Racisme et armes à feu au coeur de deux procès tests pour l'Amérique

Un manifestant brandit le portrait d'Ahmaud Arbery devant le tribunal de Brunswick, en Géorgie, le 18 janvier 2021. (Photo, AFP)
Un manifestant brandit le portrait d'Ahmaud Arbery devant le tribunal de Brunswick, en Géorgie, le 18 janvier 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Lundi 15 novembre 2021

Racisme et armes à feu au coeur de deux procès tests pour l'Amérique

  • Même si les détails diffèrent, les deux dossiers portent sur «l'idée très américaine que des civils peuvent porter des armes pour protéger leur quartier»
  • «Dans les coeurs et les esprits des Américains, s'armer pour se défendre est un droit et un devoir de +bon citoyen+»

WASHINGTON : Armes à feu, droit à l'auto-défense et tensions raciales: les Américains se passionnent pour deux procès révélateurs des fractures du pays et attendent avec appréhension des verdicts à haut risque qui pourraient être rendus dans les prochains jours.


Le premier se tient à Brunswick, dans le sud des Etats-Unis au long passé ségrégationniste. Trois hommes blancs y sont jugés pour avoir pourchassé et abattu un joggeur noir, Ahmaud Arbery, le 23 février 2020.


Ils assurent l'avoir pris pour un cambrioleur et avoir voulu l'arrêter en vertu d'une loi de Géorgie qui, à l'époque, autorisait de simples citoyens à procéder à des interpellations. Mais pour la famille du jeune homme et ses défenseurs, il a été victime d'un "lynchage" des temps modernes.


Le second procès se déroule à 1.600 km de là, à Kenosha, dans le Wisconsin, près des Grands Lacs.


En août 2020, cette ville s'était embrasée après une bavure policière contre un Afro-Américain. Au troisième soir d'émeutes, Kyle Rittenhouse, un lycéen blanc de 17 ans était descendu dans la rue avec un fusil semi-automatique AR-15 et s'était joint à des groupes armés disant être venus "protéger" les commerces.


Dans des circonstances confuses, il avait ouvert le feu, faisant deux morts et un blessé. Jugé pour meurtre, il plaide la légitime défense, assurant avoir tiré après avoir été attaqué.

Le jeune Américain Kyle Rittenhouse sanglote à son procès à Kenosha, le 10 novembre 2021
(Photo, AFP/Pool)


Même si les détails diffèrent, les deux dossiers portent sur "l'idée très américaine que des civils peuvent porter des armes pour protéger leur quartier", remarque Caroline Light, professeure d'histoire à Harvard.

«Bon citoyen»

"Dans les coeurs et les esprits des Américains, s'armer pour se défendre est un droit et un devoir de +bon citoyen+", ajoute l'experte, auteure d'un livre sur le sujet.


"Enraciné" dans l'histoire, dès l'arrivée des premiers colons européens, le droit à l'auto-défense a été codifié dans la loi de nombreux Etats depuis une vingtaine d'années sous la pression du lobby des armes, dit-elle à l'AFP.


Mais, selon l'historienne, cela sert surtout "aux hommes blancs" car "dans l'idée de protéger son quartier contre une menace, la menace est souvent vue comme émanant des hommes noirs".

La police lance du gaz lacrymogène pour éloigner les manifestants à Kenosha, dans le Wisconsin, le 25 août 2020.
(Photo, AFP)


Pour cette raison, Ahmaud Arbery est devenu un symbole du mouvement Black Lives Matter (Les vies noires comptent). "Un homme noir devrait pouvoir faire un jogging sans craindre pour sa vie", a même estimé à son sujet le président démocrate Joe Biden.


Kyle Rittenhouse est, lui aussi, devenu une icône. A droite cette fois, chez ceux qui imputent la grande mobilisation contre les violences policières de l'été 2020 à des "antifas" ou "anarchistes".

Sur des oeufs
Dans ce contexte très politique, les procureurs ont pris grand soin d'éviter les sujets qui pourraient aliéner des jurés.


"S'armer, se barricader... Toutes ces réactions sont compréhensibles et on ne vous dira pas le contraire", a notamment déclaré au jury Thomas Binger qui mène l'accusation contre Kyle Rittenhouse.


Gregory McMichael, son fils Travis et leur voisin William Bryan ont pourchassé Ahmaud Arbery "sur la base de simples présomptions", a déclaré sa consoeur de Géorgie, Linda Dunikoski, en se gardant bien de les accuser de racisme.


Les procureurs marchent sur des oeufs car leurs dossiers sont loin d'être gagnés.


Dès le départ, les accusés ont bénéficié d'une certaine clémence: à Brunswick, il a fallu près de trois mois et la diffusion d'une vidéo du drame pour qu'ils soient arrêtés; à Kenosha, Kyle Rittenhouse avait quitté la scène du crime sans être interpellé.


