Islam en France: les instances représentatives en pleine restructuration

Une photo prise le 22 mars 2019 montre l'entrée de la Grande Mosquée de Paris (Grande Mosquée de Paris) à Paris. (AFP)
Une photo prise le 22 mars 2019 montre l'entrée de la Grande Mosquée de Paris (Grande Mosquée de Paris) à Paris. (AFP)
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Publié le Dimanche 09 janvier 2022

Islam en France: les instances représentatives en pleine restructuration

  • Le président du CFCM Mohammed Moussaoui a reconnu vendredi que son institution n'était «plus viable» et appelé à l'autodissoudre
  • «Comment les 100 personnes du Forif vont-elles être plus efficaces ?», s'interroge Franck Frégosi. Et «quelle sera leur marge de manoeuvre ?»

PARIS: 2022, année d'une nouvelle structuration de l'islam en France ? L'exécutif a confirmé cette semaine la création d'un "Forum de l'islam de France" destiné à remplacer le Conseil français du culte musulman (CFCM), une instance dont le bilan est critiqué, quelque 20 ans après sa création.

Le président du CFCM Mohammed Moussaoui a reconnu vendredi que son institution n'était "plus viable" et appelé à l'autodissoudre.

Il s'est dit favorable à l'initiative voulue par le gouvernement de tenir, dans les prochaines semaines, un Forum de l'islam de France (Forif), qui verra quelque "80 à 100 personnes" --responsables cultuels, imams, membres de la société civile-- se réunir à Paris pour discuter de quatre thèmes: la formation des cadres religieux, le droit des cultes, les aumôneries et les actes anti-musulmans.

Quatre groupes de travail ont déjà commencé à se réunir en visioconférence, a indiqué à l'AFP le ministère de l'Intérieur. Et le Forif a vocation à se réunir "annuellement", a-t-on ajouté.

Cette initiative, confirmée par le président Emmanuel Macron mercredi lors d'une rencontre avec les autorités religieuses, vise à obtenir une forme de représentation de l'islam basée sur les acteurs locaux, dans la continuité d'"assises départementales" tenues ces dernières années auprès des préfets.

Et surtout de mettre fin aux blocages inhérents au CFCM.

Interlocuteur historique des pouvoirs publiques, né en 2003, le CFCM était composé d'une petite dizaine de fédérations de mosquées, dont la plupart sont restées proches des pays d'origine des communautés (Maroc, Algérie, Turquie).

«Coquille vide»
L'institution a été marquée par d'incessants différends: rivalités parfois "maroco-marocaines" (deux fédérations rivales sont proches du Maroc), mais surtout algéro-marocaines alors que les tensions se sont exacerbées, ces derniers temps, entre les deux frères ennemis du Maghreb.

Le CFCM a également été plongé dans la tourmente en 2021, avec la demande du gouvernement d'adopter une "Charte des principes pour l'islam de France", qui proscrit "l'ingérence" d'Etats étrangers et réaffirme la "compatibilité" de l'islam avec la République française.

Trois fédérations (dont les deux turques) ont refusé de signer le texte en janvier 2021, provoquant un premier schisme au sein du CFCM. Quatre autres fédérations, dont la Mosquée de Paris, ont claqué la porte du bureau exécutif et créé leur propre "coordination".

Les trois fédérations réticentes ont fini par signer le texte fin décembre. Mais entre temps, le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin déclarait l'institution "morte".

"Le CFCM est une coquille vide. Les fédérations le constituant n'avaient pas de projet commun", relève Tareq Oubrou, imam de Bordeaux (sud-ouest).

"Le CFCM a contribué à symboliser l'islam de France dans le cadre de la République", souligne Franck Frégosi, directeur de recherche au CNRS, à l'AFP. "Mais ses réalisations sont maigres sur le terrain". 

La tentative de mettre sur pied un financement du culte via les activités économiques quotidiennes (marché du halal, collecte des dons, organisation du pèlerinage à La Mecque), un temps évoquée en partenariat avec l'Association musulmane pour l'Islam de France (Amif) de l'essayiste Hakim El Karoui, n'a pas abouti.

Marge de manoeuvre? 
Sur le plan théologique ou de la déconstruction du discours radical, aucune publication majeure n'est à mettre au crédit du CFCM. 

A sa décharge, il "n'avait pas un budget propre lui permettant peut-être de lancer des grandes opérations", dit M. Frégosi.

