La France ouvre ses archives sur la guerre d'Algérie pour «regarder la vérité en face»

Dans cette photo d'archive prise le 21 avril 1962 la jeune militante algérienne du Front de libération nationale algérien (FLN) Djamila Boupacha (en voiture), accompagnée de son avocate Gisèle Halimi (à gauche) sort de la prison centrale de Rennes, où elle avait transférée, à sa sortie de prison. (AFP)
Dans cette photo d'archive prise le 21 avril 1962 la jeune militante algérienne du Front de libération nationale algérien (FLN) Djamila Boupacha (en voiture), accompagnée de son avocate Gisèle Halimi (à gauche) sort de la prison centrale de Rennes, où elle avait transférée, à sa sortie de prison. (AFP)
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Publié le Samedi 11 décembre 2021

La France ouvre ses archives sur la guerre d'Algérie pour «regarder la vérité en face»

  • Cette annonce s'inscrit dans la politique de réconciliation mémorielle initiée par le président français, Emmanuel Macron
  • Le 9 mars 2021, poursuivant sa politique de "petits pas", le chef de l'État avait annoncé une simplification des accès aux procédures de déclassification des archives classifiées de plus de 50 ans

PARIS: Pour "regarder la vérité en face" sur la guerre d'Algérie, la France a décidé d'ouvrir "avec 15 ans d'avance" les archives judiciaires de l'époque, a annoncé vendredi le gouvernement, poursuivant la politique des "petits pas" amorcée par Emmanuel Macron.  

"On a des choses à reconstruire avec l'Algérie, elles ne pourront se reconstruire que sur la vérité", a défendu sur BFMTV Roselyne Bachelot, ministre française de la Culture, peu après avoir annoncé l'ouverture des "archives sur les enquêtes judiciaires de gendarmerie et de police" en rapport avec la guerre d'Algérie (1954-1962).

"Je veux que sur cette question -qui est troublante, irritante, où il y a des falsificateurs de l'Histoire à l'oeuvre- je veux qu'on puisse la regarder en face. On ne construit pas un roman national sur un mensonge", a argué la ministre, qui a dans son périmètre la question des archives. 

Cette déclaration intervient deux jours après la visite à Alger du chef de la diplomatie française, Jean-Yves Le Drian, destinée à désamorcer une crise d'une rare gravité entre les deux pays en cours depuis plusieurs mois.

"C'est la falsification qui amène toutes les errances, tous les troubles et toutes les haines. A partir du moment où les faits sont sur la table, où ils sont reconnus, où ils sont analysés, c'est à partir de ce moment-là qu'on peut construire une autre histoire, une réconciliation", a poursuivi Mme Bachelot.

Interrogée sur les conséquences de cette décision, notamment sur la possible confirmation à venir d'actes de torture commis par l'armée française en Algérie, "c'est l'intérêt du pays que de le reconnaître", a ajouté Mme Bachelot.

Cette annonce s'inscrit dans la politique de réconciliation mémorielle initiée par le chef de l'Etat, Emmanuel Macron. Le 13 septembre 2018, il reconnaissait que la disparition du mathématicien et militant communiste Maurice Audin, en 1957 à Alger, était le fait de l'armée française et promettait à sa famille un large accès aux archives.

"Quand Emmanuel Macron a rendu justice sur l'affaire Audin, il avait ainsi mis la France en face de la vérité", a rappelé Mme Bachelot.   

"On ne doit jamais avoir peur de la vérité, il faut la contextualiser. (...) Mais il faut la regarder en face", a-t-elle ajouté.

Des plaies encore vives

Le 9 mars 2021, poursuivant sa politique de "petits pas", le chef de l'Etat avait annoncé une simplification des accès aux archives classifiées de plus de 50 ans, permettant d'écourter les délais d'attente.

Cette décision s'inspirait du rapport Stora sur la question mémorielle entre l'Algérie et la France qui préconise une ouverture et un partage des archives coloniales sensibles entre Algériens et Français, conservées aux Archives nationales d'outre-Mer à Aix-en-Provence.

Elle répondait aussi partiellement à une requête d'universitaires se plaignant des entraves à la libre consultation de documents historiques.

"À l'égard de l'Algérie, c'est un signal important que la France envoie, bien que cette politique mémorielle s'inscrive dans une démarche franco-française d'établissement des faits", a déclaré à l'AFP le Franco-Algérien, Karim Amellal, délégué interministériel à la Méditerranée.

