L'immigration, «ciment» du populisme, juge l'historien Hervé Le Bras

Des véhicules bloquent la voie d'accès à Iquique, au Chili, lors d'une grève régionale appelée par différentes organisations contre l'immigration clandestine, le 31 janvier 2022. (Diego Reyes/AFP)
Des véhicules bloquent la voie d'accès à Iquique, au Chili, lors d'une grève régionale appelée par différentes organisations contre l'immigration clandestine, le 31 janvier 2022. (Diego Reyes/AFP)
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Publié le Mardi 01 février 2022

L'immigration, «ciment» du populisme, juge l'historien Hervé Le Bras

  • Là où le thème de l'immigration charrie une vision «passéiste», le grand remplacement offre une projection vers l'avenir
  • L’implantation des immigrés se situe dans les grandes agglomérations, viviers d'emplois, et les votes populistes émanent des zones rurales

PARIS : Forte immigration rime-t-elle avec montée du vote populiste ? Pas si simple, explique l'historien Hervé Le Bras, qui estime dans un entretien que l'immigration joue, en revanche, un rôle de "ciment" idéologique pour l'extrême droite en France comme en Europe.

Si ces mouvements s'appuient sur des diatribes anti-immigration, celles-ci ne trouvent pas ou peu d'écho dans les zones où sont installés les étrangers visés, démontre l'historien et démographe dans "Le grand enfumage" (éditions de l'aube), à paraître jeudi à deux mois du scrutin présidentiel, un livre sous forme d'étude comparative des ressorts populistes en France et chez six voisins: Italie, Espagne, Allemagne, Autriche, Grande-Bretagne, Suisse.

"L'immigration est présentée comme une gêne dans la vie quotidienne", "or c'est là où il n'y en a pas qu'on les juge gênants", résume le directeur d'études à l'EHESS (Ecole des hautes études en sciences sociales), cartes et données à l'appui.

En France, seuls 4% d'immigrés vivaient en 2017 dans l'Aisne, département où Marine Le Pen avait glané 30,7% des voix à la dernière présidentielle, tandis que la présidente du RN avait récolté 13% des suffrages en Seine-Saint-Denis, où vivent 30% d'étrangers.

Jusqu'à l'année dernière, rappelle Hervé Le Bras, Marine Le Pen avait l'habitude de faire sa rentrée à Brachay, un petit village de l'Aube où elle avait récolté 90% des suffrages en 2017. Et où "il n'y a pas un immigré, dans les communes autour non plus", insiste-t-il.

- «Clé universelle» -

"Quand vous cartographiez commune par commune, vous voyez que les deux cartes sont presque l'inverse l'une de l'autre": une implantation des immigrés dans les grandes agglomérations, viviers d'emplois, et des votes populistes émanant des zones rurales.

Une logique qui vaut aussi pour le FPÖ autrichien, pour Vox en Espagne, l'UDC en Suisse, la Ligue du Nord en Italie, l'AfD ou Pegida en Allemagne, Boris Johnson et Nigel Farage en Grande-Bretagne...

Car s'il ne fait pas recette partout, le thème de l'immigration est devenu un "leitmotiv" des partis populistes, au sein desquels il est d'abord un ressort "opportuniste" avant de devenir "de plus en plus central et finalement définir l'identité de ces mouvements", décrit l'historien, 78 ans.

"Sans l'invocation de l'immigration, l'ensemble des mesures proposées par les partis populistes n'auraient pas de cohérence", estime-t-il.

"Dès qu'on sort de l'anti-immigration, les thèmes sont très différents, certains sont libéraux, d'autres étatiques... L'immigration tient tout parce qu'on peut tout rapporter à l'immigration. Dans les discours d'extrême droite, on lui impute la vie chère, le chômage, la criminalité... Vous prenez n'importe quel sujet et vous dites +C'est les immigrés!+."

Par exemple, "comment (le candidat Eric) Zemmour va-t-il équilibrer toutes ses promesses économiques ? Il répond qu'il va récupérer les milliards d'euros que coûtent les immigrés", illustre Hervé Le Bras. "C'est le ciment de la théorie, une clé d'explication universelle."

Mais pourquoi est-ce l'immigration qui joue ce rôle de catalyseur ?

