Un nouveau test électoral pour le président Tebboune

L'objectif est «l'édification des institutions de l'Etat sur des bases solides, loin des soupçons et des insuffisances», avait affirmé Tebboune, le 1er novembre. (Photo, AFP)
L'objectif est «l'édification des institutions de l'Etat sur des bases solides, loin des soupçons et des insuffisances», avait affirmé Tebboune, le 1er novembre. (Photo, AFP)
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Publié le Samedi 27 novembre 2021

Un nouveau test électoral pour le président Tebboune

  • Pour le professeur de journalisme, Redouane Boudjemaa, ce scrutin n'est rien de plus qu' «une tentative de ravaler les façades des conseils locaux par un changement de leurs composantes dont vont profiter des clientèles du pouvoir»
  • Ancien professeur de sciences politiques, Mohamed Hennad minimise aussi l'importance de ce vote: «Les enjeux politiques de ces élections ne concernent que le régime actuel»

ALGER : L'Algérie renouvelle samedi ses assemblées locales, un scrutin test pour le président Abdelmadjid Tebboune, élu en 2019, après l'abstention massive enregistrée aux législatives de juin et au référendum constitutionnel de novembre 2020.

1. Pourquoi des élections locales anticipées?

Le mandat des Assemblées populaires communales (APC) et des Assemblées populaires de wilaya (APW, départementales) devait expirer en novembre 2022 mais M. Tebboune a convoqué des élections anticipées pour mettre ces assemblées "en conformité" avec la nouvelle Constitution. 

L'objectif est "l'édification des institutions de l'Etat sur des bases solides, loin des soupçons et des insuffisances", a affirmé le chef de l'Etat, le 1er novembre.

Il faisait allusion aux précédents scrutins organisés sous la présidence de son défunt prédécesseur, Abdelaziz Bouteflika, tous marqués par des accusations de fraude.

Les Assemblées locales sont importantes car elles élisent au suffrage indirect les deux tiers des membres (96) du Conseil de la nation, la chambre haute du Parlement, les 48 autres membres étant désignés par le chef de l'Etat.

Ces élections "vont permettre de jauger le poids des partis sur la scène politique", explique Nabila Benyahia, professeur de sciences politiques à l'Université d'Alger.

2. Quels sont les enjeux politiques?

Les électeurs devraient se mobiliser davantage pour choisir leurs présidents d'assemblées locales que lors des élections organisées depuis le déclenchement du Hirak, le mouvement de contestation pro-démocratie, en février 2019.

Mais pour le professeur de journalisme à l'Université d'Alger, Redouane Boudjemaa, ce scrutin n'est rien de plus qu'"une tentative de ravaler les façades des conseils locaux par un changement de leurs composantes dont vont profiter des clientèles du pouvoir".

"Les enjeux politiques actuels restent confinés dans des slogans proclamant que le pays est entré dans une nouvelle ère alors que tous les indicateurs témoignent du contraire", a-t-il expliqué.

Ancien professeur de sciences politiques à l'université d'Alger, Mohamed Hennad minimise aussi l'importance de ce vote: "Les enjeux politiques de ces élections ne concernent que le régime actuel qui y voit une dernière étape dans le processus de 'changement', selon sa propre perception, mais ce n'est qu'une illusion, car ce qui repose sur des bases fragiles ne dure pas".

3. Le taux de participation peut-il être meilleur?

Même si M. Tebboune lui-même affirmait lors des législatives de juin que "le taux de participation n'a pas d'importance", le pouvoir et les partis en lice escomptent une plus grande affluence aux urnes.

"Nous oeuvrons pour assurer toutes les conditions de réussite des élections et atteindre un taux de participation significatif", a assuré le président de l'Autorité nationale indépendante des élections Mohamed Charfi.

Mais M. Boudjemaa s'attend à une nouvelle désaffection des électeurs: "La société estime que les élections ne sont plus un mécanisme pour construire un quelconque contrat politique. Aussi bien ceux qui sont favorables au vote que les partisans du boycott n'ont pas de projet pour réhabiliter l'action politique, réduite à un mandat électoral dépourvu de contenu politique".

M. Hennad a jugé également "peu probable que la participation puisse être forte".

4. La Kabylie va-t-elle doper la participation?

La Kabylie, région frondeuse à l'est d'Alger où moins de 1% des électeurs s'étaient rendus aux urnes lors des législatives, avait largement contribué à la plus faible participation jamais enregistrée en Algérie pour un scrutin majeur (23%).

Malgré le boycott du prochain scrutin par le Rassemblement pour la culture et la démocratie (RCD, laïc), des militants de ce parti, bien implanté en Kabylie, se sont portés candidats sur des listes indépendantes et son rival éternel dans la région, le Front des forces socialistes (FFS), a décidé d'y prendre part.

Le débat sur la participation de la Kabylie se base sur le "postulat selon lequel les autres régions du pays ont participé aux précédentes consultations, alors que les chiffres disent que le boycott est une réalité" partout, selon M. Boudjemaa.

