Irak: devenues militantes, des victimes se battent contre les violences faites aux femmes

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Publié le Dimanche 02 janvier 2022

Irak: devenues militantes, des victimes se battent contre les violences faites aux femmes

  • Mariages précoces, coercition économique: dans une société largement patriarcale, féministes et avocates luttent pour défendre des droits piétinés en toute impunité
  • Dans un Irak de 40 millions d'habitants, 17.000 plaintes pour violences conjugales ont été enregistrées en 2021 par la cellule de protection familiale

BAGHDAD : Quand elle finit sa journée de travail dans une administration de Bagdad, Azhar endosse sa casquette de militante féministe pour apporter une aide juridique aux femmes victimes de violences en Irak. Un engagement nourri par son expérience douloureuse avec un ex-mari brutal.

Il aura fallu à la quinquagénaire près d'une décennie d'âpres batailles dans les tribunaux pour obtenir son divorce, un calvaire qui l'a poussée à reprendre des études de droit.

"J'ai senti que j'étais faible face à la justice", confie celle dont l'ONG fait partie du Réseau des femmes irakiennes, une coalition d'associations féministes.

Aujourd'hui, son organisation fournit un soutien juridique aux victimes. "Pour que ces femmes soient conscientes de leurs droits et puissent se défendre", ajoute-t-elle.

Mariages précoces, coercition économique: dans une société largement patriarcale, féministes et avocates luttent pour défendre des droits piétinés en toute impunité, dénonçant lois rétrogrades et inaction des autorités.

Pour Azhar, 56 ans, le point de non-retour viendra en 2010. Elle avait été contrainte d'épouser son ex-mari sous la pression familiale.

Sur des photos, elle montre des ecchymoses violacées aux bras et jambes. "J'ai cru que j'allais mourir", lâche-t-elle. "C'est à ce moment que j'ai décidé de briser mes chaînes."

« La victime paye le prix »

Azhar quitte le domicile avec ses huit enfants et réclame le divorce.

Un premier juge connaissait l'époux et rejette la requête, malgré trois certificats médicaux, dit-elle. "Sa réponse: +je ne vais pas dissoudre des familles sur la base de certificats. Et alors, si un homme bat sa femme?+"

Dans un Irak de 40 millions d'habitants, 17.000 plaintes pour violences conjugales ont été enregistrées en 2021 par la cellule de protection familiale, rattachée au ministère de l'Intérieur, indique à l'AFP le général Saad Maan, responsable communication du ministère.

Quant au mariage des mineures, il est en hausse: 25,5% des femmes ont été mariées à moins de 18 ans en 2021, contre 21,7% en 2011. Pour les moins de 15 ans, il a doublé, dépassant les 10%, selon un sondage gouvernemental.

Responsable de la cellule de protection familiale, le brigadier Ali Mohamed reconnaît que les tribunaux qui reçoivent une affaire de violences domestiques tendent à favoriser la "réconciliation".

Mais la "réconciliation, c'est la victime qui en paye le prix", fustige Hanaa Edwar, engagée depuis cinquante ans pour les droits humains et la protection de la femme, présidente de l'ONG Al-Amal.

"La considération de la justice pour les affaires impliquant des femmes est beaucoup plus faible que le machisme dominant l'esprit des juges", assène-t-elle.

En l'absence d'une loi consacrée spécifiquement aux violences envers les femmes, l'avocate Marwa Eleoui regrette le recours au code pénal --dont l'article 398, par exemple, permet à un violeur d'échapper au châtiment s'il épouse la victime.

Un projet de loi sur lequel des ONG planchent depuis 2010 est en suspens, des partis islamistes ayant toujours entravé son adoption. Une de ses dispositions cruciales: la création de centres d'hébergement pour les victimes, souligne Mme Eleoui, dont l'organisation "Pour Elle" fait de l'assistance juridique.

« Quitter une prison » 

Bien souvent, quand l'opinion publique est mobilisée, des victoires sont remportées, comme l'illustre l'affaire de l'adolescente Mariam, qui a ému la nation.

La fille de 16 ans est défigurée. Un adulte, qui demandait sa main et qui avait été éconduit, s'est introduit un soir chez elle, l'aspergeant d'acide dans son lit, comme l'ont raconté ses parents dans la presse.

