Le photographe qui relate l’Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo

Ramesh Shukla au Etihad Museum de Dubaï pose avec l'appareil photo Rolleicord. (Photo AN/Mohamed Fawzy)
Ramesh Shukla au Etihad Museum de Dubaï pose avec l'appareil photo Rolleicord. (Photo AN/Mohamed Fawzy)
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
(Photo de Ramesh Shukla) Le photographe qui relate l'Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo.
Ramesh Shukla avec son appareil photo Rolleicord vintage. (Photo AN/Mohamed Fawzy)
Ramesh Shukla avec son appareil photo Rolleicord vintage. (Photo AN/Mohamed Fawzy)
Short Url
Publié le Jeudi 02 décembre 2021

Le photographe qui relate l’Histoire des Émirats arabes unis avec un appareil photo

  • La Fête nationale des Émirats arabes unis, célébrée le 2 décembre de chaque année, marque l'unification des émirats en une fédération
  • Ramesh Shukla a documenté l'évolution des Émirats arabes unis, de communautés de cheikhs disparates à une nation ambitieuse et moderne

DUBAΪ: Le photographe Ramesh Shukla a vécu aux Émirats Arabes Unis (EAU) pendant près de cinq décennies. Il est arrivé de son Inde natale au moment où les anciens États de la Trêve approchaient de l'indépendance de la Grande-Bretagne et se lançaient dans une remarquable aventure de construction nationale.

Désormais âgé de 84 ans, il a été le témoin direct de l'évolution des EAU, passant d'un ensemble de communautés de cheikhs du désert et de villages de pêcheurs disparates à un centre d'affaires mondial synonyme de dynamisme entrepreneurial, de villes cosmopolites et d'horizons incroyables.

C'est une transformation dont il a soigneusement documenté l'Histoire avec son appareil photo au fil des décennies.

photo
Cheikh Zayed signe une photo du jeune Ramesh Shukla. Photo fournie.

Son attachement au pays a commencé par accident après un voyage en bateau plutôt inconfortable depuis Mumbai en 1965. À l'époque, Ramesh Shukla travaillait pour le journal Times of India, mais l’appel du large était trop important pour y résister.

Emportant son bien le plus cher, un appareil photo Rolleicord et autant de rouleaux de film qu'il pouvait transporter, le jeune homme, alors dans la vingtaine, s'est lancé dans ce qui allait changer sa vie.

«C'est mon appareil photo», déclare Ramesh Shukla à Arab News au musée Etihad de Dubaï plus d'un demi-siècle plus tard, avec son Rolleicord désormais vintage.

«Quand j'avais 15 ans, mon père m'a demandé: “Quel cadeau d'anniversaire veux-tu?” J’ai répondu: “Papa, s'il te plaît, offre-moi un appareil photo.”»

photo
(Photo de Ramesh Shukla)

Peu de temps après le départ de son navire, le Dwarka, de Bombay, Ramesh Shukla souffre d’un horrible mal de mer qui freine son désir de découvrir le monde.

Épuisé par le balancement incessant des vagues, il débarque à Charjah, l'un des États de la Trêve qui à l'époque, constituaient collectivement un protectorat informel de l’Empire britannique.

Il y trouve un logement chez un habitant, qui incite le jeune visiteur à se rendre à l'hippodrome de Charjah pour assister à un grand événement de l'époque, une course de chameaux. Désireux de s’immerger dans les images et les sons authentiques de l'Arabie, Ramesh Shukla suit, appareil photo en main.

Accroupi sur le sol le long de l’hippodrome, il repère un groupe d'hommes qui allait fonder les EAU. Parmi eux, le cheikh Zayed ben Sultan al-Nahyane, qui deviendra bientôt le premier président du nouveau pays, fonction qu'il occupe jusqu'à sa mort le 2 novembre 2004.

photo
Ramesh Shukla avec son appareil photo Rolleicord vintage. (Photo AN/Mohamed Fawzy)

Ramesh Shukla fait douze photographies de cheikh Zayed regardant les courses et revient le lendemain pour lui présenter l'un de ses portraits. Le souverain d'Abu Dhabi, désormais communément appelé le «père de la nation», est tellement impressionné qu'il signe le cliché et offre son stylo à Ramesh Shukla.

