L'UE veut poursuivre ses missions militaires au Mali, mais «pas à n'importe quel prix»

Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, répond aux questions des journalistes lors d'une réunion du Conseil des affaires étrangères au siège de l'UE à Bruxelles, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, répond aux questions des journalistes lors d'une réunion du Conseil des affaires étrangères au siège de l'UE à Bruxelles, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
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Publié le Jeudi 13 janvier 2022

L'UE veut poursuivre ses missions militaires au Mali, mais «pas à n'importe quel prix»

Le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, répond aux questions des journalistes lors d'une réunion du Conseil des affaires étrangères au siège de l'UE à Bruxelles, le 13 décembre 2021. (Photo, AFP)
  • «Malgré tous les avertissements aux autorités maliennes, nous ne voyons aucun signe de progrès», a déploré le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell
  • «Il est absolument essentiel que le gouvernement malien présente un calendrier acceptable du point de vue des élections», a déclaré le chef de l'ONU

BREST/ NATIONS UNIES: L'Union européenne souhaite poursuivre ses missions militaires de formation au Mali mais « pas à n'importe quel prix », a averti jeudi le chef de la diplomatie européenne Josep Borrell, alors que la junte malienne refuse d'organiser rapidement des élections pour rendre le pouvoir aux civils.  

« Nous voulons rester engagés au Mali, nous voulons rester engagés au Sahel, mais ça ne doit pas se faire à quel n'importe quel prix », a-t-il prévenu lors d'une conférence de presse en marge d'une réunion informelle des ministres de la Défense de l'UE à Brest (ouest de la France), la France assurant la présidence semestrielle tournante de l'Union européenne.  

« Pour l'instant nos missions de formation et de conseil aux forces armées et de sécurité intérieures maliennes vont continuer » par le biais de l'EUTM, « mais on a déjà suspendu l'aide budgétaire aux autorités maliennes à partir du moment où on a su que les élections n'allaient pas avoir lieu », a-t-il rappelé.  

« Malgré tous les avertissements aux autorités maliennes, nous ne voyons aucun signe de progrès », a-t-il déploré.  

« Nous allons suivre de près la situation et prendre des mesures (...) dans la même ligne » que les lourdes sanctions par les dirigeants ouest-africains réunis au sein de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a-t-il commenté, confirmant la préparation de sanctions européennes contre la junte malienne annoncée mercredi par le ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian.  

Le chef de l'ONU demande au gouvernement malien un «calendrier électoral acceptable»

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a réclamé jeudi au gouvernement malien « un calendrier électoral acceptable », à la veille de manifestations dans le pays, à l'appel de la junte au pouvoir, pour dénoncer les sanctions récentes prises par la Cédéao. 

« Il est absolument essentiel que le gouvernement malien présente un calendrier acceptable du point de vue des élections », a déclaré le chef de l'ONU lors d'une rencontre avec des journalistes. Il a précisé espérer « entrer en contact rapidement avec le gouvernement malien ». 

Si « un calendrier acceptable est présenté et si le gouvernement prend des mesures dans cette direction, il y aura une levée progressive des sanctions » -- fermeture des frontières, mesures économiques et financières -- par la Communauté économique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao), a rappelé Antonio Guterres. 

« Je travaille avec la Cédéao et l'Union africaine pour créer les conditions qui puissent permettre au gouvernement du Mali d'adopter une position raisonnable et acceptable pour accélérer une transition qui dure déjà depuis longtemps », a-t-il aussi dit. Cela pourrait « permettre un rétablissement de la normalité dans les relations entre cet Etat et la communauté internationale, la Cédéao en particulier », a-t-il estimé. 

Mi-décembre, l'Union européenne a suspendu temporairement sa mission de formation des forces armées centrafricaines, en raison du « contrôle exercé par les mercenaires de la société Wagner », que les Européens accusent désormais de s'implanter au Mali pour soutenir la junte.  

« Nous discutons (...) dans quelles conditions cette lutte contre le terrorisme pour laquelle nous sommes mobilisés peut se poursuivre », a renchéri la ministre française des Armées, Florence Parly, présente aux côtés de M. Borrell, en estimant « urgent que la transition politique soit menée à son terme ».  

La France, militairement présente au Mali depuis neuf ans pour lutter contre les djihadistes, est en train d'y réduire ses effectifs tout en maintenant des troupes dans le nord du Mali à Gao, Ménaka et Gossi.  