L'affaire date d'il y a sept mois, mais a été médiatisée en décembre, attirant l'attention des autorités. Le juge d'instruction a publié un communiqué confirmant deux interpellations.

"Sans la pression médiatique, l'affaire aurait mis deux ans avant de passer en justice", estime Mme Eleoui.

A Kirkouk (nord), l'association Amal a sauvé Lina d'un mari violent. Elle avait été mariée contre son gré à seulement 13 ans.

"J'avais 25 ans quand je me suis dit +ça suffit+", se souvient-elle. Craignant le scandale, son père et son mari ont tenté d'obtenir un certificat disant qu'elle était psychologiquement instable.

"Le médecin a vu les bleus et m'a mis en contact avec l'association", raconte la jeune femme, s'exprimant sous un pseudonyme.

Quatre ans plus tard, elle travaille avec Amal et effectue des visites à domicile pour sensibiliser les femmes à leurs droits.

Elle n'oubliera jamais le premier jour de sa nouvelle vie. "En sortant du tribunal, quand j'ai obtenu mon divorce, c'est comme si je quittais une prison."


Iran: le rappeur Toomaj, condamné à mort, est privé de téléphone

Il a été condamné à mort la semaine dernière pour "corruption sur terre" par le tribunal révolutionnaire d'Ispahan (Photo, X).
Il a été condamné à mort la semaine dernière pour "corruption sur terre" par le tribunal révolutionnaire d'Ispahan (Photo, X).
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  • Toomaj Salehi, 33 ans, qui utilise son prénom comme nom de scène, a été arrêté en octobre 2022
  • La députée allemande Ye-One Rhie, qui suit activement son dossier, a posté ce commentaire sur X

PARIS: Les autorités iraniennes ont privé de communications téléphoniques le rappeur Toomaj Salehi, dont la condamnation à mort provoque de vives protestations à travers le monde, ont indiqué mardi ses soutiens sur les réseaux sociaux.

Toomaj Salehi, 33 ans, qui utilise son prénom comme nom de scène, a été arrêté en octobre 2022. Il a été condamné à mort la semaine dernière pour "corruption sur terre" par le tribunal révolutionnaire d'Ispahan (centre).

Il avait soutenu, via ses chansons et sur les réseaux sociaux, le mouvement de contestation déclenché après la mort le 16 septembre 2022 de Mahsa Amini, une jeune Kurde iranienne détenue par la police des mœurs, qui lui reprochait d'avoir enfreint le strict code vestimentaire imposé aux femmes.

"La permission de téléphoner de Toomaj a été supprimée dans la prison Dastgerd d'Ispahan", selon le compte X officiel qui porte son nom et qui est contrôlé désormais par un administrateur.

"Cela signifie qu'il n'a plus aucun contact avec sa famille et le monde extérieur", a-t-il ajouté. "De plus, dans le but d'exercer sur lui une pression psychologique maximum, tous les prisonniers de Dastgerd ont l'interdiction de lui parler et ont été menacés de punitions sévères s'ils le font".

La députée allemande Ye-One Rhie, qui suit activement son dossier, a posté ce commentaire sur X: "Soyons clairs: c'est de la torture".

La condamnation à mort du rappeur a été dénoncée jeudi par la France, l'Italie, et les experts d'un groupe de travail de l'ONU. Des manifestations de soutien ont été organisées ce weekend dans plusieurs villes du monde, notamment Toronto, Paris et Sydney.

Mardi soir, dans une tribune dans le quotidien français Le Monde, un collectif d'artistes, d'écrivains et de militants des droits humains, dont Chirinne Ardakani, avocate et présidente de l'Association Iran justice; Elisabeth Badinter, philosophe; François Cluzet, comédien; Agnès Jaoui, comédienne, demande au président de la République Emmanuel Macron d'agir au plus vite pour sauver l'artiste.

"Nous vous demandons, monsieur le Président, de prendre fermement position contre la politique totalitaire de la République islamique d'Iran en agissant par tous les moyens politiques et diplomatiques pour faire lever définitivement la condamnation à mort de Toomaj Salehi et celle des autres prisonniers politiques condamnés au même titre, et pour obtenir leur libération", écrivent les signataires.

Idéaux 

"Ce chanteur de rap a pris le risque de manifester, mais a surtout été catalyseur des idéaux de cette population iranienne avide de liberté et de démocratie", soulignent-ils.