«C'est là que la première connexion a lieu», déclare à Arab News le fils de Ramesh Shukla, Neel, son directeur artistique. «C'était la première fois qu'il rencontrait son altesse. Cheikh Zayed lui dit alors: “Ne quittez pas cette région. Restez.”»

Déterminé à rester, Ramesh Shukla fait venir sa femme et leur fils pour vivre avec lui dans son pays d'adoption, pendant ses années de formation.

«J'étais avec lui tout le temps», raconte Neel. «Avant de prendre une photo, il me prenait pour modèle pour s'assurer que la lumière était bonne, puis il prenait la photo.»

photo
(Photo de Ramesh Shukla)

Entièrement autodidacte, Ramesh Shukla développe un style de photographie caractéristique, capturant des scènes de la vie quotidienne sur film noir et blanc, soulignant la simplicité de la vie nomade dans le pays avant l'unification et le boom pétrolier.

Les sujets de ses premiers travaux tournent autour des Bédouins travailleurs, des troupeaux de chameaux, des bateaux traditionnels abras sur la crique de Dubaï et la tour de l'horloge de Deira, photographiée d'en haut. Il a également documenté les débuts du premier aéroport commercial de Dubaï et du premier musée de la ville.

«C'était la vie aux EAU; il n'y avait rien. Il n'y avait ni lumière ni eau dans ma maison», raconte Ramesh Shukla, soulignant le contraste entre les équipements limités disponibles à l'époque et les infrastructures avancées du pays aujourd'hui. Même l'eau dont il avait besoin pour développer ses photos devait être puisée à côté.

Bien que son style de vie soit modeste, Ramesh Shukla noue de solides relations avec les dirigeants des EAU, ce qui lui vaut le titre informel de «photographe royal». Son accès privilégié aux cours royales fait que ses photographies sont très recherchées, en particulier par les médias indiens.

photo
Ramesh Shukla avec sa photo emblématique des pères fondateurs des Émirats arabes unis. (Photo AN/Mohamed Fawzy)

Une grande partie de la collection de Ramesh Shukla a été préservée pour la postérité grâce à sa femme, Tarulatta, qui a soigneusement archivé les négatifs de son mari, les protégeant de l'humidité et de la poussière, dans leur modeste maison de Deira, qui se composait d'une chambre noire, d'une cuisine et d'une chambre à coucher. Les archives offrent un témoignage fascinant des cinquante ans de parcours des EAU en tant que nation.

«Il a continué à documenter l’Histoire», déclare Neel. «Nous sommes très soucieux de la collection. Nous ne la commercialisons pas, c'est de l'Histoire. C'est pourquoi il est très aimé, parce qu'il préserve le sacré à ses côtés.»

photo
(Photo de Ramesh Shukla)

La carte de visite de Ramesh Shukla comporte une impression miniature d'une photographie dont il est particulièrement fier. Le 2 décembre 1971, il assiste à la cérémonie historique au cours de laquelle les dirigeants de Dubaï, d’Abu Dhabi, de Charjah, d’Ajman, de Fujaïrah et d’Oumm al-Qaïwaïn se réunissent pour marquer leur indépendance de la Grande-Bretagne et la création de leur propre pays unifié. Ras al-Khaimah rejoindra l’union le mois suivant.

C'est à ce moment que Ramesh Shukla saisit ce qui allait devenir une photo emblématique des cheikhs se tenant sous le drapeau national de leur nouveau pays. Le mât du drapeau se dresse encore à ce jour dans le quartier de Jumeirah à Dubaï.

«Il y avait beaucoup de bonheur», déclare Ramesh Shukla, se souvenant du jour, il y a un demi-siècle, où il a pris la photo sous le même mât de drapeau. «Les EAU sont nés avec une seule famille.»

Union House, où a été signé l'accord qui a permis la création des EAU, se trouve à proximité. Ramesh Shukla était là, bien sûr, pour capturer devant la caméra le moment historique où cheikh Zayed appose sa signature sur le document. Sa photo des cheikhs rassemblés est devenue le logo de l’«esprit de l’Union», qui a été largement utilisé lors de la quarante-cinquième Fête nationale des EAU, il y a cinq ans.