"La vérité est que nous ignorons le niveau qu'atteindra la participation en Kabylie. La présence du FFS ne garantit pas à elle seule une forte mobilisation des électeurs et ce parti n'est pas la seule force politique représentée dans la région", détaille M. Hennad.


Centre de coordination militaro-civile pour Gaza: beaucoup de discussions, peu de résultats

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  • "Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore" ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés
  • "Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix"

JERUSALEM: Lancé par les Etats-Unis dans le sillage du cessez-le-feu entre Israël et le Hamas pour surveiller la trêve et favoriser l'afflux d'aide humanitaire, le Centre de coordination militaro-civile (CMCC) pour Gaza peine à tenir ses promesses.

"Au départ, personne ne savait ce que c'était, mais tout le monde voulait en être", raconte un diplomate européen à l'AFP, "maintenant les gens déchantent un peu, ils trouvent que rien n'avance, mais on n'a pas le choix, il n'y a aucune autre initiative, c'est ça ou continuer à discuter dans le vent avec des Israéliens".

"Il y a des moments où on se dit qu'on a touché le fond mais qu'on creuse encore", ironise un humanitaire qui s'y est rendu plusieurs fois pour parler des abris fournis aux centaines de milliers de Palestiniens de Gaza déplacés par la campagne militaire israélienne.

Le CMCC doit permettre d'amorcer la suite des étapes du plan de paix pour Gaza après plus de deux ans d'une guerre dévastatrice déclenchée le 7 octobre 2023 par l'attaque sans précédent du mouvement palestinien Hamas sur Israël.

"Lorsque nous l'avons ouvert, nous avons clairement indiqué qu'il se concentrait sur deux choses: faciliter l'acheminement de l'aide humanitaire, logistique et sécuritaire vers Gaza et aider à surveiller en temps réel la mise en oeuvre de l'accord", insiste le capitaine Tim Hawkins, porte-parole du Commandement militaire central américain (Centcom), couvrant notamment le Moyen-Orient.

L'initiative a été présentée aux acteurs (ONG, agences des Nations unies, diplomates...) comme un générateur d'idées totalement inédites.

Frustrés par leurs difficultés avec les autorités israéliennes, de nombreux pays et acteurs humanitaires disent s'être jetés dans le projet, impatients d'avoir un nouvel interlocuteur se disant enclin à trouver des solutions: les Etats-Unis.

"Rien n'a changé" 

"Au début, les Américains nous ont dit qu'ils découvraient qu'Israël interdisaient l'entrée de tout un tas de choses dans Gaza, la fameuse liste des biens à double usage, ils avaient l'air choqués et on se disait qu'enfin on allait franchir cet obstacle", raconte un ingénieur humanitaire, "mais force est de constater que strictement rien n'a changé".

Deux mois après l'ouverture, nombre d'humanitaires et diplomates contactés par l'AFP jugent, sous couvert de l'anonymat, que la capacité ou la volonté américaines à contraindre Israël est limitée.

Les visiteurs réguliers ou occasionnels des lieux ont décrit à l'AFP le grand hangar occupé par le CMCC à Kiryat Gat (sud d'Israël), comme un entrepôt où de nombreux militaires, israéliens et américains principalement, rencontrent des humanitaires, diplomates, et consultants.

Le premier des trois étages du bâtiment est réservé aux Israéliens, et le dernier aux troupes américaines. Tous deux sont interdits d'accès aux visiteurs.

Le deuxième, recouvert de gazon artificiel, sert d'espace de rencontres avec le monde extérieur.

"On dirait un espace de coworking, mais avec des gens en uniforme", s'amuse une diplomate qui raconte y croiser des "GIs qui boivent de la bière" au milieu d'une sorte d'open-space, avec des panneaux récapitulant les principaux points du plan Trump.

Plusieurs personnes ont dit à l'AFP avoir vu un tableau blanc barré de l'inscription "What is Hamas?" ("Qu'est-ce que le Hamas?") en lettres capitales, sans éléments de réponse.

"Il y a des tables rondes sur des sujets qui vont de la distribution d'eau ou de nourriture à la sécurité", raconte un humanitaire, "en gros on nous écoute décrire ce qu'on veut faire, et quels problèmes on a rencontrés depuis deux ans".

"Boussole du droit" 

Mais "ce n'est pas là que les décisions sont prises", tranche un diplomate qui cite des canaux de discussions parallèles, notamment une équipe supervisée par Arieh Lighstone, un collaborateur de l'émissaire américain Steve Witkoff, à Tel-Aviv.

Plusieurs diplomates regrettent l'absence d'officiels palestiniens dans les murs.

Un autre problème réside dans l'émergence de concepts largement rejetés par la communauté internationale, notamment celui des "Alternative Safe Communities" (ASC), visant à regrouper des civils "vérifiés", non affiliés au Hamas, dans des communautés créées ex nihilo dans une zone de la bande de Gaza sous contrôle militaire israélien, et où les services de base seraient dispensés.

"On a perdu la boussole du droit", commente une diplomate.