Les jurys posent un autre défi: dans les deux tribunaux, une seule personne de couleur figure parmi les 12 citoyens retenus pour rendre le verdict.


A Kenosha, le juge qui supervise le procès a interdit aux parties de parler de "victimes" à propos des personnes tuées par Kyle Rittenhouse, tout en autorisant les termes "meurtriers" ou "pilleurs" pour les désigner. 


Beaucoup d'observateurs anticipent un acquittement dans ce dossier, peut-être dès la semaine prochaine, notamment en raison des lois sur l'auto-défense en vigueur dans le Wisconsin. "Cela créerait de la frustration et de la colère", estime Caroline Light, qui prévoit "de nouvelles manifestations".


En Géorgie, l'issue du procès est plus ouverte et l'histoire ne s'arrêtera pas là: les trois accusés seront jugés pour crime raciste devant un tribunal fédéral en début d'année prochaine.

 


Ukraine: l'aide européenne compense le désengagement américain, selon le Kiel Institute

Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
Gabriel Felbermayr, économiste autrichien et président de l'Institut de Kiel pour l'économie mondiale, participe à une conférence de presse le 11 mars 2020 à Berlin afin de commenter l'impact économique et politique de l'épidémie du nouveau coronavirus. (Photo de Tobias SCHWARZ / AFP)
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  • « L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.
  • Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

PARIS : Selon l'institut de recherche allemand Kiel Institute, une hausse de l'aide des pays européens à l'Ukraine a permis début 2025 de combler le vide laissé par le désengagement de la nouvelle administration américaine de Donald Trump.

« L'Europe comble largement le retrait de l'aide américaine », écrit l'institut dans un communiqué, qui recense l'aide militaire, financière et humanitaire promise et livrée à l'Ukraine depuis l'invasion russe du 24 février 2022.

Alors que « les États-Unis, qui étaient auparavant le plus gros donateur à l'Ukraine, n'ont pas annoncé de nouvelle enveloppe depuis début janvier », l'Ukraine a tout de même reçu plus d'aide de janvier à avril 2025 qu'en moyenne les années précédentes sur la même période. 

« Reste à savoir s'il s'agit d'une hausse temporaire ou du début d'une évolution plus durable du rôle de l'Europe en tant que principal soutien de l'Ukraine », a déclaré Christoph Trebesch, qui dirige l'équipe du Kiel Institute chargée de suivre les engagements en faveur de l'Ukraine, cité dans le communiqué.

Début 2025, les données du Kiel Institute montrent que « la récente augmentation de l'aide européenne a été tirée par un petit groupe de pays », au premier rang desquels se trouvent « les pays nordiques et le Royaume-Uni ».

En revanche, « il est frappant de constater le peu d'aide allemande allouée ces derniers mois », a-t-il commenté. « Au lieu d'augmenter son soutien après l'arrivée de Trump au pouvoir, nous observons une forte baisse de l'aide allemande par rapport aux années précédentes. »

« La tendance est la même pour l'Italie et l'Espagne », a-t-il précisé. 

Au 30 avril 2025, 294 milliards d'euros au total ont été alloués à des dépenses précises en faveur de l'Ukraine (sur 405 milliards promis), selon les derniers chiffres du Kiel Institute. Les 111 milliards restants ont été promis à long terme, mais pas encore alloués.

Sur la somme déjà donnée, 140 milliards d'euros correspondent à de l'aide militaire, 133 milliards à de l'aide financière et 21 milliards à de l'aide humanitaire.

Les principaux donateurs sont l'Union européenne et ses membres (131 milliards d'euros donnés ou alloués), les États-Unis (115 milliards) et le Royaume-Uni (19 milliards).

En matière d'aide militaire, l'Europe, le Royaume-Uni compris, « dépasse pour la première fois depuis juin 2022 les États-Unis », selon le Kiel Institute. Les Européens ont déjà donné ou alloué 72 milliards d'euros d'aide militaire à l'Ukraine depuis le début de la guerre, contre 65 milliards pour les États-Unis. 


Les dirigeants du G7, dont Trump, se rejoignent au Canada tandis qu'un conflit oppose l'Iran et Israël

Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
Le logo du G7 2025 est visible sur la pelouse devant le centre des médias de Banff, à l'approche du sommet du Groupe des Sept (G7) qui se tiendra à Kananaskis, dans la province canadienne de l'Alberta, le 16 juin 2025. (Photo : Ben Sheppard / AFP)
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  • Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël.
  • La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

KANANASKIS, CANADA : Les pays du G7 ont entamé dimanche des négociations dans l'espoir de trouver un langage commun concernant le conflit entre l'Iran et Israël, alors que leurs dirigeants, dont le président américain, se retrouvent pour un sommet sous tension dans les Rocheuses canadiennes.

Il s'agit du premier grand sommet depuis que Donald Trump est revenu au pouvoir en janvier, ce qui a fragilisé l'unité du club des grandes démocraties industrialisées (Allemagne, Royaume-Uni, Canada, États-Unis, France, Italie et Japon).