De nombreuses photos de Ramesh Shukla sont affichées dans les stations le long de la ligne de métro de Dubaï. Plus récemment, sa photo de cheikh Zayed signant l'accord syndical a figuré dans les passeports de l'Expo 2020 Dubaï.

photo
Ramesh Shukla avec son fils et directeur artistique, Neel Shukla. (Photo AN/Mohamed Fawzy)

En reconnaissance de sa contribution remarquable à l'Histoire nationale des EAU, le photographe a été parmi les premiers membres de la communauté créative de Dubaï à recevoir le très convoité Golden Visa, qui accorde aux détenteurs des droits de résidence à long terme sans avoir besoin d'un parrain national, et la propriété à 100 % de leurs propres entreprises.

Ramesh Shukla a certainement mené une vie riche, documentant l’Histoire d'une nation depuis sa création, notamment son patrimoine naturel et culturel, ses moments les plus importants et les plus dignes, et même la vie de ses chefs d'État.

Pourtant, il ne croit pas à la retraite malgré un travail si dur pendant de nombreuses années.

«La vie commence après 100 ans», conclut-il.

 

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com

 


A Paris, le Centre Pompidou s'offre une dernière fête avant cinq ans de fermeture

un feu d'artifice intitulé "Le Dernier Carnaval" au Centre Pompidou (Beaubourg) à l'occasion de sa fermeture pour un projet de rénovation de cinq ans, à Paris, le 22 octobre 2025. (AFP)
un feu d'artifice intitulé "Le Dernier Carnaval" au Centre Pompidou (Beaubourg) à l'occasion de sa fermeture pour un projet de rénovation de cinq ans, à Paris, le 22 octobre 2025. (AFP)
Short Url
  • Le Centre Pompidou organise un dernier week-end festif baptisé « Because Beaubourg » avant cinq ans de travaux, transformant ses huit étages en un immense terrain de jeu mêlant concerts, performances et expériences immersives
  • L’événement, réunissant 80 artistes et plusieurs grandes marques partenaires, célèbre la culture et l’esprit d’ouverture du lieu avant sa fermeture pour rénovation complète

PARIS: Dans un tourbillon de musique, d'images et de patins à roulettes, le Centre Pompidou à Paris s'offre un dernier week-end festif avant cinq ans de travaux, avec "Because Beaubourg", événement qui transforme l'intégralité du bâtiment en un immense terrain de jeu.

"Je suis venu parce que j'ai entendu dire que c'était la fermeture. Et j'avais envie de participer à ça une dernière fois, pour en profiter un petit peu", explique à l'AFP Eliot Ibert, 23 ans, en coloriant une fresque participative.

Fermé au public depuis le 22 septembre, le bâtiment aux emblématiques tuyaux colorés rouvre ses portes ce week-end avec un parcours inédit. De vendredi à dimanche, quelque 80 artistes se produisent à travers concerts, DJ sets, performances, masterclasses, projections et expériences immersives sur les huit étages.

"C'est le plus grand événement que le Centre Pompidou ait fait depuis son ouverture", assure Paul Mourey, codirecteur artistique de l'événement, imaginé avec le label Because Music.

- "Spleen" -

Chaque étage propose une expérience différente. Au niveau -1, des pianistes amateurs se succèdent devant une fresque des étudiants des Beaux-Arts, tandis que le Forum, au rez-de-chaussée, devient le théâtre de performances en journée et un club illuminé la nuit.

Le Village des enfants prend place au 3e étage, tandis que plusieurs artistes et sociétés ont investi le 4e niveau. Shygirl, Shay ou Pedro Winter, fondateur du label Ed Banger, ainsi que les entreprises Spotify, Samsung et Snapchat, qui proposent de tester ses lunettes de réalité augmentée, participent à des installations et expériences interactives.

Autant de partenaires qui contribuent à financer l'événement.

Le premier et le sixième étage accueillent, de jour comme de nuit, des artistes tels que Catherine Ringer, Christine and the Queens, Selah Sue, Keziah Jones ou Sébastien Tellier.