"Il y a une demande très forte des historiens s'agissant de la déclassification des documents couverts par le secret défense. Et l'idée fondamentale est de leur donner la possibilité de faire leur travail", a ajouté ce membre de la commission "Mémoire et vérité" présidée par l'historien Benjamin Stora.

Même requête, restée sans réponse, du côté des historiens algériens qui en avril ont appelé dans une lettre le chef d'Etat algérien à ouvrir les archives nationales sur cette période. "La demande et la revendication d'ouvrir les archives date d'au moins dix ans", déplorait alors l'historien Amar Mohand-Amer sur TV5 Monde.

Soixante ans après la fin de la guerre d'Algérie, les plaies sont encore vives de part et d'autre malgré des gestes symboliques au fil des ans de la France, qui exclut toutefois "repentance" ou "excuses".

Le président Emmanuel Macron avait déclenché l'ire d'Alger en octobre en accusant, selon des propos rapportés par le quotidien français Le Monde, le système "politico-militaire" algérien d'entretenir une "rente mémorielle" autour de la guerre d'indépendance et de la France.

L'Algérie avait alors rappelé son ambassadeur à Paris et interdit le survol de son territoire aux avions militaires français ralliant le Sahel. 


Dix passeurs présumés jugés pour un naufrage meurtrier dans la Manche

Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
Une femme passe devant les restes d'un bateau de contrebande endommagé sur la plage de Bleriot à Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 11 juin 2025. (AFP)
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  • Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés
  • La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche

LILLE: Dix hommes, dont huit Afghans, sont jugés à partir de lundi à Lille pour leur rôle présumé de passeurs dans le naufrage d'une embarcation clandestine qui avait fait quatre morts et quatre disparus dans la Manche en décembre 2022.

Parti entre 1H00 et 1H30 du matin dans la nuit du 13 au 14 décembre 2022, le canot, qui transportait en majorité des migrants afghans, avait fait naufrage à quelques kilomètres des côtes anglaises.

Trente-neuf migrants, dont huit mineurs, avaient pu être sauvés, mais quatre avaient été retrouvé morts et quatre autres n'ont jamais été retrouvés.

La même nuit, sept autres départs d'embarcations clandestines avaient été dénombrés dans la Manche.

Selon les éléments de l'enquête, alors que les migrants gonflaient le bateau avant le départ, plusieurs ont entendu une détonation, synonyme selon eux de crevaison. Les passeurs leur ont dit de ne pas s'en faire et qu'il s'agissait du seul bateau disponible pour eux.

D'après les témoignages des rescapés, il n'y avait pas assez de gilets de sauvetage pour tout le monde et aucune des personnes décédées n'en portait un. La température était glaciale et la mer très agitée.

Après une ou deux heures de traversée, un boudin a commencé à se dégonfler et l'eau à entrer dans l'embarcation, jusqu'à atteindre les genoux des passagers. Paniqués, ils se sont mis debout pour tenter de faire signe à un bateau. Mais le fond du canot, peu solide, a ployé sous leur poids et celui de l'eau, et tous se sont retrouvés à l'eau.

Neuf des prévenus sont jugés, jusqu'à vendredi, pour homicide involontaire par violation d'une obligation de sécurité, deux d'entre eux le sont pour blanchiment, tous pour aide au séjour irrégulier. Huit sont afghans, un syrien, un irakien.

Certains des prévenus sont soupçonnés d'avoir recruté des passeurs et assuré la logistique auprès des passagers, d'autres d'avoir géré l'organisation sur le camp de migrants de Loon-Plage (Nord), où vivaient les migrants avant leur tentative de traversée, toujours selon les éléments de l'enquête. D'autres encore sont jugés pour s'être occupés du transport des migrants vers la plage et de la mise à l'eau du canot, et deux pour avoir collecté une partie des paiements.

Le mineur sénégalais qui pilotait le canot est, lui, inculpé dans le cadre d'une procédure au Royaume-Uni.

Apparu en 2018, le phénomène des traversées de la Manche en petites embarcations est à l'origine de nombreux naufrages, le plus meurtrier ayant coûté la vie à 27 personnes en novembre 2021.

Depuis le début de l'année, au moins 15 migrants sont morts dans la Manche, bras de mer parmi les plus fréquentés du monde et où les conditions météorologiques sont souvent difficiles, selon un décompte de l'AFP à partir de chiffres officiels. En 2024, 78 étaient morts ainsi, un record.


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».