- Totalitarisme -

Pour qu'il y ait populisme, "il faut qu'il y ait un peuple, homogène", souvent fantasmé, répond l'auteur. "Les mouvements d'extrême droite le définissent par opposition: le peuple, c'est ce qui n'est pas immigré".

Reste que, s'ils veulent accéder au pouvoir, ces mouvements doivent bien souvent adoucir leurs positions, au risque de se faire "dépasser sur leur droite".

C'est ce qui s'est passé avec Matteo Salvini et le mouvement cinq étoiles (M5S) en Italie, Pegida doublé par l'AfD en Allemagne et ce qui se profile en France, avec "la stratégie de dédiabolisation de Marine Le Pen qui crée un espace identitaire pour Eric Zemmour", observe-t-il.

Et à chaque dédoublement, "le thème de l'immigration devient plus fort".

"L'immigration joue pour le populisme le rôle de la race pour le nazisme et de la classe pour le communisme", juge Hervé Le Bras: un socle idéologique qui se cristallise, désormais, sur la notion controversée de "grand remplacement" (de la population européenne par une population immigrée non européenne).

Au risque de faire basculer le populisme vers le totalitarisme, assume Hervé Le Bras.

Car là où le thème de l'immigration charrie une vision "passéiste", le grand remplacement offre une projection vers l'avenir: "Les régimes stalinien et hitlérien, c'était l'avenir, l'homme du futur, avec Hitler qui créait des camps (avec) des enfants blonds aux yeux bleus pour reconstruire la race aryenne", poursuit-il.

"C'est en ce sens que c'est une clé de voûte. Parce que le durcissement est de plus en plus net".


En ce Noël, unissons-nous pour souhaiter la paix dans toute la région

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  • Noël au Moyen-Orient incarne un message puissant d’harmonie interconfessionnelle, de résilience et de respect mutuel
  • De Bethléem à Riyad, les célébrations deviennent un acte d’espoir partagé et un appel sincère à la paix régionale

RIYAD : Fidèle à une tradition initiée en décembre 2022, Arab News souhaite un joyeux Noël à ses lecteurs chrétiens et à tous ceux qui célèbrent cette fête. Cette édition spéciale met cette année en lumière Noël à travers le Moyen-Orient, en soulignant l’harmonie interconfessionnelle, la résilience et l’intégration culturelle. Le tout est porté par un message particulier, sincère et plein d’espoir : voir la paix se diffuser dans toute la région en 2026.

En tête de cette couverture figure une tribune exclusive du grand érudit Dr Mohammad bin Abdulkarim Al-Issa, secrétaire général de la Ligue islamique mondiale et président de l’Organisation des savants musulmans. Son message rappelle un principe essentiel : « Il n’existe aucun texte de la charia interdisant de féliciter les non-musulmans à l’occasion de leurs fêtes religieuses, y compris Noël. » Il présente cette bienveillance non comme un affaiblissement de la foi, mais comme l’expression de sa force — une force qui affirme la dignité humaine et favorise l’harmonie sociale si nécessaire aujourd’hui.

Ce même esprit de solidarité face à la souffrance résonne depuis Bethléem, où le pasteur palestinien, le révérend Dr Munther Isaac, explique que le christianisme palestinien est indissociable de l’identité nationale. En réponse à la dévastation de Gaza, sa communauté a érigé une crèche faite de gravats, l’enfant Jésus enveloppé dans un keffieh. « C’était un message de foi », affirme-t-il. « Le Christ est solidaire de ceux qui souffrent… parce qu’il est né dans la souffrance. »

De cette profondeur naissent aussi des récits de renouveau. À Damas, les illuminations festives réapparaissent alors que des Syriens de toutes confessions s’accrochent à une paix fragile. Au Liban, les célébrations percent la morosité politique par des instants de joie. En Jordanie, les espaces publics s’illuminent de sapins et des hymnes de Noël de Fairouz, tandis qu’aux Émirats arabes unis, la diaspora multiculturelle s’anime dans une effervescence festive et unitaire.

La profondeur historique et intellectuelle de l’héritage chrétien de la région est mise en lumière par le Dr Abdellatif El-Menawy, qui rappelle le rôle indispensable de l’Égypte dans la transformation du christianisme, passé d’un message spirituel à une véritable civilisation. Cet héritage ancien trouve aujourd’hui une expression moderne et dynamique.