Le président américain, qui n'a cessé de menacer le Canada ces derniers mois, est arrivé en fin de journée dans ce pays, avec sur la tête une casquette blanche portant son slogan « Make America Great Again » (« Rendre sa grandeur à l'Amérique »).

Pour cette réunion qui se déroule à Kananaskis, dans le parc national de Banff, dans l'ouest du Canada, il retrouvera ses alliés du G7 ainsi que les dirigeants de nombreux autres pays invités : l'Inde, l'Ukraine, le Mexique, l'Afrique du Sud et l'Australie seront notamment présents.

La priorité absolue pour tous sera d'éviter les drames, malgré les nombreux sujets de frictions, des droits de douane imposés par Donald Trump à la guerre en Ukraine, ou encore à celle du Moyen-Orient.

Mais parviendront-ils à parler d'une voix commune, notamment sur cette région du monde ?

Israël a stupéfié le monde vendredi en ouvrant un nouveau front avec une campagne militaire surprise et massive contre l'Iran.

Selon une source gouvernementale citée par l'AFP, les dirigeants du G7 travaillent à une déclaration commune. Reste à décider s'il s'agit d'appeler à la désescalade ou simplement de soutenir Israël en affirmant que le pays a le droit de se défendre. 

Mais cette guerre n'est pas le seule enjeu des discussions à Kananaskis. Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est parmi les invités et doit s'entretenir avec Donald Trump

Le président américain, qui s'est rapproché de façon spectaculaire de Moscou, a de nouveau eu un entretien téléphonique samedi avec le président russe Vladimir Poutine. Ce dernier lui a dit être prêt à un nouveau round de négociations.

De leur côté, les Européens tentent de convaincre Donald Trump de promulguer de nouvelles sanctions contre Moscou, ciblant plus précisément les ventes de pétrole russe. 

Tous les pays souhaitent par ailleurs aborder l'aspect commercial avec le président Trump. En imposant des taxes douanières d'au moins 10 % sur la plupart des produits entrant aux États-Unis, ce dernier a dévié le cours de la mondialisation et menacé l'économie mondiale d'un ralentissement général. 

Ce sommet du G7 est la première visite du président américain sur le sol canadien depuis qu'il a menacé son voisin du nord, estimant qu'il serait préférable qu'il devienne le 51^e État américain.

Le Premier ministre canadien, Mark Carney, et Donald Trump se rencontreront lundi matin lors d'un tête-à-tête. Outre MM. Carney et Zelensky, le dirigeant américain doit aussi rencontrer la présidente mexicaine Claudia Sheinbaum. 


Donald Trump appelle Iran et Israël à «trouver un accord»

Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant. (AFP)
Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant. (AFP)
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  • Israël a multiplié dimanche ses frappes meurtrières à travers l'Iran, visant la capitale, la ville de Machhad à l'extrémité nord-est du pays ainsi que des installations militaires dans l'ouest, auxquelles Téhéran a riposté par de nouveaux tirs de missiles
  • En fin de journée, avant son départ pour le G7 au Canada, Donald Trump a renouvelé son appel aux deux pays: "Je pense qu'il est temps de conclure un accord et nous verrons ce qui se passera"

WASHINGTON: Donald Trump a appelé Israël et l'Iran à "trouver un accord" dimanche, même s'ils vont peut-être devoir se battre auparavant, a-t-il déclaré au moment où des échanges intenses de tirs entre les deux pays se poursuivent pour la quatrième nuit consécutive.

"L'Iran et Israël devraient trouver un accord, et ils vont trouver un accord", a écrit le président américain sur son réseau Truth Social dimanche matin, ajoutant que "de nombreux appels et rencontres ont lieu en ce moment".

En fin de journée, avant son départ pour le G7 au Canada, Donald Trump a renouvelé son appel aux deux pays: "Je pense qu'il est temps de conclure un accord et nous verrons ce qui se passera. Parfois, ils doivent se battre, mais nous verrons ce qui se passera. Je pense qu'il y a de bonnes chances qu'il y ait un accord", a-t-il déclaré sur le seuil de la Maison Blanche avant d'embarquer dans son hélicoptère Marine One.

Israël a multiplié dimanche ses frappes meurtrières à travers l'Iran, visant la capitale, la ville de Machhad à l'extrémité nord-est du pays ainsi que des installations militaires dans l'ouest, auxquelles Téhéran a riposté par de nouveaux tirs de missiles.

Au troisième jour de l'offensive aérienne israélienne, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a menacé de faire payer à l'Iran "un prix très lourd" après la mort de civils provoquée par les salves de missiles balistiques iraniens tirées en représailles sur Israël, qui ont touché des zones habitées.

L'Iran a de son côté promis dimanche une "réponse dévastatrice" aux attaques israéliennes et affirmé qu'Israël ne serait bientôt "plus habitable".