Mais le reproche qui revient le plus souvent est le fait que les questions politiques (gouvernance, maintien de l'ordre...) sont évacuées au profit de questions techniques.

"Ils discutent d'où mettre les stations d'épuration, pas de qui les exploitera ni de qui paiera les employés", résume un autre.

Concédant "certaines frictions", sans plus de détail, le capitaine Hawkins, du Centcom, met en avant certaines avancées comme l'ouverture de nouveaux points de passage pour l'aide à destination de Gaza. "Nous progressons, assure-t-il, tout en reconnaissant pleinement qu'il reste encore beaucoup à faire."


Le Congrès américain approuve la levée définitive des sanctions contre la Syrie

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars. (AFP)
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  • Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar
  • Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis

WASIHNGTON: Le Congrès américain a approuvé mercredi la levée définitive des sanctions imposées par les Etats-Unis contre la Syrie du temps de Bachar al-Assad, devant permettre le retour d'investissements dans ce pays ravagé par des années de guerre civile.

L'abrogation d'une loi dite "Caesar", adoptée en 2019 lors du premier mandat de Donald Trump et qui imposait ces sanctions, figure en effet dans le texte sur la stratégie de défense (NDAA), que le Sénat américain a approuvé mercredi par 77 voix pour et 20 contre.

La Chambre des représentants s'était déjà prononcée la semaine dernière et le texte attend désormais d'être promulgué par le président américain.

Le gouvernement américain a indiqué être favorable à l'abrogation de cette loi Caesar. Son application avait déjà été suspendue par deux fois pour six mois après l'annonce du président Trump en mai levant les sanctions contre la Syrie dans le cadre de la normalisation des relations entre ce pays et les Etats-Unis.

Le chef de la diplomatie syrienne, Assaad al-Chaibani, a salué sur Telegram le vote du Sénat comme "ouvrant de nouveaux horizons pour la coopération et le partenariat entre notre pays et le reste du monde".

La loi Caesar adoptée en 2019 imposait des sanctions américaines drastiques contre le gouvernement de Bachar al-Assad, bannissant le pays du système bancaire international et des transactions financières en dollars.

Bien que son application soit suspendue, de nombreux responsables américains jugeaient qu'elle pouvait nuire à la confiance des investisseurs tant qu'elle n'était pas abrogée.

Le dirigeant syrien Ahmad al-Chareh a été reçu le 10 novembre à la Maison Blanche par le président Trump, une première pour un chef d'Etat syrien depuis l'indépendance du pays en 1946 et une consécration pour l'ancien jihadiste qui, en moins d'un an au pouvoir, a sorti son pays de l'isolement.

Donald Trump l'avait déjà rencontré lors d'un voyage dans le Golfe en mai, annonçant alors la levée des sanctions américaines.

Après 13 ans de guerre civile, la Syrie cherche à garantir des fonds pour sa reconstruction, dont le coût pourrait dépasser 216 milliards de dollars, selon la Banque mondiale.

"L'abrogation aujourd'hui de la loi Caesar est une étape décisive pour donner au peuple syrien une véritable chance de se reconstruire après des décennies de souffrances inimaginables", s'est félicité la sénatrice démocrate Jeanne Shaheen.


Les principales villes du Soudan privées de courant après des frappes de drones sur une centrale

Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts. (AFP)
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  • Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale
  • Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des FSR

PORT-SOUDAN: Les principales villes du Soudan, dont Khartoum et Port-Soudan, ont été plongées dans le noir dans la nuit de mercredi à jeudi après des frappes de drones contre une importante centrale électrique, qui ont également fait deux morts, ont indiqué plusieurs témoins à l'AFP.

Les frappes ont ciblé les transformateurs de la station électrique d’Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, a précisé la compagnie d'électricité nationale.

Deux secouristes ont été tués par une deuxième frappe de drone survenue alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, a déclaré un responsable de la centrale en attribuant cette frappe aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR).

Le gouvernement de l’État du Nil a confirmé la mort des deux secouristes dans un communiqué officiel.

Cette station est un nœud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l’électricité produite par le barrage de Merowe — la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays — avant sa redistribution vers plusieurs régions.

Des témoins ont également indiqué qu’aux alentours de 02H00 (minuit GMT), les forces de l’armée régulière avaient activé leurs systèmes de défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus de la ville contrôlée par l'armée en guerre depuis avril 2023 contre les FSR.

Les coupures d’électricité se sont étendues à plusieurs États, notamment ceux du Nil, de la mer Rouge — où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée — ainsi qu’à la capitale Khartoum, selon des témoins, l'incendie n'étant toujours pas maitrisé.

Les FSR n’ont jusqu'à présent pas commenté l'attaque.

Ces derniers mois, les FSR ont été accusées de lancer des attaques de drones sur de vastes zones contrôlées par l’armée, visant des infrastructures civiles et provoquant des coupures de courant affectant des millions de personnes.

La guerre, qui a éclaté en avril 2023, a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué "la pire crise humanitaire au monde", selon l'ONU.