Le CFCM souffrait aussi d'un manque de représentativité: un peu moins de 50% des quelque 2 500 lieux de culte y adhérent.

M. Moussaoui, dont le mandat s'achève le 19 janvier, met en avant, lui, son action dans la gestion de la crise sanitaire: fermeture des mosquées en mars 2020 puis mise en place de protocoles, actions auprès des mairies pour créer des lieux de sépultures, incitations à la vaccination, etc.

Il admet un "chantier inachevé", la mise en place d'un Conseil national des imams (CNI), pourtant réclamé par le chef de l'Etat.

Là encore, cette question a fait l'objet d'un différend: un CNI concurrent, a été installé fin novembre par les quatre fédérations dissidentes.

"Comment les 100 personnes du Forif vont-elles être plus efficaces ?", s'interroge Franck Frégosi. Et "quelle sera leur marge de manoeuvre ?"


Légion d'honneur, Sarkozy « prend acte », rappelant que la CEDH doit encore examiner son recours

La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
La Cour d'appel a confirmé l'année dernière la condamnation de l'ancien président français Nicolas Sarkozy pour avoir tenté illégalement d'obtenir des faveurs d'un juge et lui a ordonné de porter un bracelet électronique à la cheville au lieu de purger une peine d'un an de prison. (Photo d'archive AFP)
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  • L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 
  • Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain.

PARIS : L'ancien président Nicolas Sarkozy a « pris acte » dimanche de son exclusion de la Légion d'honneur et rappelle que la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) doit encore se prononcer sur son recours dans l'affaire des écoutes, a indiqué son avocat Patrice Spinosi dans une déclaration transmise à l'AFP.

« Nicolas Sarkozy prend acte de la décision prise par le grand chancelier. Il n’a jamais fait de cette question une affaire personnelle », a affirmé Patrice Spinosi, soulignant que si l'ancien chef de l'État « a fait valoir des arguments juridiques, c’était au nom de la fonction même de président de la République ».

L'ex-président (2007-2012) a rappelé que son recours devant la CEDH « est toujours pendant ». Il l'avait déposé après sa condamnation devenue définitive en décembre, à un an de prison ferme pour corruption dans l'affaire des écoutes. 

« La condamnation de la France (par la CEDH) impliquera la révision de la condamnation pénale prononcée à l'encontre de Nicolas Sarkozy, en même temps que l’exclusion de l’ordre de la Légion d’Honneur ; l’une n’étant que la conséquence de l’autre », a assuré Patrice Spinosi.

Nicolas Sarkozy, déjà exclu de l'ordre national du Mérite, est ainsi devenu le deuxième chef de l'État français privé de cette distinction, après le maréchal Pétain, à qui la Légion d'honneur avait été retirée en 1945 pour haute trahison et intelligence avec l'ennemi.

« Ce lien avec le maréchal Pétain est indigne », a déclaré la porte-parole du gouvernement Sophie Primas (LR), prenant « acte » elle aussi de cette décision « automatique qui fait partie du code de la Légion d’Honneur ».

« Le président Sarkozy a été là pour la France à des moments extrêmement compliqués », a-t-elle déclaré, se disant « un peu réservée non pas sur la règle, mais sur ce qu’elle entraîne comme comparaison ».

« C'est une règle, mais c'est aussi une honte », a déploré sur franceinfo Othman Nasrou, le nouveau secrétaire général de LR et proche de Bruno Retailleau, apportant son « soutien et son respect » à l'ex-président.

À gauche, le député écologiste Benjamin Lucas s'est félicité de la décision, appelant sur X à ce que « la République prive de ses privilèges et de son influence institutionnelle celui qui a déshonoré sa fonction et trahi le serment sacré qui lie le peuple à ses élus, celui de la probité ».


Echanges de frappes entre Israël et l'Iran : la France renforce la vigilance sur son territoire

 Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau  (Photo AFP)
Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau (Photo AFP)
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  • « Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme
  • Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

PARIS : Le ministre français de l'Intérieur Bruno Retailleau a appelé les préfets à renforcer la vigilance sur le territoire national. Il a notamment demandé de cibler les lieux de culte, les rassemblements festifs et les intérêts israéliens et américains. Cette demande a été transmise par télégramme. Elle a été envoyée vendredi. Cela fait suite à l'attaque israélienne en Iran.

