Archéologie : la belle histoire des relations étroites entre la France et l’Égypte

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Publié le Mercredi 12 août 2020

Archéologie : la belle histoire des relations étroites entre la France et l’Égypte

Archéologie : la belle histoire des relations étroites entre la France et l’Égypte
  • France-Egypte: L’histoire profonde qui unit les deux pays a commencé lors de l’expédition de Napoléon Bonaparte en Égypte en 1798. Il était accompagné de plus de 160 chercheurs
  • L’institut archéologique le plus important au Caire est l’Institut français d’archéologie orientale

Lorsque que des gens posent des questions pour savoir quel pays et quel peuple aiment le plus les pharaons, la réponse est toujours la même : les Français. Lorsque l’exposition Toutânkhamon s’est installée en France en 2019, plus de 1,3 million de personnes ont visité le trésor du pharaon. En observant ces visages scrutant avec attention tous ces objets, on pouvait y lire toute la fascination exercée par l’ancienne Égypte.

L’histoire profonde qui unit les deux pays a commencé lors de l’expédition de Napoléon Bonaparte en Égypte en 1798. Il était accompagné de plus de 160 chercheurs, connus sous le nom de « savants », comprenant scientifiques, artistes, linguistes, ingénieurs et naturalistes, qui avaient pour tâche de documenter tout ce qu’ils voyaient, ancien et moderne. Ils ont produit un document précieux qui renferme tous les aspects de l’Égypte, ancienne et moderne, dans des livres gigantesques compilés par 2 000 artistes et techniciens. Il s’agit de vingt volumes magnifiques avec des plans et des croquis, intitulés Description de l’Égypte. Chaque volume touche le cœur des lecteurs de manière universelle, et encore plus ceux qui ont eu la chance de voir les originaux. 

La découverte de la pierre de Rosette par des soldats français en 1799 peut être considérée comme essentielle pour la compréhension de l’histoire et de l’archéologie égyptiennes. Champollion, le grand érudit, en déchiffrant les hiéroglyphes de la pierre, fut capable de nous initier à l’ancienne langue égyptienne. Sans lui, l’égyptologie serait restée dans l’obscurité… Mais elle prit vie à travers lui.  La pierre de Rosette fut saisie par les Britanniques en vertu de leur traité avec les français à Alexandrie, en 1801. Elle est aujourd’hui exposée au British Museum.

L’institut archéologique le plus important au Caire est l’Institut français d’archéologie orientale (IFAO). Il organise le travail français en Égypte et y supervise environ quarante missions, sur des sites allant de la période prédynastique à l’ère Islamique. Quatre cents chercheurs et étudiants travaillent en Égypte. Les sites de restauration et de conservation les plus connus sur lesquels travaillent les Français sont Deir el-Medineh, l’Oasis de Kharga, Saqqara, et Tanis.

Le Centre franco-égyptien pour l’étude des temples de Karnak est l’entité scientifique la plus importante. De nombreux chercheurs des deux pays y travaillent en collaboration sur l’excavation et la restauration des temples. Chaque année, en été, ils célèbrent la gloire de ces temples magnifiques. 

Le Centre d’Études alexandrines (CEALX) travaille sur la restauration de plusieurs sites, ainsi qu’en archéologie sous-marine. Il a révélé de nombreux secrets de la mer Méditerranée.  

Le Français Auguste Mariette était le directeur du premier service des antiquités de l’Égypte. Son travail consistait à aider le gouvernement à mettre fin au commerce illégal d’objets et à superviser le travail des missions étrangères en Égypte. Désireux de protéger les vestiges, Mariette commença à enquêter sur le pillage de la tombe contenant la cachette des momies royales de Louxor en 1881, mais il mourut juste avant la fin de l’enquête. Son successeur, Gaston Maspero, put achever l’enquête qui révéla la cachette. Mariette fut également le premier à construire un musée au Proche-Orient, à Boulq au Caire, qui fut par la suite transféré à Tahrir Square. Une statue de Mariette a été érigée dans le jardin du musée du Caire et démontre la gratitude que nous, Égyptiens, éprouvons pour les français.  

L’obélisque de Ramsès II, qui trônait autrefois devant le temple de Louxor, a été offert à la France, par Mohamed Ali Pasha, pour être érigé place de la Concorde, à Paris, en 1833.

Les musées du Louvre et de Lyon abritent des collections d’antiquités égyptiennes de grande importance. Mon objet préféré au Louvre est la statue égyptienne du scribe accroupi qui remonte à l’Ancien Royaume. Lorsque je me rends au Louvre, je m’imagine qu’il attend encore les mots du roi pour les noter sur son parchemin.

Nous ne devons pas oublier les égyptologues exceptionnels qui ont consacré leur vie à cette science, comme Victor Loret, Jean Yoyotte, Émile Baraize, Gustave Lefebvre, et d’autres encore.

J’étais un ami proche du professeur Jean Leclant, que je considère comme l’un des plus grands égyptologues de son époque. Il a fait des découvertes très importantes sur le site de Saqqara. Il m’a fait visiter l’intérieur des pyramides de Pepi I et Pepi II et m’a montré la restauration impressionnante des textes des pyramides. Il avait pour habitude de m’envoyer, au fil des ans, chaque article qu’il écrivait à propos de l’archéologie.

J’ai donné deux conférences à Paris. La première s’est déroulée au Louvre en 1995. Il y avait tant de monde que les organisateurs ont dû ouvrir une autre salle au public. Cette nuit, les égyptologues français ont donné un dîner en mon honneur et M. Jean Philippe Lauer, âgé de 92 ans, m’a raccompagné à l’hôtel au volant de sa voiture. 

Lorsque j’ai construit le site du musée à Saqqara, j’ai décidé de créer une salle pour mettre en valeur la vie de Lauer, un homme exceptionnel qui a consacré sa vie à Saqqara. Nombreux étaient ceux qui voyait en lui la réincarnation d’Imhotep, l’architecte qui a construit la pyramide à degrés. J’ai également mis en place une zone consacrée aux découvertes aux abords des pyramides de Pepi I et II qui ont été faites par M. Leclant et un autre égyptologue de renom, Audran Labrousse.

Si on me demande quelles sont les découvertes les plus importantes des égyptologues, je dirais : le serapeum à Saqqara, le lieu de sépulture des taureaux sacrés d’Apis, par Mariette, ainsi que la cachette des momies royales dans la tombe d’Amenhotep II, par Victor Loret. La découverte la plus importante du XXIe siècle reste cependant celle de Pierre Tallet : le papyrus de Wadi el-Jarf, près de la mer Rouge. Datant de l’époque du règne du roi Khufu de la IVe dynastie, le papyrus documente le transport de la pierre sur le site de la Grande Pyramide, et nous raconte la construction de la pyramide et la gestion des monuments. La traduction et la restauration exceptionnelles de ces papyrus est une contribution importante de Pierre Tallet.

Si on devait recenser les actions accomplies par les Français dans le domaine de l’égyptologie, de nombreux noms entreraient dans l’Histoire par la grande porte.