Le musicien français, qui profite de l'événement pour promouvoir son nouvel album prévu en janvier, souligne l'importance de participer à cette célébration : "La culture, aujourd'hui, elle est rare. Quand il y a des petits îlots de culture, c'est important d'y être. Je n'avais pas envie de manquer ça."

Brigitte Baleo, 78 ans, retraitée ayant travaillé dix ans à la bibliothèque du Centre Pompidou, confie que la fermeture lui laisse "un peu de spleen".

"Ça tend l'estomac, il y a trop de souvenirs", ajoute-t-elle, émue. "Mais il faut que la fermeture ait lieu, pour réhabiliter ce monument".

Conçu en 1977 comme un lieu "ouvert à tous" par les architectes Renzo Piano et Richard Rogers, le bâtiment souffre aujourd'hui de vétusté.

Désamiantage, accessibilité du lieu, sécurité et complet réaménagement intérieur sont au menu de ses importants travaux de rénovation.

- Rollers et vue panoramique -

Cette fermeture, "c'est quelque chose qui me touche", abonde Florence, qui n'a pas souhaité donner son nom.

Férue d'électro, la Bordelaise de 57 ans vient d'assister au deuxième étage à "Space Opera", un film musical du duo français Justice projeté comme une expérience de clubbing, à quelques pas de l'installation inédite Camera/Man de Thomas Bangalter, un des deux membres de Daft Punk.

Pour encore plus de mouvements, elle compte bien expérimenter le Roller Disco qui fait vibrer l'ancienne galerie 1, au dernier étage.

Entre DJ sets, patins à roulettes et vues panoramiques sur Paris, l'ambiance mêle nostalgie et effervescence festive.

Gulliver Hubard, un étudiant britannique de 20 ans, savoure lui sa première visite. "C'est une chance de le voir avant sa fermeture", assure-t-il.

En journée, le programme est entièrement gratuit, et les organisateurs espèrent accueillir entre 10.000 et 15.000 visiteurs par jour.

Le programme nocturne, payant, a lui été pris d'assaut : les 12.000 billets se sont arrachés en à peine une journée.


AlUla ou comment le désert devient atelier d’art

Short Url
  • AlUla se transforme en laboratoire artistique où design, architecture et patrimoine dialoguent avec le désert
  • Entre traditions locales et innovation contemporaine, le désert devient un espace d’expérimentation, d’apprentissage et de création, où culture et paysage s’influencent mutuellement

PARIS: De la résidence de design à la construction du futur musée d’art contemporain confié à Lina Ghotmeh, AlUla se façonne dans le respect de sa mémoire et de son paysage.

À Paris, une table ronde organisée par la RCU et AFALULA a révélé les coulisses de cette transformation, celle d’un territoire millénaire devenu laboratoire d’expérimentation et vitrine du dialogue culturel franco-saoudien.

Dans le parc de l’hôtel des maisons (un hôtel particulier parisien construit au XVIII), la conversation s’est ouverte sur une question presque philosophique : comment bâtir dans le désert sans le dominer ? Comment concevoir à AlUla, ce paysage d’infini, une architecture qui parle à l’échelle humaine ?

La table ronde, intitulée “From the Land Up: Designing AlUla from Desert to Human Scale”, a réuni les acteurs clés du projet et plusieurs anciens résidents du programme AlUla Design Residency, créé il y a deux ans.

Ils ont tous en commun d’avoir approché cette terre d’exception, non comme un territoire vierge, mais comme un organisme vivant, porteur d’histoires et de voix anciennes.

L’événement, organisé par la Commission royale pour AlUla (RCU) et l’agence Française pour le développement d’Alula (AFALULA), a célébré l’ADN rare de cette région, qui est un mélange entre fouilles historiques, architecture, design et diplomatie culturelle notamment avec la villa Hegra. 

AlUla, déjà célèbre pour son patrimoine nabatéen et ses falaises sculptées par le vent, devient aujourd’hui un territoire d’expérimentation artistique mondiale, où le passé inspire le futur, et lui donne forme.