En Arabie saoudite, la période des fêtes est reconnue à travers une hospitalité innovante, où des chefs réinventent les menus de Noël en y intégrant des saveurs locales et une identité culinaire créative.

Cette édition spéciale offre bien plus qu’une simple atmosphère festive. Elle dépeint un Moyen-Orient où les différentes confessions approfondissent leurs propres racines en respectant celles des autres, où les célébrations sont tissées de résistance historique, et où le message de Noël — espoir, paix et humanité partagée — résonne avec confiance et optimisme.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


Le prince héritier parraine le lancement d’un centre de calligraphie arabe à Médine

Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Le ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdullah ben Farhane, prend la parole lors de l'inauguration du Centre mondial pour la calligraphie arabe Prince Mohammed ben Salmane. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, placé sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes lundi à Médine. (Fourni)
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  • Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz

RIYAD : Un nouveau centre dédié à la calligraphie arabe, sous le patronage du prince héritier Mohammed ben Salmane, a officiellement ouvert ses portes à Médine lundi.

Le Centre mondial Prince Mohammed ben Salmane pour la calligraphie arabe a été inauguré par le prince Salman ben Sultan ben Abdulaziz, gouverneur de la région de Médine.

Il était accompagné du ministre de la Culture, le prince Badr ben Abdallah ben Farhane, qui a visité les espaces d’exposition du nouveau centre et assisté à des présentations sur la programmation culturelle et les réalisations du centre.

Ils ont également découvert des collections mettant en valeur l’importance artistique et historique de la calligraphie arabe.

Lors de l’inauguration, le prince Badr a déclaré : « Depuis cette terre d’érudition et de savoir, nous lançons fièrement une plateforme mondiale dédiée à la calligraphie arabe, un patrimoine culturel inestimable. »

Il a ajouté que le soutien « généreux et illimité » du prince héritier envers le secteur culturel avait rendu ce projet possible.

Le ministre a précisé que le centre montrait au monde l’héritage de la calligraphie arabe tout en soulignant l’engagement de l’Arabie saoudite à préserver son identité et son patrimoine culturel.

Selon le prince Badr, le centre représente une vision ambitieuse visant à élever la calligraphie arabe comme outil universel de communication et élément central de l’héritage, de l’art, de l’architecture et du design arabes.

Le centre a également pour objectif de renforcer l’identité culturelle du Royaume et sa présence internationale, en ciblant calligraphes, talents émergents, artistes visuels, chercheurs en arts islamiques, institutions éducatives et culturelles, ainsi que les passionnés d’art et de patrimoine à travers le monde.

Il proposera des programmes spécialisés, incluant services de recherche et d’archivage, enseignement de la calligraphie, bourses académiques, musée permanent, expositions itinérantes, association internationale de calligraphie et incubateur soutenant les entreprises liées à la calligraphie.

D’autres initiatives incluent des programmes de résidence d’artistes, des ateliers dirigés par des experts, l’élaboration de programmes pédagogiques standardisés, ainsi que des partenariats éducatifs internationaux visant à la conservation du patrimoine et à la promotion mondiale de cet art ancestral.

L’établissement du centre à Médine revêt une signification particulière, compte tenu du rôle historique de la ville comme berceau de la calligraphie arabe et de son association avec la transcription du Coran et la préservation du savoir islamique.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com


La musique traditionnelle du rababah attire les foules au festival du chameau

(SPA)
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  • Des performances sont proposées à l’exposition « Security Oasis » du ministère de l’Intérieur
  • Le rababah, instrument de musique traditionnel à une seule corde, attire un large public au festival

RIYAD : Le rababah, un instrument traditionnel local à une seule corde issu des communautés bédouines, a suscité l’intérêt des visiteurs du Festival du chameau du roi Abdulaziz, qui se tient jusqu’au 2 janvier, rapporte l’Agence de presse saoudienne.

L’instrument se joue en faisant glisser un archet sur son unique corde, tandis que les doigts de l’autre main contrôlent la hauteur du son.

Il est souvent accompagné de vers poétiques chantés, dans un mélange de musique et de tradition orale.

La principauté de la région des Frontières du Nord présente des performances de rababah dans le cadre de l’exposition « Security Oasis » du ministère de l’Intérieur, organisée lors du festival du chameau.

Ce texte est la traduction d’un article paru sur Arabnews.com