« 70 millions d'années d'existence et 40 ans de déclin »: l'anguille menacée par l'homme

Cette photo prise le 25 octobre 2021 montre des anguilles dans un réservoir de l'Agence japonaise de recherche et d'éducation sur la pêche dans la banlieue de Minamiizu, dans la préfecture de Shizuoka.
Cette photo prise le 25 octobre 2021 montre des anguilles dans un réservoir de l'Agence japonaise de recherche et d'éducation sur la pêche dans la banlieue de Minamiizu, dans la préfecture de Shizuoka.
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Publié le Mardi 14 décembre 2021

« 70 millions d'années d'existence et 40 ans de déclin »: l'anguille menacée par l'homme

  • La survie de l'espèce est aujourd'hui mise à mal par les pressions humaines
  • Son apparence serpentiforme lui a longtemps donné une mauvaise réputation en Europe

PARIS : Longtemps abondante dans le monde entier et même parfois considérée comme nuisible, l'anguille, dont le cycle de vie est encore mal connu, est aujourd'hui menacée de disparition à cause de l'activité humaine, avertissent scientifiques et organisations environnementales.

Comment a évolué la perception de l'anguille?

En quelques décennies, "on est passé d'un statut où on pensait que l'anguille était nuisible à un statut où l'on craint pour l'avenir de l'espèce", explique à l'AFP Eric Feunteun, professeur en écologie marine du Muséum national d'histoire naturelle français.

Dans les années 1960, "l'anguille était dans tous les cours d'eau, les estuaires", raconte ce spécialiste de l'espèce. 

Les civelles (les alevins de l'anguille) avaient peu de valeur commerciale: "Ma grand-mère tenait un café à Nantes, tout près de la Loire, et de temps en temps ses clients les moins fortunés lui apportaient un seau de civelles pour payer le café. Elle acceptait en râlant", se souvient-il.

Son apparence serpentiforme lui a longtemps donné une mauvaise réputation en Europe. Parfois accusée à tort de manger les saumons, l'anguille est même classée comme nuisible en France jusqu'en 1984. "On a tiré la sonnette d'alarme dès les années 1980" mais "il faut attendre 2007 pour que l'Union européenne adopte un règlement obligeant les Etats membres à mettre en place un plan de gestion de l'anguille".

Alors que le "recrutement" (arrivées dans les eaux continentales depuis l’océan) de civelles européennes est aujourd'hui tombé à moins de 10% de son niveau des années 1960-1970, l'anguille européenne est la plus menacée des espèces de ce poisson, juste devant ses cousines japonaise et américaine, selon l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN).

Pourquoi sa population décline?

"On a accusé la pêche professionnelle d'être à l'origine de ce déclin, mais c'est une erreur à la fois scientifique et politique. On sait que les raisons sont multiples et que la pêche n'est pas le facteur principal", note M. Feunteun.

"On sait que la pollution a des effets bien supérieurs à la pêche sur le stock: les pesticides issus des activités humaines, les médicaments, les plastifiants, les métaux, responsables d'une perte de taille" et donc de fertilité des anguilles femelles.

"On a détruit l'habitat de l'anguille, c'est ça qui l'a vraiment tuée", enrage Andrew Kerr, président de l'organisation Sustainable Eel Group. L'Europe a perdu les trois quarts de ses zones humides en moins d'un siècle, et compte plus d'un million d'obstacles en tout genre (barrages, écluses, gués...) perturbant les migrations et décimant les populations d'anguilles, rappelle-t-il.

M. Feunteun évoque aussi "les courants marins (qui) changent avec le réchauffement climatique notamment. Le Gulf Stream va un peu moins vite et plus loin vers le nord, du coup le trajet des larves est plus long et la mortalité augmente".

Comment sauver l'anguille?

Divers moyens ont été mis en place, comme des programmes de restauration de l'habitat dans les cours d'eau, de repeuplement, des adaptations des barrages ou des systèmes améliorant la traçabilité de l'anguille, dont la raréfaction alimente un juteux trafic à destination de l'Asie.

"Il y a des efforts mais ils sont parfois mal orientés", déplore M. Feunteun. En ne visant que la pêche, "on se trompe. Tant que l'animal est pêché, qu'il y a une économie derrière, on s'intéresse à l'espèce. Si plus personne ne la pêche, qui tirera la sonnette d'alarme?"

"Une approche mondiale est nécessaire pour sauver l'anguille" car toutes les espèces souffrent des mêmes maux, alerte aussi Andrew Kerr.

 La reproduction artificielle, une piste?

Des chercheurs japonais planchent depuis les années 1960 sur la reproduction artificielle de l'anguille, qui a la particularité de ne pas se reproduire en élevage. 

"Actuellement, près de 100% des anguilles que nous consommons sont des civelles capturées dans la nature et élevées en aquaculture, nous sommes donc dépendants des ressources naturelles", explique Ryusuke Sudo, chercheur dans un centre spécialisé de l'Agence japonaise de la pêche.

