus de vingt mois de guerre.

Contactée par l'AFP, l'armée israélienne a dit qu'elle se renseignait.

"Vingt martyrs et plus de 200 blessés du fait de tirs de l'occupation (armée israélienne, NDLR), dont certains dans un état grave, ont été transférés" vers des hôpitaux de la bande de Gaza, a déclaré à l'AFP le porte-parole de la Défense civile, Mahmoud Bassal, ajoutant que ces personnes étaient rassemblées près d'un site de distribution d'aide.

"Elles attendaient de pouvoir accéder au centre d'aide américain à Rafah pour obtenir de la nourriture, lorsque l'occupation a ouvert le feu sur ces personnes affamées près du rond-point d'al-Alam", dans le sud de la bande de Gaza, a détaillé M. Bassal en indiquant que les tirs avaient eu lieu de 05H00 et 07H30 (02H00 et 04H30 GMT).

Il a ajouté que les victimes avaient été transférées vers des hôpitaux du sud du territoire palestinien, lesquels ne fonctionnent plus que partiellement depuis des jours en raison des combats et des pénuries de fournitures médicales.

Compte tenu des restrictions imposées aux médias dans la bande de Gaza et des difficultés d'accès sur le terrain, l'AFP n'est pas en mesure de vérifier de manière indépendante les bilans annoncés par la Défense civile.

Une série d'événements meurtriers se sont produits depuis l'ouverture le 27 mai à Gaza de centres d'aide gérés par la Fondation humanitaire de Gaza (GHF), une organisation au financement opaque soutenue par les Etats-Unis et Israël.

L'ONU refuse de travailler avec cette organisation en raison de préoccupations concernant ses procédés et sa neutralité.

Des photographes de l'AFP ont constaté ces derniers jours que des Gazaouis se réunissaient à l'aube près de sites de distribution d'aide, malgré la crainte de tirs lors des rassemblements.

La bande de Gaza est menacée de famine, selon l'ONU.

 


Ehud Barak : seule une guerre totale ou un nouvel accord peut arrêter le programme nucléaire iranien

Israël et l'Iran ont échangé des coups de feu après le déclenchement par Israël d'une campagne de bombardements aériens sans précédent qui, selon l'Iran, a touché ses installations nucléaires, "martyrisé" des hauts gradés et tué des dizaines de civils. (AFP)
Israël et l'Iran ont échangé des coups de feu après le déclenchement par Israël d'une campagne de bombardements aériens sans précédent qui, selon l'Iran, a touché ses installations nucléaires, "martyrisé" des hauts gradés et tué des dizaines de civils. (AFP)
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  • S'adressant à Christiane Amanpour sur CNN, M. Barak a déclaré que la capacité d'Israël à freiner le programme de Téhéran était limitée
  • M. Barak a déclaré que les frappes militaires étaient "problématiques", mais qu'Israël les considérait comme justifiées

LONDRES : L'ancien Premier ministre israélien Ehud Barak a prévenu que l'action militaire d'Israël ne suffirait pas à retarder de manière significative les ambitions nucléaires de l'Iran, décrivant la république islamique comme une "puissance nucléaire de seuil".

S'adressant à Christiane Amanpour sur CNN, M. Barak a déclaré que la capacité d'Israël à freiner le programme de Téhéran était limitée.
"À mon avis, ce n'est pas un secret qu'Israël ne peut à lui seul retarder le programme nucléaire de l'Iran de manière significative. Probablement plusieurs semaines, probablement un mois, mais même les États-Unis ne peuvent pas les retarder de plus de quelques mois", a-t-il déclaré.

"Cela ne signifie pas qu'ils auront immédiatement (une arme nucléaire), ils doivent probablement encore achever certains travaux d'armement, ou probablement créer un dispositif nucléaire rudimentaire pour le faire exploser quelque part dans le désert afin de montrer au monde entier où ils se trouvent.

M. Barak a déclaré que si les frappes militaires étaient "problématiques", Israël les considérait comme justifiées.

"Au lieu de rester les bras croisés, Israël estime qu'il doit faire quelque chose. Probablement qu'avec les Américains, nous pouvons faire plus".

L'ancien premier ministre a déclaré que pour stopper les progrès de l'Iran, il faudrait soit une avancée diplomatique majeure, soit un changement de régime.

"Je pense que l'Iran étant déjà ce que l'on appelle une puissance nucléaire de seuil, le seul moyen de l'en empêcher est soit de lui imposer un nouvel accord convaincant, soit de déclencher une guerre à grande échelle pour renverser le régime", a-t-il déclaré.

"C'est quelque chose que nous pouvons faire avec les États-Unis.

Mais il a ajouté qu'il ne pensait pas que Washington avait l'appétit pour une telle action.

"Je ne crois pas qu'un président américain, ni Trump ni aucun de ses prédécesseurs, aurait décidé de faire cela".

Israël a déclenché des frappes aériennes à travers l'Iran pour la troisième journée dimanche et a menacé de recourir à une force encore plus grande alors que certains missiles iraniens tirés en représailles ont échappé aux défenses aériennes israéliennes pour frapper des bâtiments au cœur du pays.

Les services d'urgence israéliens ont déclaré qu'au moins 10 personnes avaient été tuées dans les attaques iraniennes, tandis que les autorités iraniennes ont déclaré qu'au moins 128 personnes avaient été tuées par les salves israéliennes.