Toutefois, « cette coopération n'a de sens que si elle s'intègre dans un cadre plus global (...) avec des réformes de fond notamment sur la gouvernance. Ce travail-là n'est possible qu'avec des autorités légitimes », a ajouté Mme Parly en évitant de se prononcer sur le maintien ou non des forces françaises.   

Interrogée sur le fait que Bamako avait dénoncé la veille une « violation de l'espace aérien du Mali » par un avion militaire français, Mme Parly a affirmé que la fermeture de l'espace aérien décidée par la Cédéao « ne concern(ait) pas les vols militaires » aux yeux de la France. 


Tanzanie : la présidente investie malgré les violences électorales

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan. (AFP)
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  • Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021
  • Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin

NAIROBIE: Samia Suluhu Hassan a été investie lundi présidente de la Tanzanie, où l'internet reste coupé depuis les manifestations réprimées dans le sang contre son élection, l'opposition évoquant au moins 800 morts.

Mme Hassan, 65 ans, avait été promue à la tête de la Tanzanie à la mort de John Magufuli en 2021. Saluée au début pour avoir assoupli les restrictions instaurées par son prédécesseur, elle a été accusée ensuite de réprimer ses détracteurs, notamment en amont du scrutin.

"Moi, Samia Suluhu Hassan, jure que je remplirai mes fonctions de présidente de la République (...) avec diligence et un cœur sincère", a-t-elle affirmé. La cheffe de l'Etat, qui portait un voile rouge et un long vêtement noir, a également prôné dans un discours "l'unité et la solidarité".

Lors de son investiture, elle a regretté "les actes de violence qui ont entraîné des pertes de vies humaines", reconnaissant pour la première fois des décès, sans donner de bilan.

La cérémonie, qui n'était pas ouverte au public, contrairement aux précédentes, s'est tenue dans un espace ressemblant à un terrain de parade militaire de la capitale Dodoma, où quelques podiums dressés ne réussissaient pas à masquer un grand vide.

Des chanteurs et chanteuses se sont succédé, avant l'arrivée de la présidente, pour chanter les louanges de "Mama Samia", son surnom parmi ses soutiens, devant un parterre de dignitaires et de militaires. Parmi les invités étaient notamment présents les présidents de la Zambie, de la Somalie et du Burundi.

Mme Hassan a, selon la commission électorale, obtenu 97,66% des suffrages. L'élection a été qualifiée de "parodie de démocratie" par l'opposition, les deux principaux opposants ayant été soit emprisonné, soit disqualifié.

L'opposition a également dénoncé d'importantes tricheries le jour de l'élection, mais aussi sur le taux de participation de 87% selon la commission électorale.

Le scrutin a surtout été marqué par un fort niveau de violence, des manifestations anti-régime ayant été réprimées dans le sang et la Tanzanie mise sous cloche: l'internet reste coupé depuis mercredi, ce qui ralentit considérablement la sortie d'informations.

Cadavres 

De premières photos et vidéos de cadavres, parfois empilés les uns sur les autres, mais aussi d'hommes en uniforme usant de leur arme à feu, commencent à apparaître sur les réseaux sociaux.

Le service de fact-checking de l'AFP a pu vérifier que certaines d'entre elles n'avaient jamais été postées auparavant. Plusieurs éléments montrent qu'elles ont été prises en Tanzanie.

Un porte-parole du principal parti d'opposition, Chadema, a estimé vendredi qu'au moins 700 manifestants hostiles au régime ont été tués en Tanzanie en trois jours. Un chiffre estimé crédible par une source sécurité, qui a alors mentionné "des centaines de morts".

Le samedi, ce porte-parole, John Kitoka, a ensuite fait état d'au moins 800 tués.

Des informations crédibles corroborent l'idée que des centaines, et peut-être même des milliers de personnes ont été tuées lors des violences électorales, a de son côté estimé une source diplomatique interrogée par l'AFP.

D'après des "rapports préoccupants", la police utilise également le blocage d'internet pour "traquer les membres de l'opposition et les manifestants qui pourraient avoir des vidéos" de ses atrocités, a poursuivi cette source.

La Mission d'observation électorale de la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), dont la Tanzanie fait partie, a pointé lundi dans un rapport préliminaire "un faible nombre d'électeurs dans tous les bureaux de vote" où ses observateurs se trouvaient, avec parfois "plus de policiers que de votants", des irrégularités et des incidents violents "au cours desquels des membres de la police ont fait usage d'armes à feu".

Les écoles restent fermées lundi et les transports publics à l'arrêt. La capitale économique Dar es Salaam et les principales villes du pays ont retrouvé un peu de calme depuis le week-end.