Mais "le coût est trop élevé, le taux de reproduction est bas, et le temps de croissance des civelles est long", dit M. Sudo, convenant que la méthode artificielle "n'est pas rentable commercialement" à ce stade.

L'anguille peut-elle disparaître?

"C'est une famille qui existe depuis 60-70 millions d'années, qui a survécu aux dinosaures, et qui paradoxalement s'est très peu diversifiée", souligne Eric Feunteun. Il n'existe en effet que 19 espèces et sous-espèces d'anguilles.

Si l'anguille a peu évolué c'est parce qu'elle est très performante: elle naît dans des zones où d'autres poissons ne peuvent pas se développer car leurs larves n'y trouvent pas à manger, note le scientifique.

Mais la survie de l'espèce est "aujourd'hui mise à mal par les pressions humaines: 70 millions d'années d'existence et quarante années de déclin", résume-t-il.

M. Feunteun dit cependant garder espoir, "car c'est une espèce qui a montré au cours des crises climatiques passées qu'elle a su repartir à partir de très peu d'individus".


Versailles célèbre l’union musicale entre la France et l’Arabie saoudite

(Photo: Instagram)
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  • Un concert exceptionnel au Château de Versailles a réuni l’Orchestre et le Chœur National d’Arabie saoudite avec l’Orchestre de l’Opéra Royal
  • La soirée a mis en lumière les arts traditionnels saoudiens et la musique classique française

VERSAILLES: Dans le cadre somptueux du Château de Versailles, l’un des joyaux du patrimoine français, s’est tenu vendredi 5 septembre un concert intitulé Les Merveilles de l’Orchestre d’Arabie saoudite. Organisé sous le haut patronage du Prince Bader ben Abdullah ben Farhane Al Saud, ministre saoudien de la Culture et président du Conseil d’administration de la Commission musicale, cet événement a marqué un moment fort de la coopération culturelle entre le Royaume d’Arabie saoudite et la République française.

Porté par la Commission musicale, en collaboration avec la Commission du Théâtre et des Arts de la Scène, ce concert a réuni sur scène l’Orchestre et le Chœur National d’Arabie saoudite et l’Orchestre de l’Opéra Royal du Château de Versailles, dans une performance conjointe inédite. Ensemble, ils ont livré une fresque musicale riche et raffinée, mêlant tradition et modernité, Orient et Occident.

La soirée s’est distinguée par la présence de nombreuses personnalités éminentes, dont le Prince Bader ben Abdullah ben Farhane Al Saud, le Prince Turki ben Faisal Al Saud, la Princesse Haifa Al Mogrin, ambassadrice d’Arabie saoudite à Madrid, Majid ben Abdullah Al-Kassabi, ministre saoudien du Commerce, Rachida Dati, ministre française de la Culture, ainsi que Brigitte Macron.

Un hommage vibrant au patrimoine culturel saoudien a été rendu à travers quatre formes emblématiques des arts du spectacle traditionnels : Al Khobeiti, Al Majroor, Al Rifaihi et Al Khathwah, interprétés avec grâce par les artistes de la Commission du Théâtre et des Arts de la Scène. Ces tableaux vivants ont offert au public une plongée sensorielle dans l’héritage vivant du Royaume.

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En miroir à cette richesse, l’Orchestre de l’Opéra Royal a interprété des chefs-d’œuvre de la musique française, faisant résonner l’élégance intemporelle du répertoire classique national. Le point culminant de la soirée fut le segment fusion, véritable dialogue musical entre les deux ensembles, qui a symbolisé l’harmonie entre les cultures.

Cette soirée s’inscrit dans la continuité d’un parcours international remarquable pour l’Orchestre et le Chœur National d’Arabie saoudite. Après des représentations saluées à Mexico, New York, Londres, Tokyo, Riyad et Sydney, Versailles a offert une étape prestigieuse, qui résonne comme l’accomplissement d’un projet artistique d’envergure.

Depuis leur première apparition internationale au Théâtre du Châtelet en 2022, les musiciens saoudiens n’ont cessé de séduire par la profondeur de leur répertoire. Cette nouvelle escale à Versailles s’inscrit également dans l’élan diplomatique impulsé par la visite d’État saoudienne de décembre 2024, et la signature récente de deux accords majeurs avec la Philharmonie de Paris et le Grand Palais.

Au-delà de la performance, Les Merveilles de l’Orchestre d’Arabie saoudite ont incarné un puissant symbole de dialogue interculturel. Une célébration de la musique comme langage universel, capable de bâtir des ponts durables entre les peuples, et de magnifier les valeurs de respect, de partage et de beauté commune.