Au centre du projet, la vision de Lina Ghotmeh, architecte franco-libanaise à la tête du futur musée d’art contemporain d’AlUla, « Le musée ne doit pas être une icône posée dans le désert » explique-t-elle, « mais un générateur de liens, un espace de rencontre et d’hospitalité ».

Implanté près d’une ancienne oasis agricole, le musée s’enracinera dans le paysage tout en redonnant vie à des savoir-faire ancestraux, « nous travaillons avec la terre locale, avec des techniques de construction traditionnelles : torchis, terre comprimée, architecture bioclimatique, l’objectif est de renouer avec les ressources naturelles et la mémoire des lieux », souligne l’architecte.

Ghotmeh évoque aussi le dialogue qu’elle a tissé avec la communauté locale, « j’ai passé du temps à rencontrer les habitants, à partager un thé sous un oranger, à écouter les femmes qui ravivent l’artisanat, à visiter les écoles ».

Un jour, une fillette m’a dit, « le musée, c’est le lieu de l’extraordinaire, cette phrase m’accompagne toujours, car au fond, c’est bien de cela qu’il s’agit, créer un lieu qui relie la connaissance, l’émotion et la beauté ».

Dans son approche sensible, le musée devient un prolongement du paysage, un lieu où les visiteurs respireront la même lumière que les habitants, où la culture se fera conversation et échange.

« Il ne s’agit pas d’importer la culture, mais de la créer à partir du territoire », souligne Arnaud Morand, responsable des arts et industries créatives à AFALULA, c’est cette conviction qui guide toute la programmation culturelle d’AlUla.

L’une des premières grandes expositions préfigurant le musée verra le jour en janvier prochain, consiste en une collaboration entre AlUla et le Centre Pompidou, présentée d’abord dans une architecture temporaire conçue sur place avant de voyager dans le monde.

« C’est une coopération basée sur l’échange de savoirs et la lenteur, dit-il. À AlUla, on apprend à prendre le temps, l'art naît du sol, pas de la vitesse ».

Cette philosophie irrigue aussi les résidences de design et d’artistes qu’AFALULA co-dirige sur place, des programmes où jeunes talents et créateurs confirmés expérimentent à ciel ouvert, dans une relation directe avec le territoire, « Là-bas, chaque projet s’élabore dans l’écoute et l’humilité » affirme Morand.

« Lorsque nous arrivons à AlUla, nous devons laisser nos certitudes à la porte du désert » observe Ali Al Gazzaoui responsable du programme de résidences d’artistes, « il faut apprendre à écouter les habitants, à comprendre leur rapport au paysage, à la lumière, à la convivialité ».

C’est cette humilité partagée qui transforme le désert en école, les fondateurs du Studio Raw Material, Dushyant Bansal et Priyanka Sharma, anciens résidents du programme, racontent leur découverte émerveillée d’un lieu où « le matériau est partout de la roche, au sable, à la chaleur, et la lumière, tout devient matière à création ».

Leur expérience les a conduits à réfléchir à une forme de design « hors des centres urbains » à la faveur d’une pratique ancrée dans la vie quotidienne et les gestes ordinaires, « à AlUla, on apprend à se salir les mains, à construire, à inventer avec ce que la nature nous offre ».

Cette approche artisanale et poétique rejoint la vision d’Ali Alghazzawi, pour lui, « notre mission est de créer un écosystème où les créatifs peuvent dialoguer librement avec le paysage et expérimenter, car la durabilité ne se décrète pas, elle se vit ».

Tout ceci confère à AlUla qui est un site touristique d’exception, une autre dimension qui est celle de pépinière d’idées, de territoire d’apprentissage et de création contemporaine.