Dimanche, le pape Léon XIV a indiqué prier "pour la Tanzanie" et évoqué les "nombreuses victimes" des affrontements ayant éclaté après les élections.

L'élection présidentielle était couplée avec les législatives.

Le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réclamé vendredi une "enquête minutieuse et impartiale sur les accusations d'utilisation excessive de la force".


Islamabad assure que le cessez-le-feu avec l'Afghanistan «tient»

Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères. (AFP)
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  • "Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu"
  • Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite

ISLAMABAD: Le cessez-le-feu entre Islamabad et Kaboul, prolongé jeudi à l'issue d'un cycle de négociations en Turquie "tient", a affirmé le ministère pakistanais des Affaires étrangères.

"Le cessez-le-feu tient mais toute provocation entraînera une riposte adaptée à la nature de la violation du cessez-le-feu", a assuré Tahir Andrabi, porte-parole de ce ministère. Un nouveau cycle de discussions est prévu à Istanbul le 6 novembre pour tenter d'instaurer une trêve durable à la frontière entre les deux pays après des affrontements d'une ampleur inédite.

 


Soudan: le Conseil de sécurité de l'ONU condamne «l'assaut» des paramilitaires sur El-Facher

Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils". (AFP)
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  • Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher"
  • El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir"

NATIONS-UNIES: Le Conseil de sécurité de l'ONU a condamné jeudi "l'assaut" des paramilitaires soudanais sur la ville d'El-Facher, au Darfour, et ses "impacts dévastateurs sur les civils".

Dans cette déclaration, le Conseil exprime sa "profonde inquiétude concernant l'escalade de la violence dans et autour d'El-Facher", dont les paramilitaires des Forces de soutien rapide viennent de prendre le contrôle, et condamne les "atrocités qu'auraient commises les FSR contre la population civile, y compris exécutions sommaires et détentions arbitraires".

El-Facher, dernière grande ville du Darfour qui échappait au contrôle des Forces de soutien rapide (FSR), "déjà le théâtre de niveaux catastrophiques de souffrance humaine, a plongé dans un enfer encore plus noir, avec des informations crédibles d'exécutions de masse" après l'entrée des paramilitaires, a dénoncé devant le Conseil de sécurité le chef des opérations humanitaires de l'ONU, Tom Fletcher.

"Nous ne pouvons pas entendre les cris, mais pendant que nous sommes assis ici, l'horreur se poursuit. Des femmes et des filles sont violées, des gens mutilés et tués, en toute impunité", a-t-il ajouté.

Mais "la tuerie n'est pas limitée au Darfour", a-t-il alerté, s'inquiétant notamment de la situation dans le Kordofan voisin.

"Des combats féroces au Kordofan-Nord provoquent de nouvelles vagues de déplacement et menacent la réponse humanitaire, y compris autour de la capitale El-Obeid".

Des informations font état "d'atrocités à large échelle commises par les Forces de soutien rapide à Bara, dans le Kordofan-Nord, après la récente prise de la ville", a également dénoncé Martha Ama Akyaa Pobee, sous-secrétaire générale de l'ONU chargée de l'Afrique.

"Cela inclut des représailles contre des soi-disant collaborateurs, souvent ethniquement motivées", a-t-elle déploré.

"Au moins 50 civils ont été tués ces derniers jours à Bara, à cause des combats et par des exécutions sommaires. Cela inclut l'exécution sommaire de cinq bénévoles du Croissant rouge", a-t-elle indiqué.

Le Kordofan "est probablement le prochain théâtre d'opérations militaires pour les belligérants", a-t-elle mis en garde.

"Des attaques de drones de la part des deux parties touchent de nouveaux territoires et de nouvelles cibles. Cela inclut le Nil Bleu, Khartoum, Sennar, le Kordofan-Sud et le Darfour-Ouest, ce qui laisse penser que la portée territoriale du conflit s'élargit", a ajouté la responsable onusienne.

Décrivant la situation "chaotique" à El-Facher où "personne n'est à l'abri", elle a d'autre part noté qu'il était difficile d'y estimer le nombre de victimes.

La guerre au Soudan a fait des dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué la pire crise humanitaire actuelle, selon l'ONU.

Elle a été déclenchée en avril 2023 par une lutte de pouvoir entre deux anciens alliés: le général Abdel Fattah al-Burhane, commandant de l'armée et dirigeant de facto du Soudan depuis le coup d'Etat de 2021, et le général Mohamed Daglo, à la tête des FSR.