Ils ajoutent que "le rap, que Toomaj manipule avec ardeur, s'est révélé être un formidable outil politique dénonçant le totalitarisme du régime et sa corruption, encourageant le peuple à ne faire qu'un et à se soulever pour la liberté".

"La France doit désormais assumer son rôle de garante des valeurs démocratiques et abolitionnistes de la peine de mort. Le respect des droits humains ne peut être une valeur négociable", opinent-ils également.

Selon des experts de l'ONU, le rappeur avait initialement été condamné à six ans de prison, avant que la justice n'ordonne sa libération. Mais il avait été de nouveau arrêté en novembre.

Plusieurs centaines de personnes incluant des membres des forces de l'ordre ont été tuées et des milliers arrêtées au cours des manifestations qui se sont déroulées en octobre et novembre 2022 en Iran, avant de refluer.

Neuf personnes ont été exécutées en lien avec ce soulèvement, selon des ONG. Six autres sont menacées d'exécution imminente, selon l'ONG Iran Human Rights.

 


Explosion de gaz dans un restaurant de Beyrouth, huit morts

Des images diffusées sur les réseaux sociaux le 30 avril montrent un incendie provoqué par l'explosion d'une bonbonne de gaz dans un restaurant de Beyrouth (Photo, AFP).
Des images diffusées sur les réseaux sociaux le 30 avril montrent un incendie provoqué par l'explosion d'une bonbonne de gaz dans un restaurant de Beyrouth (Photo, AFP).
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  • L'économie du Liban est en chute libre depuis fin 2019, aggravant un problème de contrôle public de longue date
  • Le ministre de l'Intérieur, Bassam Mawlawi, qui s'est rendu sur les lieux, a déclaré à la presse qu'au moins huit personnes avaient été tuées

BEYROUTH: Un incendie provoqué par l'explosion d'une bonbonne de gaz a tué mardi au moins huit personnes dans un restaurant de Beyrouth, ont rapporté le ministre de l'Intérieur et les pompiers.

"Huit victimes sont décédées par asphyxie à l'intérieur du restaurant", a indiqué l'agence de presse officielle (Ani) citant les pompiers de Beyrouth.

Les pompiers ont éteint un incendie dans un petit restaurant de la capitale après qu'"une fuite de gaz a provoqué une explosion dans le restaurant", a ajouté l'Ani, citant la même source.

Non respect des normes 

Le ministre de l'Intérieur, Bassam Mawlawi, qui s'est rendu sur les lieux, a déclaré à la presse qu'au moins huit personnes avaient été tuées "par asphyxie".

L'accident "montre que cet endroit ne respectait pas les normes de sécurité publique", a déploré le député Ibrahim Mneimneh, qui s'est également rendu sur les lieux.

L'économie du Liban est en chute libre depuis fin 2019, aggravant un problème de contrôle public de longue date dans différents secteurs.


L’Unicef exige un cessez-le-feu immédiat dans le sud du Liban et la protection des enfants

Une étudiante libanaise, portant un foulard palestinien, ou keffieh, manifeste à l’Université américaine de Beyrouth en signe de solidarité avec Gaza, à Beyrouth, le mardi 30 avril 2024. (Photo AP)
Une étudiante libanaise, portant un foulard palestinien, ou keffieh, manifeste à l’Université américaine de Beyrouth en signe de solidarité avec Gaza, à Beyrouth, le mardi 30 avril 2024. (Photo AP)
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  • L’Unicef indique que «l’intensification du conflit armé a endommagé les infrastructures et les installations civiles, causant de graves dommages aux services de première nécessité
  • Mardi, les hostilités persistaient par intermittence sur le front sud entre le Hezbollah et l’armée israélienne

BEYROUTH: L’Unité libanaise de gestion des risques de catastrophe a annoncé que le bilan total des victimes des attaques israéliennes depuis le 8 octobre a atteint 438 personnes. 

Selon le dernier bilan publié par le ministère libanais de la Santé, on compte huit enfants parmi les morts et 75 enfants figurent parmi les 1 359 personnes blessées depuis l’escalade des hostilités. 

Le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef) se dit préoccupé par «les hostilités qui se poursuivent dans le sud du Liban et qui ont des répercussions dévastatrices sur la population, forçant environ 90 000 personnes, dont 30 000 enfants, à quitter leurs foyers».