« Palestine 36 », soutenu par l’Arabie saoudite, présenté en avant-première au TIFF 2025

Le film a été présenté en avant-première au Festival international du film de Toronto. (AFP)
Le film a été présenté en avant-première au Festival international du film de Toronto. (AFP)
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  • Le film Palestine 36 d’Annemarie Jacir, présenté au TIFF 2025, revient sur le soulèvement palestinien de 1936 contre le mandat britannique
  • Financé en partie par le Red Sea Film Fund d’Arabie saoudite, le film explore un moment décisif pour la région

DUBAÏ : Le film Palestine 36 de la réalisatrice Annemarie Jacir a été présenté cette semaine en avant-première au Festival international du film de Toronto (TIFF) 2025 lors d’une projection de gala.

Le film a été en partie financé par le Red Sea Film Fund, soutenu par l’Arabie saoudite.

Situé aux abords de Jérusalem, Palestine 36 raconte l’histoire du soulèvement arabe contre le mandat britannique.

Le synopsis officiel indique : « En 1936, alors que les villages de la Palestine mandataire se soulèvent contre la domination coloniale britannique, Yusuf erre entre son village rural et l’énergie bouillonnante de Jérusalem, aspirant à un avenir au-delà des troubles croissants.

Mais l’Histoire est implacable. Avec l’arrivée massive de réfugiés juifs fuyant l’antisémitisme en Europe, et la population palestinienne unie dans le plus vaste et le plus long soulèvement contre les 30 ans de domination britannique, toutes les parties glissent vers une collision inévitable — un moment décisif pour l’Empire britannique et pour l’avenir de toute la région. »

Le film réunit une distribution internationale : l’acteur oscarisé Jeremy Irons, la star de Game of Thrones Liam Cunningham, l’acteur tunisien Dhafer L’Abidine, ainsi que les talents palestiniens Hiam Abbass, Yasmine Al-Massri, Kamel El Basha et Saleh Bakri.

La première a réuni de nombreuses personnalités, dont les acteurs britanniques Billy Howle et Robert Aramayo, l’acteur palestinien Karim Daoud Anaya, le producteur de cinéma palestino-jordanien Ossama Bawardi, ainsi que Jacir, Bakri, Al-Massri et Abbass.

Jacir, à qui l’on doit Salt of the Sea, When I Saw You, Wajib et des épisodes de la série Ramy, a entamé le travail sur ce projet avant la pandémie mondiale.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Riyad accueille sa toute première représentation de l’opéra « Carmen »

La Commission royale pour la ville de Riyad (RCRC) a fait venir le célèbre opéra "Carmen" pour la première fois en Arabie saoudite. (Fourni)
La Commission royale pour la ville de Riyad (RCRC) a fait venir le célèbre opéra "Carmen" pour la première fois en Arabie saoudite. (Fourni)
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  • L’événement s’inscrit dans le cadre de l’Année culturelle sino-saoudienne, célébrant le 35e anniversaire des relations diplomatiques entre les deux pays.

RIYAD : La Commission royale pour la ville de Riyad (RCRC), en collaboration avec la China National Opera House (CNOH), a présenté jeudi soir l’opéra mondialement connu de Georges Bizet, « Carmen », au Centre culturel Roi Fahd de Riyad. Il s'agit de la toute première représentation de ce chef-d'œuvre en Arabie saoudite.

Cet événement s’inscrit dans le cadre de l’Année culturelle sino-saoudienne, qui célèbre le 35e anniversaire des relations diplomatiques entre l’Arabie saoudite et la Chine. Plus de 2 500 invités et dignitaires étaient présents pour la soirée d’ouverture.

Le public a salué cette représentation historique. Thomas Dang, résident à Riyad, a décrit la soirée comme remarquable :

« C’était extraordinaire — une troupe chinoise jouant une œuvre d’un compositeur français sur une histoire espagnole, ici en Arabie saoudite. Ce mélange culturel était incroyable. »

Mise en scène par l’équipe du CNOH, la production a donné vie à l’histoire intemporelle de passion, de jalousie et de destin de Bizet, à travers des costumes vibrants et une distribution internationale.

Créée à Paris en 1875, « Carmen » est l’un des opéras les plus célèbres de l’histoire. Son début en Arabie saoudite marque une étape importante dans le développement culturel du Royaume, illustrant son ouverture croissante aux arts mondiaux.

Huixian, une résidente chinoise de Riyad, a partagé son enthousiasme :

« C’était ma première fois à l’opéra en Arabie saoudite, et aussi la première fois que je voyais ‘Carmen’ en chinois. La performance était très bonne, même si le chant aurait pu être plus puissant. Une soirée mémorable. »

« Carmen » se poursuivra au Centre culturel Roi Fahd jusqu’au 6 septembre 2025, offrant aux spectateurs une opportunité rare d’assister à l’un des opéras les plus emblématiques sur une scène saoudienne.

Selon la RCRC, cette première historique reflète l’engagement continu de la Commission à enrichir l’offre culturelle de Riyad, à travers des événements de classe mondiale, en cohérence avec la Vision 2030 du Royaume.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com