Le Gray fait son grand retour à Beyrouth : symbole d’espoir et de renouveau

Le chef étoilé Alan Geaam au Le Gray à Beyrouth, le 14 octobre 2025. De retour dans son pays natal après son succès à Paris, il dirige les cuisines de l’hôtel. (AFP)
Le chef étoilé Alan Geaam au Le Gray à Beyrouth, le 14 octobre 2025. De retour dans son pays natal après son succès à Paris, il dirige les cuisines de l’hôtel. (AFP)
Short Url
  • Cinq ans après l’explosion du port, Le Gray rouvre ses portes en novembre 2025, devenant un symbole fort de relance pour le centre-ville de Beyrouth et l’hospitalité libanaise
  • Sous la direction de Charles Akl et du chef étoilé Alan Geaam, l’hôtel incarne l’alliance du luxe, de la mémoire et du renouveau culturel, gastronomique et économique de la capitale

BEYROUTH: Cinq ans après l’explosion dévastatrice du port de Beyrouth et la fermeture qui s’en est suivie, l’hôtel Le Gray s’apprête à rouvrir ses portes en novembre 2025, marquant un tournant symbolique pour la capitale libanaise. Situé sur la place des Martyrs, au cœur du centre-ville, cet établissement iconique, membre du réseau Leading Hotels of the World (LHW) retrouve son éclat d’antan et incarne l’espoir d’un renouveau pour l’hospitalité et la culture libanaises.

Un nouveau souffle pour Beyrouth

La réouverture de Le Gray intervient dans un contexte d’effort de relance économique. Depuis l’arrivée d’un nouveau gouvernement en janvier 2025, le Liban semble s’engager dans une phase de stabilisation et de redressement. L’ouverture des Beirut Souks plus tôt en octobre a déjà insufflé un vent d’optimisme dans une ville meurtrie, encore marquée par les séquelles de la guerre de 2024.

« C’est un retour à la vie et une réaffirmation de notre engagement envers Beyrouth, » déclare Charles Akl, directeur général de Le Gray.

« Le Gray a toujours été plus qu’un hôtel : c’est un symbole, un lieu de rencontre, une part de l’âme de la ville. Aujourd’hui, il revient pour redonner espoir et dynamisme au centre-ville. »

La gastronomie au cœur du renouveau

Symbole fort de ce retour : la cuisine. Le chef franco-libanais Alan Geaam, seul chef libanais étoilé au Guide Michelin, prend les commandes des restaurants de l'hôtel. Après vingt-sept ans en France, il signe ici un retour aux sources empreint d’émotion et d’ambition.

« Mon objectif est de porter encore plus haut le nom du Liban sur la scène gastronomique internationale, » confie le chef. « C’est un honneur de revenir à Beyrouth, de former de jeunes talents et de faire rayonner notre cuisine. »

Alan Geaam introduit à cette occasion Qasti Beyrouth, déclinaison locale de son restaurant emblématique présent à Paris et dans d’autres grandes villes, ainsi que Padam, une adresse signature au sein de l’hôtel.

--
Qasti Beyrouth : la cuisine d’Alan Geaam au cœur de Le Gray. (Photo: ANFR)

Une redécouverte d’un joyau urbain

À l’occasion du pre-opening de l’hôtel, un groupe de journalistes a été invité à redécouvrir les lieux. L’expérience a été décrite comme un moment d’émotion et de redécouverte, dans un cadre où se mêlent raffinement, art et mémoire.

Avec plus de 100 chambres et suites repensées sous la direction artistique de l’architecte Galal Mahmoud, l’hôtel allie élégance contemporaine et références subtiles à l’histoire et à la culture libanaises. Plus de 600 œuvres d’art ornent les espaces communs et les chambres, transformant l’hôtel en véritable galerie.

Le Gray propose également des espaces événementiels et de conférence modulables, capables d’accueillir aussi bien des événements professionnels que des célébrations privées.

Un lieu au carrefour du passé et de l’avenir

À quelques pas des Beirut Souks, du front de mer et de Zaitouna Bay, Le Gray se trouve à la croisée de l’histoire, de la culture et du renouveau économique. Il se veut désormais moteur du redéploiement touristique du centre-ville.

Pour Charles Akl, cette réouverture dépasse le simple acte économique : « C’est une responsabilité collective : celle de redonner de l’élan à la ville, de raviver les talents, et de réaffirmer la place de Beyrouth sur la carte mondiale de l’hospitalité et de la culture. »

Avec cette réouverture très attendue, Le Gray ne se contente pas de retrouver sa place dans le paysage hôtelier. Il incarne la résilience d’un peuple et la volonté d’un pays de se reconstruire, avec élégance et conviction.