« Il convient de porter une vigilance particulière à l'ensemble des sites qui pourraient être ciblés par des actes de terrorisme ou de malveillance de la part d'une puissance étrangère », a-t-il indiqué dans un télégramme consulté par l'AFP, alors qu'Israël et l'Iran poursuivaient leurs échanges de frappes meurtrières.

Les hostilités ont été déclenchées par une attaque israélienne massive contre des sites militaires et nucléaires iraniens, à laquelle Téhéran riposte avec des missiles balistiques. 

Dans ce contexte, M. Retailleau demande aux préfets de porter « une attention particulière » à la sécurité des lieux de culte, des établissements scolaires, des établissements publics et institutionnels, ainsi que des sites à forte affluence, notamment au moment des entrées et des sorties, et ce, incluant les « rassemblements festifs, culturels ou cultuels ».

Ces mesures de protection renforcée s'appliquent également aux « intérêts israéliens et américains ainsi qu'aux établissements de la communauté juive ».

Le ministre a appelé à la mobilisation des services de renseignements, des forces de sécurité intérieure, des polices municipales et des élus locaux, ainsi que du dispositif Sentinelle.

Vendredi soir, le président Emmanuel Macron a annoncé un « renforcement » du dispositif Sentinelle, qui déploie des militaires en France, « pour faire face à toutes les potentielles menaces sur le territoire national ».


Selon ManPowerGroup, l'IA pourrait réduire l'importance des « compétences » dans le recrutement

Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
Des visiteurs font le tour des stands du salon VivaTech dédié aux start-ups technologiques et à l'innovation, à Paris Expo Porte de Versailles, à Paris, le 12 juin 2025. (Photo de Thomas SAMSON / AFP)
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  • L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences ».
  • « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

PARIS : L'irruption de l'intelligence artificielle (IA) bouleverse le marché du travail ainsi que les modes de recrutement et pourrait amener les employeurs à privilégier le « potentiel » des candidats plutôt que leurs « compétences », selon un dirigeant de ManPowerGroup.

En effet, « les compétences pourraient s'avérer obsolètes dans six mois », explique Tomas Chamorro-Premuzic, directeur de l'innovation du géant américain du travail temporaire, rencontré par l'AFP au salon Vivatech, à Paris, qui ferme ses portes samedi.  Selon lui, « il vaut mieux savoir que vous travaillez dur, que vous êtes curieux, que vous avez de bonnes aptitudes relationnelles et ça, l'IA peut vous aider à l'évaluer ».

Selon l'Organisation internationale du travail (OIT), « un travailleur sur quatre dans le monde exerce une profession plus ou moins exposée à l'IA générative, mais la plupart des emplois seront transformés au lieu d'être supprimés, car une intervention humaine reste indispensable ».

Cependant, les tâches informatiques (utilisation d'Internet, messagerie, etc.) pouvant être accomplies de manière autonome par des agents d'IA connaissent une « rapide expansion ». 

Dans ce contexte, les employeurs pourraient rechercher de plus en plus de salariés dotés de compétences hors de portée de l'IA, telles que le jugement éthique, le service client, le management ou la stratégie, comme l'indique une enquête de ManpowerGroup menée auprès de plus de 40 000 employeurs dans 42 pays et publiée cette semaine.

M. Chamorro-Premuzic déplore toutefois que ces compétences ne soient pas encore davantage mises en avant dans la formation. « Pour chaque dollar que vous investissez dans la technologie, vous devez investir huit ou neuf dollars dans les ressources humaines, la transformation culturelle, la gestion du changement », dit-il.

Les craintes d'un chômage de masse provoqué par l'IA restent par ailleurs exagérées à ce stade, estime le dirigeant, malgré certaines prédictions alarmistes.

D'après Dario Amodei, patron de la société d'intelligence artificielle Anthropic, cette technologie pourrait faire disparaître la moitié des emplois de bureau les moins qualifiés d'ici cinq ans. 

« Si l'histoire nous enseigne une chose, c'est que la plupart des prévisions sont fausses », répond M. Chamorro-Premuzic.

Concernant le recrutement, activité principale de ManPowerGroup, le dirigeant ajoute que « les agents d'intelligence artificielle ne deviendront certainement pas le cœur de notre métier dans un futur proche ». Il constate également que l'IA est utilisée par les demandeurs d'emploi.

« Des candidats sont capables d'envoyer 500 candidatures parfaites en une journée, de passer des entretiens avec leurs bots et de déjouer certains éléments des évaluations », énumère-t-il.